Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 27 juin 2024, 22-18.178, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 juin 2024




Rejet


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 632 F-B

Pourvoi n° P 22-18.178



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 JUIN 2024

La Société générale, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société Banque Kolb, a formé le pourvoi n° P 22-18.178 contre l'arrêt rendu le 26 avril 2022 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Lorraine, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Labaune, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la Société générale, venant aux droits de la société Banque Kolb, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Lorraine, et l'avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 mai 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Labaune, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 26 avril 2022) et les productions, à la suite d'un contrôle portant sur les années 2015 à 2017, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Lorraine (l'URSSAF) a notifié à la société Banque Kolb, aux droits de laquelle vient la Société générale (la société cotisante), une lettre d'observations du 29 octobre 2018 opérant, notamment, un redressement du chef de la contribution de l'employeur au financement des garanties de retraite supplémentaire, suivie de mises en demeure adressées à ses différents établissements.

2. La société cotisante a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société cotisante fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « qu'en application de l'article R. 243-59, dernier alinéa, du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur jusqu'au 11 juillet 2016 applicable au litige, l'absence d'observations ou l'acceptation explicite d'une pratique par l'URSSAF lors d'un précédent contrôle auprès d'un cotisant vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause et jusqu'à ce que l'URSSAF notifie au cotisant une décision contraire ; que ne peut constituer une décision contraire de l'URSSAF, mettant fin à son accord tacite, les observations formulées par cet organisme à l'occasion d'une procédure de redressement qui a été annulée par une décision définitive du tribunal des affaires de sécurité sociale, dès lors qu'en conséquence de cette annulation, la décision de l'URSSAF est réputée ne jamais avoir existé et est privée d'effet ; qu'en l'espèce, en jugeant à l'inverse que le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale ayant annulé le précédent redressement opéré par l'URSSAF en 2013 n'a pu avoir pour conséquence de remettre en cause la décision de l'URSSAF, formalisée dans un courrier du 4 octobre 2013, d'appliquer pour l'avenir la règle de droit qu'elle estime fondée et que, partant, le cotisant ne peut se prévaloir d'une décision implicite ou d'un accord tacite de l'URSSAF en raison d'une décision contraire postérieure, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

4. Selon l'article R. 243-59-7 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, applicable à la date du contrôle litigieux, sous réserve des conditions qu'il prévoit, le redressement établi en application des dispositions de l'article L. 243-7 ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de l'organisme effectuant le contrôle dans les conditions prévues à l'article R. 243-59.

5. Il résulte de ce texte que la notification par l'organisme de recouvrement d'une décision contraire de sa part avant le nouveau contrôle fait obstacle à ce que l'accord tacite antérieur de ce dernier puisse continuer à produire effet.

6. La notification d'une décision de redressement par l'organisme de recouvrement prive d'effet pour l'avenir son accord tacite antérieur, quand bien même ce redressement a été annulé par la décision d'une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

7. L'arrêt constate qu'au cours d'un précédent contrôle portant sur les années 2011 et 2012 ayant donné lieu à une lettre d'observations du 8 août 2013, l'URSSAF a notifié à la société cotisante un redressement au titre du régime supplémentaire de retraite, que par lettre du 4 octobre 2013, l'inspecteur du recouvrement a annulé ce chef de redressement en raison d'une décision implicite antérieure de non-assujettissement et que par jugement du 3 février 2016, un tribunal des affaires de sécurité sociale a annulé ce contrôle.

8. De ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que l'annulation par décision judiciaire du redressement notifié en 2013 ne pouvait priver celui-ci de son effet de remise en cause de l'accord tacite antérieur, de sorte que la société cotisante ne pouvait se prévaloir d'un accord tacite de l'URSSAF faisant obstacle au redressement notifié par lettre d'observations du 29 octobre 2018.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Condamne la Société générale, venant aux droits de la société Banque Kolb, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société générale, venant aux droits de la société Banque Kolb, et la condamne à payer à l'URSSAF de Lorraine la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille vingt-quatre. ECLI:FR:CCASS:2024:C200632
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