Conseil d'Etat, 9 / 8 SSR, du 29 juillet 1998, 146333, mentionné aux tables du recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars 1993 et 9 mai 1994 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SNC GEFIROUTE, dont le siège est ... Armée à Paris (75016) ; la SNC GEFIROUTE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 19 janvier 1993 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 décembre 1990, rejetant sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités y afférentes, qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er décembre 1980 au 31 décembre 1984 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,

- les observations de Me Guinard, avocat de la SNC GEFIROUTE,

- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SNC GEFIROUTE, qui a pour activité de donner en location de longue durée, selon la formule du crédit-bail, des véhicules automobiles de tourisme, s'est vu assigner, au titre de la période du 1er décembre 1980 au 31 décembre 1984, un complément de taxe sur la valeur ajoutée assis sur le montant des indemnités qui lui ont été versées, au cours de cette période, à la suite de vols ou de sinistres ayant entraîné la perte de véhicules loués, par les compagnies d'assurance auprès desquelles ses clients s'étaient contractuellement prémunis, en sa faveur, contre ces risques ; que la cour administrative d'appel a, par l'arrêt attaqué, admis le bien-fondé de cette imposition, au motif que la perception de ces indemnités avait compensé "des préjudices commerciaux courants et correspondant à des aléas normaux inhérents à la profession exercée par la société", et devait, par suite, être regardée comme celle d'"éléments du prix payé par les locataires en contrepartie des prestations de services" qui leur étaient fournies ;

Considérant que les indemnités versées à la SNC GEFIROUTE en exécution de polices d'assurance que ses clients étaient contractuellement tenus de souscrire, et en conséquence de sinistres encourus du fait même de l'utilisation par ceux-ci des véhicules loués, étaient représentatives de la valeur vénale de ces véhicules avant leur perte, et avaient, non pour effet de rémunérer la société d'un élément de la prestation consistant à les donner en location, ni de compenser le préjudice, distinctement indemnisé, ayant résulté pour elle de l'interruption prématurée de cette location, mais de la dédommager de l'inexécution, par ses locataires, de leur obligation de restituer le bien loué en fin de location ; qu'elles ont été, ainsi, à tort qualifiées par la cour administrative d'appel de sommes reçues en contrepartie de prestations de services effectuées à titre onéreux et devant, à ce titre, être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, en application de l'article 256 du code général des impôts ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, la SNC GEFIROUTE est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 11, deuxième alinéa, de la loi du 31 décembre 1987, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la SNC GEFIROUTE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 13 décembre 1990, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de la période du 1er décembre 1980 au 31 décembre 1984, ainsi que des pénalités y afférentes ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 19 janvier 1993 et le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 décembre 1990 sont annulés.
Article 2 : La SNC GEFIROUTE est déchargée du complément de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités qui lui ont été assignés, par avis de mise en recouvrement du 2 juin 1986, au titre de la période du 1er décembre 1980 au 31 décembre 1984.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SNC GEFIROUTE et au ministre de l'économie des finances et de l'industrie.
Retourner en haut de la page