Conseil d'Etat, 7ème et 5ème sous-sections réunies, du 25 juin 2003, 225347, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête enregistrée le 25 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE, dont le siège est 4, rue Robert Schuman, à l'Isle (87170), représenté par son président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ; l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 17 juillet 2000 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel qu'il avait formé contre le jugement du 19 février 1998 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté radiant M. Christian X des cadres de l'office pour abandon de poste ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lenica, Auditeur,

- les observations de Me Odent, avocat de l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Christian X,

- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Christian X, agent d'entretien employé par l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE (ODHAC), n'a pas déféré à la mise en demeure notifiée à son domicile le 31 juillet 1996 et lui enjoignant de reprendre ses fonctions le jour-même à 13 heures 30 ; que par arrêté pris le 1er août 1996, le président de l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE l'a rayé des cadres pour abandon de poste ; qu'en déduisant l'illégalité de cette décision de la brièveté du délai global qui s'est écoulé entre la notification de la mise en demeure et l'arrêté de radiation, sans opérer de distinction entre le délai fixé à M. X pour rejoindre son poste dans la mise en demeure et le délai qui s'est écoulé entre la date fixée pour le retour à son poste et l'arrêté de radiation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ; qu'il suit de là que l'office est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Sur la recevabilité de la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Limoges :

Considérant d'une part qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté prononçant la radiation des cadres de M. X lui a été notifié le 31 juillet 1996, avec l'indication des voies et délais de recours ; que la demande d'aide juridictionnelle qu'il a formée le 30 septembre 1996, soit dans le délai de recours contentieux, a eu pour effet de proroger ce délai à compter de la décision du 16 décembre 1996 lui allouant le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Limoges le 29 janvier 1997 n'était pas tardive ; qu'il suit de là que le moyen tiré de sa tardiveté doit être écarté ;

Considérant d'autre part que contrairement à ce que soutient l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit l'obligation pour un agent ayant fait l'objet d'une mesure de radiation des cadres de former un recours administratif préalable à la présentation d'un recours contentieux ;

Sur la légalité de la décision contestée :

Considérant qu'une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer ; qu'une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il encourt d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a bénéficié du 23 au 26 juillet 1996 inclus d'un congé de maladie ; qu'à l'issue de ce congé il n'a pas repris son travail et a adressé à son service un nouveau certificat prolongeant son congé jusqu'au 4 août 1996 inclus ; que l'office a alors fait procéder le 30 juillet à une contre-visite par son médecin agréé, lequel a conclu le 31 juillet au matin que M. X était apte à reprendre son travail le jour même ; que par lettre remise par porteur à l'intéressé à 12 heures 15, le directeur de l'office l'a mis en demeure de reprendre ses fonctions dès 13 heures 30, heure de l'embauche de l'après-midi ; que l'excessive brièveté de ce délai a eu pour effet d'entacher d'illégalité la mise en demeure et, par voie de conséquence, l'arrêté radiant M. X des cadres de l'office ; que l'office requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé cet arrêté ;


D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 17 juillet 2000 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.

Article 2 : L'appel formé par l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE contre le jugement du 19 février 1998 du tribunal administratif de Limoges est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE DEPARTEMENTAL D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE LA HAUTE-VIENNE et à M. Christian X.


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