Conseil d'Etat, 2 / 6 SSR, du 31 juillet 1996, 163790, publié au recueil Lebon
Conseil d'Etat, 2 / 6 SSR, du 31 juillet 1996, 163790, publié au recueil Lebon
Conseil d'Etat - 2 / 6 SSR
statuant
au contentieux
- N° 163790
- Publié au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
31 juillet 1996
- Président
- M. Labetoulle
- Rapporteur
- Mme Chemla
- Avocat(s)
- SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, Avocat
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu l'ordonnance du 14 décembre 1994 par laquelle le président de la cour administrative de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à cette cour par la société France Affichage Vaucluse ; Vu la demande, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 9 décembre 1994, présentée par la société France Affichage Vaucluse, dont le siège est ... et tendant à : 1°) l'annulation du jugement du 5 octobre 1994 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande formée, d'une part, contre un arrêté du 23 septembre 1992 par lequel le maire de Montpellier l'a mise en demeure d'enlever des affiches posées sur des "panneaux libres" et de remettre les lieux en l'état sous peine d'astreinte, d'autre part, contre un arrêté du 5 décembre 1991 par lequel le maire de Montpellier a réglementé l'affichage sur lesdits panneaux ; 2°) l'annulation des deux arrêtés attaqués ; 3°) la condamnation de la ville de Montpellier à lui verser la somme de 20 000 F en remboursement de ses frais irrépétibles ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des communes ; Vu la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 ; Vu le décret n° 82-220 du 25 février 1982 ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ; Après avoir entendu en audience publique : - le rapport de Mme Chemla, Maître des Requêtes, - les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la ville de Montpellier, - les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions relatives à l'arrêté du 5 décembre 1991 : Considérant qu'aux termes de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal ne peut être saisi que par la voie de recours formés contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 5 décembre 1991 du maire de Montpellier déterminant les emplacements des panneaux réservés à l'affichage d'opinion et à la publicité des organismes à but non lucratif a été affiché à cette date à la mairie ; que cette publication était de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; que la demande de la société requérante dirigée contre cet arrêté n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montpellier que le 17 décembre 1992 ; qu'elle était, par suite, tardive et donc irrecevable ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en date du 5 octobre 1994, en tant qu'il a rejeté cette demande ;
Sur les conclusions relatives à l'arrêté du 23 septembre 1992 : Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens : Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 12 de la loi du 29 décembre 1979 : "... le maire détermine par arrêté et fait aménager sur le domaine public ou en surplomb de celui-ci ou sur le domaine privé communal un ou plusieurs emplacements destinés à l'affichage d'opinion ainsi qu'à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif. Aucune redevance ou taxe n'est perçue à l'occasion de cet affichage ou de cette publicité" ; qu'aux termes du deuxième alinéa du même article : "En vue d'assurer la liberté d'opinion et de répondre aux besoins des associations, les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat en fonction du nombre d'habitants et de la superficie de la commune. Ce décret fixe une surface minimale que chaque catégorie de communes doit réserver à l'affichage défini à l'alinéa précédent" ; que le décret susvisé du 25 février 1982, pris en application de ces dispositions, a fixé la surface minimale à réserver par catégorie de communes à cet affichage et précisé certaines conditions d'application des dispositions précitées de la loi du 29 décembre 1979 ; que s'il appartenait au maire de Montpellier de déterminer, ainsi qu'il l'a fait par l'arrêté susmentionné du 5 décembre 1991, des emplacements d'une surface suffisante réservés à l'affichage d'opinion et à la publicité des activités des associations et s'il lui était loisible de définir, en tant que de besoin, des modalités d'utilisation des panneaux prévus à cet effet, il ne pouvait légalement, en introduisant un régime d'autorisation, porter atteinte au droit de libre affichage sur ces panneaux résultant des dispositions sus rappelées de la loi du 29 décembre 1979 ; qu'il ne pouvait pas davantage introduire, entre les bénéficiaires de ce droit, des différences de traitement, non prévues par ces dispositions ; que cependant l'article 3 de l'arrêté du 5 décembre 1991 dispose : "1°) les panneaux implantés par la ville demeurent sa propriété et sont réservés à l'affichage des manifestations organisées à Montpellier, par des montpelliérains, associations montpelliéraines à but non lucratif ou organismes culturels montpelliérains ... 2°) tout autre affichage sur les panneaux propriété de la ville, sera soumis à son autorisation préalable" ; qu'en édictant de telles dispositions qui méconnaissent le droit de libre affichage résultant des dispositions de l'article 12 de la loi du 29 décembre 1979 et l'égalité de traitement entre les bénéficiaires de ce droit, le maire de Montpellier a excédé ses pouvoirs ; que, par suite, l'arrêté attaqué du 23 septembre 1992, lequel, au motif que la société France Affichage Vaucluse a apposé sur les panneaux de la ville, sans autorisation de celle-ci, des affiches portant sur des manifestations extérieures à Montpellier, organisées par des personnes n'y étant pas domiciliées, a mis en demeure sous astreinte cette société d'enlever lesdites affiches dans un délai de 24 heures est lui-même entaché d'excès de pouvoir ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société France Affichage Vaucluse est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande contre l'arrêté du 23 septembre 1992 du maire de Montpellier ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la ville de Montpellier à verser à la société France Affichage Vaucluse la somme de 20 000 F que celle-ci réclame au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ; Considérant que la société requérante n'étant pas la partie perdante, les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'elle soit condamnée à verser à la ville de Montpellier la somme que cette dernière demande en application de ce texte ;
Article 1er : Le jugement en date du 5 octobre 1994 du tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il rejette la demande de la société France Affichage Vaucluse dirigée contre l'arrêté du 23 septembre 1992 du maire de Montpellier, ensemble ledit arrêté, sont annulés.
Article 2 : La ville de Montpellier versera la somme de 20 000 F à la société France Affichage Vaucluse au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la ville de Montpellier tendant à ce que la société France Affichage Vaucluse soit condamnée à lui verser une somme de 20 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société France Affichage Vaucluse, à la ville de Montpellier et au ministre de l'intérieur.
Sur les conclusions relatives à l'arrêté du 5 décembre 1991 : Considérant qu'aux termes de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal ne peut être saisi que par la voie de recours formés contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 5 décembre 1991 du maire de Montpellier déterminant les emplacements des panneaux réservés à l'affichage d'opinion et à la publicité des organismes à but non lucratif a été affiché à cette date à la mairie ; que cette publication était de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; que la demande de la société requérante dirigée contre cet arrêté n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montpellier que le 17 décembre 1992 ; qu'elle était, par suite, tardive et donc irrecevable ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en date du 5 octobre 1994, en tant qu'il a rejeté cette demande ;
Sur les conclusions relatives à l'arrêté du 23 septembre 1992 : Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens : Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 12 de la loi du 29 décembre 1979 : "... le maire détermine par arrêté et fait aménager sur le domaine public ou en surplomb de celui-ci ou sur le domaine privé communal un ou plusieurs emplacements destinés à l'affichage d'opinion ainsi qu'à la publicité relative aux activités des associations sans but lucratif. Aucune redevance ou taxe n'est perçue à l'occasion de cet affichage ou de cette publicité" ; qu'aux termes du deuxième alinéa du même article : "En vue d'assurer la liberté d'opinion et de répondre aux besoins des associations, les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat en fonction du nombre d'habitants et de la superficie de la commune. Ce décret fixe une surface minimale que chaque catégorie de communes doit réserver à l'affichage défini à l'alinéa précédent" ; que le décret susvisé du 25 février 1982, pris en application de ces dispositions, a fixé la surface minimale à réserver par catégorie de communes à cet affichage et précisé certaines conditions d'application des dispositions précitées de la loi du 29 décembre 1979 ; que s'il appartenait au maire de Montpellier de déterminer, ainsi qu'il l'a fait par l'arrêté susmentionné du 5 décembre 1991, des emplacements d'une surface suffisante réservés à l'affichage d'opinion et à la publicité des activités des associations et s'il lui était loisible de définir, en tant que de besoin, des modalités d'utilisation des panneaux prévus à cet effet, il ne pouvait légalement, en introduisant un régime d'autorisation, porter atteinte au droit de libre affichage sur ces panneaux résultant des dispositions sus rappelées de la loi du 29 décembre 1979 ; qu'il ne pouvait pas davantage introduire, entre les bénéficiaires de ce droit, des différences de traitement, non prévues par ces dispositions ; que cependant l'article 3 de l'arrêté du 5 décembre 1991 dispose : "1°) les panneaux implantés par la ville demeurent sa propriété et sont réservés à l'affichage des manifestations organisées à Montpellier, par des montpelliérains, associations montpelliéraines à but non lucratif ou organismes culturels montpelliérains ... 2°) tout autre affichage sur les panneaux propriété de la ville, sera soumis à son autorisation préalable" ; qu'en édictant de telles dispositions qui méconnaissent le droit de libre affichage résultant des dispositions de l'article 12 de la loi du 29 décembre 1979 et l'égalité de traitement entre les bénéficiaires de ce droit, le maire de Montpellier a excédé ses pouvoirs ; que, par suite, l'arrêté attaqué du 23 septembre 1992, lequel, au motif que la société France Affichage Vaucluse a apposé sur les panneaux de la ville, sans autorisation de celle-ci, des affiches portant sur des manifestations extérieures à Montpellier, organisées par des personnes n'y étant pas domiciliées, a mis en demeure sous astreinte cette société d'enlever lesdites affiches dans un délai de 24 heures est lui-même entaché d'excès de pouvoir ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société France Affichage Vaucluse est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande contre l'arrêté du 23 septembre 1992 du maire de Montpellier ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la ville de Montpellier à verser à la société France Affichage Vaucluse la somme de 20 000 F que celle-ci réclame au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ; Considérant que la société requérante n'étant pas la partie perdante, les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'elle soit condamnée à verser à la ville de Montpellier la somme que cette dernière demande en application de ce texte ;
Article 1er : Le jugement en date du 5 octobre 1994 du tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il rejette la demande de la société France Affichage Vaucluse dirigée contre l'arrêté du 23 septembre 1992 du maire de Montpellier, ensemble ledit arrêté, sont annulés.
Article 2 : La ville de Montpellier versera la somme de 20 000 F à la société France Affichage Vaucluse au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la ville de Montpellier tendant à ce que la société France Affichage Vaucluse soit condamnée à lui verser une somme de 20 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société France Affichage Vaucluse, à la ville de Montpellier et au ministre de l'intérieur.