Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 08/04/2024, 472443
Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 08/04/2024, 472443
Conseil d'État - 1ère - 4ème chambres réunies
- N° 472443
- ECLI:FR:CECHR:2024:472443.20240408
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
lundi
08 avril 2024
- Rapporteur
- M. Cyril Noël
- Avocat(s)
- SCP GURY & MAITRE ; SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société anonyme d'habitations à loyer modéré à conseil d'administration Promologis a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial, ainsi que de la décision du 23 janvier 2023 par laquelle ce maire a demandé, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis d'aménager, la production de l'extrait d'une telle convention, d'autre part d'enjoindre à cette commune de lui proposer une convention de projet urbain partenarial dans le délai de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2300880 du 9 mars 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 mars et 7 avril 2023 et le 4 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Promologis demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Labarthe-sur-Lèze la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 ;
- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyril Noël, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gury, Maître, avocat de la société Promologis et à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la commune de Labarthe-sur-Lèze ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. D'une part, aux termes du I de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme : " Dans les zones urbaines et les zones à urbaniser délimitées par les plans locaux d'urbanisme ou les documents d'urbanisme en tenant lieu, lorsqu'une ou plusieurs opérations d'aménagement ou de construction nécessitent la réalisation d'équipements autres que les équipements propres mentionnés à l'article L. 332-15, une convention de projet urbain partenarial prévoyant la prise en charge financière de tout ou partie de ces équipements peut être conclue entre les propriétaires des terrains, les aménageurs, les constructeurs et ", hormis dans le périmètre d'une opération d'intérêt national au sens de l'article L. 102-12 du code de l'urbanisme ou dans celui d'une grande opération d'urbanisme au sens de l'article L. 312-3 du même code, " la commune où l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme ". Ces dispositions, issues de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, ont été complétées par un II, inséré par la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové et modifié notamment par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, aux termes duquel, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque des équipements publics ayant vocation à faire l'objet d'une première convention de projet urbain partenarial desservent des terrains autres que ceux mentionnés dans le projet de ladite convention, par décision de leur organe délibérant, la commune ou l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme (...) fixe les modalités de partage des coûts des équipements et délimite un périmètre à l'intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs qui s'y livrent à des opérations d'aménagement ou de construction, participent, dans le cadre de conventions, à la prise en charge de ces mêmes équipements publics, qu'ils soient encore à réaliser ou déjà réalisés, dès lors qu'ils répondent aux besoins des futurs habitants ou usagers de leurs opérations. Les conventions successivement établies peuvent viser des programmes d'équipements publics différents lorsque les opérations de construction attendues dans chaque périmètre de convention ne nécessitent pas les mêmes besoins en équipements. / Le périmètre est délimité par délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public (...) pour une durée maximale de quinze ans (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis (...) d'aménager (...) sont adressées (...) à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés (...) par le ou les propriétaires du ou des terrains (...) ". Aux termes de l'article R. 423-38 de ce code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur (...) une lettre recommandée avec demande d'avis de réception indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ". Aux termes de l'article R. 441-4-1 du même code : " Lorsque le projet d'aménagement fait l'objet d'une convention de projet urbain partenarial ou est situé dans un périmètre de projet urbain partenarial mentionné au II de l'article L. 332-11-3, la demande est accompagnée d'un extrait de la convention précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée de l'exonération de la taxe d'aménagement. "
4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que, par une délibération du 20 janvier 2022 prise en application des dispositions du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme, le conseil municipal de Labarthe-sur-Lèze a délimité un périmètre à l'intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs se livrant à des opérations d'aménagement ou de construction participent, dans le cadre de conventions de projet urbain partenarial, à la prise en charge des équipements publics nécessaires à l'aménagement et à la construction du secteur dit de Cailhabat, qu'ils soient à réaliser ou déjà réalisés, dès lors que ces équipements publics répondent aux besoins des futurs habitants ou usagers de ces opérations. Il a, par la même délibération, fixé, d'une part, la liste de ces équipements, en l'espèce des créations et réhabilitations de voiries bénéficiant à l'ensemble de la zone, et, d'autre part, les modalités du partage de leurs coûts au prorata de la superficie foncière aménagée.
5. Par une lettre du 13 octobre 2022, la société Promologis a demandé à la commune de Labarthe-sur-Lèze de lui communiquer un projet de convention de projet urbain partenarial en vue d'un projet d'aménagement portant sur des parcelles, dont elle est propriétaire, incluses au sein du périmètre défini par la délibération mentionnée ci-dessus. Une décision implicite de rejet de cette demande est née, le 17 décembre 2022, du silence gardé par la commune. La société Promologis a, en outre, déposé auprès de la commune, le 22 décembre 2022, une demande de permis d'aménager. Par une lettre du 19 janvier 2023, le maire de Labarthe-sur-Lèze a demandé à cette société de compléter sa demande de permis d'aménager en produisant un extrait de la convention de projet urbain partenarial signé avec la commune. Par une ordonnance du 9 mars 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande, fondée sur l'article L. 521-1 du code de justice administrative, présentée par la société Promologis, tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite du 17 décembre 2022 ainsi que de la demande de production de pièce manquante du 19 janvier 2023. La société Promologis se pourvoit en cassation contre cette ordonnance.
6. Lorsque, en application du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme, la commune ou l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme a, par délibération, délimité, au sein d'une zone urbaine ou à urbaniser dans laquelle une ou plusieurs opérations d'aménagement ou de construction nécessitent la réalisation d'équipements autres que les équipements propres mentionnés à l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme, un périmètre à l'intérieur duquel les propriétaires, les aménageurs ou les constructeurs se livrant à des opérations d'aménagement ou de construction participent à la prise en charge de ces équipements publics et défini les équipements publics devant être pris en charge et les modalités de partage de leurs coûts, un propriétaire foncier, un aménageur ou un constructeur qui fait état auprès de cette commune ou de cet établissement public d'un projet d'aménagement ou de construction situé sur l'un des terrains inclus dans ce périmètre et pour lequel les besoins des futurs habitants ou usagers de cette opération d'aménagement ou de construction nécessitent des équipements publics mentionnés par cette délibération, est en droit, eu égard à l'économie générale des dispositions de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme et dès lors qu'il satisfait aux conditions dans lesquelles elles le prévoient, de se voir proposer par la commune ou l'établissement public un projet de convention de projet urbain partenarial appliquant à l'opération en cause les modalités de répartition des coûts de ceux des équipements publics répondant aux besoins des futurs habitants ou usagers de cette opération que cette autorité a elle-même décidé de fixer.
7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que la demande adressée le 13 octobre 2022 par la société Promologis à la commune de Labarthe-sur-Lèze faisait état d'un projet d'aménagement dont les parcelles d'assiette, précisément désignées, sont situées au sein du périmètre délimité par la commune dans sa délibération du 20 janvier 2022 en application du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme et que cette demande précisait, compte tenu des modalités de partage des coûts des équipements publics ayant été fixées par la commune, en l'espèce au prorata de la surface foncière de chaque projet d'aménagement, dans quelle mesure les besoins des futurs habitants ou usagers de cette opération nécessitaient de bénéficier des équipements publics en cause. Dans ces conditions, la société Promologis est fondée à soutenir que le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne jugeant pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision refusant de lui proposer un projet de convention de projet urbain partenarial le moyen tiré de ce que la commune avait fait en l'espèce une inexacte application des dispositions du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme.
8. En revanche, il résulte des dispositions mentionnées au point 3 que, lorsqu'un projet d'aménagement est situé dans un périmètre de projet urbain partenarial délimité en application du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme, la demande de permis d'aménager doit être accompagnée d'un extrait de la convention de projet urbain partenarial précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée de l'exonération de la taxe d'aménagement. En l'absence d'un tel extrait, quel que puisse être le motif de cette absence, le dossier de demande de permis d'aménager ne saurait donc être regardé comme complet. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que la demande, présentée le 22 décembre 2022 par la société Promologis, de permis d'aménager un terrain situé au sein du périmètre de projet urbain partenarial délimité par la commune de Labarthe-sur-Lèze, n'était pas accompagnée de l'extrait d'une telle convention de projet urbain partenarial. Par suite, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne jugeant pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision du 23 janvier 2023 par laquelle le maire de Labarthe-sur-Lèze a demandé, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis d'aménager, la production d'un extrait de la convention de projet urbain partenarial, le moyen, qui était inopérant, tiré de l'illégalité du refus de la commune de conclure une convention de projet urbain partenarial avec la société requérante. Il n'a pas non plus dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne jugeant pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette demande de production de pièce manquante le moyen tiré de ce qu'elle serait entachée d'un détournement de pouvoir.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Promologis est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque en tant seulement que celle-ci a rejeté sa demande de suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi se rapportant à ce chef de conclusions.
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer dans cette mesure sur la demande de suspension, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
11. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que l'exécution de la décision soit suspendue sans attendre le jugement de la requête au fond. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, à la date à laquelle le juge des référés se prononce.
12. Si, pour justifier que la condition d'urgence est en l'espèce satisfaite, la société requérante affirme que l'intérêt public commande que la commune ne fasse pas obstacle à la réalisation d'un projet d'aménagement permettant la construction de logements sociaux et pour lequel la prise en charge du coût des équipements publics est répartie dans le cadre d'un périmètre de projet urbain partenarial, que le retard pris par le projet d'aménagement en cause lui est d'autant plus préjudiciable que la commune a engagé une révision de son plan local d'urbanisme susceptible d'affecter la réglementation d'urbanisme dans un sens qui lui serait défavorable et que la décision litigieuse préjudicie gravement à ses intérêts financiers dans un contexte de renchérissement des coûts de la construction et de raréfaction des financements publics consacrés au logement social, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que ces circonstances soient de nature à caractériser une atteinte suffisamment grave et immédiate à la situation de la société requérante ou à un intérêt public pour justifier que l'exécution de la décision litigieuse soit suspendue sans attendre le jugement de la requête au fond.
13. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions de la société Promologis tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 9 mars 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée en tant qu'elle rejette la demande de la société Promologis tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial.
Article 2 : La demande présentée par la société Promologis devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 17 décembre 2022 est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme d'habitations à loyer modéré Promologis et à la commune de Labarthe-sur-Lèze.
Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 25 mars 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, Mme Célia Verot, M. Vincent Mazauric, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et M. Cyril Noël, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 8 avril 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Cyril Noël
Le secrétaire :
Signé : M. Hervé Herber
ECLI:FR:CECHR:2024:472443.20240408
La société anonyme d'habitations à loyer modéré à conseil d'administration Promologis a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, d'une part, de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial, ainsi que de la décision du 23 janvier 2023 par laquelle ce maire a demandé, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis d'aménager, la production de l'extrait d'une telle convention, d'autre part d'enjoindre à cette commune de lui proposer une convention de projet urbain partenarial dans le délai de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2300880 du 9 mars 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 mars et 7 avril 2023 et le 4 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Promologis demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Labarthe-sur-Lèze la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 ;
- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyril Noël, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gury, Maître, avocat de la société Promologis et à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la commune de Labarthe-sur-Lèze ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. D'une part, aux termes du I de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme : " Dans les zones urbaines et les zones à urbaniser délimitées par les plans locaux d'urbanisme ou les documents d'urbanisme en tenant lieu, lorsqu'une ou plusieurs opérations d'aménagement ou de construction nécessitent la réalisation d'équipements autres que les équipements propres mentionnés à l'article L. 332-15, une convention de projet urbain partenarial prévoyant la prise en charge financière de tout ou partie de ces équipements peut être conclue entre les propriétaires des terrains, les aménageurs, les constructeurs et ", hormis dans le périmètre d'une opération d'intérêt national au sens de l'article L. 102-12 du code de l'urbanisme ou dans celui d'une grande opération d'urbanisme au sens de l'article L. 312-3 du même code, " la commune où l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme ". Ces dispositions, issues de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, ont été complétées par un II, inséré par la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové et modifié notamment par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, aux termes duquel, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque des équipements publics ayant vocation à faire l'objet d'une première convention de projet urbain partenarial desservent des terrains autres que ceux mentionnés dans le projet de ladite convention, par décision de leur organe délibérant, la commune ou l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme (...) fixe les modalités de partage des coûts des équipements et délimite un périmètre à l'intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs qui s'y livrent à des opérations d'aménagement ou de construction, participent, dans le cadre de conventions, à la prise en charge de ces mêmes équipements publics, qu'ils soient encore à réaliser ou déjà réalisés, dès lors qu'ils répondent aux besoins des futurs habitants ou usagers de leurs opérations. Les conventions successivement établies peuvent viser des programmes d'équipements publics différents lorsque les opérations de construction attendues dans chaque périmètre de convention ne nécessitent pas les mêmes besoins en équipements. / Le périmètre est délimité par délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public (...) pour une durée maximale de quinze ans (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis (...) d'aménager (...) sont adressées (...) à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés (...) par le ou les propriétaires du ou des terrains (...) ". Aux termes de l'article R. 423-38 de ce code : " Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur (...) une lettre recommandée avec demande d'avis de réception indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ". Aux termes de l'article R. 441-4-1 du même code : " Lorsque le projet d'aménagement fait l'objet d'une convention de projet urbain partenarial ou est situé dans un périmètre de projet urbain partenarial mentionné au II de l'article L. 332-11-3, la demande est accompagnée d'un extrait de la convention précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée de l'exonération de la taxe d'aménagement. "
4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que, par une délibération du 20 janvier 2022 prise en application des dispositions du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme, le conseil municipal de Labarthe-sur-Lèze a délimité un périmètre à l'intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs se livrant à des opérations d'aménagement ou de construction participent, dans le cadre de conventions de projet urbain partenarial, à la prise en charge des équipements publics nécessaires à l'aménagement et à la construction du secteur dit de Cailhabat, qu'ils soient à réaliser ou déjà réalisés, dès lors que ces équipements publics répondent aux besoins des futurs habitants ou usagers de ces opérations. Il a, par la même délibération, fixé, d'une part, la liste de ces équipements, en l'espèce des créations et réhabilitations de voiries bénéficiant à l'ensemble de la zone, et, d'autre part, les modalités du partage de leurs coûts au prorata de la superficie foncière aménagée.
5. Par une lettre du 13 octobre 2022, la société Promologis a demandé à la commune de Labarthe-sur-Lèze de lui communiquer un projet de convention de projet urbain partenarial en vue d'un projet d'aménagement portant sur des parcelles, dont elle est propriétaire, incluses au sein du périmètre défini par la délibération mentionnée ci-dessus. Une décision implicite de rejet de cette demande est née, le 17 décembre 2022, du silence gardé par la commune. La société Promologis a, en outre, déposé auprès de la commune, le 22 décembre 2022, une demande de permis d'aménager. Par une lettre du 19 janvier 2023, le maire de Labarthe-sur-Lèze a demandé à cette société de compléter sa demande de permis d'aménager en produisant un extrait de la convention de projet urbain partenarial signé avec la commune. Par une ordonnance du 9 mars 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande, fondée sur l'article L. 521-1 du code de justice administrative, présentée par la société Promologis, tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite du 17 décembre 2022 ainsi que de la demande de production de pièce manquante du 19 janvier 2023. La société Promologis se pourvoit en cassation contre cette ordonnance.
6. Lorsque, en application du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme, la commune ou l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme a, par délibération, délimité, au sein d'une zone urbaine ou à urbaniser dans laquelle une ou plusieurs opérations d'aménagement ou de construction nécessitent la réalisation d'équipements autres que les équipements propres mentionnés à l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme, un périmètre à l'intérieur duquel les propriétaires, les aménageurs ou les constructeurs se livrant à des opérations d'aménagement ou de construction participent à la prise en charge de ces équipements publics et défini les équipements publics devant être pris en charge et les modalités de partage de leurs coûts, un propriétaire foncier, un aménageur ou un constructeur qui fait état auprès de cette commune ou de cet établissement public d'un projet d'aménagement ou de construction situé sur l'un des terrains inclus dans ce périmètre et pour lequel les besoins des futurs habitants ou usagers de cette opération d'aménagement ou de construction nécessitent des équipements publics mentionnés par cette délibération, est en droit, eu égard à l'économie générale des dispositions de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme et dès lors qu'il satisfait aux conditions dans lesquelles elles le prévoient, de se voir proposer par la commune ou l'établissement public un projet de convention de projet urbain partenarial appliquant à l'opération en cause les modalités de répartition des coûts de ceux des équipements publics répondant aux besoins des futurs habitants ou usagers de cette opération que cette autorité a elle-même décidé de fixer.
7. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que la demande adressée le 13 octobre 2022 par la société Promologis à la commune de Labarthe-sur-Lèze faisait état d'un projet d'aménagement dont les parcelles d'assiette, précisément désignées, sont situées au sein du périmètre délimité par la commune dans sa délibération du 20 janvier 2022 en application du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme et que cette demande précisait, compte tenu des modalités de partage des coûts des équipements publics ayant été fixées par la commune, en l'espèce au prorata de la surface foncière de chaque projet d'aménagement, dans quelle mesure les besoins des futurs habitants ou usagers de cette opération nécessitaient de bénéficier des équipements publics en cause. Dans ces conditions, la société Promologis est fondée à soutenir que le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne jugeant pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision refusant de lui proposer un projet de convention de projet urbain partenarial le moyen tiré de ce que la commune avait fait en l'espèce une inexacte application des dispositions du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme.
8. En revanche, il résulte des dispositions mentionnées au point 3 que, lorsqu'un projet d'aménagement est situé dans un périmètre de projet urbain partenarial délimité en application du II de l'article L. 332-11-3 du code de l'urbanisme, la demande de permis d'aménager doit être accompagnée d'un extrait de la convention de projet urbain partenarial précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée de l'exonération de la taxe d'aménagement. En l'absence d'un tel extrait, quel que puisse être le motif de cette absence, le dossier de demande de permis d'aménager ne saurait donc être regardé comme complet. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que la demande, présentée le 22 décembre 2022 par la société Promologis, de permis d'aménager un terrain situé au sein du périmètre de projet urbain partenarial délimité par la commune de Labarthe-sur-Lèze, n'était pas accompagnée de l'extrait d'une telle convention de projet urbain partenarial. Par suite, le juge des référés n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne jugeant pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision du 23 janvier 2023 par laquelle le maire de Labarthe-sur-Lèze a demandé, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis d'aménager, la production d'un extrait de la convention de projet urbain partenarial, le moyen, qui était inopérant, tiré de l'illégalité du refus de la commune de conclure une convention de projet urbain partenarial avec la société requérante. Il n'a pas non plus dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en ne jugeant pas propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette demande de production de pièce manquante le moyen tiré de ce qu'elle serait entachée d'un détournement de pouvoir.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Promologis est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque en tant seulement que celle-ci a rejeté sa demande de suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi se rapportant à ce chef de conclusions.
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer dans cette mesure sur la demande de suspension, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
11. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que l'exécution de la décision soit suspendue sans attendre le jugement de la requête au fond. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire, à la date à laquelle le juge des référés se prononce.
12. Si, pour justifier que la condition d'urgence est en l'espèce satisfaite, la société requérante affirme que l'intérêt public commande que la commune ne fasse pas obstacle à la réalisation d'un projet d'aménagement permettant la construction de logements sociaux et pour lequel la prise en charge du coût des équipements publics est répartie dans le cadre d'un périmètre de projet urbain partenarial, que le retard pris par le projet d'aménagement en cause lui est d'autant plus préjudiciable que la commune a engagé une révision de son plan local d'urbanisme susceptible d'affecter la réglementation d'urbanisme dans un sens qui lui serait défavorable et que la décision litigieuse préjudicie gravement à ses intérêts financiers dans un contexte de renchérissement des coûts de la construction et de raréfaction des financements publics consacrés au logement social, il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que ces circonstances soient de nature à caractériser une atteinte suffisamment grave et immédiate à la situation de la société requérante ou à un intérêt public pour justifier que l'exécution de la décision litigieuse soit suspendue sans attendre le jugement de la requête au fond.
13. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions de la société Promologis tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.
14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 9 mars 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée en tant qu'elle rejette la demande de la société Promologis tendant à la suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née le 17 décembre 2022 du silence gardé par le maire de Labarthe-sur-Lèze sur sa demande tendant à la conclusion d'une convention de projet urbain partenarial.
Article 2 : La demande présentée par la société Promologis devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 17 décembre 2022 est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme d'habitations à loyer modéré Promologis et à la commune de Labarthe-sur-Lèze.
Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 25 mars 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, Mme Célia Verot, M. Vincent Mazauric, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et M. Cyril Noël, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 8 avril 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Cyril Noël
Le secrétaire :
Signé : M. Hervé Herber