Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31/12/2013, 12PA04250, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 octobre 2012 et 12 février 2013, présentés pour la SA Sotref, dont le siège social est situé 33, rue de Lyon à Paris (75012), représentée par son gérant, et pour M. B...A..., demeurant à... ; la société Sotref et M. A...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1115685/3-1 du 28 août 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 septembre 2011 par lequel le préfet de police a décidé la fermeture de l'établissement exploité sous l'enseigne " Le Tarmac " pour une durée de trente jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l'aide juridique prévue par l'article R. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 2013 :

- le rapport de Mme Vrignon, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un arrêté en date du 13 septembre 2011, le préfet de police a décidé, sur le fondement du 3ème alinéa de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, la fermeture de l'établissement exploité sous l'enseigne " Le Tarmac ", pour une durée de trente jours ; que la société Sotref et M. A...font appel du jugement du 28 août 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité en la forme du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : " 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois, à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. / Cette fermeture doit être précédée d'un avertissement qui peut, le cas échéant, s'y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. / (...) 3. Lorsque la fermeture est motivée par des actes criminels ou délictueux prévus par les dispositions pénales en vigueur, à l'exception des infractions visées au 1, la fermeture peut être prononcée pour six mois. Dans ce cas, la fermeture entraîne l'annulation du permis d'exploitation visé à l'article L. 3332-1-1. / 4. Les crimes et délits ou les atteintes à l'ordre public pouvant justifier les fermetures prévues au 2 et au 3 doivent être en relation avec la fréquentation de l'établissement ou ses conditions d'exploitation / (... ) " ;
3. Considérant que lorsqu'elle est ordonnée, conformément aux dispositions précitées combinées des 3 et 4 de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, en cas de commission d'un crime ou d'un délit en relation avec l'exploitation d'un débit de boissons, la fermeture qui peut en être ordonnée doit être regardée non comme une sanction, mais comme une mesure de police qui a pour objet de prévenir la continuation ou le retour de désordres liés au fonctionnement de l'établissement, indépendamment de toute responsabilité de l'exploitant ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la mesure de fermeture de l'établissement " le Tarmac " décidée par le préfet de police le 13 septembre 2011 est fondée sur les actes délictueux constitués par la dissimulation de salariés et l'emploi d'étrangers sans titre de travail qui ont été constatés, le 1er juin 2011, au cours d'un contrôle effectué conjointement dans les locaux de l'établissement " Le Tarmac " par les services de police et les services de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) ; que si ces infractions, passibles de sanctions pénales, sont en relation avec les conditions d'exploitation de l'établissement et sont de nature à justifier la mesure de police litigieuse, il n'est pas contesté par le préfet de police qu'à la date de l'arrêté du 13 septembre 2011, elles ne se poursuivaient pas ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu notamment du caractère isolé et limité dans le temps des faits constatés, qui ont d'autre part donné lieu à des mesures de redressement prises par les services de l'Urssaf à l'encontre de la société Sotref, en application du code du travail, que la mesure contestée était nécessaire pour empêcher la reproduction de ces actes délictueux ; que, dans ces conditions, en l'absence de tout désordre lié au fonctionnement de l'établissement dont il aurait fallu prévenir la continuation ou le retour, le préfet de police ne pouvait pas légalement ordonner la fermeture administrative de l'établissement " Le Tarmac " ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la société Sotref et M. A...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
Sur les dépens :
6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions de la société Sotref et de M. A...tendant à ce que l'Etat supporte la charge de la contribution pour l'aide juridique ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros chacun au titre des frais exposés respectivement par la société Sotref d'une part et par M. A...d'autre part et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1115685/3-1 en date du 28 août 2012 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté en date du 13 septembre 2011 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : La contribution pour l'aide juridique acquittée par la société Sotref et M. A...est mise à la charge de l'Etat.
Article 3 : L'Etat versera à la société Sotref et à M. A...une somme de 800 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
''
''
''
''
2
12PA04250



Retourner en haut de la page