Décret n° 2022-619 du 22 avril 2022 relatif au contrôle du financement étranger des cultes et portant diverses dispositions relatives aux libéralités et à la transparence des associations et fonds de dotation

Dernière mise à jour des données de ce texte : 25 avril 2022

NOR : INTD2207179D

JORF n°0096 du 24 avril 2022

Version en vigueur au 25 avril 2022


Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l'intérieur,
Vu le règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, notamment son chapitre III et son article 83 ;
Vu le code civil, notamment ses articles 910 et 910-1 ;
Vu le code civil local, notamment ses articles 79-VIII et 79-IX et le quatrième alinéa de l'article 79-X ;
Vu le code de commerce, notamment son article L. 823-3 ;
Vu le code des relations entre le public et l'administration, notamment ses articles L. 112-9 et L. 231-6 ;
Vu la loi du 2 janvier 1817 sur les donations et legs aux établissements ecclésiastiques ;
Vu la loi du 24 mai 1825 relative à l'autorisation et à l'existence légale des congrégations et communautés religieuses de femmes ;
Vu la loi du 1er juillet 1901 modifiée relative au contrat d'association ;
Vu la loi du 9 décembre 1905 modifiée concernant la séparation des Eglises et de l'Etat, notamment ses articles 17-1 et 19-3 ;
Vu la loi du 2 janvier 1907 modifiée concernant l'exercice public des cultes, notamment ses articles 4 à 4-2 dans leur rédaction résultant de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République ;
Vu la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 modifiée sur le développement du mécénat, et notamment son article 4-2 ;
Vu la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 modifiée de modernisation de l'économie, et notamment son article 140 ;
Vu la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, notamment ses articles 21, 22, 73, 74, 77, 78 et 79 ;
Vu l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 modifiée relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives ;
Vu le décret du 31 janvier 1852 sur les congrégations et communautés religieuses de femmes ;
Vu le décret du 16 août 1901 modifié pris pour l'exécution de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ;
Vu le décret du 16 mars 1906 modifié portant règlement d'administration publique pour l'exécution de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Eglises et de l'Etat en ce qui concerne l'attribution des biens, les édifices des cultes, les associations cultuelles, la police des cultes ;
Vu le décret n° 2007-644 du 30 avril 2007 fixant le montant des dons reçus à partir duquel les associations et les fondations sont soumises à certaines obligations ;
Vu le décret n° 2007-807 du 11 mai 2007 modifié relatif aux associations, fondations, congrégations et établissements publics du culte et portant application de l'article 910 du code civil, notamment ses articles 6-1 et 6-2 ;
Vu le décret n° 2009-158 du 11 février 2009 relatif aux fonds de dotation ;
Vu le décret n° 2016-685 du 27 mai 2016 autorisant les téléservices tendant à la mise en œuvre du droit des usagers de saisir l'administration par voie électronique ;
Vu le décret n° 2021-1789 du 23 décembre 2021 pris pour l'application de la loi du 2 janvier 1907 concernant l'exercice public des cultes ;
Vu le décret n° 2021-1812 du 24 décembre 2021 relatif à la tenue par certains organismes d'un état séparé des avantages et ressources provenant de l'étranger ;
Vu l'avis du Haut Conseil à la vie associative en date du 17 mars 2022 ;
Le Conseil d'Etat (section de l'intérieur) entendu,
Décrète :


    • I. - Est soumis à la déclaration prévue à l'article 17-1 de la loi du 9 décembre 1905 susvisée et à l'article 79-IX du code civil local toute cession ou tout acte de disposition portant sur un local servant habituellement à l'exercice public d'un culte ainsi que toute cession d'actions ou de parts conférant à leurs possesseurs le droit à la jouissance de celui-ci, en faveur, directement ou indirectement, d'un aliénataire étranger tel que défini par ces dispositions.
      II. - Est réputé être l'aliénataire l'Etat étranger, la personne morale étrangère ou la personne physique non résidente fiscale en France quand l'aliénation est consentie au profit :
      1° D'une association ou d'une société sous le contrôle exclusif, sous le contrôle conjoint ou sous l'influence notable, au sens des II et III de l'article L. 233-16 et de l'article L. 233-17-2 du code de commerce, de l'une ou plusieurs des personnes mentionnées à l'alinéa précédent ;
      2° D'une entité structurée ou organisée de manière telle que son activité est en fait exercée pour le compte de l'une ou plusieurs des personnes mentionnées au premier alinéa du présent II ou pour celui d'une association ou d'une société mentionnée au 1° du même II ;
      3° D'une personne physique de manière telle que l'aliénation est en fait réalisée pour le compte de l'une ou plusieurs des personnes mentionnées au premier alinéa du présent II ou pour celui d'une association ou d'une société mentionnée au 1° ou d'une entité mentionnée au 2° du même II.
      III. - La déclaration de l'aliénateur est adressée au préfet par courrier recommandé avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant d'attester de la date de sa réception et accompagnée des documents suivants, avec leur traduction en français s'il y a lieu :
      1° Le titre de propriété ;
      2° Les informations suivantes relatives à l'aliénateur et, s'il diffère, au propriétaire ou au titulaire de l'un des droits objet de l'acte de disposition mentionné au I du présent article :
      a) S'il s'agit d'une personne physique : nom, prénom(s), date et lieu de naissance, nationalité(s), domicile, adresse électronique et coordonnées téléphoniques ;
      b) S'il s'agit d'une personne morale : dénomination ou raison sociale, forme juridique, adresse de son siège social, coordonnées téléphoniques, adresse électronique ainsi que nom, prénom(s), adresse électronique et coordonnées téléphoniques du déclarant ;
      3° Les informations suivantes relatives à l'aliénataire :
      a) S'il s'agit d'un Etat : son nom ;
      b) S'il s'agit d'une personne physique ou d'une personne morale : les informations prévues au 2° du présent III ;
      4° Le cas échéant, les informations prévues au 2° du présent III relatives aux personnes mentionnées aux 1° à 3° du II du présent article ;
      5° Tout acte ou contrat constitutif de l'aliénation envisagée.


    • Lorsque le dossier est complet, le préfet adresse à l'aliénateur un accusé de réception mentionnant la date de réception du dossier et le délai de quatre mois dont il dispose pour décider s'il entend s'opposer à l'aliénation en application de l'article 17-1 ou de l'article 79-IX susmentionnés.
      L'absence de décision d'opposition expresse à l'issue de ce délai vaut absence d'opposition. A la demande de l'aliénateur, le préfet délivre une attestation de cette absence d'opposition.
      Lorsque le dossier est incomplet, l'accusé de réception fixe un délai maximum d'un mois pour la production des pièces manquantes qu'il énumère et précise que le délai mentionné au premier alinéa court à compter de la date de réception de la dernière des pièces manquantes.


    • Lorsque le préfet envisage de faire usage du droit d'opposition à l'aliénation en application de l'article 17-1 ou de l'article 79-IX susmentionnés, il en informe l'aliénateur par lettre recommandée avec avis de réception, ou par tout autre moyen permettant d'attester de la date de sa réception, et l'invite à présenter ses observations dans un délai d'un mois. Cette information interrompt le délai de quatre mois mentionné au premier alinéa de l'article 2 du présent décret.
      L'absence de notification d'une décision expresse d'opposition dans le délai d'un mois suivant la réception des observations vaut absence d'opposition. En l'absence d'observations, ce délai court à compter de l'expiration du délai d'un mois prévu au précédent alinéa.
      Lorsque le préfet décide de s'opposer à l'aliénation, il notifie sa décision motivée à l'aliénateur par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant d'attester de la date de sa réception.


      • En application du I de l'article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905 susvisée et du I de l'article 79-VIII du code civil local, les avantages et ressources, en numéraire ou en nature, provenant directement ou indirectement de l'étranger, consentis à des associations cultuelles ou des associations inscrites de droit local à objet cultuel sont soumis à déclaration lorsque leur montant ou leur valorisation dépasse 15 300 euros, ou lorsque le montant ou la valorisation du total de ceux-ci dépasse ce montant sur un même exercice comptable.


      • A compter de la date à laquelle le total des avantages et ressources mentionnés à l'article 4 perçus sur un exercice comptable dépasse le seuil fixé à l'article 4, chaque avantage ou ressource perçu antérieurement au cours de cet exercice et jusqu'à cette date incluse, est déclaré dans les trois mois suivant la date du dépassement de ce seuil.
        Tout avantage ou toute ressource perçu ultérieurement au cours du même exercice est déclaré dans les trois mois suivant la date de sa réception effective.
        Lorsque les avantages ou ressources constituent une créance à exécution successive, ils font l'objet, dans les trois mois suivant la première échéance, d'une déclaration unique correspondant au montant, actualisé à la date de la réception de la première échéance, de la totalité de l'avantage ou de la ressource lorsque ce montant dépasse le seuil fixé à l'article 4 ou par application des deux alinéas précédents.
        Les déclarations prévues au présent article peuvent également être valablement opérées à l'initiative du déclarant dans l'année qui précède la réception effective de l'avantage ou de la ressource.


      • I. - Lorsque le montant ou la valorisation unitaire de l'avantage ou de la ressource considéré devant être déclaré en application de l'article 5 est inférieur ou égal à 15 300 euros, la déclaration indique le nom, l'adresse du siège social, l'adresse électronique et les coordonnées téléphoniques de l'association bénéficiaire ainsi que les nom, prénom(s), adresse électronique et coordonnées téléphoniques du déclarant, et précise pour chacun des avantages et ressources, les informations mentionnées aux articles 3 et 4 du décret du 24 décembre 2021 susvisé.
        Lorsque la déclaration est faite en application du dernier alinéa de l'article 5 du présent décret, l'information prévue par le 1° de l'article 4 du décret du 24 décembre 2021 porte sur la date prévisionnelle de l'encaissement ou, pour un avantage ou une ressource non pécuniaire, la date prévisionnelle à laquelle il est effectivement acquis ou la période prévisionnelle durant laquelle il est envisagé de l'accorder.
        II. - Lorsque le montant ou la valorisation de l'avantage ou de la ressource considéré devant être déclaré en application de l'article 5 dépasse 15 300 euros, la déclaration comprend en outre :
        1° Les informations suivantes relatives à la personne consentant l'avantage ou la ressource soumis à déclaration :
        a) S'il s'agit de personnes physiques, les nom, prénom(s), date et lieu de naissance, nationalité(s), domicile, adresse électronique et coordonnées téléphoniques ;
        b) S'il s'agit de personnes morales, la dénomination ou raison sociale, la forme juridique, l'adresse du siège social, l'adresse électronique et les coordonnées téléphoniques ;
        Le cas échéant, la déclaration comporte également ces mêmes informations relatives aux personnes, organismes, entités mentionnés aux 2° à 5° du II des articles 19-3 ou 79-VIII susmentionnés ;
        2° Une note explicitant les modalités d'octroi de l'avantage ou de la ressource, assortie le cas échéant d'une copie des actes ou contrats qui y sont relatifs et, en cas de virement bancaire, le numéro de compte bancaire international, dénommé « numéro IBAN » ou à défaut le numéro permettant l'identification du compte ayant réalisé le virement.


      • Les libéralités soumises à l'obligation de déclaration prévue à l'article 910-1 du code civil sont celles qui sont consenties aux associations cultuelles dans les conditions prévues aux 1° à 5° du II de l'article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905 susvisée ainsi que celles qui sont consenties aux associations inscrites de droit local à objet cultuel et aux établissements publics du culte dans les conditions prévues aux 1° à 5° du II de l'article 79-VIII du code civil local.


      • I. - Tout legs mentionné à l'article 8 consenti par une personne physique non résidente fiscale en France à une association cultuelle, à une association inscrite de droit local à objet cultuel ou à un établissement public du culte est déclaré au ministre de l'intérieur par le notaire chargé du règlement de la succession. La déclaration est faite par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant d'attester de la date de sa réception. Elle comprend les informations prévues au I et aux 1° à 2° du II de l'article 7 du présent décret.
        II. - Les libéralités entre vifs mentionnées à l'article 8 sont déclarées au ministre de l'intérieur par l'association ou l'établissement bénéficiaire, dans les mêmes conditions.


      • A réception d'une déclaration, le ministre peut notifier au déclarant qu'elle est incomplète au regard des exigences des sections 1 et 2 ci-dessus, et l'inviter à compléter cette déclaration dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois. A défaut de production d'une déclaration complète dans le délai imparti, l'avantage, la ressource ou la libéralité est réputé non déclaré, entrainant les conséquences mentionnées au premier alinéa du IV de l'article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905 susvisée et au premier alinéa du IV de l'article 79-VIII du code civil local.
        L'absence de notification d'une décision expresse dans le délai de deux mois à compter de la déclaration vaut absence d'opposition. A la demande du déclarant ou du notaire, le ministre de l'intérieur délivre une attestation d'absence d'opposition à l'avantage, à la ressource ou à la libéralité.
        Dans le délai de deux mois, le ministre de l'intérieur peut demander au déclarant et, le cas échéant, au notaire, d'autres pièces et informations complémentaires à la déclaration et nécessaires à l'instruction. Dans ce cas il l'informe par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout moyen permettant d'attester de la date de sa réception :
        a) Que les pièces et les informations demandées doivent lui être transmises dans le délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois ;
        b) Que cette demande interrompt le délai initial d'instruction et qu'il disposera d'un délai de deux mois à compter de la réception de la dernière pièce ou information demandée pour décider s'il y a lieu de s'opposer à la perception de l'avantage ou la ressource ;
        c) Qu'à défaut de production de l'ensemble des pièces et des informations demandées dans le délai mentionné au a, l'avantage, la ressource ou la libéralité sera réputé non déclaré, entrainant les conséquences mentionnées au premier alinéa du IV de l'article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905 susvisée et au premier alinéa du IV de l'article 79-VIII du code civil local ;
        Dans le délai de deux mois suivant la déclaration, si la complexité de l'instruction le justifie, le ministre de l'intérieur peut décider de proroger ce délai dans la limite de quatre mois supplémentaires, qui courent à l'échéance du délai initial de deux mois. Il en informe l'association ou l'établissement, et le cas échéant le notaire, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout moyen permettant d'attester de la date de sa réception. Dans ce délai supplémentaire, il peut lui demander toutes autres pièces et informations, complémentaires à celles déjà reçues et nécessaires à l'instruction, dans le délai qu'il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois. Cette demande suspend le délai restant pour instruire la déclaration et précise les conséquences du défaut de production des pièces et informations telles que prévues au c du présent article.
        Après une déclaration incomplète, ou en cas de défaut de fourniture des pièces et informations complémentaires demandées, sur la base des informations dont il dispose, le ministre peut, dans le délai qui lui est imparti, s'opposer à l'avantage, à la ressource ou à la libéralité.
        L'absence de notification d'une décision expresse à l'issue du délai mentionné au b du présent article ou du délai supplémentaire mentionné au septième alinéa vaut absence d'opposition.


      • Lorsque le ministre de l'intérieur envisage de faire usage du droit d'opposition, il en informe le déclarant et, le cas échéant, le notaire, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant d'attester de la date de sa réception. Il invite l'association ou l'établissement bénéficiaire à présenter ses observations dans un délai d'un mois. Cette information interrompt, selon le cas, le délai de deux mois prévu au deuxième alinéa de l'article 10 ou au b du même article, ou le délai supplémentaire décidé par le ministre de l'intérieur prévu au septième alinéa du même article.
        L'absence de notification d'une décision expresse d'opposition dans le délai d'un mois suivant la réception des observations vaut absence d'opposition. En l'absence d'observations, ce délai court à compter de l'expiration du délai d'un mois prévu au précédent alinéa.
        Lorsque le ministre de l'intérieur décide de s'opposer à la demande, il notifie sa décision à l'association ou à l'établissement et, le cas échéant, au notaire.


      • Trois mois au plus après la notification de la décision d'opposition, le déclarant fournit au ministre de l'intérieur tout élément permettant d'attester que l'avantage ou la ressource perçu a effectivement été restitué.


      • Dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, les associations inscrites à objet cultuel sont soumises à l'obligation de certification des comptes prévue au quatrième alinéa de l'article 79-X du code civil local lorsque le montant total des avantages et ressources mentionnés au I de l'article 79-VIII du même code dépasse le seuil de 50 000 euros.


      • Les fiducies et personnes morales de droit français mentionnées aux 2° à 5° du II de l'article 19-3 de la loi du 9 décembre 1905 susvisée ou aux 2° à 5° du II de l'article 79-VIII du code civil local sont tenues de faire certifier leurs comptes dès lors qu'elles bénéficient d'avantages et de ressources mentionnés au I de ces mêmes articles dont le total annuel des montants et des valorisations dépasse 15 300 euros.


    • Pour l'application du présent décret à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, les références au préfet du département sont remplacées par la référence au représentant de l'Etat dans la collectivité.


    • Le ministre de l'intérieur est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait le 22 avril 2022.


Jean Castex
Par le Premier ministre :


Le ministre de l'intérieur,
Gérald Darmanin

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