Décret n° 2018-1198 du 20 décembre 2018 relatif à l'expérimentation de l'élargissement des formes d'insertion par l'activité économique au travail indépendant

Dernière mise à jour des données de ce texte : 01 janvier 2025

NOR : MTRD1830980D

JORF n°0296 du 22 décembre 2018

Version en vigueur au 25 janvier 2025


Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre du travail,
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 modifiée relative à l'économie sociale et solidaire, notamment ses article 1er et 2 ;
Vu la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, notamment son article 83 ;
Vu l'avis du Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles en date du 20 novembre 2018 ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :

  • I.-L'expérimentation mentionnée à l'article 83 de la loi susvisée du 5 septembre 2018 est ouverte à l'ensemble du territoire pour une durée de huit ans à compter de la publication du présent décret. Un cahier des charges défini par arrêté du ministre chargé de l'emploi précise les obligations auxquelles sont soumises les entreprises d'insertion par le travail indépendant dans le cadre de l'expérimentation.

    II.-L'entreprise d'insertion par le travail indépendant accompagne des travailleurs indépendants rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières dans le développement et la pérennisation de leur activité, afin d'assurer leur autonomie professionnelle et financière dans le cadre d'une activité indépendante ou, à défaut, dans le cadre du salariat. L'éligibilité des travailleurs indépendants à cet accompagnement est soumise aux conditions prévues à l'article R. 5132-1-7 du code du travail.

    Cet accompagnement comprend :

    1° Un soutien dans la résolution des difficultés sociales rencontrées ;

    2° Une mise en relation avec des clients ;

    3° L'appui à l'acquisition de compétences nécessaires au développement d'une activité économique indépendante dont le travailleur puisse tirer des moyens d'existence.

    Le contenu et les modalités de cet accompagnement sont précisés dans le cahier des charges mentionné au I.

    III.-Pour être candidate au conventionnement d'entreprise d'insertion par le travail indépendant telle que définie au II de l'article 83 de la loi susvisée du 5 septembre 2018, l'entreprise doit relever de l'article 1er de la loi susvisée du 31 juillet 2014 et remplir les conditions cumulatives suivantes :

    1° L'entreprise poursuit comme objectif principal la recherche d'une utilité sociale, au sens de l'article 2 de la même loi ;

    2° Une part significative des travailleurs indépendants avec lesquels l'entreprise d'insertion contracte est en insertion ;

    3° La charge induite par son objectif d'utilité sociale a un impact significatif sur le compte de résultat ou la rentabilité financière de l'entreprise ;

    4° La politique de rémunération de l'entreprise satisfait aux conditions définies au 3° du I de l'article L. 3332-17-1 du code du travail ;

    5° Les modalités de négociation des titres de capital de l'entreprise sont celles définies au 4° du I du même article ;

    6° Les conditions mentionnées aux 1° et 4° figurent dans les statuts de l'entreprise.

    Ces conditions sont précisées dans le cahier des charges mentionné au I.

    IV.-Après consultation de la commission spécialisée du comité départemental pour l'emploi mentionnée à l'article R. 5311-26 du code du travail et en tenant compte de l'offre existante pour assurer un développement équilibré des actions d'insertion, le préfet peut conclure les conventions prévues au III de l'article 83 de la loi susvisée du 5 septembre 2018 avec des entreprises candidates au conventionnement d'entreprise d'insertion par le travail indépendant.

  • La convention conclue avec une entreprise d'insertion par le travail indépendant est conforme au cahier des charges mentionné au I de l'article 1er. Elle comporte notamment :

    1° Le projet d'insertion par le travail indépendant de la structure, qui précise :

    a) Les caractéristiques générales de la structure ;

    b) Les principales caractéristiques des travailleurs indépendants en insertion ;

    c) Les modalités d'accompagnement des personnes en insertion visant à faciliter leur inclusion socio-professionnelle et à les assister dans les démarches spécifiques liées au travail indépendant et à la création d'entreprise ;

    d) Le cas échéant, la mention de l'existence d'une autre convention au titre d'une structure de l'insertion par l'activité économique ;

    e) L'adéquation du projet économique et social de la structure avec l'environnement local et l'offre d'insertion déjà existante ;

    2° La présentation des moyens en personnel ainsi que des moyens matériels et financiers mobilisés à des fins d'accompagnement professionnel, entrepreneurial et social, notamment de mise en relation des travailleurs accompagnés avec des clients, ainsi que ceux mobilisés pour accomplir les tâches administratives et les obligations comptables résultant de cette activité de l'entreprise d'insertion par le travail indépendant ;

    3° (Supprimé) ;

    4° Les objectifs poursuivis en matière d'inclusion socio-professionnelle des travailleurs indépendants en insertion avec lesquels la structure contracte et les indicateurs destinés à rendre compte des actions et des résultats obtenus ;

    5° Les modalités de coopération avec, l'opérateur France Travail et les autres acteurs du réseau pour l'emploi, en particulier les acteurs de la création d'entreprise ainsi que les organismes chargés de l'insertion sociale et professionnelle, visant à optimiser l'accompagnement des travailleurs indépendants en insertion et favoriser leur insertion sociale et professionnelle ;

    6° La nature et le montant des autres aides publiques directes ou privées dont la structure a bénéficié les années antérieures ;

    7° Les modalités de suivi, de contrôle et d'évaluation de la convention.

  • La convention peut être conclue pour une durée maximale de trois ans. Elle peut être renouvelée, selon la procédure prévue au IV de l'article 1er, sans toutefois excéder le terme de l'expérimentation.

    Les stipulations financières des conventions pluriannuelles font l'objet d'avenants annuels.

  • L'entreprise d'insertion par le travail indépendant transmet chaque année au préfet ses comptes annuels et un bilan d'activité pour les travailleurs indépendants bénéficiant de l'aide prévue à l'article 6. Ce document précise les réalisations en termes de suivi, d'accompagnement social et professionnel, d'encadrement des personnes présentant des difficultés sociales et professionnelles particulières conformément au cahier des charges prévu au I de l'article 1er.


  • Le préfet contrôle l'exécution de la convention conclue au titre de la mise en œuvre de l'expérimentation. L'entreprise d'insertion par le travail indépendant lui fournit, à sa demande, tout élément permettant de vérifier la bonne exécution de la convention, la réalité des actions d'insertion mises en œuvre ainsi que leurs résultats.
    En cas de non-respect des dispositions de la convention conclue au titre de la mise en œuvre de l'expérimentation, le préfet l'informe, par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette information, de son intention de résilier la convention. L'entreprise dispose d'un délai de deux mois pour faire connaître ses observations. Le préfet peut alors demander le reversement des sommes indûment perçues.

  • I.-L'aide financière soutient l'accompagnement de travailleurs indépendants défini au II de l'article 1er.

    Elle s'applique aux travailleurs indépendants immatriculés depuis trois ans au maximum et qui n'emploient pas de salarié.

    Sa durée maximale est de deux ans à compter de la signature du contrat liant le travailleur indépendant avec l'entreprise d'insertion par le travail indépendant.

    L'aide financière est versée mensuellement à l'entreprise d'insertion par le travail indépendant, à compter de la signature du contrat la liant au travailleur indépendant, sous réserve du respect par celle-ci du cahier des charges mentionné au I de l'article 1er.

    II.-Au cours des neuf premiers mois d'accompagnement, l'aide est égale à un montant forfaitaire par travailleur indépendant.

    Au cours des quinze mois suivants, le montant de l'aide dépend, pour chaque mois, du chiffre d'affaires réalisé, pour le même mois, par le travailleur indépendant à partir des mises en relation effectuées par l'entreprise d'insertion par le travail indépendant.

    Si ce chiffre d'affaires est au moins égal au montant mensuel du revenu de solidarité active mentionné à l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles, l'aide versée au titre du mois est égale au montant forfaitaire mentionné au premier alinéa du présent II.

    Dans le cas inverse, l'aide versée au titre du mois est :

    -égale à la moitié du montant forfaitaire, si ce mois est un des trois premiers des quinze mois ;

    -nulle, si ce mois est un des douze mois suivants.

    III.-Par dérogation aux dispositions des trois derniers alinéas du II, lorsque la moyenne mensuelle du chiffre d'affaires réalisé sur un trimestre civil par un travailleur indépendant à partir des mises en relation effectuées par l'entreprise d'insertion par le travail indépendant est au moins égale au montant mensuel du revenu de solidarité active mentionné à l'article L. 262-3 du code de l'action sociale et des familles, l'entreprise d'insertion par le travail indépendant a droit, au titre de chacun des trois mois considérés, à une aide égale au montant forfaitaire mentionné au premier alinéa du même II.

    L'entreprise d'insertion par le travail indépendant bénéficie le cas échéant, rétroactivement, du complément de versement correspondant.

    IV.-Le montant forfaitaire mentionné au deuxième alinéa du II est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de l'emploi et du budget. Il est revalorisé au 1er janvier de chaque année selon l'évolution du salaire minimum de croissance.

    Un montant spécifique peut s'appliquer à Mayotte, pour tenir compte notamment du niveau et de l'évolution du salaire minimum de croissance en vigueur à Mayotte.

    L'aide est versée, pour le compte de l'Etat, par l'Agence de services et de paiements.

  • Le rapport d'évaluation prévu au VII de l'article 83 de la loi susvisée du 5 septembre 2018 s'appuie sur une évaluation d'impact et une analyse coût bénéfice permettant, en particulier, d'apprécier la soutenabilité du programme pour les finances publiques ainsi que l'opportunité et, le cas échéant, les conditions d'une pérennisation du dispositif expérimental.

    Il consolide notamment les indications suivantes :

    1° Les caractéristiques des travailleurs indépendants en insertion accompagnés dans le cadre de l'expérimentation ;

    2° La nature, l'objet, la durée des actions de suivi individualisé et d'accompagnement professionnel de ces bénéficiaires ;

    3° Les résultats en termes d'insertion sociale et d'accès et de retour à l'emploi de ces bénéficiaires.

    Cette évaluation est fondée notamment sur une analyse de la performance, permettant de comparer la pertinence de l'insertion par le travail indépendant au regard des autres dispositifs d'insertion professionnelle.

    L'évaluation s'appuie notamment sur les données fournies par les entreprises d'insertion par le travail indépendant.

    Le cahier des charges mentionné au I de l'article 1er fixe la nature de ces données et la périodicité avec laquelle elles doivent être transmises aux services de l'Etat. Ces obligations sont reprises dans la convention mentionnée à l'article 2, au titre du 7° de cet article.

  • Pour l'application du III de l'article 1er :

    1° En Guadeloupe et à La Réunion, les mots : “commission spécialisée du comité départemental pour l'emploi mentionnée à l'article R. 5311-26” sont complétés par les mots : “ou de l'une des commissions spécialisées mentionnées aux articles R. 5523-15-15 et R. 6523-21-2” ;

    2° En Guyane et en Martinique, les mots : “commission spécialisée du comité départemental pour l'emploi mentionnée à l'article R. 5311-26” sont remplacés par les mots : “commission spécialisée mentionnée à l'article R. 5523-15-28 ou à l'article R. 6523-21-3” ;

    3° A Mayotte, les mots : “commission spécialisée du comité départemental pour l'emploi mentionnée à l'article R. 5311-26” sont remplacés par les mots : “commission spécialisée mentionnée à l'article R. 5523-15-28 ou à l'article R. 6523-26-7” ;

    4° A Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, les mots : “commission spécialisée du comité départemental pour l'emploi mentionnée à l'article R. 5311-26” sont remplacés par les mots : “commission spécialisée mentionnée, selon le cas, à l'article R. 5523-15-40 ou à l'article R. 6523-23-1” ;

    5° A Saint-Pierre-et-Miquelon, les mots : “commission spécialisée du comité départemental pour l'emploi mentionnée à l'article R. 5311-26” sont remplacés par les mots : “commission spécialisée mentionnée à l'article R. 5523-15-40 ou à l'article R. 6523-25-1”.


    Conformément au 5° du II de l’article 6 du décret n° 2024-1147 du 4 décembre 2024, par dérogation au I du même article, ces dispositions entrent en vigueur le 1er avril 2025, dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.


  • La ministre du travail et le ministre de l'action et des comptes publics sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait le 20 décembre 2018.


Edouard Philippe
Par le Premier ministre :


La ministre du travail,
Muriel Pénicaud


Le ministre de l'action et des comptes publics,
Gérald Darmanin

Retourner en haut de la page