Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 13/12/2017, 387969
Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 13/12/2017, 387969
Conseil d'État - 9ème - 10ème chambres réunies
- N° 387969
- ECLI:FR:CECHR:2017:387969.20171213
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
13 décembre 2017
- Rapporteur
- Mme Ophélie Champeaux
- Avocat(s)
- SCP PIWNICA, MOLINIE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société Office Dépôt BS a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 28 décembre 2003 au 31 décembre 2005 et, d'autre part, de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2005. Par un jugement n° 1106762 du 18 octobre 2012, le tribunal a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 12VE04252 du 18 avril 2013, le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté comme tardif l'appel formé par la société Office Dépôt BS contre ce jugement.
Par une décision n° 369463 du 9 avril 2014, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Versailles.
Par un arrêt n° 14VE01166 du 2 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a réformé le jugement du tribunal administratif de Montreuil et déchargé la société requérante des impositions en litige à hauteur des sommes de 9 619 euros au titre de l'exercice clos en 2004 et de 12 344 euros au titre de l'exercice clos en 2005, puis a rejeté le surplus de sa requête d'appel.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 18 mai 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Office Dépôt BS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 3 de cet arrêt rejetant le surplus des conclusions de son appel ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ces conclusions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Office Dépôt Business Solutions ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Office Dépôt BS a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 28 décembre 2003 au 31 décembre 2005, à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié un rappel de taxe sur la valeur ajoutée et une retenue à la source, au titre de la refacturation par la société de droit américain Office Dépôt Inc., qui la contrôle, d'une partie du coût d'une prestation d'audit portant sur ses propres procédures de contrôle interne, aux motifs que cette charge n'étant pas nécessaire à son exploitation, la taxe sur la valeur ajoutée l'ayant grevée n'était pas susceptible d'être déduite et que la charge en question correspondait à un transfert indirect de bénéfices à l'étranger, au sens de l'article 57 du code général des impôts, justifiant l'application d'une retenue à la source. La société Office Dépôt BS se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 décembre 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté le surplus de sa requête d'appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 1er octobre 2012 ayant rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de la retenue à la source en litige.
Sur les motifs de l'arrêt relatifs aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
2. Aux termes de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (...) ".
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué, d'une part, que la prestation d'audit refacturée par la société Office Dépôt Inc. à la société requérante, bien qu'ayant pour objet l'analyse des procédures de contrôle interne comptable de cette dernière, visait à remplir les obligations de la loi américaine dite " Sarbanes-Oxley " pesant sur la société américaine en raison de sa cotation à la bourse de New-York, d'autre part, que l'audit n'avait pas été diligenté par la société Office Dépôt Inc. en vue d'être utilisé par sa filiale établie en France. La cour a pu, sans erreur de droit et par un arrêt suffisamment motivé, déduire de ces constatations que la prestation en question n'était pas nécessaire à l'exploitation de la société Office Dépôt BS et qu'ainsi, la taxe sur la valeur ajoutée qui la grevait n'était pas déductible.
Sur les motifs de l'arrêt relatifs à la retenue à la source :
4. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 57 du code général des impôts : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France (...) ". Ces dispositions instituent, dès lors que l'administration établit l'existence d'un lien de dépendance et d'une pratique entrant dans leurs prévisions, une présomption de transfert indirect de bénéfices qui ne peut utilement être combattue par l'entreprise imposable en France que si celle-ci apporte la preuve que les avantages qu'elle a consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties.
5. D'autre part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (....) ". Aux termes de l'article 111 du même code : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". Enfin, aux termes de l'article 119 bis de ce code, dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : " (...) 2. Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. (...) ".
6. En jugeant qu'il résultait des circonstances mentionnées au point 3 que l'administration établissait l'existence d'une pratique entrant dans les prévisions des dispositions de l'article 57 du code général des impôts citées au point 4 et que le paiement de la dépense correspondante constituait, dès lors que la société Office Dépôt BS ne démontrait pas qu'elle en avait retiré une contrepartie, un transfert indirect de bénéfices, de nature à donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue à l'article 119 bis du même code, la cour n'a entaché son arrêt, qui est suffisamment motivé, ni de dénaturation des faits, ni d'erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société requérante doit être rejeté. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, au titre de ces dispositions, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société Office Dépôt BS est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Office Dépôt BS et au ministre de l'action et des comptes publics.
ECLI:FR:CECHR:2017:387969.20171213
La société Office Dépôt BS a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, d'une part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 28 décembre 2003 au 31 décembre 2005 et, d'autre part, de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2005. Par un jugement n° 1106762 du 18 octobre 2012, le tribunal a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 12VE04252 du 18 avril 2013, le président de la première chambre de la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté comme tardif l'appel formé par la société Office Dépôt BS contre ce jugement.
Par une décision n° 369463 du 9 avril 2014, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Versailles.
Par un arrêt n° 14VE01166 du 2 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a réformé le jugement du tribunal administratif de Montreuil et déchargé la société requérante des impositions en litige à hauteur des sommes de 9 619 euros au titre de l'exercice clos en 2004 et de 12 344 euros au titre de l'exercice clos en 2005, puis a rejeté le surplus de sa requête d'appel.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 18 mai 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Office Dépôt BS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 3 de cet arrêt rejetant le surplus des conclusions de son appel ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ces conclusions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Office Dépôt Business Solutions ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Office Dépôt BS a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 28 décembre 2003 au 31 décembre 2005, à l'issue de laquelle l'administration lui a notifié un rappel de taxe sur la valeur ajoutée et une retenue à la source, au titre de la refacturation par la société de droit américain Office Dépôt Inc., qui la contrôle, d'une partie du coût d'une prestation d'audit portant sur ses propres procédures de contrôle interne, aux motifs que cette charge n'étant pas nécessaire à son exploitation, la taxe sur la valeur ajoutée l'ayant grevée n'était pas susceptible d'être déduite et que la charge en question correspondait à un transfert indirect de bénéfices à l'étranger, au sens de l'article 57 du code général des impôts, justifiant l'application d'une retenue à la source. La société Office Dépôt BS se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 décembre 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté le surplus de sa requête d'appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 1er octobre 2012 ayant rejeté sa demande en décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de la retenue à la source en litige.
Sur les motifs de l'arrêt relatifs aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée :
2. Aux termes de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (...) ".
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué, d'une part, que la prestation d'audit refacturée par la société Office Dépôt Inc. à la société requérante, bien qu'ayant pour objet l'analyse des procédures de contrôle interne comptable de cette dernière, visait à remplir les obligations de la loi américaine dite " Sarbanes-Oxley " pesant sur la société américaine en raison de sa cotation à la bourse de New-York, d'autre part, que l'audit n'avait pas été diligenté par la société Office Dépôt Inc. en vue d'être utilisé par sa filiale établie en France. La cour a pu, sans erreur de droit et par un arrêt suffisamment motivé, déduire de ces constatations que la prestation en question n'était pas nécessaire à l'exploitation de la société Office Dépôt BS et qu'ainsi, la taxe sur la valeur ajoutée qui la grevait n'était pas déductible.
Sur les motifs de l'arrêt relatifs à la retenue à la source :
4. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article 57 du code général des impôts : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France (...) ". Ces dispositions instituent, dès lors que l'administration établit l'existence d'un lien de dépendance et d'une pratique entrant dans leurs prévisions, une présomption de transfert indirect de bénéfices qui ne peut utilement être combattue par l'entreprise imposable en France que si celle-ci apporte la preuve que les avantages qu'elle a consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties.
5. D'autre part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (....) ". Aux termes de l'article 111 du même code : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". Enfin, aux termes de l'article 119 bis de ce code, dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige : " (...) 2. Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. (...) ".
6. En jugeant qu'il résultait des circonstances mentionnées au point 3 que l'administration établissait l'existence d'une pratique entrant dans les prévisions des dispositions de l'article 57 du code général des impôts citées au point 4 et que le paiement de la dépense correspondante constituait, dès lors que la société Office Dépôt BS ne démontrait pas qu'elle en avait retiré une contrepartie, un transfert indirect de bénéfices, de nature à donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue à l'article 119 bis du même code, la cour n'a entaché son arrêt, qui est suffisamment motivé, ni de dénaturation des faits, ni d'erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société requérante doit être rejeté. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, au titre de ces dispositions, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société Office Dépôt BS est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Office Dépôt BS et au ministre de l'action et des comptes publics.