Chargé de veiller, en application de l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, « à la défense et à l'illustration de la langue et de la culture françaises », le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) rappelle les dispositions légales, réglementaires et conventionnelles relatives à l'emploi de la langue française auxquelles sont soumis les éditeurs de services de télévision et de radio.
I. - Principe
La loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française est la traduction concrète du principe constitutionnel selon lequel le français est la langue de la République. Elle impose l'usage obligatoire de la langue française dans les programmes télévisés et radiophoniques ainsi que dans le cadre de la commercialisation et de la promotion, notamment par voie audiovisuelle, des biens et des services.
Introduit par l'article 12 de la loi du 4 août 1994, l'article 20-1 de la loi du 30 septembre 1986 affirme le nécessaire emploi de la langue française sur l'antenne de l'ensemble des services de télévision et de radio, tant dans leurs programmes qu'au sein des écrans publicitaires. Cet article pose le principe selon lequel « l'emploi du français est obligatoire dans l'ensemble des émissions et des messages publicitaires des organismes et services de radio ou de télévision, quel que soit leur mode de diffusion ou de distribution ».
Les cahiers des missions et des charges des sociétés du secteur public et les conventions conclues par le Conseil supérieur de l'audiovisuel avec les opérateurs privés réaffirment le principe posé à l'article 20-1 de la loi, notamment en demandant à ces sociétés de veiller à un usage correct de la langue française dans leurs émissions.
A cet égard, sans qu'il soit dans son intention d'imposer l'usage d'une terminologie officielle, le CSA estime qu'il est souhaitable que le personnel des services de radio et de télévision intervenant à l'antenne préfère, aux termes étrangers, leurs équivalents en français consacrés par l'usage.
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel rappelle par ailleurs que les dispositions de la loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française ne s'opposent pas à l'usage par voie audiovisuelle des langues régionales de France (métropole et outre-mer).
II. - Exceptions
Le principe selon lequel l'usage du français est obligatoire dans les programmes télévisés et radiophoniques est assorti d'exceptions. En bénéficient :
- les oeuvres cinématographiques et audiovisuelles en version originale (premier alinéa de l'article 20-1 de la loi du 30 septembre 1986) ;
- les oeuvres musicales, y compris celles insérées dans des messages publicitaires, dont le texte est en tout ou partie en langue étrangère (deuxième alinéa de l'article 20-1 de la loi) ;
- les programmes, parties de programmes ou publicités incluses dans ces derniers qui sont conçus pour être intégralement diffusés en langue étrangère (troisième alinéa de l'article 20-1 de la loi). Le CSA, sur la base des préconisations de la circulaire du Premier ministre du 19 mars 1996 relative à l'application de la loi du 4 août 1994, retient notamment à ce titre, d'une part, les programmes proposés par des services étrangers reçus en France, d'autre part, ceux diffusés par les opérateurs nationaux à l'intention de communautés étrangères résidant en France, enfin, ceux destinés à une diffusion hors de France ;
- les programmes dont la finalité est l'apprentissage d'une langue et les retransmissions de cérémonies cultuelles (troisième alinéa de l'article 20-1 de la loi).
III. - Usage obligatoire mais non exclusif
Si l'usage du français est obligatoire dans les programmes et les messages publicitaires, l'utilisation de langues étrangères n'est pas bannie, sous réserve qu'il soit recouru à une traduction en français, « aussi lisible, audible ou intelligible que la présentation en langue étrangère » (quatrième alinéa de l'article 20-1 de la loi du 30 septembre 1986).
Applicable à l'ensemble des émissions, cette disposition trouve plus particulièrement lieu de s'appliquer en matière publicitaire pour des raisons tenant particulièrement à la protection du consommateur, qui doit être précisément informé sur les spécificités des biens ou services promus.
Le CSA considère, en accord avec la circulaire du 19 mars 1996, qu'« une similitude des deux présentations et un parallélisme des modes d'expression entre les deux versions ne sont pas exigés. En outre, la traduction peut ne pas être au mot à mot, dès lors qu'elle reste dans l'esprit du texte original ». En conséquence, d'une part, la traduction de mentions en langue étrangère peut indifféremment être verbale ou écrite, d'autre part, il n'est pas nécessaire que la traduction française de mentions écrites en langue étrangère soit disposée à l'écran dans des conditions semblables ou que les caractères utilisés soient de taille ou de couleur identiques.
Néanmoins, ainsi que le précise la circulaire, la mention en langue étrangère ne doit pas, « en raison de sa taille, de son graphisme, de sa couleur, de son volume sonore ou pour toute autre cause, être mieux comprise que celle établie en français ». Aussi importe-t-il que cette dernière se rapproche suffisamment de la présentation en langue étrangère pour pouvoir être regardée comme « aussi lisible, audible ou intelligible ».
IV. - Cas particulier des marques et des titres d'émissions
Il résulte du dernier alinéa de l'article 2 de la loi du 4 août 1994 que, si les marques de fabrique, de commerce ou de service au sens des articles L. 711-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle ne sont pas soumises aux dispositions de la loi relative à l'emploi de la langue française, les mentions et messages qui les accompagnent y sont soumises.
Ainsi, les mentions et messages en langue étrangère, quand bien même ils auraient été déposés avec une marque, doivent faire l'objet d'une traduction en français aussi lisible, audible ou intelligible que la présentation en langue étrangère.
S'agissant des marques elles-mêmes, le conseil rappelle qu'elles peuvent être déposées, enregistrées ou utilisées en France sans traduction. Toutefois, les personnes publiques et les personnes privées chargées d'une mission de service public ne peuvent employer de marques constituées d'un terme étranger, dès lors qu'il existe un terme français équivalent approuvé dans le cadre des dispositions réglementaires relatives à l'enrichissement de la langue française (I de l'article 14 de la loi du 4 août 1994).
Ces dispositions s'appliquent notamment aux titres d'émissions qui ont fait l'objet d'un dépôt à titre de marque.
Ainsi, les sociétés publiques de télévision et de radio, à la fois soumises à la législation sur les sociétés anonymes et investies d'une mission de service public en application de l'article 43-11 de la loi du 30 septembre 1986, ne peuvent attribuer à leurs émissions un titre constitué de termes étrangers. Trois dérogations sont toutefois prévues par la loi : les titres d'émissions dont ces sociétés ont acquis les droits de diffusion et dont la conception leur échappe ; les titres constitués d'un terme étranger dont il n'existe aucun équivalent en français ; les titres qui ont été déposés à titre de marque avant le 7 août 1994.
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel demande aux éditeurs de services de télévision et de radio privés de s'efforcer d'utiliser le français dans le titre de leurs émissions. Dans l'hypothèse où ils feraient le choix d'un titre en langue étrangère, le conseil préconise une traduction verbale ou visuelle de ce titre en vue d'une bonne compréhension par le public.
La présente recommandation sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 18 janvier 2005.
Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel :
Le président,
D. Baudis