CAA de VERSAILLES, 4ème Chambre, 02/06/2015, 14VE01199, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2014, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT, dont le siège est 52 rue de Paris BP 60058 à Moisselles (95570), par Me Latournerie, avocat ;

Le CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1209731 du 24 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé, à la demande de Mme A...B..., la décision implicite par laquelle son directeur lui a refusé le bénéfice des dispositions de l'article 4 de la charte du 6 décembre 1999 concernant l'exercice des psychologues au CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT ;

2° de rejeter la demande présentée par Mme A...B...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

3° de mettre à la charge de Mme B...la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant qu'il ne ressortait d'aucune pièce du dossier que les avancements successifs dont a bénéficié Mme B...auraient été fondés sur d'autres dispositions que celles de la charte du 6 décembre 1999 alors que le centre hospitalier a fait bénéficier ses agents contractuels d'avancements calqués sur la durée moyenne des agents titulaires exerçant les mêmes fonctions bien avant 1999 ;
- le tribunal administratif ne pouvait pas considérer que la charte du 6 décembre 1999 était venue préciser les dispositions de la décision du 2 janvier 2000 portant conditions générales d'emploi applicables aux agents non titulaires recrutés par voie de contrat qui est postérieure ;
- à supposer que la charte du 6 décembre 1999 ait pu comprendre des dispositions créatrices de droit pour les agents intéressés, ces dispositions étaient contraires à une règle d'ordre public qui interdit d'instituer des dispositifs faisant bénéficier des agents non titulaires des avancements réguliers sur une longue période ;
- à supposer même que les dispositions de la charte du 6 décembre 1999 étaient légales, elles ont été abrogées par celles de la décision du 2 janvier 2000 qui ne prévoient pas le bénéfice automatique d'une augmentation de rémunération à la durée moyenne des échelons du grade de référence ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 91-129 du 31 janvier 1991 portant statut particulier des psychologues de la fonction publique hospitalière ;

Vu le décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33
du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2015 :

- le rapport de M. Meyer, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant Me Latournerie, pour le CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT ;

1. Considérant que Mme B...a été recrutée par le CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT en qualité de psychologue à temps non complet par un contrat à durée indéterminée du 20 mai 2003 ; que par des avenants du 29 juillet 2003, du 5 mai 2004,
du 5 mai 2005 et du 30 octobre 2007, sa rémunération a été augmentée ; que par un courrier du 30 juillet 2012, demeuré sans réponse, Mme B...a demandé une augmentation de sa rémunération sur le fondement des stipulations de l'article 4 de la charte du 6 décembre 1999 concernant l'exercice des psychologues au CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT ;

2. Considérant que l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée dispose que : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont, à l'exception de ceux réservés aux magistrats de l'ordre judiciaire et aux fonctionnaires des assemblées parlementaires, occupés soit par des fonctionnaires régis par le présent titre, soit par des fonctionnaires des assemblées parlementaires, des magistrats de l'ordre judiciaire ou des militaires dans les conditions prévues par leur statut. " ; que selon l'article 9 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " Par dérogation à l'article 3 du titre Ier du statut général, les emplois permanents mentionnés au premier alinéa de l'article 2 peuvent être occupés par des agents contractuels lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient, notamment lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires hospitaliers susceptibles d'assurer ces fonctions ou lorsqu'il s'agit de fonctions nouvellement prises en charge par l'administration ou nécessitant des connaissances techniques hautement spécialisées. Les emplois à temps non complet d'une durée inférieure au mi-temps et correspondant à un besoin permanent sont occupés par des agents contractuels. Les agents ainsi recrutés peuvent être engagés par des contrats d'une durée indéterminée ou déterminée. Lorsque les contrats sont conclus pour une durée déterminée, celle-ci est au maximum de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par décision expresse dans la limite d'une durée maximale de six ans. (...) " ; que l'article 67 de la même loi dispose que : " L'avancement d'échelon se traduit par une augmentation de traitement et a lieu de façon continue d'un échelon à l'échelon immédiatement supérieur. Il est fonction à la fois de l'ancienneté et de la valeur professionnelle des fonctionnaires, telle qu'elle est définie à l'article 17 du titre Ier du statut général. Toutefois, l'accès à certains échelons peut être subordonné à des conditions spécifiques précisées dans les statuts particuliers. L'avancement d'échelon à l'ancienneté maximale est accordé de plein droit. L'avancement d'échelon à l'ancienneté réduite peut être accordé au fonctionnaire dont la valeur professionnelle le justifie. " ; qu'enfin, selon l'article 1-2 du décret du 6 février 1991 susvisé : " La rémunération des agents employés à durée indéterminée fait l'objet d'un réexamen au minimum tous les trois ans, notamment au vu des résultats de l'évaluation prévue à l'article 1-3 du présent décret. Elle est éventuellement modifiée par voie d'avenant au contrat initial. " ;

3. Considérant que s'il est loisible au directeur d'un centre hospitalier de fixer contractuellement la rémunération d'un agent non titulaire de l'établissement par référence au traitement versé aux agents titulaires appartenant au corps de fonctionnaires exerçant des fonctions de même nature que celles confiées à cet agent, il ne peut, sans méconnaître les dispositions statutaires ci-dessus reproduites, ni par contrat, ni en faisant usage de son pouvoir réglementaire de chef de service, faire bénéficier cet agent d'un dispositif lui garantissant, sur une longue période, l'évolution de sa rémunération par référence à la grille indiciaire applicable au corps de fonctionnaires exerçant des fonctions de même nature ;

4. Considérant que l'article 4 de la charte du 6 décembre 1999 concernant l'exercice des psychologues au CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT stipule que : " (...) Les personnels contractuels à durée indéterminée bénéficient d'un avancement à la durée moyenne. " ; que ces dispositions doivent être regardées comme ayant été abrogées par la décision n° 00-28 du 2 janvier 2000 portant conditions générales d'emploi applicables aux agents non titulaires recrutés par voie de contrat dont l'article 6, dans sa rédaction issue de la décision n° 03-28 du 23 mai 2003, dispose que : " Les agents non titulaires recrutés par voie de contrat à durée indéterminée peuvent, après avis favorable de leur chef de service, faire l'objet d'un avancement d'échelon calculé selon la durée moyenne d'ancienneté prévue pour les agents titulaires du grade de référence. L'application de ces dispositions a lieu par voie d'avenant au contrat d'engagement. " ;

5. Considérant qu'en application des dispositions de la décision du 2 janvier 2000, auxquelles renvoie son contrat de travail, Mme B...a bénéficié à plusieurs reprises d'une augmentation de sa rémunération par application des dispositions de l'article 5 du décret
du 31 janvier 1991 susvisé ; que, par son courrier du 30 juillet 2012, elle a demandé au directeur du CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT de reprendre l'application de ces dispositions dont elle ne bénéficiait plus ; que, toutefois, il résulte de ce qui précède que ces dispositions à caractère réglementaire étaient illégales ; que, contrairement à ce que soutient Mme B...et à ce qu'a jugé le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, nul n'a de droit au maintien d'une réglementation ; qu'au surplus, lorsqu'une autorité administrative a édicté une réglementation illégale, elle est tenue de cesser de l'appliquer et de l'abroger dès qu'elle a pris connaissance de cette illégalité ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision implicite par laquelle son directeur a refusé d'appliquer à Mme B...les stipulations de la charte du 6 décembre 1999 ;

7. Considérant que, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, il appartient à la Cour de statuer sur tous les moyens soulevés par Mme B...à l'encontre de la décision qu'elle conteste ;

8. Considérant que si les avenants par lesquels Mme B...a bénéficié à plusieurs reprises d'une augmentation de sa rémunération à la durée moyenne prévue par la grille indiciaire des psychologues hospitaliers de classe normale ont créé des droits, elle n'avait aucun droit à la poursuite de l'application d'une réglementation illégale laquelle, au surplus, ne lui conférait aucun droit à un avancement systématique, pour les motifs indiqués ci-dessus ; qu'ainsi les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne peuvent qu'être rejetées ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées par voie de conséquence ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B...demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de Mme B...une somme de 1 000 euros à verser au CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :


Article 1er : Le jugement n° 1209731 du 24 février 2014 du Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Mme B...versera au CENTRE HOSPITALIER ROGER PREVOT une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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