Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 décembre 2023, 22-11.185, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 20 décembre 2023, 22-11.185, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 22-11.185
- ECLI:FR:CCASS:2023:CO00805
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 20 décembre 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 16 décembre 2021- Président
- M. Vigneau
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 décembre 2023
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 805 FS-B
Pourvoi n° N 22-11.185
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 DÉCEMBRE 2023
M. [U] [V] [Y], domicilié [Adresse 3]), a formé le pourvoi n° N 22-11.185 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Renault, société anonyme,
2°/ à la société Renault, société par actions simplifiée,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 1],
4°/ à la société Generali retraite, venant aux droits de la société Generali vie,
ayant son siège [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de M. [V] [Y], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Generali retraite, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat des sociétés Renault SA et Renault SAS, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Ponsot Mmes Fèvre, M. Calloch, conseillers, M. Blanc, Mmes Vigneras, Lion, Lefeuvre, Tostain, M. Maigret, conseillers référendaires, Mme Gueguen, premier avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt sur compétence attaqué (Paris, 16 décembre 2021) et les productions, la société Renault SA est la holding de tête du groupe Renault et détient la totalité du capital et des droits de vote de la société opérationnelle Renault SAS.
2. Le 26 octobre 2004, le conseil d'administration de la société Renault SA a décidé de mettre en place un dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif au profit des salariés membres du comité exécutif du groupe Renault. Le 29 avril 2005, ce dispositif a été étendu au directeur général de la société Renault SA, dont les fonctions ont été réunies à celles du président du conseil d'administration le 6 mai 2009.
3. Le 22 décembre 2006, la société Renault SAS a conclu avec la société Generali vie une convention d'assurance collective relative au dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif décidé par la société Renault SA.
4. Le 23 janvier 2019, M. [V] [Y] a mis fin à ses fonctions non salariées de président directeur général de la société Renault SA et de président de la société Renault SAS. Il a demandé à la société Renault SA la liquidation de ses droits à la retraite supplémentaire à prestations définies de type additif, ce que la société a refusé, au motif qu'il ne satisfaisait pas à la condition d'achèvement de sa carrière au sein de l'entreprise.
5. M. [V] [Y] a assigné les sociétés Renault SA, Renault SAS et la société Generali vie, aux droits de laquelle vient la société Generali retraite, devant un tribunal judiciaire afin, d'une part, qu'il soit enjoint aux sociétés Renault SA et Renault SAS de procéder aux formalités nécessaires au versement des rentes viagères dues au titre du dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif, d'autre part, que la société Generali vie soit condamnée à lui verser ces rentes. Les sociétés Renault SA et Renault SAS ont soulevé l'incompétence matérielle du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce.
Examen des moyens
Sur le second moyen, pris en sa seconde branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. M. [V] [Y] fait grief à l'arrêt de dire que le tribunal de commerce de Nanterre est compétent pour connaître du litige concernant la liquidation du contrat de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif, alors « que la stipulation pour autrui est un contrat en vertu duquel le stipulant demande au promettant de s'engager envers un tiers bénéficiaire désigné ou déterminable, faisant naître un droit direct au profit du bénéficiaire à l'égard du promettant ; que le contrat conclu par une entreprise avec un assureur en vue du règlement d'un régime de retraite supplémentaire à prestations définies accordé à certains de ses salariés ou mandataires sociaux constitue ainsi une stipulation pour autrui, conférant aux bénéficiaires de ce régime de retraite un droit direct à l'égard de l'assureur ; que la cour d'appel a constaté que le contrat conclu entre les sociétés Renault SAS et Generali vie avait pour objet de garantir la bonne fin des engagements pris par la société Renault SAS d'ouvrir au bénéficiaire le droit à une retraite à prestations définies sous certaines conditions, de gérer les fonds affectés à cet engagement et de verser la rente au bénéficiaire ; que, pour juger néanmoins qu'il ne s'agissait pas d'une stipulation pour autrui permettant au bénéficiaire de revendiquer un droit de créance direct à l'égard de l'assureur, et en conséquence écarter la compétence du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce, elle a relevé que les parties n'avaient pas conclu un contrat tripartite mais deux contrats distincts, que l'obligation de l'assureur était limitée par les fonds versés par le souscripteur, que les conditions de liquidation de la retraite n'étaient établies qu'au moment de cette liquidation et que le versement de la rente au bénéficiaire était "conditionné par l'autorisation du souscripteur" ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs impropres à écarter l'existence d'une stipulation pour autrui, qui suppose simplement que le promettant ait pris à l'égard du stipulant un engagement au bénéfice d'un tiers désigné ou déterminable, la cour d'appel a violé l'article 1121 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
8. Il résulte de l'article L. 137-11, I, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-697 du 3 juillet 2019, applicable au litige, qui organise le régime de la contribution due au titre des régimes de retraite à prestations définies, tout d'abord, que le bénéfice d'une prestation de retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires, catégorie à laquelle appartient le contrat de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif en cause, est subordonné à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise, ensuite, que ce régime de retraite supplémentaire peut être géré par une compagnie d'assurance dans le cadre d'un contrat d'assurance-groupe souscrit par l'entreprise, enfin, que son financement, assuré par la seule entreprise, n'est pas individualisable par bénéficiaire.
9. Il s'ensuit, d'une part, que le bénéficiaire d'une retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires ne dispose d'aucun droit acquis à percevoir cette retraite supplémentaire tant que ses droits à pension de retraite n'ont pas été liquidés et qu'il n'a pas été constaté qu'il satisfait à la condition d'achèvement de sa carrière au sein de l'entreprise, d'autre part, que tant que le droit à cette prestation de retraite supplémentaire n'est pas acquis, son bénéficiaire éventuel ne peut se prévaloir, lorsque le régime de retraite supplémentaire est géré par un assureur, d'aucun droit de créance direct à l'encontre de cet assureur, la souscription d'un contrat d'assurance-groupe par l'entreprise s'étant engagée à faire bénéficier certains de ses membres d'un tel régime ne constituant qu'une modalité d'exécution de son engagement.
10. Après avoir relevé que la société Renault SA avait refusé la liquidation des droits à la retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires de M. [V] [Y] en estimant que la condition d'achèvement de sa carrière au sein de l'entreprise n'était pas remplie, l'arrêt retient qu'il résulte des stipulations du contrat souscrit par la société Renault SAS auprès de la société Generali vie que celui-ci n'est conclu qu'entre la société Renault SAS et la compagnie d'assurance, que les relations contractuelles entre la société et le bénéficiaire d'une prestation de retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires sont fondées sur les conditions votées par le conseil d'administration de la société Renault SA le 26 octobre 2004, que l'obligation de l'assureur est limitée par les fonds qui lui ont été versés par le souscripteur, que le règlement, par l'assureur, de la rente au bénéficiaire est conditionné à l'autorisation du souscripteur au versement de la rente et que les conditions de liquidation ne sont pas établies au moment de la souscription du contrat mais lors de sa liquidation.
11. De ces constatations et appréciations, dont il résulte que M. [V] [Y] ne disposait d'aucun droit acquis au bénéfice d'une prestation de retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires et, par suite, d'aucun droit de créance direct à l'encontre de la société Generali vie, la cour d'appel a exactement déduit que le contrat conclu entre la société Renault SAS et la société Generali vie ne comportait pas de stipulation pour autrui faisant naître au profit de M. [V] [Y] un droit de créance direct à l'encontre de la société Generali vie.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
13. M. [V] [Y] fait le même grief à l'arrêt, alors « que si la compétence du tribunal de commerce peut être retenue pour statuer sur des litiges portant sur des faits en lien direct avec la gestion d'une société commerciale, peu important que le défendeur n'ait ni la qualité de commerçant, ni celle de dirigeant de droit de cette société, le demandeur non-commerçant qui entend agir à cette fin dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce ; qu'en jugeant néanmoins, pour écarter la compétence du tribunal judiciaire pour statuer sur le litige relatif à la liquidation du contrat de retraite à prestations définies, que ce litige avait trait à la rémunération du dirigeant d'une société commerciale relevant de la compétence du tribunal de commerce et que le fait que ce dirigeant ne soit pas commerçant ne lui "accordait aucune option de compétence" et ne remettait donc pas en cause la compétence du tribunal de commerce, la cour d'appel a violé les articles L. 721-3 du code de commerce et L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire. »
Réponse de la Cour
14. Selon l'article L. 721-3, 2°, du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux sociétés commerciales.
15. Il n'est dérogé à la compétence exclusive des tribunaux de commerce pour connaître de ces contestations que dans l'hypothèse où celles-ci mettent en cause une personne non commerçante qui est extérieure au pacte social et n'appartient pas aux organes de la société, auquel cas cette personne dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce (Com., 18 novembre 2020, pourvoi n° 19-19.463, publié au Bulletin ; Com., 15 décembre 2021, pourvoi n° 21-11.882, publié au Bulletin).
16. Il en résulte que lorsqu'un litige oppose le dirigeant ou un autre mandataire social ou l'associé d'une société commerciale à cette société ou à un autre de ses associés ou de ses mandataires sociaux et porte sur une contestation relative à cette société commerciale, il relève de la compétence exclusive du tribunal de commerce.
17. Ayant retenu que le litige opposant M. [V] [Y] aux sociétés Renault SA et Renault SAS et concernant la liquidation de ses droits à une retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires était relatif à sa rémunération en tant que dirigeant de ces sociétés, ce dont il résultait qu'il portait sur une contestation relative à ces sociétés, la cour d'appel en a exactement déduit que ce litige relevait de la compétence exclusive du tribunal de commerce, peu important que le demandeur à l'action n'ait pas la qualité de commerçant.
18. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [V] [Y] et le condamne à payer aux sociétés Renault SA et Renault SAS la somme globale de 3 000 euros et à la société Generali retraite la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:CO00805
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 décembre 2023
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 805 FS-B
Pourvoi n° N 22-11.185
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 DÉCEMBRE 2023
M. [U] [V] [Y], domicilié [Adresse 3]), a formé le pourvoi n° N 22-11.185 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Renault, société anonyme,
2°/ à la société Renault, société par actions simplifiée,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 1],
4°/ à la société Generali retraite, venant aux droits de la société Generali vie,
ayant son siège [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de M. [V] [Y], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Generali retraite, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat des sociétés Renault SA et Renault SAS, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 7 novembre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Ponsot Mmes Fèvre, M. Calloch, conseillers, M. Blanc, Mmes Vigneras, Lion, Lefeuvre, Tostain, M. Maigret, conseillers référendaires, Mme Gueguen, premier avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt sur compétence attaqué (Paris, 16 décembre 2021) et les productions, la société Renault SA est la holding de tête du groupe Renault et détient la totalité du capital et des droits de vote de la société opérationnelle Renault SAS.
2. Le 26 octobre 2004, le conseil d'administration de la société Renault SA a décidé de mettre en place un dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif au profit des salariés membres du comité exécutif du groupe Renault. Le 29 avril 2005, ce dispositif a été étendu au directeur général de la société Renault SA, dont les fonctions ont été réunies à celles du président du conseil d'administration le 6 mai 2009.
3. Le 22 décembre 2006, la société Renault SAS a conclu avec la société Generali vie une convention d'assurance collective relative au dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif décidé par la société Renault SA.
4. Le 23 janvier 2019, M. [V] [Y] a mis fin à ses fonctions non salariées de président directeur général de la société Renault SA et de président de la société Renault SAS. Il a demandé à la société Renault SA la liquidation de ses droits à la retraite supplémentaire à prestations définies de type additif, ce que la société a refusé, au motif qu'il ne satisfaisait pas à la condition d'achèvement de sa carrière au sein de l'entreprise.
5. M. [V] [Y] a assigné les sociétés Renault SA, Renault SAS et la société Generali vie, aux droits de laquelle vient la société Generali retraite, devant un tribunal judiciaire afin, d'une part, qu'il soit enjoint aux sociétés Renault SA et Renault SAS de procéder aux formalités nécessaires au versement des rentes viagères dues au titre du dispositif de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif, d'autre part, que la société Generali vie soit condamnée à lui verser ces rentes. Les sociétés Renault SA et Renault SAS ont soulevé l'incompétence matérielle du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce.
Examen des moyens
Sur le second moyen, pris en sa seconde branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. M. [V] [Y] fait grief à l'arrêt de dire que le tribunal de commerce de Nanterre est compétent pour connaître du litige concernant la liquidation du contrat de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif, alors « que la stipulation pour autrui est un contrat en vertu duquel le stipulant demande au promettant de s'engager envers un tiers bénéficiaire désigné ou déterminable, faisant naître un droit direct au profit du bénéficiaire à l'égard du promettant ; que le contrat conclu par une entreprise avec un assureur en vue du règlement d'un régime de retraite supplémentaire à prestations définies accordé à certains de ses salariés ou mandataires sociaux constitue ainsi une stipulation pour autrui, conférant aux bénéficiaires de ce régime de retraite un droit direct à l'égard de l'assureur ; que la cour d'appel a constaté que le contrat conclu entre les sociétés Renault SAS et Generali vie avait pour objet de garantir la bonne fin des engagements pris par la société Renault SAS d'ouvrir au bénéficiaire le droit à une retraite à prestations définies sous certaines conditions, de gérer les fonds affectés à cet engagement et de verser la rente au bénéficiaire ; que, pour juger néanmoins qu'il ne s'agissait pas d'une stipulation pour autrui permettant au bénéficiaire de revendiquer un droit de créance direct à l'égard de l'assureur, et en conséquence écarter la compétence du tribunal judiciaire au profit du tribunal de commerce, elle a relevé que les parties n'avaient pas conclu un contrat tripartite mais deux contrats distincts, que l'obligation de l'assureur était limitée par les fonds versés par le souscripteur, que les conditions de liquidation de la retraite n'étaient établies qu'au moment de cette liquidation et que le versement de la rente au bénéficiaire était "conditionné par l'autorisation du souscripteur" ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs impropres à écarter l'existence d'une stipulation pour autrui, qui suppose simplement que le promettant ait pris à l'égard du stipulant un engagement au bénéfice d'un tiers désigné ou déterminable, la cour d'appel a violé l'article 1121 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
8. Il résulte de l'article L. 137-11, I, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-697 du 3 juillet 2019, applicable au litige, qui organise le régime de la contribution due au titre des régimes de retraite à prestations définies, tout d'abord, que le bénéfice d'une prestation de retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires, catégorie à laquelle appartient le contrat de retraite supplémentaire à prestations définies de type additif en cause, est subordonné à l'achèvement de la carrière du bénéficiaire dans l'entreprise, ensuite, que ce régime de retraite supplémentaire peut être géré par une compagnie d'assurance dans le cadre d'un contrat d'assurance-groupe souscrit par l'entreprise, enfin, que son financement, assuré par la seule entreprise, n'est pas individualisable par bénéficiaire.
9. Il s'ensuit, d'une part, que le bénéficiaire d'une retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires ne dispose d'aucun droit acquis à percevoir cette retraite supplémentaire tant que ses droits à pension de retraite n'ont pas été liquidés et qu'il n'a pas été constaté qu'il satisfait à la condition d'achèvement de sa carrière au sein de l'entreprise, d'autre part, que tant que le droit à cette prestation de retraite supplémentaire n'est pas acquis, son bénéficiaire éventuel ne peut se prévaloir, lorsque le régime de retraite supplémentaire est géré par un assureur, d'aucun droit de créance direct à l'encontre de cet assureur, la souscription d'un contrat d'assurance-groupe par l'entreprise s'étant engagée à faire bénéficier certains de ses membres d'un tel régime ne constituant qu'une modalité d'exécution de son engagement.
10. Après avoir relevé que la société Renault SA avait refusé la liquidation des droits à la retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires de M. [V] [Y] en estimant que la condition d'achèvement de sa carrière au sein de l'entreprise n'était pas remplie, l'arrêt retient qu'il résulte des stipulations du contrat souscrit par la société Renault SAS auprès de la société Generali vie que celui-ci n'est conclu qu'entre la société Renault SAS et la compagnie d'assurance, que les relations contractuelles entre la société et le bénéficiaire d'une prestation de retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires sont fondées sur les conditions votées par le conseil d'administration de la société Renault SA le 26 octobre 2004, que l'obligation de l'assureur est limitée par les fonds qui lui ont été versés par le souscripteur, que le règlement, par l'assureur, de la rente au bénéficiaire est conditionné à l'autorisation du souscripteur au versement de la rente et que les conditions de liquidation ne sont pas établies au moment de la souscription du contrat mais lors de sa liquidation.
11. De ces constatations et appréciations, dont il résulte que M. [V] [Y] ne disposait d'aucun droit acquis au bénéfice d'une prestation de retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires et, par suite, d'aucun droit de créance direct à l'encontre de la société Generali vie, la cour d'appel a exactement déduit que le contrat conclu entre la société Renault SAS et la société Generali vie ne comportait pas de stipulation pour autrui faisant naître au profit de M. [V] [Y] un droit de créance direct à l'encontre de la société Generali vie.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
13. M. [V] [Y] fait le même grief à l'arrêt, alors « que si la compétence du tribunal de commerce peut être retenue pour statuer sur des litiges portant sur des faits en lien direct avec la gestion d'une société commerciale, peu important que le défendeur n'ait ni la qualité de commerçant, ni celle de dirigeant de droit de cette société, le demandeur non-commerçant qui entend agir à cette fin dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce ; qu'en jugeant néanmoins, pour écarter la compétence du tribunal judiciaire pour statuer sur le litige relatif à la liquidation du contrat de retraite à prestations définies, que ce litige avait trait à la rémunération du dirigeant d'une société commerciale relevant de la compétence du tribunal de commerce et que le fait que ce dirigeant ne soit pas commerçant ne lui "accordait aucune option de compétence" et ne remettait donc pas en cause la compétence du tribunal de commerce, la cour d'appel a violé les articles L. 721-3 du code de commerce et L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire. »
Réponse de la Cour
14. Selon l'article L. 721-3, 2°, du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux sociétés commerciales.
15. Il n'est dérogé à la compétence exclusive des tribunaux de commerce pour connaître de ces contestations que dans l'hypothèse où celles-ci mettent en cause une personne non commerçante qui est extérieure au pacte social et n'appartient pas aux organes de la société, auquel cas cette personne dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce (Com., 18 novembre 2020, pourvoi n° 19-19.463, publié au Bulletin ; Com., 15 décembre 2021, pourvoi n° 21-11.882, publié au Bulletin).
16. Il en résulte que lorsqu'un litige oppose le dirigeant ou un autre mandataire social ou l'associé d'une société commerciale à cette société ou à un autre de ses associés ou de ses mandataires sociaux et porte sur une contestation relative à cette société commerciale, il relève de la compétence exclusive du tribunal de commerce.
17. Ayant retenu que le litige opposant M. [V] [Y] aux sociétés Renault SA et Renault SAS et concernant la liquidation de ses droits à une retraite supplémentaire à prestations définies à droits aléatoires était relatif à sa rémunération en tant que dirigeant de ces sociétés, ce dont il résultait qu'il portait sur une contestation relative à ces sociétés, la cour d'appel en a exactement déduit que ce litige relevait de la compétence exclusive du tribunal de commerce, peu important que le demandeur à l'action n'ait pas la qualité de commerçant.
18. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] [Y] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [V] [Y] et le condamne à payer aux sociétés Renault SA et Renault SAS la somme globale de 3 000 euros et à la société Generali retraite la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille vingt-trois.