Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 15 novembre 2023, 23-81.135, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 23-81.135 F+B

N° 01343


ECF
15 NOVEMBRE 2023


CASSATION SANS RENVOI


M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 15 NOVEMBRE 2023


M. [Y] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, en date du 24 janvier 2023, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'escroquerie aggravée, a confirmé l'ordonnance de remise à l'AGRASC aux fins d'aliénation rendue par le juge d'instruction.

Par ordonnance du 12 juin 2023, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [Y] [D], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 octobre 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [Y] [D] a été mis en examen pour escroquerie aggravée.

3. Dans le cadre de l'information, il a été procédé à la saisie de divers biens mobiliers lui appartenant pour un montant évalué à 162 280 euros. Par ordonnance du 15 juin 2022, le juge d'instruction a ordonné la remise de ces biens à l'AGRASC en vue de leur aliénation.

4. M. [D] a relevé appel de cette décision

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de remise à l'AGRASC des biens mobiliers saisis, alors « que les décisions de remise à l'AGRASC font l'objet d'une ordonnance motivée prise soit sur réquisitions du procureur de la République, soit d'office après avis de ce dernier ; que l'avis du procureur de la République constitue une formalité obligatoire dont l'absence cause nécessairement grief ; qu'en retenant qu'aucune nullité n'est spécialement encourue du fait de l'absence d'avis du procureur de la République et en exigeant la démonstration d'un grief, la chambre de l'instruction a violé l'article 99-2, alinéa 5, du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 99-2, alinéas 2 et 5, du code de procédure pénale :

6. Il résulte de ce texte que, lorsque le juge d'instruction ordonne d'office la remise à l'AGRASC, en vue de leur aliénation, de biens meubles placés sous main de justice car le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur des biens, cette décision est prise après avis du procureur de la République.

7. Pour écarter le moyen selon lequel l'ordonnance de remise des biens en vue de leur aliénation serait nulle faute d'avis préalable du procureur de la République, l'arrêt attaqué énonce qu'aucune nullité n'est spécialement encourue du fait de cette irrégularité et qu'aucun grief n'est démontré.

8. En se déterminant ainsi, alors que les dispositions précitées de l'article 99-2 du code de procédure pénale exigent que le juge d'instruction recueille l'avis du procureur de la République avant de prendre une ordonnance de remise des biens placés sous main de justice en vue de leur aliénation, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.

9. La cassation est par conséquent encourue.

Portée et conséquences de la cassation

10. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, en date du 24 janvier 2023 ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ANNULE l'ordonnance du juge d'instruction du 15 juin 2022 du tribunal judiciaire de Saint-Denis de La Réunion ordonnant la remise à l'AGRASC de biens meubles appartenant à M. [D] et placés sous main de justice en vue de leur aliénation ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:CR01343
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