Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 25 janvier 2018, 17-11.442, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 25 janvier 2018


Cassation


Mme X..., président


Arrêt n° 77 F-P+B

Pourvoi n° P 17-11.442





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont le siège est [...]                                    , venant aux droits de l'URSSAF de Toulon,

contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la Caisse nationale militaire de sécurité sociale, dont le siège est [...]                                           ,

2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [...]                      

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 13 décembre 2017, où étaient présents : Mme X..., président, Mme Y..., conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mme Parchemal, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de l'URSSAF Provence-Alpes-Côte d'Azur, de la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Provence-Alpes-Côte d'Azur du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale, 80 duodecies du code général des impôts, dans leur rédaction applicable à la date d'exigibilité des cotisations litigieuses, et l'article 51 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 modifié par l'article 5 du décret n° 2008-281 du 21 mars 2008 ;

Attendu, selon le premier de ces textes, que toutes les sommes versées au salarié à l'occasion de la rupture de son contrat de travail sont soumises aux cotisations de sécurité sociale, dans les limites établies par le second ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'à la suite d'un contrôle portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'URSSAF) a notifié à la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (la cotisante) un redressement portant notamment sur la réintégration dans l'assiette des cotisations sociales du montant de la rémunération qui aurait été perçue par M. Z..., agent contractuel de droit public, licencié en décembre 2008, si celui-ci avait exécuté son contrat jusqu'au terme ; que la cotisante a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour dire que le calcul de l'assiette des cotisations et contributions sociales dues par la cotisante doit s'opérer sur la somme de 14 572,14 euros au titre de la réparation du préjudice pour rupture anticipée du contrat à durée déterminée et sur la somme de 31 732 euros au titre des allocations chômage et en exclure la somme de 8 910,37 euros versée au titre de l'indemnité de licenciement, l'arrêt constate que M. Z... a effectivement perçu la somme de 55 214,51 euros qui se décompose comme suit : 31 732 euros au titre des allocations chômage, 8 910,37 euros au titre de l'indemnité de licenciement et 14 572,14 euros au titre de la réparation de son préjudice pour rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée ; qu'il retient que sont exclues de l'assiette des cotisations les sommes versées à un salarié lors de la rupture de son contrat de travail à titre d'indemnité de licenciement, soit en l'espèce la somme de 8 910,37 euros ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité de licenciement versée, en application du troisième des textes susvisés, par une personne publique à l'agent contractuel engagé à terme et licencié avant ce terme n'est pas au nombre de celles limitativement énumérées par les dispositions combinées des deux premiers, de sorte qu'elle entre dans l'assiette des cotisations sociales et contributions d'assurance chômage, la cour d'appel a violé ceux-ci ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la Caisse nationale militaire de sécurité sociale aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale et la condamne à payer à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille dix-huit, et signé par Mme X..., président, et par Mme Szirek, greffier de chambre qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Provence-Alpes-Côte d'Azur

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le calcul de l'assiette des cotisations et contributions sociales dues par la CNMSS doit s'opérer sur la somme de 14.572,14 euros au titre de la réparation de son préjudice pour rupture anticipée d'un CDD et sur la somme de 31.732 euros au titre des allocations chômage et d'AVOIR dit que le redressement à l'encontre de la CNMSS doit être effectué en conséquence ;

AUX MOTIFS QUE la CNMSS est un établissement public à caractère administratif, soumis au règlement général sur la comptabilité publique ; que Christian Z... a été employé dans le cadre de ce régime par la CNMSS en qualité d'agent contractuel à compter du 1er janvier 2004 par contrat à durée déterminée pour une durée de 3 ans aux fonctions de chef du service logistique de Toulon ; qu'à la suite de son licenciement par la CNMSS, Christian Z... a saisi le Tribunal administratif de Toulon pour contester cette mesure ; que par jugement de cette juridiction en date du 17 juin 2010 : -il a été constaté que « la rémunération que Monsieur Z... aurait perçue s'il avait exécuté son contrat jusqu'au terme initialement prévu aurait été de 55214,51 € »,
-la CNMSS a été condamnée à verser à Monsieur Z... la somme de 14.572,141 euros « en réparation de son préjudice » selon les termes exacts du dispositif en son article premier ; que l'URSSAF soutient que les sommes versées au titre du licenciement de Monsieur Z..., soit pour un montant total de 55 214,51 €. doivent être soumises à cotisations en raison de ce que les indemnités versées lors de la rupture anticipée d'un contrat de travail à durée déterminée à l'initiative de l'employeur, constituent une rémunération imposable conformément aux dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; que la CNMSS répond qu'au regard de son statut, les rémunérations « ne peuvent intervenir avant l'exécution du service », conformément aux dispositions de l'article 64 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; que les sommes ainsi versées à Monsieur Z... ne sont pas des rémunérations, mais des dommages et intérêts non soumis à cotisations; qu'il ressort des éléments du dossier que Monsieur Z... a effectivement perçu la somme de 55.214,51 euros ; que toutefois cette somme se décompose ainsi :
- 31.732 € au titre des allocations chômage,
- 8.910,37 lé au titre de l'indemnité de licenciement,
- 14572,14 euros au titre de la réparation de son préjudice pour rupture anticipée d'un CDD ;
que certes sont exclues de l'assiette des cotisations les sommes versées à un salarié lors de la rupture de son contrat de travail à titre d'indemnité de licenciement, soit en l'espèce la somme de 8.910,37 euros ;
que toutefois il doit être rappelé qu'en application de la loi du 2 décembre 1999 portant financement de la sécurité sociale pour 2000, laquelle a complété les articles L 136-2 et L 242-1 du code de la sécurité sociale, et de la loi de finances du 30 décembre 1999 qui a introduit dans le code général des impôts l'article 80 duodecies, les dommages et intérêts versés par l'employeur à l'occasion de la rupture anticipée d'un contrat de travail à durée indéterminée sont assujettis à la CSG et à la CRDS ; que de même, les allocations chômage sont considérées comme des revenus de remplacement ; que tous les revenus de remplacement entrent dans le champ d'application de la CSG et de la CRDS ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, que le calcul de l'assiette des cotisations et contributions sociales dues par la CNMSS doit s'opérer en conséquence :
- sur la somme de 14 572,14 € qui représente le montant des condamnations prononcées par le jugement du Tribunal administratif de Toulon à l'encontre de la CNMSS au profit de Christian Z... en réparation de son préjudice,
- et sur la somme de 31 732 € représentant les allocations chômage ;
qu'il convient en conséquence de considérer qu'en annulant le redressement, le premier juge n'a pas fait une juste appréciation des faits de la cause et que sa décision doit être infirmée, dans les termes du présent dispositif ;

ALORS QUE les sommes accordées en cas de rupture anticipée d'un contrat de travail à durée déterminée ne sont pas au nombre de celles limitativement énumérées par l'article 80 duodecies du code général des impôts auquel renvoie l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en l'espèce, par un jugement du 20 mai 2010, le tribunal administratif de Toulon a décidé que suite à la rupture anticipée de son CDD, M. Z... était en droit de prétendre à l'octroi d'une indemnité représentative de sa rémunération qu'il aurait perçue s'il n'avait pas été évincé de ses fonctions, soit un montant de 55.214,51 euros ; qu'il a ainsi alloué à l'intéressé la somme de 14.572,14 euros en tenant compte des sommes de 31.732 euros et de 8.910,37 euros déjà versées par ailleurs dans le cadre de la rupture anticipée du contrat de travail au titre des allocations chômage et de l'indemnité de licenciement, le total de ces sommes correspondant à l'indemnité représentative de sa rémunération de 55.214,51 euros ; que cette indemnité, prise dans sa globalité, était intégralement imposable en application de la loi fiscale et soumise à cotisations sociales ; qu'en décidant néanmoins d'exclure de l'assiette des cotisations la partie de cette indemnité correspondant au montant de l'indemnité de licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés. ECLI:FR:CCASS:2018:C200077
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