Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 janvier 2024, 22-13.200, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 10 janvier 2024, 22-13.200, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 22-13.200
- ECLI:FR:CCASS:2024:SO00022
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mercredi 10 janvier 2024
Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, du 12 janvier 2022- Président
- M. Sommer
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
HP
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 janvier 2024
Cassation
M. SOMMER, président
Arrêt n° 22 FS-B
Pourvoi n° C 22-13.200
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 JANVIER 2024
M. [E] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 22-13.200 contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2022 par la cour d'appel de Limoges (chambre économique et sociale), dans le litige l'opposant à la société Hôtel [2], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Poupet et Kacenelenbogen, avocat de M. [D], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Hôtel [2], et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, M. Rouchayrole, Mmes Deltort, Le Quellec, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, Rodrigues, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 12 janvier 2022), M. [D] a été engagé en qualité de directeur de l'hôtel [4] d'[Localité 5] (19) le 1er septembre 2016. Le contrat prévoyait un forfait annuel de deux cent dix-sept jours.
2. Le forfait annuel ayant été dépassé de vingt-cinq jours en 2016, puis de vingt-six jours en 2017, la direction a limité à cent soixante-six jours le forfait en 2018, lequel a été dépassé de trente jours.
3. Par lettre du 28 janvier 2019, le salarié a démissionné à effet du 31 mars 2019.
4. Le 6 mai 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors :
« 2°/ qu'aux termes de l'article L. 3121-60 du code du travail, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ; qu'en application de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants, relatif au suivi du temps de travail, chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours devra bénéficier chaque année d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées la charge de travail du salarié, l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale, ainsi que sa rémunération ; que la méconnaissance par l'employeur de son obligation d'organiser un entretien annuel individuel avec le salarié ayant conclu une convention de forfait jours, mesure destinée à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, prive d'effet la convention de forfait jours ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'un entretien annuel avait eu lieu le 13 décembre 2017, le compte-rendu de cet entretien indiquant que la charge de travail de M. [D] "avait un impact sérieux d'un niveau 4/5", le forfait de M. [D] ayant été dépassé (244 jours au lieu de 218) ce qui avait un impact notable sur la situation du salarié ; que la cour d'appel a encore constaté "qu'aucun entretien annuel n'a eu lieu en 2018" ; qu'il en résultait que la convention de forfait jours signée par M. [D] était privée d'effet, faute pour l'employeur d'avoir respecté son obligation d'organiser un entretien annuel individuel ; qu'en énonçant néanmoins, pour débouter M. [D] de ses demandes, que celui-ci n'était "pas fondé à invoquer l'absence de l'entretien annuel en 2018, prévu par l'article 2.4 de l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016, pour voir privée d'effet la convention de forfait jours le concernant", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article L. 3121-60 du code du travail et l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants ;
3°/ qu'aux termes de l'article L. 3121-60 du code du travail, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ; qu'en application de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants, relatif au suivi du temps de travail, chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours devra bénéficier chaque année d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées la charge de travail du salarié, l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale, ainsi que sa rémunération ; que la méconnaissance par l'employeur de son obligation d'organiser un entretien annuel individuel avec le salarié ayant conclu une convention de forfait jours, mesure destinée à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, prive d'effet la convention de forfait jours ; qu'en déboutant M. [D] de ses demandes, aux motifs inopérants que la société [2] justifiait qu'en raison de la démission de son directeur général, M. [L], le 31 décembre 2018, et de la prise de poste très récente au 21 janvier 2019 du nouveau directeur des opérations, M. [K], les directeurs des différents hôtels avaient été convoqués à l'entretien individuel de suivi du forfait cadre au titre de l'année 2018 en mars 2019, que dans ce cadre, M. [D] avait été convoqué le 6 mars 2019 mais avait refusé cet entretien par mail en faisant valoir que la période concernée était dépassée et que son contrat se terminant le 31 mars 2019, le recul de la date de l'entretien de M. [D] était "admissible et légitime" de la part de l'employeur et que si le salarié était resté en poste, l'entretien de 2018 se serait déroulé en mars 2019 et celui relatif à l'année 2019 fin 2019, les dispositions conventionnelles étant respectées, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à justifier légalement sa décision, en violation de l'article L. 3121-60 du code du travail et de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
6. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016 était bien applicable à la convention de forfait en jours, au plus tard à compter du 1er avril 2018, et que pour la période antérieure, l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014, entré en vigueur le 1er avril 2016, n'était applicable que sous réserve du respect de mesures complémentaires de l'employeur, de sorte que le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, tirées de la violation du seul avenant n° 22 du 16 décembre 2014, le cas échéant conjugué avec l'article L. 3121-60 du code du travail, est imprécis.
7. Cependant, le moyen, qui précise le cas d'ouverture invoqué, la partie critiquée de la décision et ce en quoi elle encourt le reproche allégué, n'est pas imprécis.
8. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles L. 3121-60, L. 3121-64, II, du code du travail, 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 à la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants (HCR) du 30 avril 1997, relatif aux cadres autonomes, étendu par arrêté du 29 février 2016 et 2.4 de l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016, relatif aux cadres autonomes, étendu par arrêté du 9 mars 2018 :
9. Aux termes du premier de ces textes, dont les dispositions sont d'ordre public, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
10. Selon le deuxième, l'accord collectif autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours détermine les modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération, ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise.
11. Selon les deux derniers, chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours devra bénéficier chaque année d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées la charge de travail du salarié, l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale ainsi que sa rémunération.
12. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la convention individuelle de forfait en jours, l'arrêt, après avoir constaté qu'aucun entretien annuel n'avait eu lieu en 2018, retient que l'employeur justifie qu'en raison de la démission de son directeur général, le 31 décembre 2018, et de la prise de fonction le 21 janvier 2019 du nouveau directeur des opérations, les directeurs des différents hôtels ont été convoqués à l'entretien individuel de suivi du forfait cadre au titre de l'année 2018, en mars 2019. Il ajoute qu'eu égard à la nécessité de décaler l'ensemble des entretiens des directeurs du fait des contraintes de la société, le recul de la date d'entretien du salarié au 6 mars 2019 était admissible et légitime.
13. En statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de contraintes internes à l'entreprise, alors qu'elle avait constaté que, lors de l'entretien réalisé en 2017, le salarié avait signalé l'impact sérieux de sa charge de travail et le non-respect ponctuel du repos hebdomadaire, que le repos hebdomadaire n'avait pas été respecté à plusieurs reprises en 2018 et que les convocations pour l'entretien pour 2018 n'avaient été adressées qu'en mars 2019, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
14. Le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'aux termes de l'article L. 3121-60 du code du travail, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ; qu'en application de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants, relatif au suivi du temps de travail, "l'employeur tient un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées travaillées, le positionnement et la qualification des jours de repos (repos hebdomadaire, congés payés, jours fériés (...) ; que ce document sera tenu à la disposition de l'inspection du travail et permettra au supérieur hiérarchique (...) d'assurer un suivi de l'organisation du travail du salarié, afin de veiller à ce que l'amplitude et la charge de travail soient raisonnables (...) ; ces cadres doivent bénéficier des dispositions relatives au repos quotidien minimal prévu à l'article 21.4 de la convention collective nationale des HCR et au repos hebdomadaire prévu à l'article 21.3 de ladite convention" ; que des solutions à la surcharge de travail d'un salarié doivent être recherchées et trouvées et que les garanties mises en place par l'accord collectif doivent avoir été effectives ; que la méconnaissance, par l'employeur, de son obligation de veiller à ce que l'amplitude et la charge de travail du salarié restent raisonnables et de vérifier le respect du repos quotidien et hebdomadaire par le salarié, mesures destinées à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, prive d'effet la convention de forfait jours ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, d'abord, que M. [D] avait, lors de l'entretien annuel du 13 décembre 2017, indiqué que sa charge de travail avait un impact sérieux et qu'il avait dépassé son forfait annuel ; qu'elle a relevé, ensuite, que M. [D] avait effectivement alerté le service des ressources humaines sur sa fatigue et sur la surcharge de travail, par mails des 26 juin 2018, 6 juillet 2018 et 20 août 2018 et que le salarié avait dépassé son forfait de 25 jours en 2016, de 16 jours en 2017 et de 30 jours en 2018 ; qu'elle a ajouté que M. [D] avait parfois travaillé "plus de six jours de suite (en 2016, janvier, mars, octobre, novembre 2017, janvier, juin, août 2018)" ; qu'il ressortait de ces constatations que l'employeur avait méconnu son obligation d'assurer un suivi de l'organisation du travail de M. [D] afin de veiller à ce que son amplitude et sa charge de travail restent raisonnables ; qu'il s'en déduit que l'employeur n'avait pas recherché ni trouvé de solutions à la surcharge de travail du salarié et n'avait pas vérifié le respect des règles relatives au repos quotidien et hebdomadaire par M. [D], de sorte que les garanties mises en place par l'accord collectif n'avaient pas été effectives ; que, dès lors, en déboutant M. [D] de ses demandes, la cour d'appel n'a donc pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, violant les articles L. 3121-60 du code du travail et 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
15. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016 était bien applicable à la convention de forfait en jours, au plus tard à compter du 1er avril 2018, et que pour la période antérieure, l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014, entré en vigueur le 1er avril 2016, n'était applicable que sous réserve du respect de mesures complémentaires de l'employeur, de sorte que le moyen, pris en sa cinquième branche, tiré de la violation du seul avenant n° 22 du 16 décembre 2014, le cas échéant conjugué avec l'article L. 3121-60 du code du travail, est imprécis.
16. Cependant, le moyen, qui précise le cas d'ouverture invoqué, la partie critiquée de la décision et ce en quoi elle encourt le reproche allégué, n'est pas imprécis.
17. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles L. 3121-60, L. 3121-64 et L. 4121-1 du code du travail :
18. Aux termes du premier de ces textes, dont les dispositions sont d'ordre public, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
19. Il résulte du troisième que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
20. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre du forfait en jours l'arrêt, après avoir relevé que le salarié avait parfois travaillé plus de six jours de suite en 2016, 2017 et 2018, retient qu'à compter de 2018 les tableaux mentionnent une alerte de l'employeur (115 repos hebdomadaires à prendre au lieu de 104) et que le salarié a bénéficié de jours de récupération.
21. L'arrêt ajoute que le forfait ayant été dépassé de vingt-cinq jours en 2016 et de vingt-six jours en 2017, l'employeur a imposé au salarié un forfait annuel de cent soixante-six jours en 2018 pour compenser la différence de cinquante et un jours travaillés, montrant ainsi son souci que le temps de travail du salarié ne dépasse pas deux cent dix-sept jours par an afin de préserver sa santé et sa sécurité. L'arrêt précise que le salarié ayant encore dépassé de trente jours le forfait en 2018, l'employeur a payé ce dépassement.
22. L'arrêt relève enfin que la responsable des ressources humaines s'est déplacée du 17 au 19 mai 2017, pour expliquer au salarié le fonctionnement du fichier forfait cadre, et du 18 au 20 juillet 2017, et a invité à cette occasion le salarié à poser ses congés, que la note de service relative au report des congés a été signée en décembre 2017, que la fiche relative à la durée du temps de travail a été remise le 14 décembre 2017 et que des informations sur le forfait en jours ont été données aux directeurs d'hôtels en mars et août 2018. L'arrêt en conclut que le salarié ne peut pas dire que son employeur ne portait pas un regard attentif sur le nombre de jours travaillés.
23. En statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de la récupération ou du paiement des jours de dépassement du forfait et des alertes mentionnées sur les tableaux tenus par l'employeur, alors qu'elle avait constaté, d'une part, que le repos hebdomadaire n'avait pas été respecté à plusieurs reprises en 2016, 2017 et 2018, d'autre part, que le forfait annuel avait été dépassé de vingt-cinq jours en 2016, vingt-six jours en 2017 et trente jours en 2018, ce dont il résultait que l'employeur qui s'était abstenu de mettre en place des mesures de nature à remédier en temps utile à la charge de travail incompatible avec une durée raisonnable de travail dont il avait été informé, avait manqué à ses obligations légales et conventionnelles, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Hôtel [2] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hôtel [2] et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-quatre.ECLI:FR:CCASS:2024:SO00022
SOC.
HP
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 janvier 2024
Cassation
M. SOMMER, président
Arrêt n° 22 FS-B
Pourvoi n° C 22-13.200
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 JANVIER 2024
M. [E] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 22-13.200 contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2022 par la cour d'appel de Limoges (chambre économique et sociale), dans le litige l'opposant à la société Hôtel [2], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Poupet et Kacenelenbogen, avocat de M. [D], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Hôtel [2], et l'avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Flores, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, Mme Cavrois, M. Rouchayrole, Mmes Deltort, Le Quellec, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, Rodrigues, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 12 janvier 2022), M. [D] a été engagé en qualité de directeur de l'hôtel [4] d'[Localité 5] (19) le 1er septembre 2016. Le contrat prévoyait un forfait annuel de deux cent dix-sept jours.
2. Le forfait annuel ayant été dépassé de vingt-cinq jours en 2016, puis de vingt-six jours en 2017, la direction a limité à cent soixante-six jours le forfait en 2018, lequel a été dépassé de trente jours.
3. Par lettre du 28 janvier 2019, le salarié a démissionné à effet du 31 mars 2019.
4. Le 6 mai 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors :
« 2°/ qu'aux termes de l'article L. 3121-60 du code du travail, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ; qu'en application de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants, relatif au suivi du temps de travail, chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours devra bénéficier chaque année d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées la charge de travail du salarié, l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale, ainsi que sa rémunération ; que la méconnaissance par l'employeur de son obligation d'organiser un entretien annuel individuel avec le salarié ayant conclu une convention de forfait jours, mesure destinée à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, prive d'effet la convention de forfait jours ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'un entretien annuel avait eu lieu le 13 décembre 2017, le compte-rendu de cet entretien indiquant que la charge de travail de M. [D] "avait un impact sérieux d'un niveau 4/5", le forfait de M. [D] ayant été dépassé (244 jours au lieu de 218) ce qui avait un impact notable sur la situation du salarié ; que la cour d'appel a encore constaté "qu'aucun entretien annuel n'a eu lieu en 2018" ; qu'il en résultait que la convention de forfait jours signée par M. [D] était privée d'effet, faute pour l'employeur d'avoir respecté son obligation d'organiser un entretien annuel individuel ; qu'en énonçant néanmoins, pour débouter M. [D] de ses demandes, que celui-ci n'était "pas fondé à invoquer l'absence de l'entretien annuel en 2018, prévu par l'article 2.4 de l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016, pour voir privée d'effet la convention de forfait jours le concernant", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article L. 3121-60 du code du travail et l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants ;
3°/ qu'aux termes de l'article L. 3121-60 du code du travail, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ; qu'en application de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants, relatif au suivi du temps de travail, chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours devra bénéficier chaque année d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées la charge de travail du salarié, l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale, ainsi que sa rémunération ; que la méconnaissance par l'employeur de son obligation d'organiser un entretien annuel individuel avec le salarié ayant conclu une convention de forfait jours, mesure destinée à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, prive d'effet la convention de forfait jours ; qu'en déboutant M. [D] de ses demandes, aux motifs inopérants que la société [2] justifiait qu'en raison de la démission de son directeur général, M. [L], le 31 décembre 2018, et de la prise de poste très récente au 21 janvier 2019 du nouveau directeur des opérations, M. [K], les directeurs des différents hôtels avaient été convoqués à l'entretien individuel de suivi du forfait cadre au titre de l'année 2018 en mars 2019, que dans ce cadre, M. [D] avait été convoqué le 6 mars 2019 mais avait refusé cet entretien par mail en faisant valoir que la période concernée était dépassée et que son contrat se terminant le 31 mars 2019, le recul de la date de l'entretien de M. [D] était "admissible et légitime" de la part de l'employeur et que si le salarié était resté en poste, l'entretien de 2018 se serait déroulé en mars 2019 et celui relatif à l'année 2019 fin 2019, les dispositions conventionnelles étant respectées, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à justifier légalement sa décision, en violation de l'article L. 3121-60 du code du travail et de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
6. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016 était bien applicable à la convention de forfait en jours, au plus tard à compter du 1er avril 2018, et que pour la période antérieure, l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014, entré en vigueur le 1er avril 2016, n'était applicable que sous réserve du respect de mesures complémentaires de l'employeur, de sorte que le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, tirées de la violation du seul avenant n° 22 du 16 décembre 2014, le cas échéant conjugué avec l'article L. 3121-60 du code du travail, est imprécis.
7. Cependant, le moyen, qui précise le cas d'ouverture invoqué, la partie critiquée de la décision et ce en quoi elle encourt le reproche allégué, n'est pas imprécis.
8. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles L. 3121-60, L. 3121-64, II, du code du travail, 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 à la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants (HCR) du 30 avril 1997, relatif aux cadres autonomes, étendu par arrêté du 29 février 2016 et 2.4 de l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016, relatif aux cadres autonomes, étendu par arrêté du 9 mars 2018 :
9. Aux termes du premier de ces textes, dont les dispositions sont d'ordre public, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
10. Selon le deuxième, l'accord collectif autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours détermine les modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié, sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération, ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise.
11. Selon les deux derniers, chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours devra bénéficier chaque année d'un entretien avec son supérieur hiérarchique au cours duquel seront évoquées la charge de travail du salarié, l'amplitude de ses journées d'activité, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale ainsi que sa rémunération.
12. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la convention individuelle de forfait en jours, l'arrêt, après avoir constaté qu'aucun entretien annuel n'avait eu lieu en 2018, retient que l'employeur justifie qu'en raison de la démission de son directeur général, le 31 décembre 2018, et de la prise de fonction le 21 janvier 2019 du nouveau directeur des opérations, les directeurs des différents hôtels ont été convoqués à l'entretien individuel de suivi du forfait cadre au titre de l'année 2018, en mars 2019. Il ajoute qu'eu égard à la nécessité de décaler l'ensemble des entretiens des directeurs du fait des contraintes de la société, le recul de la date d'entretien du salarié au 6 mars 2019 était admissible et légitime.
13. En statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de contraintes internes à l'entreprise, alors qu'elle avait constaté que, lors de l'entretien réalisé en 2017, le salarié avait signalé l'impact sérieux de sa charge de travail et le non-respect ponctuel du repos hebdomadaire, que le repos hebdomadaire n'avait pas été respecté à plusieurs reprises en 2018 et que les convocations pour l'entretien pour 2018 n'avaient été adressées qu'en mars 2019, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
14. Le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'aux termes de l'article L. 3121-60 du code du travail, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ; qu'en application de l'article 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants, relatif au suivi du temps de travail, "l'employeur tient un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées travaillées, le positionnement et la qualification des jours de repos (repos hebdomadaire, congés payés, jours fériés (...) ; que ce document sera tenu à la disposition de l'inspection du travail et permettra au supérieur hiérarchique (...) d'assurer un suivi de l'organisation du travail du salarié, afin de veiller à ce que l'amplitude et la charge de travail soient raisonnables (...) ; ces cadres doivent bénéficier des dispositions relatives au repos quotidien minimal prévu à l'article 21.4 de la convention collective nationale des HCR et au repos hebdomadaire prévu à l'article 21.3 de ladite convention" ; que des solutions à la surcharge de travail d'un salarié doivent être recherchées et trouvées et que les garanties mises en place par l'accord collectif doivent avoir été effectives ; que la méconnaissance, par l'employeur, de son obligation de veiller à ce que l'amplitude et la charge de travail du salarié restent raisonnables et de vérifier le respect du repos quotidien et hebdomadaire par le salarié, mesures destinées à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, prive d'effet la convention de forfait jours ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, d'abord, que M. [D] avait, lors de l'entretien annuel du 13 décembre 2017, indiqué que sa charge de travail avait un impact sérieux et qu'il avait dépassé son forfait annuel ; qu'elle a relevé, ensuite, que M. [D] avait effectivement alerté le service des ressources humaines sur sa fatigue et sur la surcharge de travail, par mails des 26 juin 2018, 6 juillet 2018 et 20 août 2018 et que le salarié avait dépassé son forfait de 25 jours en 2016, de 16 jours en 2017 et de 30 jours en 2018 ; qu'elle a ajouté que M. [D] avait parfois travaillé "plus de six jours de suite (en 2016, janvier, mars, octobre, novembre 2017, janvier, juin, août 2018)" ; qu'il ressortait de ces constatations que l'employeur avait méconnu son obligation d'assurer un suivi de l'organisation du travail de M. [D] afin de veiller à ce que son amplitude et sa charge de travail restent raisonnables ; qu'il s'en déduit que l'employeur n'avait pas recherché ni trouvé de solutions à la surcharge de travail du salarié et n'avait pas vérifié le respect des règles relatives au repos quotidien et hebdomadaire par M. [D], de sorte que les garanties mises en place par l'accord collectif n'avaient pas été effectives ; que, dès lors, en déboutant M. [D] de ses demandes, la cour d'appel n'a donc pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, violant les articles L. 3121-60 du code du travail et 2.4 de l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014 de la convention collective nationale des hôtels, cafés restaurants. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
15. L'employeur conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que l'avenant n° 22 bis du 7 octobre 2016 était bien applicable à la convention de forfait en jours, au plus tard à compter du 1er avril 2018, et que pour la période antérieure, l'avenant n° 22 du 16 décembre 2014, entré en vigueur le 1er avril 2016, n'était applicable que sous réserve du respect de mesures complémentaires de l'employeur, de sorte que le moyen, pris en sa cinquième branche, tiré de la violation du seul avenant n° 22 du 16 décembre 2014, le cas échéant conjugué avec l'article L. 3121-60 du code du travail, est imprécis.
16. Cependant, le moyen, qui précise le cas d'ouverture invoqué, la partie critiquée de la décision et ce en quoi elle encourt le reproche allégué, n'est pas imprécis.
17. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles L. 3121-60, L. 3121-64 et L. 4121-1 du code du travail :
18. Aux termes du premier de ces textes, dont les dispositions sont d'ordre public, l'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
19. Il résulte du troisième que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
20. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre du forfait en jours l'arrêt, après avoir relevé que le salarié avait parfois travaillé plus de six jours de suite en 2016, 2017 et 2018, retient qu'à compter de 2018 les tableaux mentionnent une alerte de l'employeur (115 repos hebdomadaires à prendre au lieu de 104) et que le salarié a bénéficié de jours de récupération.
21. L'arrêt ajoute que le forfait ayant été dépassé de vingt-cinq jours en 2016 et de vingt-six jours en 2017, l'employeur a imposé au salarié un forfait annuel de cent soixante-six jours en 2018 pour compenser la différence de cinquante et un jours travaillés, montrant ainsi son souci que le temps de travail du salarié ne dépasse pas deux cent dix-sept jours par an afin de préserver sa santé et sa sécurité. L'arrêt précise que le salarié ayant encore dépassé de trente jours le forfait en 2018, l'employeur a payé ce dépassement.
22. L'arrêt relève enfin que la responsable des ressources humaines s'est déplacée du 17 au 19 mai 2017, pour expliquer au salarié le fonctionnement du fichier forfait cadre, et du 18 au 20 juillet 2017, et a invité à cette occasion le salarié à poser ses congés, que la note de service relative au report des congés a été signée en décembre 2017, que la fiche relative à la durée du temps de travail a été remise le 14 décembre 2017 et que des informations sur le forfait en jours ont été données aux directeurs d'hôtels en mars et août 2018. L'arrêt en conclut que le salarié ne peut pas dire que son employeur ne portait pas un regard attentif sur le nombre de jours travaillés.
23. En statuant ainsi, par des motifs inopérants tirés de la récupération ou du paiement des jours de dépassement du forfait et des alertes mentionnées sur les tableaux tenus par l'employeur, alors qu'elle avait constaté, d'une part, que le repos hebdomadaire n'avait pas été respecté à plusieurs reprises en 2016, 2017 et 2018, d'autre part, que le forfait annuel avait été dépassé de vingt-cinq jours en 2016, vingt-six jours en 2017 et trente jours en 2018, ce dont il résultait que l'employeur qui s'était abstenu de mettre en place des mesures de nature à remédier en temps utile à la charge de travail incompatible avec une durée raisonnable de travail dont il avait été informé, avait manqué à ses obligations légales et conventionnelles, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Hôtel [2] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hôtel [2] et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-quatre.