Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 16/11/2009, 304632, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 16/11/2009, 304632, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 9ème et 10ème sous-sections réunies
- N° 304632
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
lundi
16 novembre 2009
- Président
- M. Martin
- Rapporteur
- M. Benoit Bohnert
- Avocat(s)
- SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 10 avril et 10 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 6 février 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement en date du 4 novembre 2003 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 60 980 euros en raison du préjudice dont il demandait réparation ;
2°) réglant l'affaire au fond, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 980 euros majorée des intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A s'est vu notifier, au titre des années 1984 et 1985, des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu, à concurrence respectivement d'une somme de 33 120 euros et d'une somme de 10 017 euros, en raison de la remise en cause par l'administration de l'imputation sur son revenu imposable de déficits fonciers consécutifs à des opérations immobilières réalisées dans le cadre de la loi n° 62-903 du 31 juillet 1962, dite Loi Malraux ; que l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à la décharge des impositions litigieuses, qui a été rejetée par un jugement en date du 9 juin 1993 confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 21 février 1995, lequel est devenu définitif après que le Conseil d'Etat, par une décision du 26 janvier 1996, eut refusé d'admettre le pourvoi en cassation formé par le requérant à l'encontre de cet arrêt ; que, par courrier du 28 décembre 1999, M. A a saisi le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'une demande de dommages et intérêts d'un montant de 60 980 euros en se prévalant du préjudice qui lui aurait été causé par le refus de l'administration fiscale de lui accorder le bénéfice de la réponse ministérielle du 16 avril 1996 à M. Hugot, sénateur, aux termes de laquelle les contribuables ayant engagé un contentieux relatif à la déductibilité des travaux réalisés dans un immeuble à usage locatif relevant de la Loi Malraux, se verraient proposer, compte tenu des aménagements apportés par l'article 40 de la loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994 portant loi de finances rectificative pour 1994 au régime d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global prévu par le 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, un règlement transactionnel comportant la remise gracieuse d'une partie des rappels notifiés et de tous les intérêts de retard légalement dus ; que le directeur régional des impôts d'Aquitaine a rejeté cette demande le 10 avril 2000 ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 février 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 novembre 2003 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 60 980 euros en raison du préjudice dont il demandait réparation ;
Considérant, en premier lieu, que la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la demande indemnitaire formée par M. A le 28 décembre 1999 a eu pour effet de lier le contentieux qui relève, eu égard à l'objet de la demande, de la pleine juridiction ; qu'au regard de l'objet de ce contentieux, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la lettre du 10 avril 2000 est inopérant ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, contrairement à ce que soutient M. A, la cour a analysé les conclusions dont elle était saisie comme fondées à la fois sur un revirement de jurisprudence du Conseil d'Etat qui lui donnerait raison sur le fond et sur le préjudice anormal et spécial qu'il aurait subi du fait de la rupture du principe d'égalité devant les charges publiques qui résulterait du refus de l'administration de lui appliquer le régime transactionnel prévu par la réponse ministérielle à M. Hugot ; qu'il suit de là que le requérant, qui mentionnait dans son mémoire introductif d'instance devant la cour administrative d'appel de Bordeaux que sa demande d'indemnité n'était pas fondée sur une faute commise par l'administration fiscale, mais sur la violation des principes d'égalité devant l'impôt et devant les charges publiques, n'est pas fondé à soutenir que l'analyse faite par la cour des conclusions de sa requête serait entachée d'une dénaturation des faits de l'espèce ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'appui de sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 60 980 euros, le requérant invoquait dans ses écritures de première instance et d'appel un préjudice lié, d'une part, au paiement des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1984 et 1985 et, d'autre part, au refus de l'administration fiscale de lui accorder, en application de la réponse ministérielle du 16 avril 1996 à M. Hugot, sénateur, un dégrèvement au moins partiel de ces impositions, alors qu'elle aurait accordé un tel dégrèvement à d'autres contribuables placés dans la même situation ; qu'eu égard à la circonstance relevée par la cour dans les motifs de son arrêt que, par cette réponse ministérielle, l'administration s'est bornée à mettre en place, compte tenu des assouplissements apportés par l'article 40 de la loi du 29 décembre 1994 portant loi de finances rectificative pour 1994 aux règles d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global prévu par le 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, un régime transactionnel visant exclusivement les contribuables concernés par un litige en cours, situation dans laquelle M. A n'entrait pas, les juges du fond ont pu, dans les circonstances de l'espèce, déduire de ces éléments de fait, qu'ils n'ont pas dénaturés, que le requérant ne pouvait être regardé comme invoquant un préjudice distinct de celui relatif au paiement des rappels d'impôt sur le revenu mis à sa charge ; que, par suite, et dès lors qu'un contribuable dont la demande en décharge d'une contribution a été rejetée par le juge de l'impôt n'est pas recevable à introduire une demande en réparation qui n'invoque pas de préjudice autre que celui résultant du paiement de l'imposition qui était en litige, la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu juger, sans commettre d'erreur de droit, que les conclusions indemnitaires de M. A étaient irrecevables ;
Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de ce que l'application discriminatoire de la loi fiscale dont M. A estime avoir fait l'objet serait contraire aux stipulations des articles 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du premier protocole additionnel à cette convention, qui se rattachait à la contestation par le requérant, sur le fondement des principes d'égalité devant l'impôt et devant les charges publiques, des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1984 et 1985, était, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, invoqué à l'appui de conclusions irrecevables ; qu'il suit de là que la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu s'abstenir d'y répondre sans entacher son arrêt d'irrégularité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
1°) d'annuler l'arrêt du 6 février 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement en date du 4 novembre 2003 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 60 980 euros en raison du préjudice dont il demandait réparation ;
2°) réglant l'affaire au fond, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 60 980 euros majorée des intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A s'est vu notifier, au titre des années 1984 et 1985, des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu, à concurrence respectivement d'une somme de 33 120 euros et d'une somme de 10 017 euros, en raison de la remise en cause par l'administration de l'imputation sur son revenu imposable de déficits fonciers consécutifs à des opérations immobilières réalisées dans le cadre de la loi n° 62-903 du 31 juillet 1962, dite Loi Malraux ; que l'intéressé a saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à la décharge des impositions litigieuses, qui a été rejetée par un jugement en date du 9 juin 1993 confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 21 février 1995, lequel est devenu définitif après que le Conseil d'Etat, par une décision du 26 janvier 1996, eut refusé d'admettre le pourvoi en cassation formé par le requérant à l'encontre de cet arrêt ; que, par courrier du 28 décembre 1999, M. A a saisi le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'une demande de dommages et intérêts d'un montant de 60 980 euros en se prévalant du préjudice qui lui aurait été causé par le refus de l'administration fiscale de lui accorder le bénéfice de la réponse ministérielle du 16 avril 1996 à M. Hugot, sénateur, aux termes de laquelle les contribuables ayant engagé un contentieux relatif à la déductibilité des travaux réalisés dans un immeuble à usage locatif relevant de la Loi Malraux, se verraient proposer, compte tenu des aménagements apportés par l'article 40 de la loi n° 94-1163 du 29 décembre 1994 portant loi de finances rectificative pour 1994 au régime d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global prévu par le 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, un règlement transactionnel comportant la remise gracieuse d'une partie des rappels notifiés et de tous les intérêts de retard légalement dus ; que le directeur régional des impôts d'Aquitaine a rejeté cette demande le 10 avril 2000 ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 février 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 novembre 2003 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 60 980 euros en raison du préjudice dont il demandait réparation ;
Considérant, en premier lieu, que la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de deux mois par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la demande indemnitaire formée par M. A le 28 décembre 1999 a eu pour effet de lier le contentieux qui relève, eu égard à l'objet de la demande, de la pleine juridiction ; qu'au regard de l'objet de ce contentieux, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la lettre du 10 avril 2000 est inopérant ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, contrairement à ce que soutient M. A, la cour a analysé les conclusions dont elle était saisie comme fondées à la fois sur un revirement de jurisprudence du Conseil d'Etat qui lui donnerait raison sur le fond et sur le préjudice anormal et spécial qu'il aurait subi du fait de la rupture du principe d'égalité devant les charges publiques qui résulterait du refus de l'administration de lui appliquer le régime transactionnel prévu par la réponse ministérielle à M. Hugot ; qu'il suit de là que le requérant, qui mentionnait dans son mémoire introductif d'instance devant la cour administrative d'appel de Bordeaux que sa demande d'indemnité n'était pas fondée sur une faute commise par l'administration fiscale, mais sur la violation des principes d'égalité devant l'impôt et devant les charges publiques, n'est pas fondé à soutenir que l'analyse faite par la cour des conclusions de sa requête serait entachée d'une dénaturation des faits de l'espèce ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'appui de sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 60 980 euros, le requérant invoquait dans ses écritures de première instance et d'appel un préjudice lié, d'une part, au paiement des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1984 et 1985 et, d'autre part, au refus de l'administration fiscale de lui accorder, en application de la réponse ministérielle du 16 avril 1996 à M. Hugot, sénateur, un dégrèvement au moins partiel de ces impositions, alors qu'elle aurait accordé un tel dégrèvement à d'autres contribuables placés dans la même situation ; qu'eu égard à la circonstance relevée par la cour dans les motifs de son arrêt que, par cette réponse ministérielle, l'administration s'est bornée à mettre en place, compte tenu des assouplissements apportés par l'article 40 de la loi du 29 décembre 1994 portant loi de finances rectificative pour 1994 aux règles d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global prévu par le 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, un régime transactionnel visant exclusivement les contribuables concernés par un litige en cours, situation dans laquelle M. A n'entrait pas, les juges du fond ont pu, dans les circonstances de l'espèce, déduire de ces éléments de fait, qu'ils n'ont pas dénaturés, que le requérant ne pouvait être regardé comme invoquant un préjudice distinct de celui relatif au paiement des rappels d'impôt sur le revenu mis à sa charge ; que, par suite, et dès lors qu'un contribuable dont la demande en décharge d'une contribution a été rejetée par le juge de l'impôt n'est pas recevable à introduire une demande en réparation qui n'invoque pas de préjudice autre que celui résultant du paiement de l'imposition qui était en litige, la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu juger, sans commettre d'erreur de droit, que les conclusions indemnitaires de M. A étaient irrecevables ;
Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de ce que l'application discriminatoire de la loi fiscale dont M. A estime avoir fait l'objet serait contraire aux stipulations des articles 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 1er du premier protocole additionnel à cette convention, qui se rattachait à la contestation par le requérant, sur le fondement des principes d'égalité devant l'impôt et devant les charges publiques, des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1984 et 1985, était, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, invoqué à l'appui de conclusions irrecevables ; qu'il suit de là que la cour administrative d'appel de Bordeaux a pu s'abstenir d'y répondre sans entacher son arrêt d'irrégularité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.