Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 mai 2024, 22-20.439, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 mai 2024, 22-20.439, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 22-20.439
- ECLI:FR:CCASS:2024:CO00242
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du vendredi 10 mai 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 22 juin 2022- Président
- M. Vigneau
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 mai 2024
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 242 F-B
Pourvoi n° W 22-20.439
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MAI 2024
La société Soc investissement gestion service - IGS, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-20.439 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2022 par la cour d'appel de Paris (pole 5, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société BNP Paribas, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Soc Investissement gestion service - IGS, de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, après débats en l'audience publique du 12 mars 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 juin 2022), par un acte du 13 avril 2010, la société BNP Paribas (la banque) a consenti à la société L'huitrière (la société) un prêt, garanti par le cautionnement solidaire de la société anonyme à directoire et conseil de surveillance Investissement gestion service (la société IGS).
2. La débitrice principale ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a assigné en paiement la société IGS, qui lui a opposé la nullité de son engagement de caution.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. La société IGS fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de vérification des signatures, de rejeter sa demande tendant à constater le défaut de validité du cautionnement, de dire que les droits attachés à la créance ont été préservés, et de la condamner à payer, en sa qualité de caution, à la société BNP Paribas la somme de 226 009,13 euros, alors « que les cautionnements donnés par des sociétés anonymes avec directoire et conseil de surveillance, autres que celles exploitant des établissements bancaires ou financiers, doivent faire l'objet d'une autorisation du conseil de surveillance donnée au directoire, qui peut lui-même déléguer le pouvoir qu'il a reçu ; qu'en retenant, pour juger le cautionnement valable et opposable, qu'"il ne résulte d'aucun texte, ni des statuts de la société IGS, que le président du directoire de celle-ci, [?] doive lui-même être habilité par une décision spéciale du directoire", quand il revient pourtant au directoire de déléguer, à son président ou à toute autre personne, les pouvoirs qu'il tient de l'autorisation du conseil de surveillance de conclure un cautionnement, la cour d'appel a violé les articles L. 225-68 al. 2 et R. 225-53 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 225-66, alinéa 1er, L. 225-68, alinéa 2, et R. 225-53 du code de commerce :
5. Aux termes du premier de ces textes, le président du directoire ou, le cas échéant, le directeur général unique, représente la société dans ses rapports avec les tiers.
6. Selon le deuxième, dans les sociétés anonymes avec directoire et conseil de surveillance, les statuts peuvent subordonner à l'autorisation préalable du conseil de surveillance la conclusion des opérations qu'ils énumèrent. Toutefois, les cautions, avals et garanties, sauf dans les sociétés exploitant un établissement bancaire ou financier, font l'objet d'une autorisation du conseil de surveillance dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.
7. Aux termes du troisième, le conseil de surveillance peut, dans la limite d'un montant total qu'il fixe, autoriser le directoire à donner des cautions, avals ou garanties au nom de la société. (...) Le directoire peut déléguer le pouvoir qu'il a reçu en application des alinéas précédents.
8. Il en résulte que si le président du directoire a le pouvoir d'exécuter une décision prise par le directoire, le cas échéant, pour certains actes au nombre desquels le cautionnement, en vertu d'une autorisation donnée au directoire par le conseil de surveillance, il ne peut, en l'absence d'une telle décision, décider par lui-même de consentir un engagement de caution au nom de la société que s'il a reçu du directoire délégation pour ce faire.
9. Pour rejeter la demande d'annulation du cautionnement de la société IGS,
l'arrêt retient qu'aux termes du procès-verbal du 6 octobre 2009, le conseil de surveillance a convenu : « [...] d'autoriser le directoire pour que la société se porte caution de la SARL L'HUITRIERE en vue de l'obtention d'un financement destiné à la réalisation de travaux nécessaires à son exploitation. ( ) A cette fin, le conseil de surveillance confère tous pouvoirs au directoire à l'effet de signer tous actes, percevoir toutes sommes, accorder les garanties demandées et généralement faire le nécessaire. » et ce, conformément à l'article L. 225-68 du code de commerce et à l'article 28-2 des statuts de la société IGS qui disposent que le conseil de surveillance peut, dans les limites qu'il fixe, autoriser le directoire, avec faculté de délégation, à céder à notamment constituer des sûretés ainsi que des cautions, avals ou garanties au nom de la société. L'arrêt ajoute qu'il ne résulte d'aucun texte, ni des statuts de la société IGS, que le président du directoire de celle-ci, lequel, aux termes de l'article L. 225-66 du code de commerce comme de l'article 18-3 de ses statuts, représente la société dans ses rapports avec les tiers, doive lui-même être habilité par une décision spéciale du directoire à conclure l'acte de caution que le directoire a été autorisé à passer par le conseil de surveillance.
10. En se déterminant ainsi, sans constater l'existence d'une décision du directoire d'autoriser le cautionnement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BNP Paribas et la condamne à payer à la société Investissement gestion service - IGS la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:CO00242
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 mai 2024
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 242 F-B
Pourvoi n° W 22-20.439
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MAI 2024
La société Soc investissement gestion service - IGS, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-20.439 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2022 par la cour d'appel de Paris (pole 5, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société BNP Paribas, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Soc Investissement gestion service - IGS, de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, après débats en l'audience publique du 12 mars 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 22 juin 2022), par un acte du 13 avril 2010, la société BNP Paribas (la banque) a consenti à la société L'huitrière (la société) un prêt, garanti par le cautionnement solidaire de la société anonyme à directoire et conseil de surveillance Investissement gestion service (la société IGS).
2. La débitrice principale ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a assigné en paiement la société IGS, qui lui a opposé la nullité de son engagement de caution.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. La société IGS fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de vérification des signatures, de rejeter sa demande tendant à constater le défaut de validité du cautionnement, de dire que les droits attachés à la créance ont été préservés, et de la condamner à payer, en sa qualité de caution, à la société BNP Paribas la somme de 226 009,13 euros, alors « que les cautionnements donnés par des sociétés anonymes avec directoire et conseil de surveillance, autres que celles exploitant des établissements bancaires ou financiers, doivent faire l'objet d'une autorisation du conseil de surveillance donnée au directoire, qui peut lui-même déléguer le pouvoir qu'il a reçu ; qu'en retenant, pour juger le cautionnement valable et opposable, qu'"il ne résulte d'aucun texte, ni des statuts de la société IGS, que le président du directoire de celle-ci, [?] doive lui-même être habilité par une décision spéciale du directoire", quand il revient pourtant au directoire de déléguer, à son président ou à toute autre personne, les pouvoirs qu'il tient de l'autorisation du conseil de surveillance de conclure un cautionnement, la cour d'appel a violé les articles L. 225-68 al. 2 et R. 225-53 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 225-66, alinéa 1er, L. 225-68, alinéa 2, et R. 225-53 du code de commerce :
5. Aux termes du premier de ces textes, le président du directoire ou, le cas échéant, le directeur général unique, représente la société dans ses rapports avec les tiers.
6. Selon le deuxième, dans les sociétés anonymes avec directoire et conseil de surveillance, les statuts peuvent subordonner à l'autorisation préalable du conseil de surveillance la conclusion des opérations qu'ils énumèrent. Toutefois, les cautions, avals et garanties, sauf dans les sociétés exploitant un établissement bancaire ou financier, font l'objet d'une autorisation du conseil de surveillance dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat.
7. Aux termes du troisième, le conseil de surveillance peut, dans la limite d'un montant total qu'il fixe, autoriser le directoire à donner des cautions, avals ou garanties au nom de la société. (...) Le directoire peut déléguer le pouvoir qu'il a reçu en application des alinéas précédents.
8. Il en résulte que si le président du directoire a le pouvoir d'exécuter une décision prise par le directoire, le cas échéant, pour certains actes au nombre desquels le cautionnement, en vertu d'une autorisation donnée au directoire par le conseil de surveillance, il ne peut, en l'absence d'une telle décision, décider par lui-même de consentir un engagement de caution au nom de la société que s'il a reçu du directoire délégation pour ce faire.
9. Pour rejeter la demande d'annulation du cautionnement de la société IGS,
l'arrêt retient qu'aux termes du procès-verbal du 6 octobre 2009, le conseil de surveillance a convenu : « [...] d'autoriser le directoire pour que la société se porte caution de la SARL L'HUITRIERE en vue de l'obtention d'un financement destiné à la réalisation de travaux nécessaires à son exploitation. ( ) A cette fin, le conseil de surveillance confère tous pouvoirs au directoire à l'effet de signer tous actes, percevoir toutes sommes, accorder les garanties demandées et généralement faire le nécessaire. » et ce, conformément à l'article L. 225-68 du code de commerce et à l'article 28-2 des statuts de la société IGS qui disposent que le conseil de surveillance peut, dans les limites qu'il fixe, autoriser le directoire, avec faculté de délégation, à céder à notamment constituer des sûretés ainsi que des cautions, avals ou garanties au nom de la société. L'arrêt ajoute qu'il ne résulte d'aucun texte, ni des statuts de la société IGS, que le président du directoire de celle-ci, lequel, aux termes de l'article L. 225-66 du code de commerce comme de l'article 18-3 de ses statuts, représente la société dans ses rapports avec les tiers, doive lui-même être habilité par une décision spéciale du directoire à conclure l'acte de caution que le directoire a été autorisé à passer par le conseil de surveillance.
10. En se déterminant ainsi, sans constater l'existence d'une décision du directoire d'autoriser le cautionnement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BNP Paribas et la condamne à payer à la société Investissement gestion service - IGS la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille vingt-quatre.