Cour administrative d'appel de Nancy, 1e chambre, du 29 mars 2001, 97NC01910, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

(Première Chambre)

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 19 août 1997, complétée par mémoire ampliatif enregistré les 14 et 15 octobre 1999, présentée pour l'association "Le Centre culturel turc" dont le siège social se trouve ..., par Me X..., avocate ;

L'association demande à la Cour :

1 / d'annuler le jugement du 19 juin 1997 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Metz en date du 27 septembre - en fait décembre - 1995 portant interdiction d'utiliser les bâtiments qu'elle occupe en vertu d'un bail en date du 1er octobre 1991 ;

2 / d'annuler la décision du maire de Metz en date du 27 septembre 1995 ;

3 / de condamner la ville de Metz à verser la somme de 10 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que l'arrêt paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2001 :

- le rapport de M. JOB, Premier Conseiller,

- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en première instance par la commune de Metz tirée de la tardiveté de la requête et de la qualité à agir du représentant du Centre culturel turc :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent . A cet effet doivent être motivées les décisions qui : / ... constituent une mesure de police ( ...)" ; que l'article 3 de ladite loi dispose que : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour interdire l'utilisation des bâtiments cadastrés sur la commune de Metz section SA, parcelles 19-A-B-C, 47, 56 et 71 et ordonner l'inaccessibilité desdits locaux par son arrêté en date du 27 décembre 1995, le maire de Metz s'est fondé, d'une part, dans les visas de son arrêté, sur les dispositions des articles L. 181-47 du code des communes, R.123-52 du code de la construction et de l'habitation et L.1 et suivants du code de la santé publique, d'autre part, sur l'absence par les copropriétaires de l'immeuble en cause de réalisation des travaux de mise aux normes qui leur avaient été imposés par les courriers en date des 25 juillet et 14 octobre 1994, 2 janvier et 6 mars 1995 rappelés, sur l'avis défavorable de la commission de sécurité et d'accessibilité dans sa séance du 29 novembre 1995 relatif au fonctionnement de l'établissement en raison du risque d'incendie lié à l'inter-communicabilité des différents locaux, sur le rapport de l'expert concluant à la présence d'un danger réel à l'utilisation desdits locaux en raison de leur état, enfin sur les risques que présenteraient, pour la santé publique, des déversements dans les sous-sols de l'immeuble et la présence de denrées destinées à la vente ; que, dans la mesure où le maire de la commune, autorité compétente, s'est approprié les avis recueillis qu'il résume et qui s'incorporent à sa décision au regard des dispositions légales qui la soutendent, l'association requérante, locataire de locaux dans l'immeuble en cause, n'est pas fondée à soutenir que la décision qu'elle attaque n'est pas motivée ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-2 du code de la construction et de l'habitation : "Des mesures complémentaires de sauvegarde et de sécurité et des moyens d'évacuation et de défense contre l'incendie peuvent être imposés par décrets aux propriétaires, aux constructeurs et aux exploitants de bâtiment et établissements ouverts au public" ; qu'aux termes de l'article R.123-52 dudit code : "Sans préjudice de l'exercice par les autorités de police de leurs pouvoirs généraux, la fermeture des établissements exploités en infraction aux dispositions du présent chapitre peut être ordonnée par le maire ... La décision est prise par arrêté après avis de la commission de sécurité compétente" ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 123-2 du même code : " ... constituent des établissements recevant du public, tous bâtiments, locaux et enceintes dans lesquels des personnes sont admises, soit librement, soit moyennant une rétribution ou une participation quelconque, ou dans lesquels sont tenues des réunions ouvertes à tout venant ou sur invitations payantes ou non. Sont considérées comme faisant partie du public, toutes personnes admises dans l'établissement à quelque titre que ce soit en plus du personnel" ;

Considérant, d'une part, qu'en raison de la présence dans l'immeuble, au premier étage de celui-ci, de la salle de réunion de l'association requérante, l'immeuble en cause entre dans la définition d'un établissement recevant du public ; que, d'autre part, l'article R.123-52 du code de la construction et de l'habitation ne comporte aucune disposition limitant à l'urgence, une mesure de fermeture d'établissement ; que, par suite, dans la mesure où les copropriétaires ont été mis en demeure à plusieurs reprises de mettre leur immeuble aux normes et qu'ils s'y sont refusés, le maire de Metz, au regard des risques graves d'incendie et du danger réel encourus par les utilisateurs de l'immeuble en mauvais état, révélés par les différents avis recueillis dont celui de la commission de sécurité n'a pas méconnu ses obligations en ordonnant l'inaccessibilité de cet immeuble ;

Considérant, enfin, que les circonstances que l'immeuble ne s'est pas écroulé, n'a pas brûlé et est toujours occupé par l'association requérante sont sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse dont les motifs étaient de nature à la justifier légalement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'association Centre culturel turc n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :

Considérant que la commune de Metz n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative qui se sont substituées à celles de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce qu'elle soit condamnée à verser à l'association Centre culturel turc une somme au titre desdites dispositions.
Article 1er : La requête de l'association Centre culturel turc est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Centre culturel turc et à la commune de Metz.
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