Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 18 septembre 2024, 23-10.675, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 18 septembre 2024




Rejet


M. PONSOT, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 496 F-D

Pourvoi n° D 23-10.675



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 SEPTEMBRE 2024

La société des Carrières de la Menudelle, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° D 23-10.675 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la direction régionale des douanes et des droits indirects de Marseille, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), dont le siège est [Adresse 1],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations, écrites et orales, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société des Carrières de la Menudelle, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction régionale des douanes et des droits indirects de Marseille et de la direction générale des douanes et droits indirects, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 juin 2024 où étaient présents M. Ponsot, conseiller doyen, faisant fonction de président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, Mme Daubigney, conseiller, faisant fonction de doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 novembre 2022), la société des carrières de la Menudelle exerce une activité d'exploitation de carrières et de production de matériaux d'extraction.

2. Le 10 novembre 2015, l'administration des douanes lui a notifié l'infraction de défaut de déclaration de la taxe générale sur les activités polluantes dans sa composante émissions polluantes (la TGAP) au titre des années 2013 à 2015.

3. Le 1er juillet 2016, l'administration des douanes a émis un avis de mise en recouvrement (AMR) de la TGAP.

4. Le 2 novembre 2016, après le rejet de sa réclamation, la société des carrières de la Menudelle a assigné l'administration des douanes en annulation de l'AMR.

Examen du moyen

Sur le moyen pris en ses deuxième, troisième, cinquième et sixième branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. La société des carrières de la Menudelle fait grief à l'arrêt de valider l'AMR du 1er juillet 2016, alors « qu'en application de l'article 55 de la Constitution, l'application d'un texte qui méconnaît la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écartée ; que l'article 266 septies du code des douanes, en ce qu'il ne définit pas suffisamment la notion de poussières totales en suspension, porte une atteinte excessive au droit au respect des biens garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, en considération du but que poursuit cet article 266 septies, et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence ; qu'en validant l'avis de mise en recouvrement litigieux, cependant que l'application des dispositions de l'article 266 septies du code des douanes devait être écartée, la cour d'appel a violé l'article 55 de la Constitution, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ».

Réponse de la Cour

7. Selon l'article 266 septies du code des douanes, le fait générateur de la TGAP est constitué par l'émission dans l'atmosphère des poussières totales en suspension, par certaines installations soumises à autorisation.

8. L'ingérence que constitue la taxe en cause dans le droit au respect des biens, garanti à l'article 1er du protocole additionnel n° 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit satisfaire une condition de légalité, laquelle implique que la norme de droit interne qui l'institue soit suffisamment accessible, précise et prévisible, afin d'offrir des garanties contre l'arbitraire (CEDH, arrêt du 5 janvier 2000, Beyeler c. Italie [GC], n° 33202/96, § 109-110).

9. En déterminant le fait générateur de la TGAP, le législateur, qui dispose à ce titre d'une large marge d'appréciation, a énoncé avec une précision suffisante les dispositions de l'article 266 septies du code des douanes à l'égard des redevables de la taxe, qui ont la qualité de professionnels.

10. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

Sur le moyen pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

11. La société fait le même grief à l'arrêt, alors « que la notion de poussières totales en suspension visée par l'article 266 septies du code des douanes, à raison de l'émission desquelles la taxe générale sur les activités polluantes peut être due, doit être considérée comme visant les poussières non sédimentables, à l'exclusion des poussières retombant au sol à raison de la gravité ; qu'en retenant, par des motifs inopérants, qu'il n'y avait pas lieu de distinguer entre les particules supérieures et inférieures à 10 micromètres, pour en déduire que l'avis de mise en recouvrement du 1er juillet 2016 était valable, tandis que seules entrent dans l'assiette de la taxe sur les activités polluantes les poussières demeurant en suspension, par opposition aux poussières sédimentables, qui retombent au sol par le seul effet de la gravité, la cour d'appel a violé l'article 266 septies du code des douanes. »

Réponse de la Cour

12. Selon les articles 266 septies et 266 octies du code des douanes, la TGAP est assise sur le poids des poussières totales en suspension émises dans l'atmosphère par certaines installations soumises à autorisation.

13. Aucune des dispositions applicables ne limite à des particules qui demeureraient en suspension sans retomber au sol le champ d'application de la TGAP, dont le fait générateur est constitué par l'émission de poussières totales en suspension.

14. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société des carrières de la Ménudelle aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société des carrières de la Ménudelle et la condamne à payer au directeur général des douanes et droits indirects et au directeur régional des douanes et droits indirects de Marseille la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:CO00496
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