Cour Administrative d'Appel de Versailles, 3ème Chambre, 23/09/2008, 07VE02324, Inédit au recueil Lebon
Cour Administrative d'Appel de Versailles, 3ème Chambre, 23/09/2008, 07VE02324, Inédit au recueil Lebon
Cour Administrative d'Appel de Versailles - 3ème Chambre
- N° 07VE02324
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mardi
23 septembre 2008
- Président
- Mme COROUGE
- Rapporteur
- M. Franck LOCATELLI
- Avocat(s)
- TAHAR
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE TS3, dont le siège est 62-64 boulevard Pereire à Paris (75017), par Me Tahar ; la SOCIETE TS3 demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0613453 en date du 12 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamnée à verser à la commune de Garges-lès-Gonesse la somme de 22 250,48 euros ;
Elle soutient, en premier lieu, que le contrat conclu le 2 septembre 2005 entre elle et la commune de Garges-lès-Gonesse n'a pas la nature d'un contrat administratif et que, par suite, la juridiction administrative est incompétente pour en connaître ; qu'en second lieu, la tenue du spectacle que la SOCIETE TS3 s'était contractuellement engagée à fournir a été rendue impossible en raison de l'état de santé du chanteur Raphaël, victime d'un malaise à l'issue du concert donné au zénith de Lille au soir du 16 juin 2006 ; qu'elle a dûment justifié de l'état de santé de l'artiste par la production d'un certificat médical établi le 16 juin 2006, à 23 h 20, par un médecin cardiologue lequel a prescrit « le repos à la chambre [de l'artiste] pendant 48 heures » ; qu'il ressort de ces constatations que l'artiste était physiquement incapable d'assurer le spectacle, objet du contrat litigieux ; que, dès lors, elle est fondée à invoquer les stipulations de l'article 11 au contrat, qui prévoient expressément la suspension, la résolution ou la résiliation du contrat en cas de force majeure liée à la maladie dûment constatée de l'artiste ; qu'en outre, la commune est mal fondée à contester cette résolution, dès lors qu'en vertu de l'article 10 du contrat, l'organisateur et le producteur du spectacle devaient, mutuellement, s'assurer contre la survenance d'un tel risque ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 92/50/CEE du 18 juin 1992 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de service ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 aout 2008 :
- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,
- les observations de Me Tahar, pour la SOCIETE TS3,
- les observations de Me Gravisse, pour la commune de Garges-lès-Gonesse,
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Vu, enregistrée le 5 septembre 2008, la note en délibéré présentée pour la commune de Garges-lès-Gonesse ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 : « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. (...) » ; qu'aux termes des dispositions de l'article 1er du code des marchés publics : « I. (...) Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. (...) » et qu'aux termes de l'article 2 du même code : « Les pouvoirs adjudicateurs soumis au présent code sont : (...) 2º Les collectivités territoriales et les établissements publics locaux. (...) » ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 30 du code des marchés publics, dans sa rédaction issue du décret n° 2005-1008 du 24 août 2005 applicable aux marchés de service : « I. - Les marchés publics de service, dont le montant estimé est égal ou supérieur à 4 000 euros HT, qui ont pour objet des prestations de service qui ne sont pas mentionnées à l'article 29 peuvent être passés selon une procédure adaptée librement définie par la personne responsable du marché dans les conditions prévues par le présent article (...) » et qu'aux termes de l'article 35 du même code : « III. Peuvent être négociés sans publicité préalable et sans mise en concurrence : (...) 4° Les marchés qui ne peuvent être confiés qu'à un prestataire déterminé pour des raisons techniques, artistiques ou tenant à la protection de droits d'exclusivité » ;
Considérant que le contrat conclu, le 2 septembre 2005, entre la commune de Garges-lès-Gonesse et la SOCIETE TS3 a pour objet de céder, à raison d'une représentation, à la commune de Garges-lès-Gonesse, les droits qu'elle détient sur la production du spectacle de l'artiste Raphaël ;
Considérant qu'un contrat de cession des droits d'exploitation d'un spectacle à une personne publique consiste dans l'achat, par cette personne publique, d'une prestation de service et est donc conclu à titre onéreux par un pouvoir adjudicateur en vue de répondre à ses besoins en matière de service ; qu'un tel contrat doit ainsi être regardé comme un marché public au sens des articles 1er et 2 du code des marchés publics, dont la commune a en outre estimé à bon droit que sa passation pouvait être dispensée de mise en concurrence et de publicité préalables dès lors, d'une part, que cette prestation de service était expressément exclue de la liste des prestations énumérées à l'article 29 du code des marchés publics et, d'autre part, qu'en application des dispositions précitées des articles 30 et 35 du code des marchés publics, toute mise en concurrence et tout avis de publicité étaient manifestement rendus inutiles ou impossibles par le fait que ce marché ne pouvait être confié qu'à la SOCIETE TS3 en tant qu'elle détenait les droits de production du spectacle de l'artiste Raphaël ; qu'il en résulte, ainsi que l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, que ce contrat a le caractère d'un marché public de service et que les litiges se rattachant à l'exécution d'un tel contrat relèvent de la compétence de la juridiction administrative ;
Sur la résiliation du contrat :
Considérant qu'aux termes du A) de l'article XI du contrat conclu entre la SOCIETE TS3 et la commune de Garges-lès-Gonesse : « Le présent contrat se trouverait suspendu, résolu ou résilié de plein droit et sans indemnité d'aucune sorte en cas d'accidents indépendants des parties reconnus de force majeure nécessitant la fermeture de la plupart des salles de spectacles, tels que : calamités publiques, guerre, révolution, émeute, mouvement populaire, accident de la circulation, deuil national, grève, épidémie, maladie dûment constatée d'un artiste et tout autre cas de force majeure (...) » ;
Considérant que, pour annuler la représentation prévue le 17 juin 2006, la SOCIETE TS3 a adressé à la commune de Garges-lès-Gonesse un certificat médical établi le 16 juin 2006 à 23 h 20 par un médecin cardiologue selon lequel l'état de santé de l'artiste nécessitait « le repos à la chambre pendant 48 heures » ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne pouvait, comme il l'a fait, écarter ce certificat au motif qu'il n'était pas circonstancié alors que le secret médical interdisait au médecin de révéler des informations sur l'état de santé de l'artiste ; que, compte tenu des énonciations de ce certificat médical, corroboré par deux témoignages circonstanciés, l'annulation du spectacle doit être regardée comme résultant d'une « maladie dûment constatée » de l'artiste, au sens de l'article XI du contrat, constitutive d'un cas de force majeure à raison duquel le contrat litigieux pouvait être résilié de plein droit sans indemnité d'aucune sorte ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE TS3 est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 12 juillet 2007, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamnée à indemniser la commune des conséquences dommageables de cette résiliation ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société requérante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la commune de Garges-lès-Gonesse au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 12 juillet 2007 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la commune de Garges-lès-Gonesse devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions présentées devant la cour administrative d'appel sont rejetées.
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N° 07VE02324
Elle soutient, en premier lieu, que le contrat conclu le 2 septembre 2005 entre elle et la commune de Garges-lès-Gonesse n'a pas la nature d'un contrat administratif et que, par suite, la juridiction administrative est incompétente pour en connaître ; qu'en second lieu, la tenue du spectacle que la SOCIETE TS3 s'était contractuellement engagée à fournir a été rendue impossible en raison de l'état de santé du chanteur Raphaël, victime d'un malaise à l'issue du concert donné au zénith de Lille au soir du 16 juin 2006 ; qu'elle a dûment justifié de l'état de santé de l'artiste par la production d'un certificat médical établi le 16 juin 2006, à 23 h 20, par un médecin cardiologue lequel a prescrit « le repos à la chambre [de l'artiste] pendant 48 heures » ; qu'il ressort de ces constatations que l'artiste était physiquement incapable d'assurer le spectacle, objet du contrat litigieux ; que, dès lors, elle est fondée à invoquer les stipulations de l'article 11 au contrat, qui prévoient expressément la suspension, la résolution ou la résiliation du contrat en cas de force majeure liée à la maladie dûment constatée de l'artiste ; qu'en outre, la commune est mal fondée à contester cette résolution, dès lors qu'en vertu de l'article 10 du contrat, l'organisateur et le producteur du spectacle devaient, mutuellement, s'assurer contre la survenance d'un tel risque ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 92/50/CEE du 18 juin 1992 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de service ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 aout 2008 :
- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,
- les observations de Me Tahar, pour la SOCIETE TS3,
- les observations de Me Gravisse, pour la commune de Garges-lès-Gonesse,
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Vu, enregistrée le 5 septembre 2008, la note en délibéré présentée pour la commune de Garges-lès-Gonesse ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 : « Les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs. (...) » ; qu'aux termes des dispositions de l'article 1er du code des marchés publics : « I. (...) Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. (...) » et qu'aux termes de l'article 2 du même code : « Les pouvoirs adjudicateurs soumis au présent code sont : (...) 2º Les collectivités territoriales et les établissements publics locaux. (...) » ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 30 du code des marchés publics, dans sa rédaction issue du décret n° 2005-1008 du 24 août 2005 applicable aux marchés de service : « I. - Les marchés publics de service, dont le montant estimé est égal ou supérieur à 4 000 euros HT, qui ont pour objet des prestations de service qui ne sont pas mentionnées à l'article 29 peuvent être passés selon une procédure adaptée librement définie par la personne responsable du marché dans les conditions prévues par le présent article (...) » et qu'aux termes de l'article 35 du même code : « III. Peuvent être négociés sans publicité préalable et sans mise en concurrence : (...) 4° Les marchés qui ne peuvent être confiés qu'à un prestataire déterminé pour des raisons techniques, artistiques ou tenant à la protection de droits d'exclusivité » ;
Considérant que le contrat conclu, le 2 septembre 2005, entre la commune de Garges-lès-Gonesse et la SOCIETE TS3 a pour objet de céder, à raison d'une représentation, à la commune de Garges-lès-Gonesse, les droits qu'elle détient sur la production du spectacle de l'artiste Raphaël ;
Considérant qu'un contrat de cession des droits d'exploitation d'un spectacle à une personne publique consiste dans l'achat, par cette personne publique, d'une prestation de service et est donc conclu à titre onéreux par un pouvoir adjudicateur en vue de répondre à ses besoins en matière de service ; qu'un tel contrat doit ainsi être regardé comme un marché public au sens des articles 1er et 2 du code des marchés publics, dont la commune a en outre estimé à bon droit que sa passation pouvait être dispensée de mise en concurrence et de publicité préalables dès lors, d'une part, que cette prestation de service était expressément exclue de la liste des prestations énumérées à l'article 29 du code des marchés publics et, d'autre part, qu'en application des dispositions précitées des articles 30 et 35 du code des marchés publics, toute mise en concurrence et tout avis de publicité étaient manifestement rendus inutiles ou impossibles par le fait que ce marché ne pouvait être confié qu'à la SOCIETE TS3 en tant qu'elle détenait les droits de production du spectacle de l'artiste Raphaël ; qu'il en résulte, ainsi que l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, que ce contrat a le caractère d'un marché public de service et que les litiges se rattachant à l'exécution d'un tel contrat relèvent de la compétence de la juridiction administrative ;
Sur la résiliation du contrat :
Considérant qu'aux termes du A) de l'article XI du contrat conclu entre la SOCIETE TS3 et la commune de Garges-lès-Gonesse : « Le présent contrat se trouverait suspendu, résolu ou résilié de plein droit et sans indemnité d'aucune sorte en cas d'accidents indépendants des parties reconnus de force majeure nécessitant la fermeture de la plupart des salles de spectacles, tels que : calamités publiques, guerre, révolution, émeute, mouvement populaire, accident de la circulation, deuil national, grève, épidémie, maladie dûment constatée d'un artiste et tout autre cas de force majeure (...) » ;
Considérant que, pour annuler la représentation prévue le 17 juin 2006, la SOCIETE TS3 a adressé à la commune de Garges-lès-Gonesse un certificat médical établi le 16 juin 2006 à 23 h 20 par un médecin cardiologue selon lequel l'état de santé de l'artiste nécessitait « le repos à la chambre pendant 48 heures » ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne pouvait, comme il l'a fait, écarter ce certificat au motif qu'il n'était pas circonstancié alors que le secret médical interdisait au médecin de révéler des informations sur l'état de santé de l'artiste ; que, compte tenu des énonciations de ce certificat médical, corroboré par deux témoignages circonstanciés, l'annulation du spectacle doit être regardée comme résultant d'une « maladie dûment constatée » de l'artiste, au sens de l'article XI du contrat, constitutive d'un cas de force majeure à raison duquel le contrat litigieux pouvait être résilié de plein droit sans indemnité d'aucune sorte ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE TS3 est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 12 juillet 2007, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamnée à indemniser la commune des conséquences dommageables de cette résiliation ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société requérante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la commune de Garges-lès-Gonesse au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 12 juillet 2007 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la commune de Garges-lès-Gonesse devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions présentées devant la cour administrative d'appel sont rejetées.
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