Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 21/10/2011, 325619
Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 21/10/2011, 325619
Conseil d'État - 9ème et 10ème sous-sections réunies
- N° 325619
- ECLI:FR:CESSR:2011:325619.20111021
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
21 octobre 2011
- Rapporteur
- Mme Cécile Isidoro
- Avocat(s)
- SCP BARTHELEMY, MATUCHANSKY, VEXLIARD
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 février et 26 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS, dont le siège est avenue d'Auvergne à Brioude (43000), représentée par son président-directeur général ; la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt n°06LY00353 du 23 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, sur le recours du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique tendant à l'annulation du jugement du 4 octobre 2005 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a déchargé la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % et de contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle restait assujettie au titre de ses exercices clos les 31 mai 1996, 1997, 1998 et 1999, ainsi que des pénalités correspondantes, a rétabli ces impositions et pénalités ;
2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Séverine Larere, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS,
- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'ont été mises à la charge de la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle de 10 % et de contribution temporaire à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en mai 1996, 1997, 1998 et 1999 en conséquence des redressements apportés aux résultats de sa filiale, la SA Snop, à la suite de la vérification de comptabilité de celle-ci ; que la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, sur le recours du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a remis à sa charge les impositions dont le tribunal administratif de Clermont-Ferrand avait prononcé la décharge par un jugement du 4 octobre 2005 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'aux termes de l'article 223 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : "Une société (...) peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe (...). / Les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales (...)" ; que selon l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : "A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57 le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements. (...) / Pour une société membre d'un groupe mentionné à l'article 223 A du code général des impôts, l'information prévue au premier alinéa porte, en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, l'imposition forfaitaire annuelle, le précompte et les pénalités correspondantes, sur les montants dont elle serait redevable en l'absence d'appartenance à un groupe (...)" ; que selon l'article L. 57 du même livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...)." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'alors même que la société mère d'un groupe fiscal intégré s'est constituée seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats des différentes sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et que c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène la procédure de vérification de comptabilité et de redressement, dans les conditions prévues aux articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales ; que les redressements ainsi apportés aux résultats déclarés par les sociétés membres du groupe constituent cependant les éléments d'une procédure unique conduisant d'abord à la correction du résultat d'ensemble déclaré par la société mère du groupe, puis à la mise en recouvrement des rappels d'impôt établis à son nom ; que l'information qui doit être donnée à la société mère avant cette mise en recouvrement peut être réduite à une référence aux procédures de redressement qui ont été menées avec les sociétés membres du groupe et à un tableau chiffré qui en récapitule les conséquences sur le résultat d'ensemble, sans qu'il soit nécessaire de reprendre l'exposé de la nature, des motifs et des conséquences de chacun des chefs de redressement concernés ;
Considérant qu'après avoir constaté que l'administration fiscale avait informé, par une lettre en date du 27 novembre 2000, le président du conseil d'administration de la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS de ce que la société intégrée du groupe fiscal dénommée SA Snop avait fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices 1996 à 1999 et porté à sa connaissance, sous la forme d'un tableau chiffré, les seules modifications apportées aux résultats déclarés par cette société, la cour a commis une erreur de droit en jugeant que cette information était suffisante alors que cette lettre ne récapitule pas les conséquences des redressements notifiés à la société Snop Dunois sur le résultat d'ensemble du groupe ; que la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS est, par suite, fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'en n'indiquant pas, dans la lettre du 27 novembre 2000, les conséquences de la vérification de comptabilité de la société Snop Dunois sur le résultat d'ensemble du groupe, l'administration fiscale a méconnu le droit de la société mère fiscalement intégrée à être informée des conséquences, pour le groupe, des redressements dont a fait l'objet sa filiale ; que la procédure d'imposition étant irrégulière, il y a lieu d'accorder à la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle de 10 % à cet impôt et de contribution temporaire auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mai 1996, 1997, 1998 et 1999 ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros à verser à la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt n°06LY00353 de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 23 décembre 2008 est annulé.
Article 2 : La SA FINANCIERE SNOP DUNOIS est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle de 10 % et de contribution temporaire à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 31 mai 1996, 1997, 1998 et 1999.
Article 3 : L'Etat versera à la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
ECLI:FR:CESSR:2011:325619.20111021
1°) d'annuler l'arrêt n°06LY00353 du 23 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, sur le recours du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique tendant à l'annulation du jugement du 4 octobre 2005 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a déchargé la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % et de contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle restait assujettie au titre de ses exercices clos les 31 mai 1996, 1997, 1998 et 1999, ainsi que des pénalités correspondantes, a rétabli ces impositions et pénalités ;
2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Séverine Larere, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS,
- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'ont été mises à la charge de la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle de 10 % et de contribution temporaire à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en mai 1996, 1997, 1998 et 1999 en conséquence des redressements apportés aux résultats de sa filiale, la SA Snop, à la suite de la vérification de comptabilité de celle-ci ; que la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 23 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, sur le recours du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a remis à sa charge les impositions dont le tribunal administratif de Clermont-Ferrand avait prononcé la décharge par un jugement du 4 octobre 2005 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu'aux termes de l'article 223 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : "Une société (...) peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe (...). / Les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales (...)" ; que selon l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : "A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L. 57 le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements. (...) / Pour une société membre d'un groupe mentionné à l'article 223 A du code général des impôts, l'information prévue au premier alinéa porte, en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, l'imposition forfaitaire annuelle, le précompte et les pénalités correspondantes, sur les montants dont elle serait redevable en l'absence d'appartenance à un groupe (...)" ; que selon l'article L. 57 du même livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...)." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'alors même que la société mère d'un groupe fiscal intégré s'est constituée seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats des différentes sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et que c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène la procédure de vérification de comptabilité et de redressement, dans les conditions prévues aux articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales ; que les redressements ainsi apportés aux résultats déclarés par les sociétés membres du groupe constituent cependant les éléments d'une procédure unique conduisant d'abord à la correction du résultat d'ensemble déclaré par la société mère du groupe, puis à la mise en recouvrement des rappels d'impôt établis à son nom ; que l'information qui doit être donnée à la société mère avant cette mise en recouvrement peut être réduite à une référence aux procédures de redressement qui ont été menées avec les sociétés membres du groupe et à un tableau chiffré qui en récapitule les conséquences sur le résultat d'ensemble, sans qu'il soit nécessaire de reprendre l'exposé de la nature, des motifs et des conséquences de chacun des chefs de redressement concernés ;
Considérant qu'après avoir constaté que l'administration fiscale avait informé, par une lettre en date du 27 novembre 2000, le président du conseil d'administration de la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS de ce que la société intégrée du groupe fiscal dénommée SA Snop avait fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices 1996 à 1999 et porté à sa connaissance, sous la forme d'un tableau chiffré, les seules modifications apportées aux résultats déclarés par cette société, la cour a commis une erreur de droit en jugeant que cette information était suffisante alors que cette lettre ne récapitule pas les conséquences des redressements notifiés à la société Snop Dunois sur le résultat d'ensemble du groupe ; que la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS est, par suite, fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'en n'indiquant pas, dans la lettre du 27 novembre 2000, les conséquences de la vérification de comptabilité de la société Snop Dunois sur le résultat d'ensemble du groupe, l'administration fiscale a méconnu le droit de la société mère fiscalement intégrée à être informée des conséquences, pour le groupe, des redressements dont a fait l'objet sa filiale ; que la procédure d'imposition étant irrégulière, il y a lieu d'accorder à la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle de 10 % à cet impôt et de contribution temporaire auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mai 1996, 1997, 1998 et 1999 ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros à verser à la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt n°06LY00353 de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 23 décembre 2008 est annulé.
Article 2 : La SA FINANCIERE SNOP DUNOIS est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution additionnelle de 10 % et de contribution temporaire à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 31 mai 1996, 1997, 1998 et 1999.
Article 3 : L'Etat versera à la SA FINANCIERE SNOP DUNOIS la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE FINANCIERE SNOP DUNOIS et à la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.