CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 14/11/2017, 15BX03734, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 14/11/2017, 15BX03734, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX - 5ème chambre - formation à 3
- N° 15BX03734
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mardi
14 novembre 2017
- Président
- Mme JAYAT
- Rapporteur
- M. Frédéric FAÏCK
- Avocat(s)
- CABINET SCHMITT AVOCATS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Heliportugal a demandé au tribunal administratif de Cayenne de prononcer la nullité du contrat conclu le 19 février 2014 entre le centre hospitalier Andrée Rosemon et la société Hélicoptères de France concernant la fourniture de prestations de transports sanitaires héliportés dans le cadre des activités du Samu 973 et, subsidiairement, de prononcer la résiliation du contrat.
Par un jugement n° 1400613 du 21 septembre 2015, le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 novembre 2015 et le 21 juillet 2017, la société Heliportugal, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Cayenne du 21 septembre 2015 ;
2°) d'annuler le contrat conclu le 19 février 2014 entre le centre hospitalier Andrée Rosemon et la société Hélicoptères de France ;
3°) subsidiairement, de prononcer la résiliation de ce contrat ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a jugé que l'attribution du marché litigieux n'avait pu léser ses intérêts dès lors que son offre était irrecevable et a donc rejeté sa demande au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions de recevabilité dégagées par l'arrêt du Conseil d'Etat n° 358994 du 4 avril 2014 (" Tarn et Garonne ") ; ce faisant, le tribunal a commis une erreur de droit dès lors que cette décision ne concerne que les contrats conclus à compter du 4 avril 2014, ce qui n'est pas le cas du marché litigieux ; cette règle a été récemment réaffirmée par le Conseil d'Etat dans un arrêt n° 383149 du 5 février 2016 ; au contraire, la recevabilité de la demande aurait dû être appréciée en fonction des conditions dégagées par le Conseil d'Etat dans son arrêt n° 291545 du 16 juillet 2007 (" Tropic Travaux "), lequel permet au concurrent évincé d'invoquer tout moyen à l'encontre du contrat ;
- le marché a été conclu en méconnaissance du principe de transparence des procédures de commande publique garanti par les articles 80 et 83 du code des marchés publics ; ainsi, le centre hospitalier n'a jamais répondu clairement aux demandes de la société de communication des motifs de rejet de son offre, de l'attribution du marché à son concurrent ; dans ses différentes réponses à ses demandes, le centre a même procédé à une substitution des motifs de rejet de son offre ; enfin, les différents tableaux d'analyse des offres produits par le centre hospitalier n'ont pas montré que la société attributaire avait présenté une variante, laquelle a pourtant été retenue ;
- le marché a été signé le 19 février 2014 avec la société Hélicoptères de France (HDF) en méconnaissance de l'obligation de suspension de la signature prévue par l'article 80 du code des marchés publics ;
- le centre hospitalier a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation des mérites respectifs des candidats, ce qui a conduit à un écart injustifié entre les notes qui leur ont été attribuées ; ainsi, il a été reproché à tort à la société Heliportugal d'avoir présenté une offre imprécise en ce qui concerne les moyens mis en oeuvre pour assurer la permanence du service (solution de back-up) alors que celle présentée par l'attributaire ne prévoyait rien sur cette question ; l'offre de la société Heliportugal était supérieure car elle comportait la mise à disposition d'un hélicoptère AS 365N3 dans un délai de six mois à compter du 1er mars 2014 et d'un hélicoptère de même catégorie, pour la solution de back-up, dans un délai de vingt-quatre mois à compter du 1er mars 2014 ; la modification des prestations décidée après la signature du marché par le centre hospitalier, dans le cadre de la mise au point avec l'attributaire, a conduit à exiger de ce dernier des prestations qui étaient déjà proposées par la société Heliportugal ; il est donc établi que l'offre de l'attributaire ne garantissait pas le même niveau de service que celle de la société Heliportugal, en particulier en terme de permanence du service ;
- le centre hospitalier a commis une erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats car il a attribué à la société HDF une note supérieure en ce qui concerne le coût global de la prestation alors que la variante de l'offre de la société Heliportugal était moins disante ;
- le centre hospitalier a également sélectionné une offre qui était irrégulière dès lors qu'au jour de l'attribution du contrat, la société HDF ne disposait pas de l'appareil 365 N3 en méconnaissance des exigences de l'article 11 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ; l'offre de la société HDF était également irrégulière dès lors que ses appareils ne figuraient pas sur la liste des appareils autorisés figurant en annexe au certificat de transport aérien ;
- enfin, la mise au point du marché a été effectuée illégalement car elle a conduit à une modification substantielle de l'offre de la société HDF en méconnaissance de l'article 59.II du code des marchés publics ; ainsi, cette mise au point a permis à la société HDF de disposer d'un délai supplémentaire pour respecter ses engagements contractuels en termes de fourniture des appareils ; elle prévoit aussi de nouvelles pénalités en cas de défaillance de l'attributaire à respecter les délais de mise à disposition alors qu'une telle clause, si elle avait été insérée dans le règlement de la consultation, aurait conduit à renchérir l'offre de la société HDF ; ce faisant, le centre hospitalier a méconnu le principe d'égalité entre les candidats ;
- en raison de la gravité des vices entachant le contrat, celui-ci doit être annulé.
Par deux mémoires en défense, enregistré le 1er février 2016 et le 16 août 2017, le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Heliportugal la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de la société Héliportugal en appliquant le principe, dégagé par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 4 avril 2014, selon lequel les tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ; dans cet arrêt, le Conseil d'Etat a en effet jugé que seuls les tiers qui ne bénéficiaient pas auparavant de l'accès au juge du contrat sont concernés par la nouvelle condition relative à l'existence d'un intérêt lésé ; la société requérante n'appartient pas à cette catégorie dès lors que, en sa qualité de concurrent évincé, elle pouvait contester le marché dans le cadre du recours défini par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 16 juillet 2007 ; ainsi, pour le concurrent évincé, les règles de recevabilité définies dans l'arrêt du 4 avril 2014 s'appliquent immédiatement ;
- le principe de transparence de la procédure de passation du marché n'a pas été méconnu car le centre hospitalier a communiqué à la société Heliportugal l'analyse de son offre variante, le nom de l'attributaire et les motifs ayant conduit au choix de ce dernier ; contrairement à ce que soutient la requérante, le centre hospitalier n'a pas, dans les divers échanges qu'il a eus avec cette dernière, procédé à une substitution des motifs du rejet de son offre ; en tout état de cause, une telle substitution est admise par la jurisprudence ;
- l'erreur manifeste alléguée par la requérante concernant les mérites respectifs des offres des candidats n'existe pas ; ainsi, aucun des critères de choix définis dans le règlement de la consultation ne vise à apprécier la disponibilité des appareils proposés dès le jour de la signature du marché ; la société HDF ne s'est pas engagée dans son offre à fournir immédiatement un appareil AS 365 N3 mais prévoyait bien un appareil de remplacement sur la solution de back-utilité publique ; au contraire, la société Heliportugal n'a pas exposé dans son offre une solution de back-up ;
- le centre hospitalier n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats ; à supposer d'ailleurs qu'une erreur de notation ait été commise dans le report de notation contenu dans le courrier du 17 février 2014, celle-ci aurait été sans incidence sur le classement des offres ;
- l'offre présentée par la société HDF n'était nullement irrégulière ; ainsi, aucune clause du CCTP n'imposait aux candidats de disposer des appareils au jour du dépôt de leur offre et au jour de la signature du contrat ;
- la mise au point du marché n'est entachée d'aucune illégalité au regard de l'article 59 II du code des marchés publics ; dans la mesure où les documents de consultation n'exigeaient pas la fourniture immédiate des appareils, la mise au point a pu prévoir un tel délai afin de permettre le début d'exécution du marché ; cette mise au point n'a donc pas modifié substantiellement l'offre de la société HDF ni modifié le classement entre les candidats dès lors que la disponibilité des appareils ne constituait pas un critère de sélection des offres ; l'insertion d'une clause de pénalité dans la mise au point n'est pas non plus irrégulière ;
- subsidiairement, les motifs d'irrégularité du marché invoqués par la requérante ne portent pas sur l'objet du contrat, le consentement des parties et sur des dispositions d'ordre public ; ils ne peuvent donc justifier l'annulation du contrat ; en tout état de cause, la nécessité d'assurer la continuité du service public de transport sanitaire fait obstacle à ce que la cour prononce l'annulation du marché litigieux.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 15 mars 2016 et le 9 août 2017, la société Hélicoptères de France, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société requérante la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de la société Heliportugal en appliquant le principe, dégagé par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 4 avril 2014, selon lequel les tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ; dans cet arrêt, le Conseil d'Etat a en effet jugé que seuls les tiers qui ne bénéficiaient pas auparavant de l'accès au juge du contrat sont concernés par la nouvelle condition relative à l'existence d'un intérêt lésé ; la société requérante n'appartient pas à cette catégorie dès lors que, en sa qualité de concurrent évincé, elle pouvait contester le marché dans le cadre du recours défini par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 16 juillet 2007 ; ainsi, pour le concurrent évincé, les règles de recevabilité définies dans l'arrêt du 4 avril 2014 s'appliquent immédiatement ; la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 5 février 2016 devra être écartée comme contraire à celle issue de la jurisprudence " Tarn et Garonne ".
- le principe de transparence de la procédure de passation du marché n'a pas été méconnu car le centre hospitalier a communiqué à la société Heliportugal les informations sollicitées en application des articles 80 et 83 du code des marchés publics ; contrairement à ce que soutient la requérante, le centre hospitalier n'a pas, dans les divers échanges qu'il a eus avec cette dernière, procédé à une substitution des motifs du rejet de son offre ;
- l'erreur manifeste alléguée par la requérante concernant les mérites respectifs des offres des candidats n'existe pas car l'offre déposée par la société HDF était supérieure à celle de la requérante concernant les moyens mis en oeuvre pour la permanence du service (" solution de back-up ") ; en effet, la requérante a simplement envisagé de mettre en place un second appareil pour le remplacement éventuel de la machine principal, ce qui ne constitue pas une solution de back-up ; au contraire, l'attributaire avait clairement prévu une solution de remplacement ; enfin, le centre hospitalier n'entendait pas apprécier la disponibilité des appareils proposés par les candidats ;
- le centre hospitalier n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats concernant le prix des prestations ; l'offre variante déposée par la société Heliportugal était rédigée en langue anglaise et n'avait même pas à être examinée ; et son offre de base était bien plus onéreuse que celle de la société HDF ; en tout état de cause, une erreur dans l'appréciation du prix n'aurait eu aucune incidence sur le classement des offres ;
- l'offre présentée par la société HDF n'était nullement irrégulière car le centre hospitalier n'exigeait pas des candidats qu'ils disposent des appareils au jour du dépôt de leur offre et au jour de la signature du contrat ; à la date du début d'exécution du marché, la société HDF disposait d'un appareil qui était inscrit sur son certificat de transporteur aérien ;
- la mise au point du marché n'est entachée d'aucune illégalité au regard de l'article 59 II du code des marchés publics ; dans la mesure où les documents de consultation n'exigeaient pas la fourniture immédiate des appareils, la mise au point a pu prévoir un tel délai afin de permettre le début d'exécution du marché ; cette mise au point n'a donc pas modifié substantiellement l'offre de la société HDF ni modifié le classement entre les candidats dès lors que la disponibilité des appareils ne constituait pas un critère de sélection des offres ; l'insertion d'une clause de pénalité dans la mise au point n'est pas non plus irrégulière ;
- subsidiairement, la nécessité d'assurer la continuité du service public de transport sanitaire constitue un motif d'intérêt général faisant obstacle à ce que la cour prononce l'annulation du marché litigieux.
Par ordonnance du 24 juillet 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 16 août 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la société Heliportugal, de Me E..., représentant le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et de Me F..., représentant la société Hélicoptères de France.
Deux notes en délibéré présentées, d'une part, pour la société Hélicoptères de France et d'autre part, pour la société Heliportugal ont été enregistrées le 19 octobre 2017.
Une note en délibéré présentée pour le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne a été enregistrée le 20 octobre 2017.
Considérant ce qui suit :
1. En octobre 2013, le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour l'attribution d'un marché de transports sanitaires héliportés dans le cadre des activités du SAMU 973. Par une lettre du 30 janvier 2014, le centre hospitalier a informé la société Heliportugal que son offre n'était pas retenue et que le marché était attribué à la société Hélicoptères de France. La société Heliportugal a saisi le tribunal administratif de Cayenne d'un recours contestant la validité du contrat signé le 19 février 2014 par le centre hospitalier et la société attributaire. Elle relève appel du jugement rendu le 21 septembre 2015 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Pour rejeter la demande de la société Heliportugal, les premiers juges ont relevé que son offre était irrégulière dès lors que, contrairement aux exigences de l'article 4 du règlement de la consultation, elle était rédigée en langue anglaise sans être accompagnée d'une traduction en français certifiée conforme par un traducteur assermenté. Les premiers juges en ont déduit que l'attribution du marché litigieux n'avait pu léser les intérêts de la société Heliportugal et qu'en conséquence, sa demande en contestation de la validité du contrat était irrecevable.
3. Tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.
4. Il résulte de la décision n° 358994 du 4 avril 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, que le recours défini ci-dessus ne trouve à s'appliquer et quelle que soit la qualité dont se prévaut le tiers, qu'à l'encontre des contrats signés à compter de la lecture de cette même décision. En conséquence, le recours de la société Heliportugal devant le tribunal administratif de Cayenne à l'encontre du marché signé le 19 février 2014 doit être apprécié au regard des règles applicables avant ladite décision, lesquelles permettent au concurrent évincé de l'attribution d'un marché d'invoquer tout moyen à l'appui de son recours contre le contrat alors même qu'il aurait présenté une offre inappropriée, irrégulière ou inacceptable.
5. Il suit de là qu'en rejetant, pour les motifs exposés au point 2 du présent arrêt, comme irrecevable la demande de la société Heliportugal, le tribunal administratif de Cayenne a entaché son jugement d'irrégularité.
6. Dès lors, ce jugement doit être annulé et il y a lieu de statuer sur la demande présentée par la société Heliportugal devant le tribunal administratif de Cayenne par la voie de l'évocation.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
7. Il résulte de ce qui précède que la société Heliportugal était recevable à saisir le juge du contrat d'une action en contestation de la validité du marché signé le 19 février 2014 alors même que son offre aurait été inappropriée, irrégulière ou inacceptable au regard des exigences posées par le pouvoir adjudicateur. La société Heliportugal était également recevable à soulever tout moyen à l'appui de son recours et pas seulement des manquements aux règles applicables à la passation du contrat qui sont en rapport direct avec son éviction. Par suite, la fin de non-recevoir opposée devant les premiers juges doit être écartée.
Sur la validité du contrat :
En ce qui concerne la régularité de l'offre de la société Hélicoptères de France :
8. Aux termes de l'article 53 du code des marchés publics : " (...) III.-Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. L'offre la mieux classée est retenue. ". Est notamment irrégulière une offre qui, à défaut de contenir toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation, est incomplète.
9. En l'espèce, aux termes de l'article 4 du règlement de la consultation, les candidats au marché devaient joindre à leur dossier de candidature les renseignements suivants : " Déclaration indiquant l'outillage, le matériel et l'équipement technique dont ils disposent pour la réalisation de contrats de même nature ; Description de l'équipement technique, des mesures employées par l'opérateur économique pour s'assurer de la qualité et des moyens d'étude et de recherche de son entreprise. ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " Les critères relatifs à la candidature sont : - Type d'appareil proposé pour l'exécution du marché (...) ". L'article 7 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) définit les caractéristiques techniques auxquelles doivent satisfaire les appareils fournis en ce qui concerne les conditions de leur exploitation, leur accessibilité, l'aménagement des cabines. Enfin, selon l'article 11 du CCTP, l'appareil mis à disposition par le prestataire est basé sur le site de l'aéroport de Félix Eboué et est destiné dès l'acceptation du contrat à assurer exclusivement les transports sanitaires héliportés demandés par le SAMU 973.
10. S'il ne résulte pas de ces documents que les candidats étaient tenus de justifier qu'ils disposaient immédiatement des appareils à la date de remise de leur offre, il leur appartenait toutefois de justifier, à cette même date, qu'ils en disposeraient pour l'exécution du marché. Les candidats devaient ainsi établir, au moment du dépôt de leur offre, qu'ils avaient entrepris des démarches suffisantes en vue de disposer effectivement des appareils de transports héliportés lors du commencement d'exécution du marché.
11. Le centre hospitalier Andrée Rosemon a retenu l'offre variante n° 2 présentée par la société Hélicoptères de France, laquelle prévoyait la fourniture d'un hélicoptère principal AS 365 N3 et la fourniture d'un hélicoptère de remplacement AS 365 N pour 2014/2015 et AS 365 N3 à partir de 2016. Il résulte toutefois de l'instruction que cette offre ne comportait aucune précision sur le délai d'acheminement et de mise à disposition des appareils. En particulier, elle n'était accompagnée d'aucun document, tel que notamment un contrat d'achat, garantissant au pouvoir adjudicateur que les appareils héliportés seraient disponibles pour l'exécution du marché. A supposer par ailleurs que le commentaire qui accompagnait l'offre variante n° 1 présentée par la société Hélicoptères de France et selon lequel " la mise en place des appareils sera immédiatement déclenchée dès l'attribution. Le délai sera minimalisé et lié à l'acheminement des appareils " doive être regardé comme s'appliquant également à la variante n° 2 retenue, de telles mentions n'étaient pas suffisamment précises pour que le pouvoir adjudicateur soit assuré, en l'absence de tout autre élément, de disposer effectivement des appareils héliportés lors du commencement de l'exécution du marché.
12. Il s'ensuit qu'en attribuant le marché en litige à la société Hélicoptères de France, dont l'offre était incomplète, le centre hospitalier André Rosemon a méconnu les exigences de l'article 53 précité du code des marchés publics.
En ce qui concerne la mise au point du marché :
13. Aux termes de l'article 59 du code des marchés publics : " (...) II. - Après classement des offres finales (...) l'offre économiquement la plus avantageuse est choisie en application du ou des critères annoncés dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation. (...) Il est possible, en accord avec le candidat retenu, de procéder à une mise au point des composantes du marché sans que ces modifications puissent remettre en cause les caractéristiques substantielles de l'offre ni le classement des offres. ".
14. Il résulte de l'instruction que la société Hélicoptères de France a eu recours pendant les six premiers mois de l'exécution du marché à des appareils héliportés AS 365 N qu'elle avait déjà utilisés lors du précédent marché dont elle a obtenu le renouvellement par le contrat en litige. Ces trois appareils héliportés AS 365 N que la société Hélicoptères de France détenait déjà en Guyane n'étaient donc pas les appareils AS 365 N3 qui étaient indiqués dans son offre variante. Or, le centre hospitalier Andrée Rosemon et la société Hélicoptères de France sont convenus, lors de la mise au point du marché, que l'hélicoptère principal et l'hélicoptère de remplacement AS 365 N 3 devraient être disponibles pour le nouveau marché mais seulement dans les délais respectifs de six et vingt-quatre mois à compter du 1er mars 2014 et qu'à défaut pour la société attributaire de respecter ces échéances, une pénalité d'un montant journalier de 3 103 euros par jour de retard lui serait infligée. Une telle mise au point a donc modifié l'offre de la société Hélicoptères de France sur un point essentiel en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 59 du code des marchés publics.
Sur la poursuite du contrat :
15. Il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit d'accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat.
16. En l'espèce, la méconnaissance par les parties de l'article 53 du code des marchés publics a rendu possible la signature d'un marché avec un candidat dont l'offre, compte tenu de son caractère incomplet au regard des exigences du règlement de la consultation, n'aurait pas dû être examinée. L'autre irrégularité commise au regard de l'article 59 du code a conduit à modifier un point essentiel de l'offre de la société attributaire après la signature du marché. La nature de ces vices, qui ont trait au choix du cocontractant et au contenu de son offre, justifie en conséquence l'annulation du marché public en litige. Compte tenu de l'annulation prononcée, il n'y a pas lieu pour la cour d'examiner les autres vices invoqués par la société requérante à l'encontre du contrat en litige.
17. Il existe toutefois un motif d'intérêt général tenant à ce que la continuité du service de transports sanitaires d'urgence assuré par le centre hospitalier soit garantie dans le cadre du contrat litigieux, lequel avait été conclu pour une durée de six années. En conséquence, il y a lieu de prononcer l'annulation du marché signé le 19 février 2014 avec un effet différé à neuf mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge du centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne la somme globale de 3 000 euros au titre des frais, non compris dans les dépens, exposés par la société Heliportugal tant en première instance qu'en appel. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Heliportugal qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au centre hospitalier et à la société Hélicoptères de France la somme qu'ils demandent au titre de leurs frais non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1400613 du tribunal administratif de Cayenne du 21 septembre 2015 est annulé.
Article 2 : Le marché de transports sanitaires héliportés conclu le 19 février 2014 entre le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et la société Hélicoptères de France est annulé. Cette annulation prendra effet à l'issue d'un délai de neuf mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne versera à la société Heliportugal la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la société Heliportugal est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et la société Hélicoptères de France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Heliportugal, au centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et à la société Hélicoptères de France. Copie pour information en sera adressée à la ministre des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
M. Fréderic Faïck, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 novembre 2017.
Le rapporteur,
Frédéric Faïck
Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au préfet de Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX03734
Procédure contentieuse antérieure :
La société Heliportugal a demandé au tribunal administratif de Cayenne de prononcer la nullité du contrat conclu le 19 février 2014 entre le centre hospitalier Andrée Rosemon et la société Hélicoptères de France concernant la fourniture de prestations de transports sanitaires héliportés dans le cadre des activités du Samu 973 et, subsidiairement, de prononcer la résiliation du contrat.
Par un jugement n° 1400613 du 21 septembre 2015, le tribunal administratif de Cayenne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 20 novembre 2015 et le 21 juillet 2017, la société Heliportugal, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Cayenne du 21 septembre 2015 ;
2°) d'annuler le contrat conclu le 19 février 2014 entre le centre hospitalier Andrée Rosemon et la société Hélicoptères de France ;
3°) subsidiairement, de prononcer la résiliation de ce contrat ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif a jugé que l'attribution du marché litigieux n'avait pu léser ses intérêts dès lors que son offre était irrecevable et a donc rejeté sa demande au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions de recevabilité dégagées par l'arrêt du Conseil d'Etat n° 358994 du 4 avril 2014 (" Tarn et Garonne ") ; ce faisant, le tribunal a commis une erreur de droit dès lors que cette décision ne concerne que les contrats conclus à compter du 4 avril 2014, ce qui n'est pas le cas du marché litigieux ; cette règle a été récemment réaffirmée par le Conseil d'Etat dans un arrêt n° 383149 du 5 février 2016 ; au contraire, la recevabilité de la demande aurait dû être appréciée en fonction des conditions dégagées par le Conseil d'Etat dans son arrêt n° 291545 du 16 juillet 2007 (" Tropic Travaux "), lequel permet au concurrent évincé d'invoquer tout moyen à l'encontre du contrat ;
- le marché a été conclu en méconnaissance du principe de transparence des procédures de commande publique garanti par les articles 80 et 83 du code des marchés publics ; ainsi, le centre hospitalier n'a jamais répondu clairement aux demandes de la société de communication des motifs de rejet de son offre, de l'attribution du marché à son concurrent ; dans ses différentes réponses à ses demandes, le centre a même procédé à une substitution des motifs de rejet de son offre ; enfin, les différents tableaux d'analyse des offres produits par le centre hospitalier n'ont pas montré que la société attributaire avait présenté une variante, laquelle a pourtant été retenue ;
- le marché a été signé le 19 février 2014 avec la société Hélicoptères de France (HDF) en méconnaissance de l'obligation de suspension de la signature prévue par l'article 80 du code des marchés publics ;
- le centre hospitalier a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation des mérites respectifs des candidats, ce qui a conduit à un écart injustifié entre les notes qui leur ont été attribuées ; ainsi, il a été reproché à tort à la société Heliportugal d'avoir présenté une offre imprécise en ce qui concerne les moyens mis en oeuvre pour assurer la permanence du service (solution de back-up) alors que celle présentée par l'attributaire ne prévoyait rien sur cette question ; l'offre de la société Heliportugal était supérieure car elle comportait la mise à disposition d'un hélicoptère AS 365N3 dans un délai de six mois à compter du 1er mars 2014 et d'un hélicoptère de même catégorie, pour la solution de back-up, dans un délai de vingt-quatre mois à compter du 1er mars 2014 ; la modification des prestations décidée après la signature du marché par le centre hospitalier, dans le cadre de la mise au point avec l'attributaire, a conduit à exiger de ce dernier des prestations qui étaient déjà proposées par la société Heliportugal ; il est donc établi que l'offre de l'attributaire ne garantissait pas le même niveau de service que celle de la société Heliportugal, en particulier en terme de permanence du service ;
- le centre hospitalier a commis une erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats car il a attribué à la société HDF une note supérieure en ce qui concerne le coût global de la prestation alors que la variante de l'offre de la société Heliportugal était moins disante ;
- le centre hospitalier a également sélectionné une offre qui était irrégulière dès lors qu'au jour de l'attribution du contrat, la société HDF ne disposait pas de l'appareil 365 N3 en méconnaissance des exigences de l'article 11 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ; l'offre de la société HDF était également irrégulière dès lors que ses appareils ne figuraient pas sur la liste des appareils autorisés figurant en annexe au certificat de transport aérien ;
- enfin, la mise au point du marché a été effectuée illégalement car elle a conduit à une modification substantielle de l'offre de la société HDF en méconnaissance de l'article 59.II du code des marchés publics ; ainsi, cette mise au point a permis à la société HDF de disposer d'un délai supplémentaire pour respecter ses engagements contractuels en termes de fourniture des appareils ; elle prévoit aussi de nouvelles pénalités en cas de défaillance de l'attributaire à respecter les délais de mise à disposition alors qu'une telle clause, si elle avait été insérée dans le règlement de la consultation, aurait conduit à renchérir l'offre de la société HDF ; ce faisant, le centre hospitalier a méconnu le principe d'égalité entre les candidats ;
- en raison de la gravité des vices entachant le contrat, celui-ci doit être annulé.
Par deux mémoires en défense, enregistré le 1er février 2016 et le 16 août 2017, le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société Heliportugal la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de la société Héliportugal en appliquant le principe, dégagé par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 4 avril 2014, selon lequel les tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ; dans cet arrêt, le Conseil d'Etat a en effet jugé que seuls les tiers qui ne bénéficiaient pas auparavant de l'accès au juge du contrat sont concernés par la nouvelle condition relative à l'existence d'un intérêt lésé ; la société requérante n'appartient pas à cette catégorie dès lors que, en sa qualité de concurrent évincé, elle pouvait contester le marché dans le cadre du recours défini par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 16 juillet 2007 ; ainsi, pour le concurrent évincé, les règles de recevabilité définies dans l'arrêt du 4 avril 2014 s'appliquent immédiatement ;
- le principe de transparence de la procédure de passation du marché n'a pas été méconnu car le centre hospitalier a communiqué à la société Heliportugal l'analyse de son offre variante, le nom de l'attributaire et les motifs ayant conduit au choix de ce dernier ; contrairement à ce que soutient la requérante, le centre hospitalier n'a pas, dans les divers échanges qu'il a eus avec cette dernière, procédé à une substitution des motifs du rejet de son offre ; en tout état de cause, une telle substitution est admise par la jurisprudence ;
- l'erreur manifeste alléguée par la requérante concernant les mérites respectifs des offres des candidats n'existe pas ; ainsi, aucun des critères de choix définis dans le règlement de la consultation ne vise à apprécier la disponibilité des appareils proposés dès le jour de la signature du marché ; la société HDF ne s'est pas engagée dans son offre à fournir immédiatement un appareil AS 365 N3 mais prévoyait bien un appareil de remplacement sur la solution de back-utilité publique ; au contraire, la société Heliportugal n'a pas exposé dans son offre une solution de back-up ;
- le centre hospitalier n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats ; à supposer d'ailleurs qu'une erreur de notation ait été commise dans le report de notation contenu dans le courrier du 17 février 2014, celle-ci aurait été sans incidence sur le classement des offres ;
- l'offre présentée par la société HDF n'était nullement irrégulière ; ainsi, aucune clause du CCTP n'imposait aux candidats de disposer des appareils au jour du dépôt de leur offre et au jour de la signature du contrat ;
- la mise au point du marché n'est entachée d'aucune illégalité au regard de l'article 59 II du code des marchés publics ; dans la mesure où les documents de consultation n'exigeaient pas la fourniture immédiate des appareils, la mise au point a pu prévoir un tel délai afin de permettre le début d'exécution du marché ; cette mise au point n'a donc pas modifié substantiellement l'offre de la société HDF ni modifié le classement entre les candidats dès lors que la disponibilité des appareils ne constituait pas un critère de sélection des offres ; l'insertion d'une clause de pénalité dans la mise au point n'est pas non plus irrégulière ;
- subsidiairement, les motifs d'irrégularité du marché invoqués par la requérante ne portent pas sur l'objet du contrat, le consentement des parties et sur des dispositions d'ordre public ; ils ne peuvent donc justifier l'annulation du contrat ; en tout état de cause, la nécessité d'assurer la continuité du service public de transport sanitaire fait obstacle à ce que la cour prononce l'annulation du marché litigieux.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 15 mars 2016 et le 9 août 2017, la société Hélicoptères de France, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société requérante la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à bon droit que le tribunal a rejeté la demande de la société Heliportugal en appliquant le principe, dégagé par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 4 avril 2014, selon lequel les tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ; dans cet arrêt, le Conseil d'Etat a en effet jugé que seuls les tiers qui ne bénéficiaient pas auparavant de l'accès au juge du contrat sont concernés par la nouvelle condition relative à l'existence d'un intérêt lésé ; la société requérante n'appartient pas à cette catégorie dès lors que, en sa qualité de concurrent évincé, elle pouvait contester le marché dans le cadre du recours défini par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 16 juillet 2007 ; ainsi, pour le concurrent évincé, les règles de recevabilité définies dans l'arrêt du 4 avril 2014 s'appliquent immédiatement ; la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans son arrêt du 5 février 2016 devra être écartée comme contraire à celle issue de la jurisprudence " Tarn et Garonne ".
- le principe de transparence de la procédure de passation du marché n'a pas été méconnu car le centre hospitalier a communiqué à la société Heliportugal les informations sollicitées en application des articles 80 et 83 du code des marchés publics ; contrairement à ce que soutient la requérante, le centre hospitalier n'a pas, dans les divers échanges qu'il a eus avec cette dernière, procédé à une substitution des motifs du rejet de son offre ;
- l'erreur manifeste alléguée par la requérante concernant les mérites respectifs des offres des candidats n'existe pas car l'offre déposée par la société HDF était supérieure à celle de la requérante concernant les moyens mis en oeuvre pour la permanence du service (" solution de back-up ") ; en effet, la requérante a simplement envisagé de mettre en place un second appareil pour le remplacement éventuel de la machine principal, ce qui ne constitue pas une solution de back-up ; au contraire, l'attributaire avait clairement prévu une solution de remplacement ; enfin, le centre hospitalier n'entendait pas apprécier la disponibilité des appareils proposés par les candidats ;
- le centre hospitalier n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation dans la notation des candidats concernant le prix des prestations ; l'offre variante déposée par la société Heliportugal était rédigée en langue anglaise et n'avait même pas à être examinée ; et son offre de base était bien plus onéreuse que celle de la société HDF ; en tout état de cause, une erreur dans l'appréciation du prix n'aurait eu aucune incidence sur le classement des offres ;
- l'offre présentée par la société HDF n'était nullement irrégulière car le centre hospitalier n'exigeait pas des candidats qu'ils disposent des appareils au jour du dépôt de leur offre et au jour de la signature du contrat ; à la date du début d'exécution du marché, la société HDF disposait d'un appareil qui était inscrit sur son certificat de transporteur aérien ;
- la mise au point du marché n'est entachée d'aucune illégalité au regard de l'article 59 II du code des marchés publics ; dans la mesure où les documents de consultation n'exigeaient pas la fourniture immédiate des appareils, la mise au point a pu prévoir un tel délai afin de permettre le début d'exécution du marché ; cette mise au point n'a donc pas modifié substantiellement l'offre de la société HDF ni modifié le classement entre les candidats dès lors que la disponibilité des appareils ne constituait pas un critère de sélection des offres ; l'insertion d'une clause de pénalité dans la mise au point n'est pas non plus irrégulière ;
- subsidiairement, la nécessité d'assurer la continuité du service public de transport sanitaire constitue un motif d'intérêt général faisant obstacle à ce que la cour prononce l'annulation du marché litigieux.
Par ordonnance du 24 juillet 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 16 août 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Faïck,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la société Heliportugal, de Me E..., représentant le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et de Me F..., représentant la société Hélicoptères de France.
Deux notes en délibéré présentées, d'une part, pour la société Hélicoptères de France et d'autre part, pour la société Heliportugal ont été enregistrées le 19 octobre 2017.
Une note en délibéré présentée pour le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne a été enregistrée le 20 octobre 2017.
Considérant ce qui suit :
1. En octobre 2013, le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour l'attribution d'un marché de transports sanitaires héliportés dans le cadre des activités du SAMU 973. Par une lettre du 30 janvier 2014, le centre hospitalier a informé la société Heliportugal que son offre n'était pas retenue et que le marché était attribué à la société Hélicoptères de France. La société Heliportugal a saisi le tribunal administratif de Cayenne d'un recours contestant la validité du contrat signé le 19 février 2014 par le centre hospitalier et la société attributaire. Elle relève appel du jugement rendu le 21 septembre 2015 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Pour rejeter la demande de la société Heliportugal, les premiers juges ont relevé que son offre était irrégulière dès lors que, contrairement aux exigences de l'article 4 du règlement de la consultation, elle était rédigée en langue anglaise sans être accompagnée d'une traduction en français certifiée conforme par un traducteur assermenté. Les premiers juges en ont déduit que l'attribution du marché litigieux n'avait pu léser les intérêts de la société Heliportugal et qu'en conséquence, sa demande en contestation de la validité du contrat était irrecevable.
3. Tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.
4. Il résulte de la décision n° 358994 du 4 avril 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, que le recours défini ci-dessus ne trouve à s'appliquer et quelle que soit la qualité dont se prévaut le tiers, qu'à l'encontre des contrats signés à compter de la lecture de cette même décision. En conséquence, le recours de la société Heliportugal devant le tribunal administratif de Cayenne à l'encontre du marché signé le 19 février 2014 doit être apprécié au regard des règles applicables avant ladite décision, lesquelles permettent au concurrent évincé de l'attribution d'un marché d'invoquer tout moyen à l'appui de son recours contre le contrat alors même qu'il aurait présenté une offre inappropriée, irrégulière ou inacceptable.
5. Il suit de là qu'en rejetant, pour les motifs exposés au point 2 du présent arrêt, comme irrecevable la demande de la société Heliportugal, le tribunal administratif de Cayenne a entaché son jugement d'irrégularité.
6. Dès lors, ce jugement doit être annulé et il y a lieu de statuer sur la demande présentée par la société Heliportugal devant le tribunal administratif de Cayenne par la voie de l'évocation.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
7. Il résulte de ce qui précède que la société Heliportugal était recevable à saisir le juge du contrat d'une action en contestation de la validité du marché signé le 19 février 2014 alors même que son offre aurait été inappropriée, irrégulière ou inacceptable au regard des exigences posées par le pouvoir adjudicateur. La société Heliportugal était également recevable à soulever tout moyen à l'appui de son recours et pas seulement des manquements aux règles applicables à la passation du contrat qui sont en rapport direct avec son éviction. Par suite, la fin de non-recevoir opposée devant les premiers juges doit être écartée.
Sur la validité du contrat :
En ce qui concerne la régularité de l'offre de la société Hélicoptères de France :
8. Aux termes de l'article 53 du code des marchés publics : " (...) III.-Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées. Les autres offres sont classées par ordre décroissant. L'offre la mieux classée est retenue. ". Est notamment irrégulière une offre qui, à défaut de contenir toutes les pièces ou renseignements requis par les documents de la consultation, est incomplète.
9. En l'espèce, aux termes de l'article 4 du règlement de la consultation, les candidats au marché devaient joindre à leur dossier de candidature les renseignements suivants : " Déclaration indiquant l'outillage, le matériel et l'équipement technique dont ils disposent pour la réalisation de contrats de même nature ; Description de l'équipement technique, des mesures employées par l'opérateur économique pour s'assurer de la qualité et des moyens d'étude et de recherche de son entreprise. ". Aux termes de l'article 5 du même règlement : " Les critères relatifs à la candidature sont : - Type d'appareil proposé pour l'exécution du marché (...) ". L'article 7 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) définit les caractéristiques techniques auxquelles doivent satisfaire les appareils fournis en ce qui concerne les conditions de leur exploitation, leur accessibilité, l'aménagement des cabines. Enfin, selon l'article 11 du CCTP, l'appareil mis à disposition par le prestataire est basé sur le site de l'aéroport de Félix Eboué et est destiné dès l'acceptation du contrat à assurer exclusivement les transports sanitaires héliportés demandés par le SAMU 973.
10. S'il ne résulte pas de ces documents que les candidats étaient tenus de justifier qu'ils disposaient immédiatement des appareils à la date de remise de leur offre, il leur appartenait toutefois de justifier, à cette même date, qu'ils en disposeraient pour l'exécution du marché. Les candidats devaient ainsi établir, au moment du dépôt de leur offre, qu'ils avaient entrepris des démarches suffisantes en vue de disposer effectivement des appareils de transports héliportés lors du commencement d'exécution du marché.
11. Le centre hospitalier Andrée Rosemon a retenu l'offre variante n° 2 présentée par la société Hélicoptères de France, laquelle prévoyait la fourniture d'un hélicoptère principal AS 365 N3 et la fourniture d'un hélicoptère de remplacement AS 365 N pour 2014/2015 et AS 365 N3 à partir de 2016. Il résulte toutefois de l'instruction que cette offre ne comportait aucune précision sur le délai d'acheminement et de mise à disposition des appareils. En particulier, elle n'était accompagnée d'aucun document, tel que notamment un contrat d'achat, garantissant au pouvoir adjudicateur que les appareils héliportés seraient disponibles pour l'exécution du marché. A supposer par ailleurs que le commentaire qui accompagnait l'offre variante n° 1 présentée par la société Hélicoptères de France et selon lequel " la mise en place des appareils sera immédiatement déclenchée dès l'attribution. Le délai sera minimalisé et lié à l'acheminement des appareils " doive être regardé comme s'appliquant également à la variante n° 2 retenue, de telles mentions n'étaient pas suffisamment précises pour que le pouvoir adjudicateur soit assuré, en l'absence de tout autre élément, de disposer effectivement des appareils héliportés lors du commencement de l'exécution du marché.
12. Il s'ensuit qu'en attribuant le marché en litige à la société Hélicoptères de France, dont l'offre était incomplète, le centre hospitalier André Rosemon a méconnu les exigences de l'article 53 précité du code des marchés publics.
En ce qui concerne la mise au point du marché :
13. Aux termes de l'article 59 du code des marchés publics : " (...) II. - Après classement des offres finales (...) l'offre économiquement la plus avantageuse est choisie en application du ou des critères annoncés dans l'avis d'appel public à la concurrence ou dans le règlement de la consultation. (...) Il est possible, en accord avec le candidat retenu, de procéder à une mise au point des composantes du marché sans que ces modifications puissent remettre en cause les caractéristiques substantielles de l'offre ni le classement des offres. ".
14. Il résulte de l'instruction que la société Hélicoptères de France a eu recours pendant les six premiers mois de l'exécution du marché à des appareils héliportés AS 365 N qu'elle avait déjà utilisés lors du précédent marché dont elle a obtenu le renouvellement par le contrat en litige. Ces trois appareils héliportés AS 365 N que la société Hélicoptères de France détenait déjà en Guyane n'étaient donc pas les appareils AS 365 N3 qui étaient indiqués dans son offre variante. Or, le centre hospitalier Andrée Rosemon et la société Hélicoptères de France sont convenus, lors de la mise au point du marché, que l'hélicoptère principal et l'hélicoptère de remplacement AS 365 N 3 devraient être disponibles pour le nouveau marché mais seulement dans les délais respectifs de six et vingt-quatre mois à compter du 1er mars 2014 et qu'à défaut pour la société attributaire de respecter ces échéances, une pénalité d'un montant journalier de 3 103 euros par jour de retard lui serait infligée. Une telle mise au point a donc modifié l'offre de la société Hélicoptères de France sur un point essentiel en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 59 du code des marchés publics.
Sur la poursuite du contrat :
15. Il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences. Il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit d'accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat.
16. En l'espèce, la méconnaissance par les parties de l'article 53 du code des marchés publics a rendu possible la signature d'un marché avec un candidat dont l'offre, compte tenu de son caractère incomplet au regard des exigences du règlement de la consultation, n'aurait pas dû être examinée. L'autre irrégularité commise au regard de l'article 59 du code a conduit à modifier un point essentiel de l'offre de la société attributaire après la signature du marché. La nature de ces vices, qui ont trait au choix du cocontractant et au contenu de son offre, justifie en conséquence l'annulation du marché public en litige. Compte tenu de l'annulation prononcée, il n'y a pas lieu pour la cour d'examiner les autres vices invoqués par la société requérante à l'encontre du contrat en litige.
17. Il existe toutefois un motif d'intérêt général tenant à ce que la continuité du service de transports sanitaires d'urgence assuré par le centre hospitalier soit garantie dans le cadre du contrat litigieux, lequel avait été conclu pour une durée de six années. En conséquence, il y a lieu de prononcer l'annulation du marché signé le 19 février 2014 avec un effet différé à neuf mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge du centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne la somme globale de 3 000 euros au titre des frais, non compris dans les dépens, exposés par la société Heliportugal tant en première instance qu'en appel. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Heliportugal qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au centre hospitalier et à la société Hélicoptères de France la somme qu'ils demandent au titre de leurs frais non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1400613 du tribunal administratif de Cayenne du 21 septembre 2015 est annulé.
Article 2 : Le marché de transports sanitaires héliportés conclu le 19 février 2014 entre le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et la société Hélicoptères de France est annulé. Cette annulation prendra effet à l'issue d'un délai de neuf mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne versera à la société Heliportugal la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la société Heliportugal est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et la société Hélicoptères de France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Heliportugal, au centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne et à la société Hélicoptères de France. Copie pour information en sera adressée à la ministre des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
M. Fréderic Faïck, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 novembre 2017.
Le rapporteur,
Frédéric Faïck
Le président,
Elisabeth JayatLe greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au préfet de Guyane en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX03734