Arrêté du 22 mars 2016 portant approbation du cahier des charges national relatif à l'expérimentation d'espaces de réduction des risques par usage supervisé, autrement appelés « salles de consommation à moindre risque »

Dernière mise à jour des données de ce texte : 24 février 2022

NOR : AFSP1601434A

JORF n°0072 du 25 mars 2016

Version abrogée depuis le 24 février 2022


La ministre des affaires sociales et de la santé,
Vu le code de la santé publique, notamment son article L. 3411-8 ;
Vu la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, notamment ses articles 41 et 43 ;
Vu l'avis du Conseil national d'évaluation des normes en date du 4 février 2016,
Arrête :

  • Article 1 (abrogé)


    Le cahier des charges national relatif à l'expérimentation d'espaces de réduction des risques par usage supervisés, autrement appelés « salles de consommation à moindre risque », annexé au présent arrêté est approuvé.

    • (abrogé)

      ANNEXE


      CAHIER DES CHARGES NATIONAL RELATIF À L'EXPÉRIMENTATION D'ESPACES DE RÉDUCTION DES RISQUES PAR USAGE SUPERVISÉ


      I. - Eléments généraux et cadre national


      1. Contexte

      L'expérimentation d'un espace de réduction des risques par usage supervisé dit "salle de consommation à moindre risque" (SCMR) répond à la politique de réduction des risques et des dommages pour les usagers de drogues telle qu'elle est définie par l'article L. 3411-8 du code de la santé publique.


      Son expérimentation s'inscrit dans le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017.


      L'étude des expériences étrangères montre que ce type de dispositif est capable d'attirer les usagers injecteurs de substances psychoactives les plus vulnérables et cumulant les risques (précarité, forte prévalence de pathologies infectieuses, absence de domicile…).


      Ces études montrent également un impact positif des SCMR sur la réduction de la mortalité liée aux surdoses, des morbidités associées à l'injection et sur la diminution des pratiques à risque (moindre réutilisation et partage du matériel d'injection, meilleure hygiène…).


      Ce sont également des lieux où peuvent être prodigués des soins de base ainsi que des dépistages de pathologies infectieuses et autres. Ils favorisent aussi l'orientation des usagers vers des structures de soins et de traitement de la dépendance.

      2. Objectifs généraux

      Contribuer à réduire, chez les usagers actifs, les risques de surdose, d'infections et d'autres complications liées à la consommation de drogues en fournissant des conditions de consommation et d'injection sécurisées et du matériel stérile.


      Contribuer à faire entrer les usagers de drogues actifs dans un processus de réduction des risques et de soins, et un nouveau parcours de vie, afin de lutter contre les addictions.


      Contribuer à faire entrer les usagers de drogues actifs dans des processus de sevrage ou de substitution.


      Contribuer à améliorer l'accès des usagers aux droits et aux services sociaux.


      Réduire les nuisances dans l'espace public.

      3. Objectifs spécifiques

      Atteindre les usagers actifs à haut risque et les faire entrer dans un processus de réduction des risques et de soins.


      Améliorer les capacités des usagers à adopter des comportements de prévention, de réduction des risques et des dommages.


      Encourager les usagers à pratiquer des dépistages de maladies infectieuses (VIH, hépatites notamment) afin de connaître leur statut sérologique.


      Encourager et faciliter l'accès aux soins somatiques, psychologiques et l'accès aux traitements des dépendances des usagers les plus précaires.

      4. Cadrage juridique

      Article 43 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.


      Article L. 3411-8 du code de la santé publique : politique de réduction des risques et des dommages en direction des usagers de drogue.


      Article L. 3411-9 du code de la santé publique : prise en charge anonyme et gratuite.


      Article R. 3121-33-1 à R. 3121-33-4 du code de la santé publique : missions des CAARUD.


      Référentiel national de réduction du risque prévu à l'article D. 3121-33 du code de la santé publique et reproduit à l'annexe 31-2 du même code.


      Code de l'action sociale et des familles, notamment l'article L. 311-7.

      5. Durée

      La durée totale de l'expérimentation nationale est fixée à six ans à compter de la date d'ouverture de la première salle de consommation à moindre risque.


      Chaque projet de SCMR doit être opérationnel pour une durée minimale de un an.

      6. Structures concernées

      La mise en œuvre des expérimentations de salles de consommation à moindre risque est confiée par arrêté ministériel à des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD) au titre de leur mission de réduction des risques et des dommages.


      La consommation de substances psychoactives n'étant pas autorisée dans les locaux d'un CAARUD, la salle de consommation devra donc être située dans un lieu distinct.

      7. Public concerné

      La salle de consommation à moindre risque s'adresse à un public d'usagers de substances psychoactives par voie d'injection, par voie nasale ou par inhalation, âgés de plus de 18 ans, vulnérables et cumulant les risques. En cas de doute, le personnel exige à tout moment que les intéressés établissent la preuve de leur majorité, par la production d'une pièce d'identité ou de tout autre document officiel muni d'une photographie.

      8. Implantation

      Le projet d'expérimentation de salle de consommation à moindre risque tient compte des réalités et des besoins spécifiques à son territoire d'implantation.


      Le choix du lieu d'implantation doit dépendre de données locales spécifiques relatives au nombre d'usagers actifs, aux produits, aux modes et à la fréquence de consommation et aux habitudes des usagers. Il doit être situé à proximité des lieux de consommation afin d'être proches des usagers et de réduire les nuisances publiques là où elles sont les plus tangibles.


      Le projet adapte en conséquence les programmes d'intervention, les actions et les outils de réduction des risques à ces besoins spécifiques.

      9. Financement

      Le coût du fonctionnement annuel d'une salle de consommation à moindre risque intègre les dépenses suivantes, qui reprennent les groupes fonctionnels de la nomenclature budgétaire des établissements médico-sociaux définie par l'arrêté du 8 août 2002 :

      - dépenses afférentes à l'exploitation courante (frais de fonctionnement, achat de matériel, y compris médical) ;


      - dépenses afférentes au personnel (salaires et cotisations sociales) ;


      - dépenses afférentes à la structure (loyer, maintenances diverses).

      Le financement de l'expérimentation est assuré, pour la partie Etat, par le ministère des affaires sociales et de la santé. Les objectifs poursuivis par cette expérimentation s'inscrivent pleinement dans le champ du Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaire (FNPEIS) au titre de son intervention de lutte contre les infections VIH/hépatites.


      Des cofinancements peuvent provenir des collectivités territoriales (notamment pour les locaux et leur maintenance, le matériel et l'équipement), d'associations et de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) qui participe au financement de l'évaluation.


      La programmation des financements nécessaires est assurée pour toute la durée de l'expérimentation.

      10. Pilotage national

      Un comité de pilotage national est placé sous la responsabilité de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives. Il est composé de représentants des différents ministères concernés (santé, justice, intérieur).


      Il a pour mission de faire le lien entre les comités de pilotage locaux qui seront mis en place au fur et à mesure des expérimentations pour adapter au mieux l'évolution du projet au public concerné, aux besoins nationaux et locaux identifiés, aux possibilités locales.


      Le comité national assure un suivi régulier de la mise en place des projets d'expérimentation dans toutes leurs composantes. Il facilitera les liens entre le consortium de recherche chargé de l'évaluation scientifique et les comités de pilotage locaux.

      11. Evaluation scientifique de l'expérimentation

      Les objectifs et modalités d'évaluation sont développés à l'annexe 3. Les structures expérimentant une salle de consommation à moindre risque seront amenées à participer à cette évaluation.


      L'évaluation des salles de consommation à moindre risque portera sur la santé publique, l'ordre public et la collectivité dans le contexte français. L'évaluation doit aussi contribuer à définir les conditions nécessaires à la pérennisation du dispositif et à son insertion dans le dispositif médico-social de prise en charge des personnes présentant des pratiques addictives.


      Afin d'évaluer ce dispositif et son impact pour les personnes et l'environnement, trois recherches sont financées par la Mildeca :

      - le programme de recherche socio-épidémiologique "Cosinus" porté par un consortium de chercheurs de l'Inserm étudiera l'impact de la salle à partir d'une série de critères d'efficacité tels que la réduction des pratiques à risque de transmission du VHC, du VIH et d'autres maladies transmissibles, ainsi que l'amélioration de la santé mentale, de l'insertion socioprofessionnelle et l'accès au logement, la diminution des actes de délinquance, l'accès aux soins, etc.

      La population de cette étude sera composée de personnes recrutées dans une ville où les salles n'existent pas, de personnes qui ne fréquentent pas une SCMR, même s'ils habitent dans une ville où une SCMR existe, et enfin de personnes qui fréquentent une SCMR ;

      - la recherche conduite par le centre de recherche médecine, sciences, santé, santé mentale et société (Cermes 3) portera sur l'acceptabilité sociale des dispositifs de réduction des risques incluant le dispositif innovant des salles de consommation à moindre risque sur la ville de Paris.

      Cette recherche sociologique et ethnographique aura pour objectif principal d'analyser de manière approfondie les évolutions de perception des riverains, des professionnels de santé et de la sécurité publique, des institutions et des usagers de drogues vis-à-vis des nuisances associées à la consommation de drogues et en particulier les pratiques d'injection et la présence d'usagers de drogues dans l'espace public, avant et après la mise en place d'une SCMR sur Paris.


      Les retombées pragmatiques de ce volet qualitatif pourront contribuer à améliorer le service proposé par la SCMR, d'après les expériences étrangères menées sur ce sujet.

      -L'évaluation médico-économique du dispositif de la SCMR prévue par la Mildeca. Pour cela, sera réalisée la mesure des coûts, des coûts évités et du coût-efficacité des SCMR par rapport aux Centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues (CAARUD). Il s'agit également de mettre en regard les coûts associés aux SCMR avec les principaux bénéfices qu'ils apportent et les coûts évités que ces bénéfices représentent. Ainsi, cette étude collectera des données sur le coût de la mise en place des SCMR et leur coût additionnel par rapport aux CAARUD. Egalement, les données issues de la cohorte Cosinus et de la littérature scientifique permettront d'identifier les bénéfices de ce dispositif en termes d'infections (VHC, VIH, abcès) et d'overdoses (fatales ou non fatales) évitées et des coûts évités en terme de consommation de soins liés à la prise en charge de ces problèmes de santé. Le modèle développé dans le cadre de cette étude permettra également de simuler sur le long terme les bénéfices de santé apportés par les SCMR.

      II. - Déclinaison locale du cahier des charges

      Le choix de l'implantation est issu d'un diagnostic partagé des différents acteurs basé sur des données populationnelles et épidémiologiques locales (espaces publics de consommations, rapports d'activité des CAARUD et CSAPA…).

      1. Missions

      La salle de consommation à moindre risque met en œuvre les prestations suivantes :

      - accueil personnalisé ;


      - mise à disposition de postes de consommation adaptés et permettant un usage supervisé ;


      - mise à disposition de matériel stérile adapté aux consommations des usagers ;


      - supervision ;


      - accompagnement aux pratiques d'injection à moindre risque ;


      - soins médicaux et infirmiers ;


      - dépistage des infections transmissibles (VIH, VHB, VHC) ;


      - orientation vers des structures de prise en charge médico-sociales, sanitaires ou sociales ;


      - information, orientation et soutien aux démarches administratives d'accès aux droits ;


      - participation à la médiation et à la prévention des nuisances aux abords du service, en lien avec les services de voirie et les forces de sécurité ;


      - participation au système de veille et d'alerte.

      2. Disposition des différents espaces composant la salle de consommation à moindre risque

      Les espaces doivent être identifiés et organisés de manière à permettre une circulation fluide des usagers, tenant compte du "parcours" de l'usager, de l'accueil à la sortie de la salle de consommation.


      Le projet précise la disposition des espaces qui comprennent au minimum :

      - un lieu d'accueil et d'attente ;


      - l'espace de consommation (précisant le nombre de postes de consommation par voie d'injection ou voie nasale et le nombre de postes d'inhalation), qui comporte :


      - un système d'alerte visuelle ou sonore en cas d'incident ;


      - un dispositif de récupération des matériels utilisés ;


      - une hotte aspirante en cas d'installation de postes d'inhalation ;


      - un espace de consultation médical individuel ;


      - un lieu de repos.

      Le nombre de places dans l'espace de consommation est défini sur la base de la file active prévisible et des capacités d'accueil prévues dans le cadre de l'expérimentation.


      Chaque espace doit être accessible aux personnes à mobilité réduite et disposer de portes adaptées au passage de brancards.


      La salle de consommation satisfait aux conditions d'hygiène et de sécurité nécessaires aux pratiques d'injection, de consommation par voie nasale et d'inhalation.

      Chaque poste d'injection est individualisé.

      3. Matériel

      a. Matériel de réduction des risques et des dommages mis à disposition pour la consommation sur place :


      Le matériel de prévention et de réduction des risques et des dommages mis à disposition des usagers doit être conforme aux objectifs de la politique de réduction des risques et des dommages. Il doit être adapté aux besoins des usagers.


      Les usagers ont l'obligation d'utiliser le matériel stérile fourni par la salle de consommation à moindre risque et de déposer le matériel usagé dans des collecteurs spécifiques.


      b. Matériel médical :


      Sous la responsabilité du médecin, un chariot d'urgence, contrôlé à échéances régulières, doit être mis en place. Il comprend obligatoirement de la naloxone pour les cas de surdose d'opiacés.


      La commande des médicaments se fait directement auprès de fabricants, de distributeurs ou de grossistes répartiteurs qui sont autorisés à fournir les centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues disposant d'une SCMR, en effectuant un suivi individualisé des lots et, s'il y a lieu, leur retrait.

      4. Fonctionnement

      a. Amplitude horaire d'ouverture :


      Les horaires d'ouverture doivent être adaptés aux modes de vie des publics concernés.


      7 jours sur 7, la salle est au minimum ouverte au public sur une plage horaire d'une demi-journée (entre 4 et 7 heures), auxquelles doivent être ajoutés les temps d'installation et de nettoyage de l'ensemble du dispositif.


      Les horaires et conditions de fonctionnement de la salle de consommation à moindre risque doivent être connus par les usagers (plaquette/brochure d'information, livret d'accueil, etc.) ainsi que des professionnels d'autres structures et dispositifs intervenant auprès de ces publics. Une concertation spécifique est prévue avec les forces de sécurité et les autorités judiciaires locales.


      b. Règles d'usage :


      Dans l'ensemble des espaces de la salle de consommation à moindre risque, les règles suivantes doivent être respectées :

      - les produits consommés et admis dans le dispositif peuvent être des produits illicites ainsi que des médicaments détournés de leur usage ;


      - l'usager doit énoncer et montrer à l'intervenant au moment de l'accueil le produit qu'il souhaite consommer pour éviter qu'il n'entre dans la SCMR sans substance et incite au partage des produits ;


      - une seule session de consommation (injection ou inhalation ou consommation par voie nasale) est autorisée par passage. L'usager doit ensuite quitter le poste de consommation ;


      -la consommation est pratiquée par l'usager lui-même sous la supervision d'un professionnel. En cas de besoin, celui-ci peut conseiller l'usager sur les conditions d'une pratique sûre, sans toutefois participer au(x) geste(s) de l'injection ;


      - après la consommation, les usagers sont encouragés à rester un moment dans la salle de repos avant de quitter la structure.

      5. Protocoles, outils à mettre en place

      a. Protocole d'accompagnement :


      Un document détaillant le déroulement du parcours de l'usager, de l'accueil initial à la sortie, doit être élaboré préalablement à l'ouverture de la salle de consommation à moindre risque. Il doit comprendre également une description :

      - des critères d'inclusion et d'exclusion spécifiques au profil des usagers accueillis : les couples d'injecteurs (histoire des pratiques d'injection et parcours de soins), les femmes enceintes (suivi médical, histoires de vie et pratiques de consommation), les primo-injecteurs ou les usagers peu expérimentés ;


      - des modalités d'admission et de primo-admission (inscription, respect de l'anonymat, recueil de données, profils de consommation…).

      Ce protocole d'accompagnement détaille également les modalités de coopérations avec les services de voirie, de police et l'autorité judiciaire. Ce document doit être produit de façon concertée, en veillant à son appropriation par l'ensemble des professionnels concernés. Il est régulièrement adapté au regard du fonctionnement de la salle.


      b. Protocole d'intervention :


      Le protocole d'intervention doit être formalisé par écrit, de manière claire et porté à la connaissance de l'ensemble des intervenants. Il est signé par le directeur et/ou le médecin.


      Le protocole d'intervention inclut en particulier une description détaillée :

      - du déroulement de l'entretien d'admission et de la communication du règlement de fonctionnement de la salle. Celui-ci précise les droits et devoirs des personnes accueillies et des intervenants et les règles de fonctionnement et de sécurité de la salle de consommation à moindre risque ;


      - des règles d'hygiène que les usagers doivent respecter avant, pendant et après leur consommation ;


      - des situations particulières qui peuvent justifier un refus d'admission ou une sortie obligatoire de la salle de consommation (non-respect des règles d'usage, état d'ébriété ou d'agitation excessive…) ;


      - des modalités du travail de supervision des intervenants : notamment en incluant des recommandations de bonnes pratiques d'injection, de la mise en garde contre les pratiques à risque et des conseils visant à minimiser ces risques.

      Dans le cadre de leur rôle de supervision, les intervenants doivent être aptes à juger de l'état de conscience des usagers et à évaluer le degré de risque de la consommation : entretien, observation des signes d'imprégnation, etc.


      Le protocole précise :

      - les conduites à tenir en cas d'urgence, spécifiquement en cas de malaise ou en cas de suspicion d'overdose ; le protocole précise notamment le circuit d'intervention rapide en lien avec le service des urgences de l'hôpital, le SAMU, l'utilisation de la naloxone en cas de surdose aux opiacés, etc. ;


      - la conduite à tenir en cas d'accident d'exposition au sang.

      6. Règlement de fonctionnement

      Conformément à l'article L. 311-7 du code de l'action sociale et des familles, il est élaboré un règlement de fonctionnement qui définit les droits de la personne accueillie et les obligations et devoirs nécessaires au respect des règles de vie collective au sein de l'établissement ou du service.


      Le règlement de fonctionnement est établi après consultation du conseil de la vie sociale ou, le cas échéant, après mise en œuvre d'une autre forme de participation.


      Destiné à l'usager, le règlement de fonctionnement définit les règles devant être respectées respectivement par les professionnels et les usagers pour garantir le bon fonctionnement de la salle de consommation à moindre risque.


      Le règlement de fonctionnement peut comporter, en complément de ces dispositions communes de mises en œuvre, des modalités plus spécifiques, adaptées aux situations locales du lieu d'implantation de la salle.


      a. Conditions, modalités d'admission, principes, droits et obligations :


      Sont inclus les usagers injecteurs majeurs.


      Sont exclus les usagers mineurs.


      Tout échange ou tentative d'échange de produit psychoactif entraîne l'exclusion immédiate, temporaire ou définitive, dans les conditions fixées par le règlement de la salle de consommation.


      Les obligations des usagers comprennent au minimum le respect du règlement de fonctionnement, notamment :

      - l'énonciation et la description visuelle du produit que l'usager vient consommer ;


      - le respect des règles d'hygiène avant, pendant et après la consommation ;


      - l'interdiction de tout partage ;


      - l'interdiction de toute vente ou cession de produits illicites ou de médicaments à l'intérieur des locaux, y compris dans l'espace de consommation, et dans le périmètre extérieur direct ;


      - l'interdiction de consommer toute substance psychoactive en dehors des postes de consommation ;


      - l'interdiction de tout acte de violence, menace verbale ou physique entre les usagers ou envers les intervenants ;


      - l'interdiction d'endommager les mobiliers et matériels ;


      - l'interdiction, comme dans tout lieu accueillant du public, de consommer du tabac à l'intérieur des locaux (y compris la salle et les postes de consommation) sauf dans les espaces réservés aménagés dans le respect des normes techniques précises et garantissant la sécurité des non-fumeurs. La consommation de tabac aux abords des locaux ne doit pas être une source de nuisance pour les riverains.

      Certaines situations particulières peuvent justifier un refus d'admission ou une sortie obligatoire de la salle de consommation. Ces situations sont librement fixées dans le règlement de fonctionnement qui doit en préciser les motifs.


      Ces motifs peuvent inclure :

      - un état d'ébriété ou d'agitation excessive ;


      - la volonté d'utiliser son propre matériel ;


      - la volonté d'injecter par voie artérielle, dans des abcès ou des sites d'injection dangereux.

      En cas de non-respect de ces dispositions, le personnel de la salle de consommation peut faire appel aux services de police.


      b. Conditions et modalités de l'accueil :


      Sont précisés :

      - les horaires d'ouverture ;


      - les conditions d'accès au lieu d'accueil et d'attente ;


      - les modalités du déroulement de la première consultation d'accueil ;


      - les conditions de gestion des animaux de compagnie pendant les temps d'accueil, d'attente et de consommation ;


      - les conditions d'accès à la salle et aux postes de consommation ;


      - les conditions d'accès à la salle de repos ;


      - les prestations délivrées :


      - information, conseil, rappels sur la réduction des risques et des dommages ;


      - information, rappel des règles d'hygiène à respecter avant, pendant et après la consommation ;


      - fourniture de matériel stérile ;


      - prestations de soins et d'accès aux soins ;


      - prestations d'accès et de maintien aux droits sociaux, aux démarches administratives et juridiques.

      c. Participation à l'expression des usagers : le conseil de la vie sociale ou autre mode d'expression :


      Le règlement de fonctionnement détaille le rôle et les modalités de désignation des usagers représentants.


      d. Livret d'accueil remis à l'usager :


      Chaque usager admis dans la salle de consommation se voit remettre un livret d'accueil.

      7. Participation au système de veille et alerte sanitaire

      Le personnel de la salle de consommation à moindre risque peut être à l'origine d'une information en direction du système de veille et d'alerte sanitaire.


      Il est aussi le relais d'information et de messages d'alerte déclenchés par les autorités auprès des usagers et des professionnels.


      Une circulation des informations est organisée et précisée : elle inclut notamment le Centre d'évaluation et d'information sur les pharmacodépendances (CEIP), l'agence régionale de santé, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).


      La salle de consommation à moindre risque est intégrée aux différents dispositifs d'observation dont les dispositifs de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) : Tendances récentes et nouvelles drogues (TREND) et Système national d'identification des toxiques et substances (SINTES).


      Le personnel de la salle de consommation à moindre risque ne peut pas réaliser l'analyse de produits sur place pour le compte de l'usager avant sa consommation.

      8. Composition de l'équipe

      L'expérimentation de la salle de consommation à moindre risque s'appuie sur une équipe pluridisciplinaire. Le personnel répond aux qualifications professionnelles du secteur médico-social.


      Deux intervenants, dont au moins un infirmier compétent pour la prise en charge des urgences liées à l'usage de drogues, sont présents à tout moment dans l'espace de consommation : l'un accueille et gère le flux de personnes et le matériel, l'autre supervise les consommations et intervient selon les protocoles définis.


      Un poste spécifique d'agent de sécurité doit être créé pour permettre aux autres intervenants de se consacrer aux tâches d'accueil, d'éducation et d'orientation. En fonction de l'analyse des acteurs locaux et du contexte, le nombre de ces agents peut être augmenté.


      Des vacations médicales doivent être organisées.


      Des médiateurs pairs, formés à la réduction des risques, peuvent assister le professionnel de santé ou du secteur médico-social, dans tous les espaces autres que l'espace de consommation. Ils ne sont pas autorisés à participer à la mission de supervision. Le porteur de projet peut s'appuyer sur le référentiel de compétences, de formation et de bonnes pratiques de la médiation en santé de la Haute Autorité de santé pour préciser leur cadre d'intervention.


      Le projet précisera les compétences et qualifications requises (formations), les quotités de temps et le taux d'encadrement qui doivent garantir la qualité de l'accueil, des prestations et la sécurité (cf. annexe 1 : proposition de tableau des emplois simplifié).


      Une astreinte de direction est organisée et budgétée. Des réunions d'information, de coordination et de suivi de la mise en œuvre des protocoles doivent être organisées par l'équipe de direction.

      9. Partenariats et conventionnements

      Le CAARUD en charge de l'expérimentation formalise avec le SAMU et le service des urgences de l'hôpital le plus proche des protocoles d'intervention en cas d'urgence.


      Une convention formalise l'élimination des déchets et des seringues usagées. Une concertation est prévue entre l'association porteuse et la municipalité concernant le ramassage des seringues usagées autour de la salle.


      La salle de consommation à moindre risque a vocation à s'inscrire dans un réseau de partenariats : CAARUD, CSAPA, ELSA, CeGIDD, structures sociales, médico-sociales, sanitaires de proximité, ou tout autre établissement, structure ou dispositif intervenant dans le cadre de prestations, dont les soins somatiques, addictologiques et psychiatriques.


      Les horaires et conditions de fonctionnement de la salle de consommation à moindre risque doivent être connus par les usagers (plaquette/brochure d'information, livret d'accueil, etc.) ainsi que les professionnels d'autres structures et dispositifs intervenant auprès de ces publics.


      Une concertation spécifique, notamment dans le cadre de l'élaboration du protocole de fonctionnement de la salle, est prévue avec les forces de sécurité et les autorités judiciaires locales concernant le fonctionnement de la salle de consommation et la gestion de l'ordre public à l'extérieur de la salle. Dans ce cadre, les modalités de recours aux services de police doivent être formalisées.


      Des interventions régulières de proximité visant à assurer une bonne intégration dans le quartier, à prévenir et réduire les nuisances sur l'espace public doivent être prévues (réunions de riverains, rencontres avec les élus, la police, les institutions, participation aux réunions et instances locales de pilotage et de suivi, aux conseils de quartiers, etc.).

      10. Comité de pilotage local de l'expérimentation

      Un comité de pilotage local est créé. Le maire de la commune où est implantée l'expérimentation de la salle de consommation, le directeur général de l'ARS et le chef de projet régional Mildeca sont chargés du pilotage de ce comité. Celui-ci est composé d'élus locaux, de représentants des services des collectivités territoriales, des institutions concernées intervenant dans les domaines de la santé, de la sécurité, de la justice (préfecture, ministère public, etc.), de la caisse primaire d'assurance maladie, du gestionnaire porteur de l'expérimentation, des représentants des usagers, etc.


      Il a pour missions de vérifier la conformité de la mise en place de l'expérimentation au contenu du cahier des charges, d'accompagner l'adaptation du projet aux réalités locales et de faciliter le lien avec le comité de pilotage national.


      Un comité opérationnel, distinct du comité de pilotage mais agissant sous sa responsabilité, est créé. Ce comité opérationnel, qui pourra pour partie être composé de membres du comité de pilotage, associe l'équipe de direction de la salle de consommation à moindre risque et les acteurs locaux de proximité ou les plus directement impliqués dans le projet (services de police, de justice, de voirie, riverains…).


      Il a pour fonctions de favoriser l'échange d'informations, d'assurer la coordination entre tous les acteurs, d'examiner en tant que de besoin les difficultés d'organisation ou de fonctionnement de la structure et de faire remonter ces difficultés au comité de pilotage au cas où elles ne peuvent être résolues à l'échelle du comité opérationnel.

      11. Evaluation de l'activité

      Le CAARUD porteur désigné doit adresser chaque année un rapport sur le déroulement de l'expérimentation au directeur général de l'agence régionale de santé dans le ressort duquel il est implanté, au maire de la commune ainsi qu'au ministre en charge de la santé.


      Ce rapport d'activité annuelle détaille notamment :

      - la file active : nombre, profil, part d'usagers réguliers… ;


      - les produits consommés et leur nature ;


      - le temps moyen de passage ;


      - les événements indésirables ;


      - les dépistages réalisés ;


      - les actions de médiation sociale et de proximité ;


      - le nombre de réunions avec les différents partenaires ;


      - les articulations avec les réseaux environnants : CAARUD, CSAPA, hôpital, social.

    • Article Annexe 1 (abrogé)

      Encadrement de la salle de consommation : tableau indicatif

      Heures hebdosTemps de réunion
      + matinées
      ETP théoriquesETP nécessaires
      Accueillant
      Médecin
      Infirmier
      Educateur
      Travail social
      Coordinateur
      Administratif

      Ce tableau est proposé à titre indicatif et peut être ajusté en fonction des catégories de personnel intervenant dans la SCMR (médiateur pair, etc.).

    • Article Annexe 2 (abrogé)

      Liste des documents à élaborer préalablement à l'ouverture de la salle de consommation à moindre risque


      Les prestations, programmes, activités, etc., proposés font l'objet de recueils de procédures, élaborés de manière concertée et appropriés par l'ensemble des professionnels concernés.


      Il est recommandé que soient associés des représentants des usagers dans le cadre de la participation et de l'expression des usagers.


      Ces protocoles d'accompagnement et d'intervention sont signés par le directeur et/ou le coordonnateur ainsi que par le médecin. Ils sont datés, si nécessaire actualisés pour tenir compte de l'évolution des besoins et des pratiques.


      Règlement de fonctionnement de la SCMR.


      Protocole d'accompagnement détaillant le déroulement du parcours de l'usager, de l'accueil initial à la sortie, l'organisation et l'utilisation des locaux. Ce protocole d'accompagnement détaille également les modalités de coopération avec les services de voirie et de police et l'autorité judiciaire.


      Protocole d'intervention détaillant notamment le rôle de supervision des intervenants, le déroulement de la consommation et les règles d'hygiène et détaillant les procédures et les conduites à tenir en cas d'urgence.


      Conventions de partenariat (SAMU, services d'urgence…).

    • Article Annexe 3 (abrogé)

      Evaluation de l'expérimentation du dispositif de la salle de consommation à moindre risque


      Dans le domaine de la recherche, le plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017 préconise d'améliorer les connaissances sur les trajectoires d'usagers de drogues en particulier ceux qui présentent une grande vulnérabilité sociale, des pratiques à risque de transmission du VHC et du VIH et qui sont, pour la majorité d'entre eux, en marge du système de santé.


      A cet effet, la Mildeca a commandé à l'institut de santé publique de l'Inserm la mise en place d'une étude de cohorte d'usagers de drogues afin d'évaluer des dispositifs innovants de réduction des risques tels que les salles de consommation à moindre risque.


      Le consortium de recherche mandaté pour la conduite de ce programme de recherche est chargé d'évaluer l'impact de l'ouverture des salles de consommation à moindre risque sur la santé publique, l'ordre public et la collectivité dans le contexte français. L'évaluation doit aussi contribuer à définir les conditions nécessaires à la pérennisation du dispositif et à son insertion dans le dispositif médico-social de prise en charge des personnes présentant des pratiques addictives.


      Afin d'évaluer ce dispositif et son impact pour les personnes et l'environnement, trois recherches sont financées par la Mildeca :


      - le programme de recherche socio-épidémiologique Cosinus porté par un consortium de chercheurs de l'Inserm étudiera l'impact de la salle à partir d'une série de critères d'efficacité tels que la réduction des pratiques à risque de transmission du VHC (problème majeur de santé publique dans cette population), du VIH et d'autres maladies transmissibles, ainsi que l'amélioration de la santé mentale, de l'insertion socioprofessionnelle et l'accès au logement, la diminution des actes de délinquance, l'accès aux soins, etc.


      Ces critères seront mesurés par l'intermédiaire de questionnaires validés c'est-à-dire déjà testés dans des évaluations menées à l'étranger et adaptés pour la France. Les questions sont posées aux usagers de drogues par injection par un enquêteur formé et indépendant (extérieur aux structures de réduction des risques), selon un rythme régulier.


      L'étude permettra de comparer à la fois un groupe d'injecteurs exposés à ce dispositif et un groupe qui n'a jamais fréquenté une SCMR. Les participants seront recrutés dans quatre villes (Bordeaux, Marseille, Paris et Strasbourg) et auront ou non fréquenté une SCMR.


      Ainsi, la population de cette étude sera composée de personnes recrutées dans une ville où les salles n'existent pas (Marseille), de personnes non exposées à SCMR mais dans des villes où une SCMR existe, et enfin de personnes qui fréquentent une SCMR.


      Le schéma de l'étude permettra donc d'avoir une ville témoin afin de comparer l'évolution des critères dans une ville où aucune SCMR n'existe et dans des villes où une SCMR a été mise en place.


      Le programme de recherche Cosinus prévoit la mise en place de deux comités : un comité de pilotage associant les chercheurs et les représentants de l'Inserm et de la Mildeca et un comité scientifique externe composé de membres non impliqués dans l'évaluation, associant des experts étrangers, dont la mission sera de vérifier la pertinence des questions scientifiques et la validité des méthodes utilisées pour y répondre.


      - la recherche conduite par le centre de recherche médecine, sciences, santé, santé mentale et société (Cermes 3) portant sur l'acceptabilité sociale des dispositifs de réduction des risques incluant le dispositif innovant des salles de consommation à moindre risque sur la ville de Paris.


      Cette recherche sociologique et ethnographique aura pour objectif principal d'analyser de manière approfondie, à partir d'entretiens semi-directifs en face à face, les évolutions de perception des riverains, des professionnels de santé et de sécurité publique, des institutions et des usagers de drogues vis-à-vis des nuisances associées à la consommation de drogues et en particulier les pratiques d'injection et la présence d'usagers de drogues dans l'espace public, avant et après la mise en place d'une SCMR sur Paris. Des observations ethnographiques seront également réalisées dans les espaces de discussion formels et informels concernant l'implantation des SCMR, tels que les réunions entre la mairie de Paris et les riverains, et au sein des réunions spécifiques aux associations de riverains se positionnant en faveur ou en défaveur des SCMR.


      Les retombées pragmatiques de ce volet qualitatif pourront contribuer à améliorer le service proposé par la SCMR, d'après les expériences étrangères menées sur ce sujet.

      L'évaluation médico-économique des SCMR sera portée par une équipe de l'Inserm, l'équipe du SESSTIM U1252. Cette étude apportera des données sur le coût de la mise en place des SCMR ainsi que sur les bénéfices de cette intervention en termes d'infections et d'overdoses évitées, de coûts évités liés à la prise en charge de ces problèmes de santé et de coût-efficacité. Le modèle développé dans le cadre de cette étude permettra également de simuler sur le long terme les bénéfices de santé apportés par l'intervention, notamment vis-à-vis de l'infection à VIH, du VHC, des abcès et des overdoses.


      Elle permettra de mettre en regard les coûts associés à ce dispositif et son efficacité d'un point de vue sanitaire. L'évaluation économique des SCMR sera effectuée en termes de :


      -coût de fonctionnement d'une SCMR (intégrant coût en capital et coût en fonctionnement), décrire ses composantes par activité et le coût unitaire par usager ;


      -coût incrémental (ou coût additionnel) de la SCMR par rapport aux CAARUD ;


      -d'efficacité de la salle de consommation en termes d'infections et d'overdoses évitées (par rapport aux CAARUD) ;


      -coûts évités en terme de consommations de soins (urgence, hospitalisation, consultations médicales, traitement …) associés aux infections évitées (abcès, hépatite C et infection VIH) et aux overdoses évitées ;


      -coût-efficacité de la SCMR.


      Un modèle sera construit afin de simuler le devenir de la population d'usagers de drogues fréquentant les SCMR. Ce modèle sera divisé en deux sous-modèles : un arbre de décision permettant d'évaluer le nombre d'infections (VIH, VHC et abcès) et d'overdoses (fatales ou non fatales) évitées en fonction de la fréquence d'injection et des probabilités d'infection et d'overdose par injection ; et un modèle multi-état pour simuler la cascade de soins associée à chacune de ces infections (dépistage, prise en charge par le système de santé et traitement) et les bénéfices de santé sur le long terme en termes d'années de vie ajustées sur la qualité de vie (QALY). Dans un deuxième temps, le modèle sera utilisé afin d'évaluer l'impact d'une mise à l'échelle des SCMR.


      Plusieurs sources de données seront mobilisées pour la conduite de l'analyse économique : les données de la cohorte “ Cosinus ”, les données institutionnelles concernant les dispositifs en question, les données de coûts et d'activités recueillies sur site dans les SCMR et les données issues de la littérature.


Fait le 22 mars 2016.


Marisol Touraine

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