Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 04/12/2017, 402041
Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 04/12/2017, 402041
Conseil d'État - 5ème - 4ème chambres réunies
- N° 402041
- ECLI:FR:CECHR:2017:402041.20171204
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
lundi
04 décembre 2017
- Rapporteur
- M. Florian Roussel
- Avocat(s)
- CARBONNIER
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite rejetant le recours gracieux qu'il a présenté le 18 février 2014 contre la décision du 17 janvier 2014 du préfet du Rhône refusant d'échanger son permis de conduire syrien contre un permis français. Par un jugement n° 1404565 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 2 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 600 euros à Me Carbonnier, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Carbonnier, avocat de M.A....
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., ressortissant syrien, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié par la Cour nationale du droit d'asile le 6 avril 2012 ; qu'un premier titre de séjour provisoire lui a été délivré le 18 avril 2012 et qu'une carte de résident, dont le début de validité a été fixé au 6 avril 2012, lui a été délivrée le 14 août 2012 ; que, le 4 juillet 2013, M. A...a sollicité l'échange de son permis de conduire syrien contre un permis de conduire français ; que, par une décision du 17 janvier 2014, le préfet du Rhône a rejeté sa demande au motif qu'elle avait été présentée après l'expiration du délai d'un an suivant le début de validité de son premier titre de séjour prévu à l'article 4 de l'arrêté du 12 janvier 2012 susvisé ; qu'il a implicitement rejeté le recours gracieux formé par M. A... le 18 février 2014 contre cette décision ; que M. A...se pourvoit en cassation contre le jugement du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite ;
2. Considérant que le fait pour le jugement attaqué, après avoir analysé les moyens contenus dans les mémoires produits par les parties, d'avoir visé " les autres pièces du dossier ", sans préciser qui les avait versées ni en détailler le contenu, n'est pas irrégulier et ne contrevient pas aux stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si le requérant allègue par ailleurs qu'il n'aurait pas eu la possibilité de consulter " certaines de ces pièces ", ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
3. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.A..., le tribunal administratif a répondu, au point 4 de son jugement, au moyen tiré de ce que le délai d'un an prévu à l'article R. 223-3 du code de la route pour l'échange de son permis de conduire, avait commencé à courir à compter de la date de délivrance de sa carte de résident ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-3 du code de la route : " Tout permis de conduire national, en cours de validité, délivré par un Etat ni membre de la Communauté européenne, ni partie à l'accord sur l'Espace économique européen, peut être reconnu en France jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an après l'acquisition de la résidence normale de son titulaire " ; qu'aux termes du II de l'article 4 de l'arrêté du 12 janvier 2012 susvisé : " Pour les ressortissants étrangers non-ressortissants de l'Union européenne, la date d'acquisition de la résidence normale est celle du début de validité du premier titre de séjour " ; qu'aux termes du II de l'article 11 du même arrêté, le délai d'un an dans lequel un étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié peut demander l'échange de son permis de conduire court " à compter de la date de début de validité du titre de séjour provisoire " ;
5. Considérant que, tant qu'un titre de séjour ne lui a pas été délivré, un étranger ne saurait être regardé comme ayant acquis une résidence normale en France, au sens des dispositions de l'article R. 222-3 du code de la route ; qu'il suit de là que les dispositions des articles 4 et 11 de l'arrêté du 12 janvier 2012 ne peuvent légalement avoir pour effet de fixer à une date antérieure à celle de la délivrance du premier titre de séjour ou, pour les réfugiés, du titre de séjour provisoire établi à la suite de la reconnaissance de la qualité de réfugié, le point de départ du délai d'un an imparti pour demander l'échange d'un permis délivré par un Etat n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
6. Considérant que, pour regarder comme tardive la demande d'échange de permis de conduire de M.A..., le tribunal administratif de Lyon, faisant application de l'article 4 de l'arrêté du 12 janvier 2012, a retenu que cette demande avait été formulée plus d'un an après la date de début de validité mentionnée sur la carte de résident de l'intéressé, soit le 6 avril 2012 ; que, toutefois, d'une part, M. A...relevait, eu égard à sa qualité de réfugié, de l'article 11 du même arrêté ; que, d'autre part, la date de début de validité qui figure sur sa carte de résident étant antérieure à la date de délivrance de cette carte, elle ne pouvait, en tout état de cause, constituer le début de sa résidence normale en France ; qu'il en résulte qu'en statuant par les motifs qu'il a retenus, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ;
7. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...a obtenu, le 18 avril 2012, la délivrance d'un récépissé de carte de résident ; que la remise de ce document a fait courir, en application du II de l'article 11 de l'arrêté du 12 janvier 2012, tel qu'interprété au point 3 de la présente décision, le délai d'un an imparti à M. A...pour demander l'échange de son permis de conduire syrien ; que, par suite, ce délai avait expiré à la date du 4 juillet 2013 à laquelle l'intéressé a sollicité l'échange de son permis de conduire ; que ce motif doit être substitué au motif retenu par le jugement attaqué, dont il justifie le dispositif ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ;
9. Considérant que les dispositions de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
ECLI:FR:CECHR:2017:402041.20171204
M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite rejetant le recours gracieux qu'il a présenté le 18 février 2014 contre la décision du 17 janvier 2014 du préfet du Rhône refusant d'échanger son permis de conduire syrien contre un permis français. Par un jugement n° 1404565 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er août et 2 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 600 euros à Me Carbonnier, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Carbonnier, avocat de M.A....
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., ressortissant syrien, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié par la Cour nationale du droit d'asile le 6 avril 2012 ; qu'un premier titre de séjour provisoire lui a été délivré le 18 avril 2012 et qu'une carte de résident, dont le début de validité a été fixé au 6 avril 2012, lui a été délivrée le 14 août 2012 ; que, le 4 juillet 2013, M. A...a sollicité l'échange de son permis de conduire syrien contre un permis de conduire français ; que, par une décision du 17 janvier 2014, le préfet du Rhône a rejeté sa demande au motif qu'elle avait été présentée après l'expiration du délai d'un an suivant le début de validité de son premier titre de séjour prévu à l'article 4 de l'arrêté du 12 janvier 2012 susvisé ; qu'il a implicitement rejeté le recours gracieux formé par M. A... le 18 février 2014 contre cette décision ; que M. A...se pourvoit en cassation contre le jugement du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision implicite ;
2. Considérant que le fait pour le jugement attaqué, après avoir analysé les moyens contenus dans les mémoires produits par les parties, d'avoir visé " les autres pièces du dossier ", sans préciser qui les avait versées ni en détailler le contenu, n'est pas irrégulier et ne contrevient pas aux stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si le requérant allègue par ailleurs qu'il n'aurait pas eu la possibilité de consulter " certaines de ces pièces ", ce moyen n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
3. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.A..., le tribunal administratif a répondu, au point 4 de son jugement, au moyen tiré de ce que le délai d'un an prévu à l'article R. 223-3 du code de la route pour l'échange de son permis de conduire, avait commencé à courir à compter de la date de délivrance de sa carte de résident ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-3 du code de la route : " Tout permis de conduire national, en cours de validité, délivré par un Etat ni membre de la Communauté européenne, ni partie à l'accord sur l'Espace économique européen, peut être reconnu en France jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an après l'acquisition de la résidence normale de son titulaire " ; qu'aux termes du II de l'article 4 de l'arrêté du 12 janvier 2012 susvisé : " Pour les ressortissants étrangers non-ressortissants de l'Union européenne, la date d'acquisition de la résidence normale est celle du début de validité du premier titre de séjour " ; qu'aux termes du II de l'article 11 du même arrêté, le délai d'un an dans lequel un étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié peut demander l'échange de son permis de conduire court " à compter de la date de début de validité du titre de séjour provisoire " ;
5. Considérant que, tant qu'un titre de séjour ne lui a pas été délivré, un étranger ne saurait être regardé comme ayant acquis une résidence normale en France, au sens des dispositions de l'article R. 222-3 du code de la route ; qu'il suit de là que les dispositions des articles 4 et 11 de l'arrêté du 12 janvier 2012 ne peuvent légalement avoir pour effet de fixer à une date antérieure à celle de la délivrance du premier titre de séjour ou, pour les réfugiés, du titre de séjour provisoire établi à la suite de la reconnaissance de la qualité de réfugié, le point de départ du délai d'un an imparti pour demander l'échange d'un permis délivré par un Etat n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
6. Considérant que, pour regarder comme tardive la demande d'échange de permis de conduire de M.A..., le tribunal administratif de Lyon, faisant application de l'article 4 de l'arrêté du 12 janvier 2012, a retenu que cette demande avait été formulée plus d'un an après la date de début de validité mentionnée sur la carte de résident de l'intéressé, soit le 6 avril 2012 ; que, toutefois, d'une part, M. A...relevait, eu égard à sa qualité de réfugié, de l'article 11 du même arrêté ; que, d'autre part, la date de début de validité qui figure sur sa carte de résident étant antérieure à la date de délivrance de cette carte, elle ne pouvait, en tout état de cause, constituer le début de sa résidence normale en France ; qu'il en résulte qu'en statuant par les motifs qu'il a retenus, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ;
7. Considérant, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...a obtenu, le 18 avril 2012, la délivrance d'un récépissé de carte de résident ; que la remise de ce document a fait courir, en application du II de l'article 11 de l'arrêté du 12 janvier 2012, tel qu'interprété au point 3 de la présente décision, le délai d'un an imparti à M. A...pour demander l'échange de son permis de conduire syrien ; que, par suite, ce délai avait expiré à la date du 4 juillet 2013 à laquelle l'intéressé a sollicité l'échange de son permis de conduire ; que ce motif doit être substitué au motif retenu par le jugement attaqué, dont il justifie le dispositif ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ;
9. Considérant que les dispositions de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.