COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 4ème chambre - formation à 3, 12/04/2007, 05LY00123

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 28 janvier 2005, présentée pour la société DINECITTA dont le siège est au Champ du Beau à Sevrier (74320), par Me Brossy, avocat au barreau de la Rochelle ;

La société DINECITTA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202876 du 2 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie en date du 27 mai 2002 prononçant la fermeture pour une durée d'un mois du débit de boissons qu'elle exploite à Sevrier à l'enseigne « le Casting »,

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision,

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code des débits de boissons ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mars 2007 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions en annulation de la requête :

Considérant, en premier lieu, que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 se borne à exiger de l'administration qu'elle mette l'intéressé « à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, des observations orales » avant de prendre une décision individuelle assujettie à l'obligation de motivation telle qu'une mesure de police ou une sanction administrative ;

Considérant que le préfet de la Haute-Savoie a invité la société DINECITTA à présenter ses observations par un courrier du 29 avril 2002 qui énonce précisément les motifs susceptibles d'entraîner une sanction de fermeture temporaire d'un mois de l'établissement « Le Casting » ; qu'un entretien organisé en préfecture le 24 mai 2004 a permis au gérant de compléter les justifications qu'il avait exposées dans sa lettre du 7 mai 2002 ; qu'il n'est pas allégué qu'à cette occasion, les services de la préfecture ne l'auraient pas informé des témoignages recueillis au cours de l'enquête judiciaire sur le comportement des trois consommateurs soupçonnés d'avoir absorbé des quantités excessives d'alcool dans l'établissement, à défaut de lui avoir communiqué les procès-verbaux de gendarmerie ; que, par suite, la société requérante a été mise en mesure de se défendre utilement et n'est, par suite, pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée des garanties de la procédure contradictoire organisée par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique dans sa rédaction alors applicable : « La fermeture des débits de boissons (…) peut être ordonnée par arrêté du représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas six mois soit à la suite d'infraction aux lois et règlements relatifs à ces établissements, soit en vue de préserver l'ordre public (…). » ; qu'aux termes de l'article R. 6 du code des débits de boissons : « Les (…) débitants de boissons qui auront donné à boire à des gens manifestement ivres ou qui les auront reçus dans leurs établissements seront punis de l'amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe.» ;

Considérant que ces dispositions permettent de sanctionner le détaillant qui a servi des boissons alcoolisées à tout consommateur présentant des signes évidents de perturbation du comportement ou qui lui en a servies dans de telles quantités que leur absorption rend inévitable l'apparition des symptômes de l'ivresse, alors même que de ces abus ne seraient résultés ni accident ni dommage ;

Considérant que s'il ne résulte pas des pièces du dossier que X auraient présenté des signes évidents d'ivresse lorsque les boissons leur ont été servies dans la nuit du 5 au 6 avril 2002, il est constant, en revanche, que Y a consommé sans quitter le comptoir de l'établissement « cinq à six verres de whisky, puis une dizaine de verres de vodka » avant d'aller dormir à l'arrière du véhicule de Z sans que le choc de l'accident et le tumulte de la fuite aient pu le réveiller ; que les quantités de boissons fortement alcoolisées absorbées par ce consommateur n'ont pas pu ne pas provoquer des troubles manifestes de comportement qu'il a qualifiées lui-même « d'état d'ivresse proche du coma » ; qu'alors qu'il n'a été impliqué ni dans l'accident ni dans la fuite, son ivresse manifeste suffisait à justifier, en application des dispositions précitées de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique et de l'article R. 6 du code des débits de boissons, une sanction de fermeture provisoire de l'établissement dans lequel les boissons lui avaient été servies ;

Considérant, en troisième lieu, que si l'émotion suscitée par les faits a pu inciter le préfet de la Haute-Savoie à prendre la sanction litigieuse, sa décision n'en répond pas moins aux buts de protection de la santé et de la sécurité publiques poursuivis par les textes précités relatifs à la police des débits de boissons ; que, par suite, le détournement de pouvoir n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société DINECITTA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 mai 2002 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a prononcé la fermeture pour une durée d'un mois du débit de boissons qu'elle exploite à Sevrier à l'enseigne « le Casting » ; qu'il y a lieu de rejeter les conclusions susmentionnées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la société DINECITTA doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société DINECITTA est rejetée.

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N° 05LY00123




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