Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 avril 2024, 22-13.664, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 avril 2024, 22-13.664, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 22-13.664
- ECLI:FR:CCASS:2024:SO00411
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 24 avril 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, du 20 janvier 2022- Président
- M. Sommer
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 avril 2024
Cassation partielle
M. SOMMER, président
Arrêt n° 411 FS-B
Pourvoi n° H 22-13.664
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 AVRIL 2024
M. [F] [B], domicilié chez [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 22-13.664 contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à l'association Père Le Bideau, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [B], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de l'association Père Le Bideau, et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 mars 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Rouchayrole, Flores, Mmes Deltort, Le Quellec, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Techer, Rodrigues, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 20 janvier 2022), M. [B] a été engagé en qualité de professeur d'éducation physique et sportive par l'association Père Le Bideau le 1er septembre 2003.
2. Cette association gère un institut scolaire éducatif et professionnel ( ISEP) "[4]" devenu institut thérapeutique et pédagogique (ITEP) accueillant des jeunes en difficulté.
3. La convention collective applicable est la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées du 15 mars 1966.
4. Le 13 février 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes portant sur l'exécution du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'un rappel de congés payés, alors :
« 1° / que selon l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 relatif aux emplois d'EPS et d'APS à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, ''Par dérogation aux dispositions de l'article 22 « Congés payés annuels » des dispositions permanentes et de l'article 6 « Congés payés annuels supplémentaires » de l'annexe n° 3, le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges, en fonction du calendrier scolaire de l'académie du lieu d'implantation de l'établissement'' ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que ''les dispositions conventionnelles qui attribuent expressément le bénéfice des congés scolaires aux seuls professeurs d'éducation physique et sportive travaillant dans les établissements du second degré, ne peuvent être étendues aux enseignants travaillant dans un autre type de structure, tel que l'ITEP [3] exploité par l'association APLB'' ; qu'en statuant ainsi, quand tous les professeurs d'éducation physique et sportive travaillant au sein des unités d'enseignement des établissements médico-sociaux relevant de la convention collective du 15 mars 1966 et dispensant un enseignement à des jeunes de 12 à 21 ans ont droit à une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS de l'Education nationale, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble l'article L. 112-1 du code de l'éducation ;
2°/ que l'article 1er de l'avenant n° 292 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées prévoit que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; que les établissements du second degré scolarisent des enfants à partir de l'âge de 12 ans ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la qualification d'établissement du second degré ne dépendait pas que d'un critère d'âge des élèves, de sorte que l'ITEP [3] pouvait avoir la qualification d'école primaire alors même qu'il accueillait des jeunes de 12 ans à 21 ans ; qu'en statuant ainsi quand la qualification d'établissement du premier degré ne peut être retenue pour un établissement dispensant un enseignement à des jeunes de plus de 12 ans, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation ;
3°/ que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; qu'en l'espèce, pour débouter M. [B] de sa demande de rappel de congés payés, la cour d'appel a retenu que « l'article 1er du contrat signé entre le préfet de la Charente et le directeur de l'école primaire privée ISEP de ''[4]'', désormais dénommée ITEP [3] stipule : ''Un contrat simple est conclu entre l'Etat et l'école primaire privée ISEP de « [4] » (...). Il est donc expressément fait référence à une école primaire'' ; qu'en s'appuyant sur un contrat datant de 1991 conclu pour l'ISEP qui ne gérait alors qu'une école primaire avec deux classes spécialisées, à une époque où l'ITEP [3], créé en 2008, n'existait pas encore, la cour d'appel, qui a statué par un motif impropre à écarter la qualification d'établissement du second degré de l'ITEP [3], a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation ;
4°/ que l'article 1er de l'avenant n° 292 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées prévoit que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; qu'en l'espèce, en retenant que le fait qu'une collègue du salarié ait perçu en septembre 2018 une ''indemnité d'enseignement Segpa'' n'était ''pas plus pertinent pour remettre en cause la qualification retenue d'établissement primaire, telle qu'elle résulte de la convention conclue avec le préfet de la Charente'', quand, au contraire, le fait que des primes Segpa soient versées démontrait que l'établissement assurait un enseignement à des jeunes de la 6e à la 3e présentant des difficultés scolaires importantes et ne pouvait donc être un établissement du premier degré, la cour d'appel a violé l'article 1er de l'avenant n° 292 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation ;
5°/ que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; qu'en l'espèce, en retenant que ''l'ITEP [3] emploie des professeurs des écoles'', quand un professeur des écoles peut parfaitement enseigner dans le second degré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation. »
Réponse de la Cour
6. Selon l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 relatif aux emplois d'EPS et d'APS attaché à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, par dérogation aux dispositions de l'article 22 "Congés payés annuels" des dispositions permanentes et de l'article 6 "Congés payés annuels supplémentaires" de l'annexe n° 3, le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges, en fonction du calendrier scolaire de l'académie du lieu d'implantation de l'établissement.
7. Après avoir énoncé à bon droit que la qualification d'établissement secondaire ne pouvait reposer uniquement sur la prise en compte d'un critère d'âge des élèves, la cour d'appel, qui a constaté qu'avait été conclu entre le directeur de l'école primaire privée ISEP "[4]" devenue ITEP [3] et l'Etat un contrat simple concernant une école primaire privée et qui, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments produits, a retenu que rien ne permettait de considérer que ce contrat avait pris fin et fait ressortir que les éléments versés par le salarié ne permettaient pas d'établir qu'un enseignement de second degré était dispensé au sein de l'ITEP, en a exactement déduit que la qualification d'établissement primaire ne pouvait valablement être remise en cause, en sorte que le salarié ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2014.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors « que le juge doit examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ces décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que ''les sanctions en date des 18 mars 2015 et 8 janvier 2016 n'ont pas été contestées en temps utile par M. [B] et ne peuvent donc être aujourd'hui utilement remises en cause par l'intéressé, tandis que l'avertissement du 2 mars 2018 prononcé pour un comportement inadapté et qui est d'ailleurs relatif à la réitération d'un comportement similaire, précédemment sanctionné le 8 janvier 2016, ne révèle, pas plus que l'avertissement annulé du 15 février 2016, le moindre lien avec des revendications salariales de M. [B]'' et en a conclu que ''ce fait invoqué par l'intimé n'est donc pas pertinent'' ; qu'elle a aussi relevé que M. [B] invoquait sur l'unique témoignage de Mme [I] avoir fait l'objet d'un traitement particulier, mais que cette attestation était imprécise et qu' ''aucun élément dans les pièces relatives à ces sanctions disciplinaires ne laisse supposer qu'elles aient été détournées de leur objet et aient eu pour objet ou effet de porter atteinte à la santé ou à la dignité du salarié'', de sorte que ce second fait invoqué par l'intimé n'était pas plus pertinent ; qu'en procédant ainsi à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié et en examinant pour chacun d'eux les éléments avancés par l'employeur pour les justifier, sans avoir préalablement recherché si, pris dans leur ensemble, ils ne laissaient pas présumer un harcèlement moral, de sorte que c'était à l'employeur de justifier qu'ils étaient étrangers à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail :
10. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
11. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt retient qu'en premier lieu, le salarié évoque le déroulement chronologique des sanctions prononcées à son encontre, qui établirait que l'employeur a entendu lui faire payer sa pugnacité sur ses demandes relatives au bénéfice des règles relatives à l'ancienneté ainsi que le bénéfice des congés basés sur les périodes scolaires. Il relève qu'outre le fait que l'examen des courriers échangés au sujet des dispositions conventionnelles relatives à l'ancienneté et aux congés ne met nullement en évidence d'agissements répétés destinés à déstabiliser le salarié au motif de revendications salariales qui au demeurant s'avèrent mal fondées, les sanctions en date des 18 mars 2015 et 8 janvier 2016 n'ont pas été contestées en temps utile par le salarié et ne peuvent donc être aujourd'hui utilement remises en cause, tandis que l'avertissement du 2 mars 2018 prononcé pour un comportement inadapté et qui est relatif à la réitération d'un comportement similaire, précédemment sanctionné le 8 janvier 2016, ne révèle, pas plus que l'avertissement annulé du 15 février 2016, le moindre lien avec des revendications salariales de l'intéressé. Il en conclut que ce fait n'est pas pertinent.
12. L'arrêt ajoute qu'en deuxième lieu, le salarié invoque l'attestation de Mme [I], en date du 6 décembre 2017, dans laquelle cette salariée affirme que son collègue a été sanctionné pour des postures professionnelles identiques à celles d'autres salariés et que la direction de l'époque a eu des positionnements différents selon les personnes. Il retient que le salarié affirme sur la base de cet unique témoignage avoir fait l'objet d'un traitement particulier. Il retient qu'outre le pouvoir d'individualisation des sanctions dont dispose l'employeur en dehors de toute discrimination, non invoquée en l'espèce, l'attestation est établie en termes généraux, sans la moindre précision tant sur les postures professionnelles des autres salariés que sur l'existence d'agissements répétés visant précisément le salarié, de nature à laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral perpétré sur la personne de ce dernier, tandis qu'outre l'absence de contestation dans les délais requis de deux sanctions sur quatre et de l'annulation d'un unique avertissement en date du 15 février 2016 sur le seul fondement de la règle non bis in idem, aucun élément dans les pièces relatives à ces sanctions disciplinaires ne laisse supposer qu'elles aient été détournées de leur objet et aient eu pour objet ou effet de porter atteinte à la santé ou à la dignité du salarié. Il en conclut que le fait invoqué par le salarié n'est donc pas plus pertinent.
13. L'arrêt ajoute encore qu'en troisième lieu, le salarié produit une attestation de M. [M], autre collègue de travail, qui indique que face à l'investissement du salarié dans son travail, il a trouvé déplacée l'obstination dont a fait preuve Mme [N] à son encontre, qu'il produit encore un certificat établi le 15 novembre 2017 par son médecin traitant, qui indique que l'intéressé a consulté à plusieurs reprises au cabinet pour des problèmes qu'il disait liés à un conflit au travail qu'il estimait être du harcèlement avec à la clé des arrêts de travail.
14. La cour d'appel a jugé que ces éléments de fait pouvaient laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral mais que toutefois en l'absence d'éléments précis visés dans les attestations, qu'il s'agisse de la teneur des avertissements téléphoniques le week-end, de celle des propos diffamatoires qui auraient été tenus concernant le salarié ou encore de la nature des "injonctions arbitraires" ou des manifestations d'une "obstination" dont le salarié aurait fait l'objet et alors qu'aucun lien de cause à effet ne pouvait être établi entre les doléances exprimées par l'intéressé auprès de son médecin traitant et un comportement inadapté de l'employeur, lequel produisait le compte rendu de la réunion exceptionnelle du comité social et économique central du 12 décembre 2019, à laquelle participaient des représentants de la direction et des salariés ainsi que le médecin du travail, l'inspectrice du travail et un représentant de la CARSAT, ayant conclu à l'absence de harcèlement suite à l'enquête interne mise en oeuvre, établissant ainsi que les agissements reprochés étaient étrangers à tout harcèlement moral.
15. Elle en a déduit que tous ces éléments, pris dans leur ensemble, conduisaient à rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
16. En statuant ainsi, en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié et en examinant pour chacun d'eux les éléments avancés par l'employeur pour les justifier, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis et les certificats médicaux laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation du chef de dispositif se rapportant au harcèlement moral, n'emporte pas celle du chef de dispositif de l'arrêt condamnant l'association Père Le Bideau aux dépens, justifié par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [B] de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt rendu le 20 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne l'association Père Le Bideau aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Père Le Bideau et la condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:SO00411
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 avril 2024
Cassation partielle
M. SOMMER, président
Arrêt n° 411 FS-B
Pourvoi n° H 22-13.664
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 AVRIL 2024
M. [F] [B], domicilié chez [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 22-13.664 contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à l'association Père Le Bideau, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [B], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de l'association Père Le Bideau, et l'avis de M. Halem, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 mars 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, MM. Rouchayrole, Flores, Mmes Deltort, Le Quellec, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Techer, Rodrigues, conseillers référendaires, M. Halem, avocat général référendaire, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 20 janvier 2022), M. [B] a été engagé en qualité de professeur d'éducation physique et sportive par l'association Père Le Bideau le 1er septembre 2003.
2. Cette association gère un institut scolaire éducatif et professionnel ( ISEP) "[4]" devenu institut thérapeutique et pédagogique (ITEP) accueillant des jeunes en difficulté.
3. La convention collective applicable est la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées du 15 mars 1966.
4. Le 13 février 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes portant sur l'exécution du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'un rappel de congés payés, alors :
« 1° / que selon l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 relatif aux emplois d'EPS et d'APS à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, ''Par dérogation aux dispositions de l'article 22 « Congés payés annuels » des dispositions permanentes et de l'article 6 « Congés payés annuels supplémentaires » de l'annexe n° 3, le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges, en fonction du calendrier scolaire de l'académie du lieu d'implantation de l'établissement'' ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que ''les dispositions conventionnelles qui attribuent expressément le bénéfice des congés scolaires aux seuls professeurs d'éducation physique et sportive travaillant dans les établissements du second degré, ne peuvent être étendues aux enseignants travaillant dans un autre type de structure, tel que l'ITEP [3] exploité par l'association APLB'' ; qu'en statuant ainsi, quand tous les professeurs d'éducation physique et sportive travaillant au sein des unités d'enseignement des établissements médico-sociaux relevant de la convention collective du 15 mars 1966 et dispensant un enseignement à des jeunes de 12 à 21 ans ont droit à une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS de l'Education nationale, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble l'article L. 112-1 du code de l'éducation ;
2°/ que l'article 1er de l'avenant n° 292 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées prévoit que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; que les établissements du second degré scolarisent des enfants à partir de l'âge de 12 ans ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la qualification d'établissement du second degré ne dépendait pas que d'un critère d'âge des élèves, de sorte que l'ITEP [3] pouvait avoir la qualification d'école primaire alors même qu'il accueillait des jeunes de 12 ans à 21 ans ; qu'en statuant ainsi quand la qualification d'établissement du premier degré ne peut être retenue pour un établissement dispensant un enseignement à des jeunes de plus de 12 ans, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation ;
3°/ que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; qu'en l'espèce, pour débouter M. [B] de sa demande de rappel de congés payés, la cour d'appel a retenu que « l'article 1er du contrat signé entre le préfet de la Charente et le directeur de l'école primaire privée ISEP de ''[4]'', désormais dénommée ITEP [3] stipule : ''Un contrat simple est conclu entre l'Etat et l'école primaire privée ISEP de « [4] » (...). Il est donc expressément fait référence à une école primaire'' ; qu'en s'appuyant sur un contrat datant de 1991 conclu pour l'ISEP qui ne gérait alors qu'une école primaire avec deux classes spécialisées, à une époque où l'ITEP [3], créé en 2008, n'existait pas encore, la cour d'appel, qui a statué par un motif impropre à écarter la qualification d'établissement du second degré de l'ITEP [3], a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation ;
4°/ que l'article 1er de l'avenant n° 292 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées prévoit que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; qu'en l'espèce, en retenant que le fait qu'une collègue du salarié ait perçu en septembre 2018 une ''indemnité d'enseignement Segpa'' n'était ''pas plus pertinent pour remettre en cause la qualification retenue d'établissement primaire, telle qu'elle résulte de la convention conclue avec le préfet de la Charente'', quand, au contraire, le fait que des primes Segpa soient versées démontrait que l'établissement assurait un enseignement à des jeunes de la 6e à la 3e présentant des difficultés scolaires importantes et ne pouvait donc être un établissement du premier degré, la cour d'appel a violé l'article 1er de l'avenant n° 292 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation ;
5°/ que le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges ; qu'en l'espèce, en retenant que ''l'ITEP [3] emploie des professeurs des écoles'', quand un professeur des écoles peut parfaitement enseigner dans le second degré, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 à la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, ensemble les articles L. 331-1, L. 332-2 et D. 311-10 du code de l'éducation. »
Réponse de la Cour
6. Selon l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2004 relatif aux emplois d'EPS et d'APS attaché à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, par dérogation aux dispositions de l'article 22 "Congés payés annuels" des dispositions permanentes et de l'article 6 "Congés payés annuels supplémentaires" de l'annexe n° 3, le professeur d'éducation physique et sportive travaillant dans un établissement du second degré bénéficie d'une durée de congés identique à celle dont bénéficient les professeurs d'EPS des lycées et collèges, en fonction du calendrier scolaire de l'académie du lieu d'implantation de l'établissement.
7. Après avoir énoncé à bon droit que la qualification d'établissement secondaire ne pouvait reposer uniquement sur la prise en compte d'un critère d'âge des élèves, la cour d'appel, qui a constaté qu'avait été conclu entre le directeur de l'école primaire privée ISEP "[4]" devenue ITEP [3] et l'Etat un contrat simple concernant une école primaire privée et qui, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments produits, a retenu que rien ne permettait de considérer que ce contrat avait pris fin et fait ressortir que les éléments versés par le salarié ne permettaient pas d'établir qu'un enseignement de second degré était dispensé au sein de l'ITEP, en a exactement déduit que la qualification d'établissement primaire ne pouvait valablement être remise en cause, en sorte que le salarié ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 1er de l'avenant n° 292 du 14 janvier 2014.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors « que le juge doit examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ces décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que ''les sanctions en date des 18 mars 2015 et 8 janvier 2016 n'ont pas été contestées en temps utile par M. [B] et ne peuvent donc être aujourd'hui utilement remises en cause par l'intéressé, tandis que l'avertissement du 2 mars 2018 prononcé pour un comportement inadapté et qui est d'ailleurs relatif à la réitération d'un comportement similaire, précédemment sanctionné le 8 janvier 2016, ne révèle, pas plus que l'avertissement annulé du 15 février 2016, le moindre lien avec des revendications salariales de M. [B]'' et en a conclu que ''ce fait invoqué par l'intimé n'est donc pas pertinent'' ; qu'elle a aussi relevé que M. [B] invoquait sur l'unique témoignage de Mme [I] avoir fait l'objet d'un traitement particulier, mais que cette attestation était imprécise et qu' ''aucun élément dans les pièces relatives à ces sanctions disciplinaires ne laisse supposer qu'elles aient été détournées de leur objet et aient eu pour objet ou effet de porter atteinte à la santé ou à la dignité du salarié'', de sorte que ce second fait invoqué par l'intimé n'était pas plus pertinent ; qu'en procédant ainsi à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié et en examinant pour chacun d'eux les éléments avancés par l'employeur pour les justifier, sans avoir préalablement recherché si, pris dans leur ensemble, ils ne laissaient pas présumer un harcèlement moral, de sorte que c'était à l'employeur de justifier qu'ils étaient étrangers à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail :
10. Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
11. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt retient qu'en premier lieu, le salarié évoque le déroulement chronologique des sanctions prononcées à son encontre, qui établirait que l'employeur a entendu lui faire payer sa pugnacité sur ses demandes relatives au bénéfice des règles relatives à l'ancienneté ainsi que le bénéfice des congés basés sur les périodes scolaires. Il relève qu'outre le fait que l'examen des courriers échangés au sujet des dispositions conventionnelles relatives à l'ancienneté et aux congés ne met nullement en évidence d'agissements répétés destinés à déstabiliser le salarié au motif de revendications salariales qui au demeurant s'avèrent mal fondées, les sanctions en date des 18 mars 2015 et 8 janvier 2016 n'ont pas été contestées en temps utile par le salarié et ne peuvent donc être aujourd'hui utilement remises en cause, tandis que l'avertissement du 2 mars 2018 prononcé pour un comportement inadapté et qui est relatif à la réitération d'un comportement similaire, précédemment sanctionné le 8 janvier 2016, ne révèle, pas plus que l'avertissement annulé du 15 février 2016, le moindre lien avec des revendications salariales de l'intéressé. Il en conclut que ce fait n'est pas pertinent.
12. L'arrêt ajoute qu'en deuxième lieu, le salarié invoque l'attestation de Mme [I], en date du 6 décembre 2017, dans laquelle cette salariée affirme que son collègue a été sanctionné pour des postures professionnelles identiques à celles d'autres salariés et que la direction de l'époque a eu des positionnements différents selon les personnes. Il retient que le salarié affirme sur la base de cet unique témoignage avoir fait l'objet d'un traitement particulier. Il retient qu'outre le pouvoir d'individualisation des sanctions dont dispose l'employeur en dehors de toute discrimination, non invoquée en l'espèce, l'attestation est établie en termes généraux, sans la moindre précision tant sur les postures professionnelles des autres salariés que sur l'existence d'agissements répétés visant précisément le salarié, de nature à laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral perpétré sur la personne de ce dernier, tandis qu'outre l'absence de contestation dans les délais requis de deux sanctions sur quatre et de l'annulation d'un unique avertissement en date du 15 février 2016 sur le seul fondement de la règle non bis in idem, aucun élément dans les pièces relatives à ces sanctions disciplinaires ne laisse supposer qu'elles aient été détournées de leur objet et aient eu pour objet ou effet de porter atteinte à la santé ou à la dignité du salarié. Il en conclut que le fait invoqué par le salarié n'est donc pas plus pertinent.
13. L'arrêt ajoute encore qu'en troisième lieu, le salarié produit une attestation de M. [M], autre collègue de travail, qui indique que face à l'investissement du salarié dans son travail, il a trouvé déplacée l'obstination dont a fait preuve Mme [N] à son encontre, qu'il produit encore un certificat établi le 15 novembre 2017 par son médecin traitant, qui indique que l'intéressé a consulté à plusieurs reprises au cabinet pour des problèmes qu'il disait liés à un conflit au travail qu'il estimait être du harcèlement avec à la clé des arrêts de travail.
14. La cour d'appel a jugé que ces éléments de fait pouvaient laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral mais que toutefois en l'absence d'éléments précis visés dans les attestations, qu'il s'agisse de la teneur des avertissements téléphoniques le week-end, de celle des propos diffamatoires qui auraient été tenus concernant le salarié ou encore de la nature des "injonctions arbitraires" ou des manifestations d'une "obstination" dont le salarié aurait fait l'objet et alors qu'aucun lien de cause à effet ne pouvait être établi entre les doléances exprimées par l'intéressé auprès de son médecin traitant et un comportement inadapté de l'employeur, lequel produisait le compte rendu de la réunion exceptionnelle du comité social et économique central du 12 décembre 2019, à laquelle participaient des représentants de la direction et des salariés ainsi que le médecin du travail, l'inspectrice du travail et un représentant de la CARSAT, ayant conclu à l'absence de harcèlement suite à l'enquête interne mise en oeuvre, établissant ainsi que les agissements reprochés étaient étrangers à tout harcèlement moral.
15. Elle en a déduit que tous ces éléments, pris dans leur ensemble, conduisaient à rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
16. En statuant ainsi, en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par le salarié et en examinant pour chacun d'eux les éléments avancés par l'employeur pour les justifier, alors qu'il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis et les certificats médicaux laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation du chef de dispositif se rapportant au harcèlement moral, n'emporte pas celle du chef de dispositif de l'arrêt condamnant l'association Père Le Bideau aux dépens, justifié par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [B] de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt rendu le 20 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne l'association Père Le Bideau aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Père Le Bideau et la condamne à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille vingt-quatre.