Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 décembre 2013, 12-22.344, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 mai 2012), que, Mme X... a été engagée, le 10 octobre 2005, par la société Pro santé Lizy en qualité de directrice d'établissement médicalisé ; qu'elle a été mutée le 1er septembre 2006 auprès de la société Résidence du Val d'Osne comme directrice d'un établissement en cours d'ouverture ; qu'à la suite de son licenciement, le 24 novembre 2007, elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée la somme de 36 000 euros à titre d'heures supplémentaires, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en cas de litige relatif au nombre d'heures travaillées, il appartient au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en se fondant sur un relevé informatique établi par la salariée elle-même et non validé par l'employeur, pour retenir que la demande de rappel d'heures supplémentaires était étayée et faire droit à l'ensemble des demandes de la salariée motifs pris de ce que la société Résidence le Val d'Osne ne produisait aucun élément permettant le décompte des heures de travail effectives de la salariée, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul employeur en violation de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2°/ que pour constituer des heures supplémentaires, les heures de travail effectuées par le salarié au-delà de son temps de travail doivent avoir été commandées ou autorisées par l'employeur, ce qui ne peut se déduire de son silence ; qu'il appartient au salarié d'informer l'employeur de l'accomplissement d'heures supplémentaires ; qu'en déduisant la connaissance et l'acceptation d'heures supplémentaires par l'employeur de la circonstance supposée que les fonctions exercées par la salariée dans des conditions difficiles « avaient nécessité un investissement de Mme X... dépassant manifestement les trente-cinq heures hebdomadaires », la cour d'appel, qui a procédé par voie d'affirmation, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

3°/ que le juge ne peut évaluer arbitrairement et forfaitairement la somme susceptible d'être allouée au salarié au titre des heures supplémentaires ; qu'en condamnant la société Résidence le Val d'Osne au paiement de la somme forfaitaire de 36 000 euros sans préciser le nombre d'heures réellement travaillées ni le détail de son calcul, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'après avoir apprécié l'ensemble des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, qui n'a pas procédé à une évaluation forfaitaire, a, sans être tenue de préciser le détail du calcul appliqué, souverainement évalué l'importance des heures supplémentaires et fixé en conséquence les créances salariales s'y rapportant ;

Attendu, ensuite, qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les autres griefs qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Résidence Le Val d'Osne aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Résidence Le Val d'Osne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Résidence Le Val d'Osne

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Résidence le Val d'Osne à payer à madame X... la somme de 36.000 € pour heures supplémentaires sur la période du 4 décembre 2006 au 25 novembre 2007, outre 3.600 € de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE les bulletins de salaire délivrés à Mme X... indiquent un « salaire forfaitaire » sur les mois de novembre et décembre 2006 puis un salaire de base, sans indication de la mention légale du nombre d'heures accomplies par mois ; que Mme X... produit un relevé informatique quotidien récapitulatif entre le 4 décembre 2006 et le 25 novembre 2007 pour de très nombreuses heures supplémentaires, avec mention en marge des événements marquants, dont notamment pour plus de 70H sur 4 semaines avec un pic de 79H5 sur la semaine du 2 au 8 avril 2007 pendant laquelle a eu lieu l'inauguration, et indiquant des nuits entières de travail ; qu'elle justifie de journées portes ouvertes et de diverses manifestations tenues le dimanche dans l'établissement ; que les courriels envoyés à la direction témoignent d'heures de travail tardives; que Mme X... produit les attestations de salariés et de membres de familles de résidents attestant de travail 10H par jour ainsi que le week-end, en soirée lors des repas et quelque fois tardivement et quelques nuits ; que le principe d'heures supplémentaires est ainsi étayé; que la société ne peut opposer que Mme X... n'a pas fait connaître d'heures supplémentaires la concernant lors de la transmission des horaires des salariés pour l'établissement des bulletins de salaires et que la société ne lui a pas demandé l'exécution d'heures supplémentaires ; qu'en effet la mise en route et l'ouverture de cet établissement de 90 lits à partir de décembre 2006 dans des conditions difficiles de retard dans les travaux et les formalités d'immatriculation de la société souvent évoquées dans les courriels, avec le recrutement massif d'un effectif de 25 personnes dans un secteur en pénurie s'agissant des infirmières, à un niveau de rémunération que l'employeur a dû augmenter en juillet 2007 pour essayer d'y remédier, et la prospection également massive de résidents qui étaient de 45 début novembre 2007, a nécessité un investissement de Mme X... dépassant manifestement les 35 H hebdomadaires, à la connaissance de l'employeur ; que cependant la demande de Mme X... n'est pas entièrement justifiée en l'absence d'événements topiques sur certaines semaines et la retranscription chiffrée faite dans les conclusions comporte des erreurs, notamment pour les heures supplémentaires décomptées sur la semaine du 6 août au 12 août 2007 comptée pour 57H5 alors que Mme X... est en vacances, pour la semaine du 1er au 7 octobre 2007 décomptées pour 55H au lieu de 35.5 H ; que la cour dans ces conditions a les éléments pour fixer à la somme de 36.000 € le montant des heures supplémentaires outre les congés payés afférents ;

1) ALORS QU'en cas de litige relatif au nombre d'heures travaillées, il appartient au salarié de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en se fondant sur un relevé informatique établi par la salariée elle-même et non validé par l'employeur, pour retenir que la demande de rappel d'heures supplémentaires était étayée et faire droit à l'ensemble des demandes de la salariée motifs pris de ce que la Société Résidence le Val d'Osne ne produisait aucun élément permettant le décompte des heures de travail effectives de la salariée, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve sur le seul employeur en violation l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2) ALORS QUE pour constituer des heures supplémentaires, les heures de travail effectuées par le salarié au-delà de son temps de travail doivent avoir été commandées ou autorisées par l'employeur, ce qui ne peut se déduire de son silence ; qu'il appartient au salarié d'informer l'employeur de l'accomplissement d'heures supplémentaires ; qu'en déduisant la connaissance et l'acceptation d'heures supplémentaires par l'employeur de la circonstance supposée que les fonctions exercées par la salariée dans des conditions difficiles « avaient nécessité un investissement de madame X... dépassant manifestement les 35 heures hebdomadaires », la cour d'appel, qui a procédé par voie d'affirmation, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

3) ALORS QUE le juge ne peut évaluer arbitrairement et forfaitairement la somme susceptible d'être allouée au salarié au titre des heures supplémentaires ; qu'en condamnant la société Résidence le Val d'Osne au paiement de la somme forfaitaire de 36.000 € sans préciser le nombre d'heures réellement travaillées ni le détail de son calcul, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-1 du code du travail.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO02090
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