CAA de NANTES, 5ème chambre, 13/02/2017, 15NT03204, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES, 5ème chambre, 13/02/2017, 15NT03204, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES - 5ème chambre
- N° 15NT03204
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
lundi
13 février 2017
- Président
- M. LENOIR
- Rapporteur
- Mme Barbara MASSIOU
- Avocat(s)
- DE BAYNAST
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...du Tertre a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 26 octobre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a décidé son déplacement d'office à titre disciplinaire.
Par un jugement n° 1211745 du 25 août 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 octobre 2015, M. B...du Tertre, représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 août 2015 ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 26 octobre 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie, dès lors notamment qu'il a été relaxé par le juge pénal du chef d'entrave au déroulement des débats d'un organe délibérant d'une collectivité locale ;
- il ne peut lui être reproché d'avoir commis une faute, aucun manquement au devoir de réserve n'étant établi ;
- la sanction prononcée à son encontre présente un caractère disproportionné.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2106, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B...du Tertre ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 17 novembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 décembre 2016.
Un mémoire présenté pour M. B...du Tertre a été enregistré le 23 décembre 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massiou,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- les observations de MeC..., représentant M. B...du Tertre.
1. Considérant que par un arrêté du ministre de l'intérieur du 26 octobre 2012,
M. B...du Tertre, secrétaire administratif de classe exceptionnelle affecté à la préfecture de Maine-et-Loire, a été déplacé d'office à titre disciplinaire à la sous-préfecture de Segré (Maine-et-Loire) ; que cet arrêté est motivé par la circonstance que l'intéressé a, le 8 avril 2011, organisé et dirigé la perturbation de la séance du conseil municipal d'Angers par plusieurs personnes portant des masques représentant la tête d'un cochon et scandant des slogans hostiles au projet de création d'un édifice religieux musulman, par le retentissement qu'a eu cette action dans la presse, et par le manquement que les faits en cause constituent au devoir de réserve ; que
M. B...du Tertre relève appel du jugement du 25 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué, qui n'est pas motivé par référence à l'avis du conseil de discipline, comporte la mention des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que la circonstance selon laquelle le conseil de discipline ne s'est prononcé en faveur d'aucune des sanction proposées et que M. B...du Tertre en ait été informé est sans incidence à cet égard, dès lors qu'en vertu des dispositions de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984, le conseil est alors réputé avoir été régulièrement consulté ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué doit, par suite, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que si M. B...du Tertre a été relaxé en appel des poursuites pénales exercées à son encontre pour délit d'entrave au déroulement des débats d'un organe délibérant d'une collectivité territoriale et que le pourvoi en cassation dirigé contre cet arrêt a été rejeté, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu'il puisse être sanctionné pour avoir organisé et dirigé la perturbation d'un conseil municipal dès lors que la matérialité des faits est établie, faits qu'il a, par ailleurs, reconnu avoir commis ; que le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur de fait ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...du Tertre a organisé et dirigé la perturbation en cause du conseil municipal, notamment en fournissant des tracts et les masques utilisés et qu'il attendait les protagonistes de cette manifestation à l'extérieur de la salle de réunion du conseil municipal ; que ces tracts, au ton polémique, faisaient mention de la nécessité de se mobiliser " contre l'islamisation de nos villes et de notre pays " au sujet de la construction d'une mosquée, qualifiée de " contraire à nos valeurs " ; que l'intéressé a été reconnu lors de l'incident par le directeur général des services de la commune d'Angers ; que les faits ont donné lieu à plusieurs articles dans la presse locale mettant nommément en cause l'intéressé, avec la mention de ses fonctions ; qu'ainsi, alors même que l'intéressé est un agent de catégorie B dont le domaine de compétence ne concerne pas les relations avec les cultes, ces faits, qui caractérisent un manquement à l'obligation de réserve, sont constitutifs d'une faute ;
5. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à la nature des faits commis et à leur retentissement au niveau local, la sanction de déplacement d'office, sanction du deuxième groupe, est proportionnée à la gravité de la faute commise par l'intéressé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... du Tertre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B...du Tertre sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... du Tertre est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...du Tertre et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2017, où siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2017.
Le rapporteur,
B. MASSIOULe président,
H. LENOIR
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 15NT03204
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...du Tertre a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 26 octobre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a décidé son déplacement d'office à titre disciplinaire.
Par un jugement n° 1211745 du 25 août 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 octobre 2015, M. B...du Tertre, représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 août 2015 ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 26 octobre 2012 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie, dès lors notamment qu'il a été relaxé par le juge pénal du chef d'entrave au déroulement des débats d'un organe délibérant d'une collectivité locale ;
- il ne peut lui être reproché d'avoir commis une faute, aucun manquement au devoir de réserve n'étant établi ;
- la sanction prononcée à son encontre présente un caractère disproportionné.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2106, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B...du Tertre ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 17 novembre 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 décembre 2016.
Un mémoire présenté pour M. B...du Tertre a été enregistré le 23 décembre 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massiou,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- les observations de MeC..., représentant M. B...du Tertre.
1. Considérant que par un arrêté du ministre de l'intérieur du 26 octobre 2012,
M. B...du Tertre, secrétaire administratif de classe exceptionnelle affecté à la préfecture de Maine-et-Loire, a été déplacé d'office à titre disciplinaire à la sous-préfecture de Segré (Maine-et-Loire) ; que cet arrêté est motivé par la circonstance que l'intéressé a, le 8 avril 2011, organisé et dirigé la perturbation de la séance du conseil municipal d'Angers par plusieurs personnes portant des masques représentant la tête d'un cochon et scandant des slogans hostiles au projet de création d'un édifice religieux musulman, par le retentissement qu'a eu cette action dans la presse, et par le manquement que les faits en cause constituent au devoir de réserve ; que
M. B...du Tertre relève appel du jugement du 25 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué, qui n'est pas motivé par référence à l'avis du conseil de discipline, comporte la mention des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que la circonstance selon laquelle le conseil de discipline ne s'est prononcé en faveur d'aucune des sanction proposées et que M. B...du Tertre en ait été informé est sans incidence à cet égard, dès lors qu'en vertu des dispositions de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984, le conseil est alors réputé avoir été régulièrement consulté ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué doit, par suite, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que si M. B...du Tertre a été relaxé en appel des poursuites pénales exercées à son encontre pour délit d'entrave au déroulement des débats d'un organe délibérant d'une collectivité territoriale et que le pourvoi en cassation dirigé contre cet arrêt a été rejeté, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu'il puisse être sanctionné pour avoir organisé et dirigé la perturbation d'un conseil municipal dès lors que la matérialité des faits est établie, faits qu'il a, par ailleurs, reconnu avoir commis ; que le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur de fait ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...du Tertre a organisé et dirigé la perturbation en cause du conseil municipal, notamment en fournissant des tracts et les masques utilisés et qu'il attendait les protagonistes de cette manifestation à l'extérieur de la salle de réunion du conseil municipal ; que ces tracts, au ton polémique, faisaient mention de la nécessité de se mobiliser " contre l'islamisation de nos villes et de notre pays " au sujet de la construction d'une mosquée, qualifiée de " contraire à nos valeurs " ; que l'intéressé a été reconnu lors de l'incident par le directeur général des services de la commune d'Angers ; que les faits ont donné lieu à plusieurs articles dans la presse locale mettant nommément en cause l'intéressé, avec la mention de ses fonctions ; qu'ainsi, alors même que l'intéressé est un agent de catégorie B dont le domaine de compétence ne concerne pas les relations avec les cultes, ces faits, qui caractérisent un manquement à l'obligation de réserve, sont constitutifs d'une faute ;
5. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à la nature des faits commis et à leur retentissement au niveau local, la sanction de déplacement d'office, sanction du deuxième groupe, est proportionnée à la gravité de la faute commise par l'intéressé ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... du Tertre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B...du Tertre sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... du Tertre est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...du Tertre et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 27 janvier 2017, où siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 février 2017.
Le rapporteur,
B. MASSIOULe président,
H. LENOIR
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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