Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 décembre 2013, 12-23.859, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme X... a été engagée en qualité d'agent d'accueil le 15 juillet 2010 par la société MC sécurité ; qu'étant entrée au service de la société CRIT intérim, elle ne s'est plus présentée à son lieu de travail initial à compter du 21 juin 2011 et a remis son badge le 28 juin 2011 ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire de la société MC sécurité, prononcée le 26 juillet 2011, la salariée a été licenciée le 10 août 2011 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;

Sur le moyen unique en ce qu'il porte sur les rappels de salaire :

Attendu que la salariée fait grief au jugement de rejeter ses demandes de rappels de salaire, alors, selon le moyen, que la démission ne se présume pas et ne peut résulter du seul comportement du salarié, si ce comportement ne révèle pas clairement l'intention de démissionner ; que le fait que le salarié ne se rende plus sur son lieu de travail et s'engage dans le cadre d'un second contrat de travail, même si cette situation donne lieu à un cumul d'emploi matériellement impossible, ne suffit pas à caractériser une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au premier contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour décider que la rupture du contrat de travail conclu avec M. Z... (MC sécurité) était imputable à Mme X... et que cette rupture se trouvait acquise à la date du 21 juin 2011, le conseil de prud'hommes a retenu qu'à cette date, la salariée, en se mettant à la disposition de la société CRIT intérim dans le cadre d'une seconde relation de travail, s'était rendue indisponible pour M. Z... du fait d'un cumul de temps de travail excédant les limites légales et en ne se rendant plus sur son lieu de travail ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne caractérisait pas une volonté claire et non équivoque de Mme X... de rompre le contrat de travail conclu avec M. Z..., le conseil de prud'hommes a violé l'article L. 1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la salariée ne s'était plus tenue à la disposition de son employeur, le conseil de prud'hommes a légalement justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique, qui est recevable, en ce qu'il porte sur les demandes liées à la rupture :

Vu l'article L. 1237-1 du code du travail ;

Attendu que, pour débouter la salariée de ses demandes, le jugement retient qu'en se mettant à la disposition de la société CRIT intérim dans le cadre d'une seconde relation de travail et en remettant son badge, l'intéressée s'était rendue indisponible pour son employeur initial du fait d'un cumul de temps de travail excédant les limites légales et en ne se rendant plus sur son lieu de travail ; que la rupture du contrat de travail est imputable à la salariée ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations que la salariée avait manifesté une volonté claire et non équivoque de démissionner, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme X... de ses demandes liées à la rupture, le jugement rendu le 20 juin 2012, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Melun ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Fontainebleau ;

Condamne M. A..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile , rejette la demande de M. A..., ès qualité, et le condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est reproché au jugement attaqué d'avoir dit que la rupture du contrat de travail était à l'initiative de Mme X... en date du 21 juin 2011 et d'avoir débouté celle-ci de l'intégralité de ses demandes ;

AUX MOTIFS QU' en l'espèce, l'employeur M. Z... avait perdu le renouvellement du contrat concernant la garde des locaux de la caisse primaire d'assurance maladie de Rubelles (le contrat prenait fin le 30 juin 2011) ; que Mme X... en date du 21 juin 2011 ne se présente plus sur son lieu de travail et rend son badge le 28 juin 2011 ; qu'il faut savoir aussi que Mme X... pouvait cumuler plusieurs activités salariées (activité réduite pour M. Z...) ; qu'en effet, elle a commencé une activité salariée pour CRIT Intérim le 22 juin 2011 ; que lors de l'audience, elle précisa que les horaires qu'elle avait pour la société MC Sécurité étaient incompatibles avec l'emploi qu'elle avait trouvé en intérim et donc ne pouvait cumuler les deux emplois ; que de plus, au regard de l'attestation délivrée par CRIT Intérim (second employeur), si Mme X... avait cumulé deux emplois, son temps de travail aurait dépassé la durée légale du temps de travail ; que c'est dans cette option que Mme X... ne se présenta plus sur son lieu de travail à partir du 28 juin 2011 (et en rendant son badge le même jour) et de ce fait de se rendre indisponible pour son employeur MC Sécurité ; qu'en l'état, Mme X... avait le droit de cumuler deux emplois, mais devait respecter certaines conditions (ne pas dépasser un temps de travail cumulatif) ; que Mme X... a préféré se mettre à la disposition totale de la société d'intérim (de ce fait, devenue activité principale) et ainsi de ne plus être à la disposition de MC Sécurité (pour M. Z...) ; que le conseil, après avoir entendu les parties et analysé les pièces présentes au dossier, précise que la rupture du contrat de travail est imputable à Mme X... en date du 21 juin 2011, date de sa mise à disposition pour CRIT Intérim (temps de travail supérieur pour CRIT Intérim et cumul du temps de travail au-delà de la disposition légale) et de son indisponibilité pour MC Sécurité (contrat qui était toujours en cours) ; qu'en l'espèce, le conseil a fixé la rupture du contrat de travail à l'initiative de Mme X... au 21 juin 2011 (date de son activité auprès de CRIT Intérim et de ce fait de son indisponibilité professionnelle pour son employeur qui était MC Sécurité jusqu'à la date de son licenciement ; qu'en l'état, le conseil déboute Mme X... de l'intégralité de ses demandes ;

ALORS QUE la démission ne se présume pas et ne peut résulter du seul comportement du salarié, si ce comportement ne révèle pas clairement l'intention de démissionner ; que le fait que le salarié ne se rende plus sur son lieu de travail et s'engage dans le cadre d'un second contrat de travail, même si cette situation donne lieu à un cumul d'emploi matériellement impossible, ne suffit pas à caractériser une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au premier contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour décider que la rupture du contrat de travail conclu avec M. Z... (MC Sécurité) était imputable à Mme X... et que cette rupture se trouvait acquise à la date du 21 juin 2011, le conseil de prud'hommes a retenu qu'à cette date, la salariée, en se mettant à la disposition de la société CRIT Intérim dans le cadre d'une seconde relation de travail, s'était rendue indisponible pour M. Z... du fait d'un cumul de temps de travail excédant les limites légales et en ne se rendant plus sur son lieu de travail ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne caractérisait pas une volonté claire et non équivoque de Mme X... de rompre le contrat de travail conclu avec M. Z..., le conseil de prud'hommes a violé l'article L.1231-1 du code du travail et l'article 1134 du code civil.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO02111
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