Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 novembre 2023, 22-17.738, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 novembre 2023, 22-17.738, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 22-17.738
- ECLI:FR:CCASS:2023:SO02033
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 08 novembre 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 14 avril 2022- Président
- M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 8 novembre 2023
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 2033 F-D
Pourvoi n° K 22-17.738
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 NOVEMBRE 2023
M. [C] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 22-17.738 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant au GIE Axa, groupement d'intérêt économique, dont le siège est [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [H], de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat du GIE Axa, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 avril 2022), M. [H] a été engagé par le GIE Axa en qualité de Chief Risk Officer d'Axa Bank Europe au sein de la direction Group Risk Management du GIE Axa, par un contrat de travail à durée indéterminée du 19 septembre 2011. Par avenant du même jour, il a été affecté auprès de la société Axa Bank Europe en Belgique en tant que membre du comité de direction pour y exercer le mandat de Chief Risk Officer à compter du 21 novembre 2011. Le 7 octobre 2011, une convention de management a été conclue entre la société Axa Bank Europe et le salarié, prévoyant que ce dernier exercerait les fonctions de Chief Risk Officer à compter du 21 novembre 2011 pour une durée indéterminée, un préavis de six mois en cas de rupture, puis de neuf mois si la durée de la collaboration excédait trois ans, étant stipulé. M. [H] a été nommé membre du conseil d'administration et du comité de direction.
2. Par lettre du 25 octobre 2014, la société Axa Bank Europe a indiqué à M. [H] qu'elle mettait fin à la convention de management avec effet immédiat au 31 octobre 2014. Le 27 octobre 2014, l'actionnaire unique de cette société a retiré à M. [H] son mandat d'administrateur, ses fonctions de directeur effectif en tant que membre du comité de direction prenant fin à la même date.
3. Par lettre du même jour, le GIE Axa a indiqué à M. [H] que son contrat de travail était réactivé à compter du 1er novembre 2014 et l'a dispensé d'activité jusqu'au 30 novembre 2014. Cette dispense d'activité a été renouvelée jusqu'au 9 janvier 2015 inclus par lettre du 1er décembre 2014.
4. Convoqué le 9 janvier 2015 à un entretien préalable, le salarié a sollicité par lettre du même jour une enquête contradictoire concernant des faits allégués de harcèlement moral. Il a été licencié par lettre du 4 février 2015 visant l'impossibilité de le reclasser.
5. Soutenant notamment que son licenciement était nul comme intervenu en raison de la dénonciation de faits de harcèlement moral, subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de réintégration et d'indemnisation.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à ce qu'il soit jugé qu'il a été licencié pour avoir dénoncé des agissements de harcèlement moral, que soit prononcée la nullité de son licenciement, que soit ordonnée sa réintégration et que le GIE Axa soit condamné à lui payer une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus entre le 4 février 2015 et le jour de sa réintégration effective, alors « que lorsque la lettre de licenciement ne reproche pas au salarié d'avoir dénoncé un harcèlement moral et que les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à sa dénonciation d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, lorsque le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse et qu'il fait suite à la dénonciation par le salarié d'un harcèlement moral, c'est à l'employeur, même si la lettre de licenciement ne reproche pas au salarié d'avoir dénoncé un harcèlement moral, qu'il appartient d'établir que le licenciement est justifié par des éléments étrangers à cette dénonciation ; qu'en l'espèce, pour refuser de prononcer la nullité du licenciement de M. [H], la cour d'appel a retenu, après avoir relevé que la procédure de licenciement avait été engagée postérieurement à la dénonciation d'un harcèlement par le salarié et que "la lettre de licenciement ne contient aucune référence à cette dénonciation", que M. [H] avait fait l'objet d'un processus de recrutement pour un reclassement au sein des sociétés Axa UK et Axa Im, de sorte que "le lien allégué par le salarié entre sa dénonciation de faits de harcèlement moral et la rupture des relations contractuelles est insuffisamment caractérisé" ; qu'en faisant ainsi peser sur le salarié la charge de la preuve du lien de causalité entre le licenciement et sa dénonciation d'un harcèlement moral quand il ressortait de ses propres constatations que le licenciement de M. [H] était "dépourvu de cause réelle et sérieuse", que M. [H] avait "été victime d'un harcèlement moral" et que "M. [H] a dénoncé à trois reprises l'existence selon lui d'un harcèlement moral démissionnaire soit le 20 octobre par un courriel adressé en copie à Mme [M], le 23 décembre 2014 puis le 9 janvier 2015", ce dont elle aurait dû déduire que c'était à l'employeur de justifier que le licenciement de M. [H] était sans lien avec sa dénonciation d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1152-1, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail :
7. Il résulte de ces textes que, lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à la dénonciation antérieure de faits de harcèlement moral. Dans le cas contraire, il appartient à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la dénonciation par le salarié d'agissements de harcèlement moral et son licenciement.
8. Pour rejeter les demandes du salarié au titre de la nullité du licenciement pour harcèlement et de dommages-intérêts, l'arrêt retient que celui-ci a dénoncé à trois reprises l'existence de faits de harcèlement moral destinés à le pousser à la démission, que la lettre de licenciement ne contient pas de référence à ces dénonciations, que l'existence d'un tel harcèlement a été invoquée pour la première fois deux mois et demi avant l'engagement de la procédure de licenciement et non de manière immédiatement concomitante, et qu'en tout état de cause il ne peut être déduit de la seule concomitance des faits une relation entre la dénonciation d'un harcèlement moral et un licenciement, qu'il résulte des éléments produits aux débats que le GIE Axa a pris des contacts avec diverses sociétés Axa pour reclasser le salarié et que les refus qu'elle s'est vu opposer s'inscrivent dans une chronologie cohérente dans le cadre d‘un processus de recrutement, enfin que le fait que le GIE n'ait pas diligenté d'enquête en dépit de la demande du salarié est inopérant à ce titre, qu'en conséquence le lien allégué par le salarié entre sa dénonciation de faits de harcèlement moral et la rupture des relations contractuelles est insuffisamment caractérisé.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le licenciement prononcé n'était pas justifié par l'existence d'une cause réelle et sérieuse, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre les dénonciations par le salarié de faits de harcèlement moral et le licenciement prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt relatifs au rejet des demandes tendant à ce qu'il soit jugé que le salarié a été licencié pour avoir dénoncé des agissements de harcèlement moral, que soit prononcée la nullité de son licenciement, ordonnée sa réintégration et que le GIE Axa soit condamné à lui payer une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus entre le 4 février 2015 et le jour de sa réintégration effective, entraîne la cassation des chefs de dispositif relatifs à la condamnation du GIE Axa à payer à M. [H] la somme de 130 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes tendant à ce qu'il soit jugé que M. [H] a été licencié pour avoir dénoncé des agissements de harcèlement moral, que soit prononcée la nullité de son licenciement, que soit ordonnée sa réintégration, que le GIE Axa soit condamné à lui payer une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus entre le 4 février 2015 et le jour de sa réintégration effective, et en ce qu'il condamne le GIE Axa à payer à M. [H] la somme de 130 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités, l'arrêt rendu le 14 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.
Condamne le GIE Axa aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le GIE Axa et le condamne à payer à M. [H] la somme de 3 000 euros.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:SO02033
SOC.
CH9
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 8 novembre 2023
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 2033 F-D
Pourvoi n° K 22-17.738
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 NOVEMBRE 2023
M. [C] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 22-17.738 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant au GIE Axa, groupement d'intérêt économique, dont le siège est [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [H], de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat du GIE Axa, après débats en l'audience publique du 4 octobre 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 avril 2022), M. [H] a été engagé par le GIE Axa en qualité de Chief Risk Officer d'Axa Bank Europe au sein de la direction Group Risk Management du GIE Axa, par un contrat de travail à durée indéterminée du 19 septembre 2011. Par avenant du même jour, il a été affecté auprès de la société Axa Bank Europe en Belgique en tant que membre du comité de direction pour y exercer le mandat de Chief Risk Officer à compter du 21 novembre 2011. Le 7 octobre 2011, une convention de management a été conclue entre la société Axa Bank Europe et le salarié, prévoyant que ce dernier exercerait les fonctions de Chief Risk Officer à compter du 21 novembre 2011 pour une durée indéterminée, un préavis de six mois en cas de rupture, puis de neuf mois si la durée de la collaboration excédait trois ans, étant stipulé. M. [H] a été nommé membre du conseil d'administration et du comité de direction.
2. Par lettre du 25 octobre 2014, la société Axa Bank Europe a indiqué à M. [H] qu'elle mettait fin à la convention de management avec effet immédiat au 31 octobre 2014. Le 27 octobre 2014, l'actionnaire unique de cette société a retiré à M. [H] son mandat d'administrateur, ses fonctions de directeur effectif en tant que membre du comité de direction prenant fin à la même date.
3. Par lettre du même jour, le GIE Axa a indiqué à M. [H] que son contrat de travail était réactivé à compter du 1er novembre 2014 et l'a dispensé d'activité jusqu'au 30 novembre 2014. Cette dispense d'activité a été renouvelée jusqu'au 9 janvier 2015 inclus par lettre du 1er décembre 2014.
4. Convoqué le 9 janvier 2015 à un entretien préalable, le salarié a sollicité par lettre du même jour une enquête contradictoire concernant des faits allégués de harcèlement moral. Il a été licencié par lettre du 4 février 2015 visant l'impossibilité de le reclasser.
5. Soutenant notamment que son licenciement était nul comme intervenu en raison de la dénonciation de faits de harcèlement moral, subsidiairement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de réintégration et d'indemnisation.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à ce qu'il soit jugé qu'il a été licencié pour avoir dénoncé des agissements de harcèlement moral, que soit prononcée la nullité de son licenciement, que soit ordonnée sa réintégration et que le GIE Axa soit condamné à lui payer une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus entre le 4 février 2015 et le jour de sa réintégration effective, alors « que lorsque la lettre de licenciement ne reproche pas au salarié d'avoir dénoncé un harcèlement moral et que les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à sa dénonciation d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, lorsque le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse et qu'il fait suite à la dénonciation par le salarié d'un harcèlement moral, c'est à l'employeur, même si la lettre de licenciement ne reproche pas au salarié d'avoir dénoncé un harcèlement moral, qu'il appartient d'établir que le licenciement est justifié par des éléments étrangers à cette dénonciation ; qu'en l'espèce, pour refuser de prononcer la nullité du licenciement de M. [H], la cour d'appel a retenu, après avoir relevé que la procédure de licenciement avait été engagée postérieurement à la dénonciation d'un harcèlement par le salarié et que "la lettre de licenciement ne contient aucune référence à cette dénonciation", que M. [H] avait fait l'objet d'un processus de recrutement pour un reclassement au sein des sociétés Axa UK et Axa Im, de sorte que "le lien allégué par le salarié entre sa dénonciation de faits de harcèlement moral et la rupture des relations contractuelles est insuffisamment caractérisé" ; qu'en faisant ainsi peser sur le salarié la charge de la preuve du lien de causalité entre le licenciement et sa dénonciation d'un harcèlement moral quand il ressortait de ses propres constatations que le licenciement de M. [H] était "dépourvu de cause réelle et sérieuse", que M. [H] avait "été victime d'un harcèlement moral" et que "M. [H] a dénoncé à trois reprises l'existence selon lui d'un harcèlement moral démissionnaire soit le 20 octobre par un courriel adressé en copie à Mme [M], le 23 décembre 2014 puis le 9 janvier 2015", ce dont elle aurait dû déduire que c'était à l'employeur de justifier que le licenciement de M. [H] était sans lien avec sa dénonciation d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1152-1, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail :
7. Il résulte de ces textes que, lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à la dénonciation antérieure de faits de harcèlement moral. Dans le cas contraire, il appartient à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la dénonciation par le salarié d'agissements de harcèlement moral et son licenciement.
8. Pour rejeter les demandes du salarié au titre de la nullité du licenciement pour harcèlement et de dommages-intérêts, l'arrêt retient que celui-ci a dénoncé à trois reprises l'existence de faits de harcèlement moral destinés à le pousser à la démission, que la lettre de licenciement ne contient pas de référence à ces dénonciations, que l'existence d'un tel harcèlement a été invoquée pour la première fois deux mois et demi avant l'engagement de la procédure de licenciement et non de manière immédiatement concomitante, et qu'en tout état de cause il ne peut être déduit de la seule concomitance des faits une relation entre la dénonciation d'un harcèlement moral et un licenciement, qu'il résulte des éléments produits aux débats que le GIE Axa a pris des contacts avec diverses sociétés Axa pour reclasser le salarié et que les refus qu'elle s'est vu opposer s'inscrivent dans une chronologie cohérente dans le cadre d‘un processus de recrutement, enfin que le fait que le GIE n'ait pas diligenté d'enquête en dépit de la demande du salarié est inopérant à ce titre, qu'en conséquence le lien allégué par le salarié entre sa dénonciation de faits de harcèlement moral et la rupture des relations contractuelles est insuffisamment caractérisé.
9. En statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le licenciement prononcé n'était pas justifié par l'existence d'une cause réelle et sérieuse, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre les dénonciations par le salarié de faits de harcèlement moral et le licenciement prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt relatifs au rejet des demandes tendant à ce qu'il soit jugé que le salarié a été licencié pour avoir dénoncé des agissements de harcèlement moral, que soit prononcée la nullité de son licenciement, ordonnée sa réintégration et que le GIE Axa soit condamné à lui payer une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus entre le 4 février 2015 et le jour de sa réintégration effective, entraîne la cassation des chefs de dispositif relatifs à la condamnation du GIE Axa à payer à M. [H] la somme de 130 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes tendant à ce qu'il soit jugé que M. [H] a été licencié pour avoir dénoncé des agissements de harcèlement moral, que soit prononcée la nullité de son licenciement, que soit ordonnée sa réintégration, que le GIE Axa soit condamné à lui payer une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus entre le 4 février 2015 et le jour de sa réintégration effective, et en ce qu'il condamne le GIE Axa à payer à M. [H] la somme de 130 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités, l'arrêt rendu le 14 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.
Condamne le GIE Axa aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le GIE Axa et le condamne à payer à M. [H] la somme de 3 000 euros.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille vingt-trois.