Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 11 juillet 2024, 22-24.357, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 11 juillet 2024, 22-24.357, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 3
- N° de pourvoi : 22-24.357
- ECLI:FR:CCASS:2024:C300410
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du jeudi 11 juillet 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 16 septembre 2022- Président
- Mme Teiller (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 11 juillet 2024
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 410 F-D
Pourvoi n° E 22-24.357
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JUILLET 2024
La société Safedéveloppement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-24.357 contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Ivry Michelet, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société Compagnie européenne de garanties et cautions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La société Ivry Michelet a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Safedéveloppement, de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat de la société Ivry Michelet, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Compagnie européenne de garanties et cautions, après débats en l'audience publique du 4 juin 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 septembre 2022), par acte authentique du 24 mai 2016, la société Ivry Michelet, promettant, et la société Safedéveloppement, bénéficiaire, ont conclu une promesse synallagmatique de vente d'un immeuble moyennant le prix de 8 100 000 euros.
2. Une garantie autonome de paiement à première demande a été souscrite auprès de la Compagnie européenne de garanties et cautions (la CEGC) aux fins de garantir le paiement d'un acompte de 405 000 euros, la promesse de vente stipulant une clause pénale du même montant.
3. L'acte authentique de vente n'a pas été signé entre les parties à l'expiration du délai convenu.
4. Le promettant a assigné le bénéficiaire et le garant aux fins de paiement de la somme de 405 000 euros.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal
Enoncé du moyen
6. La société Safedéveloppement fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la société Ivry Michelet à lui payer la somme de 405 000 euros à titre de clause pénale et de la condamner à payer à la société Ivry Michelet la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel, alors « que le vendeur doit délivrer la chose conformément aux stipulations de l'acte de vente ; que lorsque le promettant déclare dans l'acte que le bien est raccordé au réseau d'assainissement public sans assortir cette déclaration d'une réserve expresse quant à l'existence d'un raccordement indirect, total ou partiel, à ce réseau, il s'engage à délivrer un bien dont toutes les évacuations y sont directement raccordées ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt qu'aux termes de la promesse synallagmatique de vente conclue le 24 mai 2016 avec la SAS Safedéveloppement, la SCI Ivry Michelet, promettante, a déclaré que le bien est raccordé à l'assainissement communal, mais qu'il ne garantit aucunement la conformité des installations aux normes actuellement en vigueur, la SCI Ivry Michelet s'étant par ailleurs engagée à demander dans les huit jours de la promesse à Veolia ou tout autre organisme habilité l'établissement d'un diagnostic de cette installation, la promesse stipulant que dans le cas où un certificat de conformité ne pourra pas être délivré, les parties se concerteront sur la suite à donner à cette question ; qu'il ressort par ailleurs des constatations de l'arrêt que les évacuations du bâtiment sont effectivement raccordées aux réseaux d'assainissement (réseau pluvial et réseau eaux usées) de la ville mais qu'elles ne le sont pas directement puisqu'un certain nombre de canalisations empruntent des réseaux voisins ; qu'en énonçant néanmoins que « la SCI Ivry Michelet qui ne s'est engagée, au terme de la promesse, qu'à délivrer un bien raccordé à l'assainissement communal mais a stipulé ne garantir aucunement la conformité des installations aux normes en vigueur, a rempli ses obligations aux termes de la promesse et il ne peut être retenu qu'elle avait l'obligation de délivrer un bien directement raccordé au réseau communal avec un réseau conforme sauf à rajouter une garantie qui ne figure pas dans la promesse et que la promesse comportait une clause de concertation entre les parties quant à la suite à donner à cette question dans l'hypothèse où un certificat de conformité ne pourrait pas être délivré », quand il résultait de la clause susvisée que la SCI Ivry Michelet s'était engagée à délivrer un bien dont toutes les évacuations étaient directement raccordées à l'assainissement communal de sorte qu'elle avait manqué à son obligation de délivrance, la cour d'appel a violé les articles 1603 et 1604 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1604 du code civil :
7. Il résulte de ce texte que le vendeur doit délivrer la chose conformément aux stipulations de l'acte de vente.
8. Pour rejeter la demande de la société Safedéveloppement formée au titre de la clause pénale, l'arrêt, après avoir constaté que les évacuations du bâtiment n'étaient pas directement raccordées aux réseaux d'assainissement de la ville puisqu'un certain nombre de canalisations empruntaient des réseaux voisins, retient que la société Ivry Michelet, qui s'était engagée à délivrer un bien raccordé à l'assainissement communal sans garantir la conformité des installations aux normes en vigueur, n'avait pas l'obligation de délivrer un bien directement raccordé au réseau communal avec un réseau conforme, sauf à rajouter une garantie qui ne figure pas dans la promesse.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la promesse de vente mentionnait que l'immeuble était raccordé à l'assainissement communal, ce dont il résultait que la société Ivry Michelet avait promis de vendre un bien dont toutes les canalisations y étaient directement raccordées, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Safedéveloppement de condamnation de la société civile immobilière Ivry Michelet à lui payer la somme de 405 000 euros à titre de clause pénale et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 16 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Ivry Michelet aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:C300410
CIV. 3
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 11 juillet 2024
Cassation partielle
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 410 F-D
Pourvoi n° E 22-24.357
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JUILLET 2024
La société Safedéveloppement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-24.357 contre l'arrêt rendu le 16 septembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Ivry Michelet, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société Compagnie européenne de garanties et cautions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La société Ivry Michelet a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Safedéveloppement, de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat de la société Ivry Michelet, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Compagnie européenne de garanties et cautions, après débats en l'audience publique du 4 juin 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 septembre 2022), par acte authentique du 24 mai 2016, la société Ivry Michelet, promettant, et la société Safedéveloppement, bénéficiaire, ont conclu une promesse synallagmatique de vente d'un immeuble moyennant le prix de 8 100 000 euros.
2. Une garantie autonome de paiement à première demande a été souscrite auprès de la Compagnie européenne de garanties et cautions (la CEGC) aux fins de garantir le paiement d'un acompte de 405 000 euros, la promesse de vente stipulant une clause pénale du même montant.
3. L'acte authentique de vente n'a pas été signé entre les parties à l'expiration du délai convenu.
4. Le promettant a assigné le bénéficiaire et le garant aux fins de paiement de la somme de 405 000 euros.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal
Enoncé du moyen
6. La société Safedéveloppement fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la société Ivry Michelet à lui payer la somme de 405 000 euros à titre de clause pénale et de la condamner à payer à la société Ivry Michelet la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel, alors « que le vendeur doit délivrer la chose conformément aux stipulations de l'acte de vente ; que lorsque le promettant déclare dans l'acte que le bien est raccordé au réseau d'assainissement public sans assortir cette déclaration d'une réserve expresse quant à l'existence d'un raccordement indirect, total ou partiel, à ce réseau, il s'engage à délivrer un bien dont toutes les évacuations y sont directement raccordées ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt qu'aux termes de la promesse synallagmatique de vente conclue le 24 mai 2016 avec la SAS Safedéveloppement, la SCI Ivry Michelet, promettante, a déclaré que le bien est raccordé à l'assainissement communal, mais qu'il ne garantit aucunement la conformité des installations aux normes actuellement en vigueur, la SCI Ivry Michelet s'étant par ailleurs engagée à demander dans les huit jours de la promesse à Veolia ou tout autre organisme habilité l'établissement d'un diagnostic de cette installation, la promesse stipulant que dans le cas où un certificat de conformité ne pourra pas être délivré, les parties se concerteront sur la suite à donner à cette question ; qu'il ressort par ailleurs des constatations de l'arrêt que les évacuations du bâtiment sont effectivement raccordées aux réseaux d'assainissement (réseau pluvial et réseau eaux usées) de la ville mais qu'elles ne le sont pas directement puisqu'un certain nombre de canalisations empruntent des réseaux voisins ; qu'en énonçant néanmoins que « la SCI Ivry Michelet qui ne s'est engagée, au terme de la promesse, qu'à délivrer un bien raccordé à l'assainissement communal mais a stipulé ne garantir aucunement la conformité des installations aux normes en vigueur, a rempli ses obligations aux termes de la promesse et il ne peut être retenu qu'elle avait l'obligation de délivrer un bien directement raccordé au réseau communal avec un réseau conforme sauf à rajouter une garantie qui ne figure pas dans la promesse et que la promesse comportait une clause de concertation entre les parties quant à la suite à donner à cette question dans l'hypothèse où un certificat de conformité ne pourrait pas être délivré », quand il résultait de la clause susvisée que la SCI Ivry Michelet s'était engagée à délivrer un bien dont toutes les évacuations étaient directement raccordées à l'assainissement communal de sorte qu'elle avait manqué à son obligation de délivrance, la cour d'appel a violé les articles 1603 et 1604 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1604 du code civil :
7. Il résulte de ce texte que le vendeur doit délivrer la chose conformément aux stipulations de l'acte de vente.
8. Pour rejeter la demande de la société Safedéveloppement formée au titre de la clause pénale, l'arrêt, après avoir constaté que les évacuations du bâtiment n'étaient pas directement raccordées aux réseaux d'assainissement de la ville puisqu'un certain nombre de canalisations empruntaient des réseaux voisins, retient que la société Ivry Michelet, qui s'était engagée à délivrer un bien raccordé à l'assainissement communal sans garantir la conformité des installations aux normes en vigueur, n'avait pas l'obligation de délivrer un bien directement raccordé au réseau communal avec un réseau conforme, sauf à rajouter une garantie qui ne figure pas dans la promesse.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la promesse de vente mentionnait que l'immeuble était raccordé à l'assainissement communal, ce dont il résultait que la société Ivry Michelet avait promis de vendre un bien dont toutes les canalisations y étaient directement raccordées, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Safedéveloppement de condamnation de la société civile immobilière Ivry Michelet à lui payer la somme de 405 000 euros à titre de clause pénale et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 16 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Ivry Michelet aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille vingt-quatre.