Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 12 octobre 2023, 22-16.555, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

SG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 octobre 2023




Cassation partielle


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 669 F-D

Pourvoi n° Z 22-16.555




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 OCTOBRE 2023

1°/ M. [S] [C], domicilié [Adresse 11], [Localité 7],

2°/ Mme [J] [C], domiciliée [Adresse 4], [Localité 6],

3°/ Mme [U] [K], domiciliée [Adresse 10], [Localité 6],

ont formé le pourvoi n° Z 22-16.555 contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-4), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Europ labo, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], [Localité 5], venant aux droits de la société Diet'Azur,

2°/ à la société Axa France IARD, dont le siège est [Localité 3], [Localité 8], pris en qualité d'assureur des locaux appartenant à l'indivision [C],

3°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 9],

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. David, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. et Mme [C] et de Mme [K], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Teiller, président, M. David, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Déchéance partielle du pourvoi examinée d'office

1. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 978 du même code.

2. Il résulte de ce texte qu'à peine de déchéance, le demandeur à la cassation doit, au plus tard dans le délai de quatre mois à compter du pourvoi, remettre au greffe de la Cour de cassation un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée.

3. Mme [K], M. [C] et Mme [C] se sont pourvus en cassation contre l'arrêt rendu le 27 janvier 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence en même temps qu'ils se sont pourvus contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la même cour. Leur mémoire ampliatif ne contient toutefois aucun moyen à l'encontre de cette dernière décision.

4. Il y a lieu, dès lors, de constater la déchéance du pourvoi en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Faits et procédure

5. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 janvier 2022), Mme [K], M. [C] et Mme [C] (les bailleurs), propriétaires indivis d'un immeuble assuré auprès de la société Axa France IARD, l'ont donné à bail commercial à la société Diet service, aux droits de laquelle est venue la société Europ labo (la locataire), assurée auprès de la société Allianz IARD.

6. Le 31 janvier 2010, un incendie a entièrement détruit l'immeuble loué.

7. A raison de cette destruction, la locataire s'est, le 9 février 2010, prévalue de la résiliation du bail.

8. Par actes des 22, 23 et 27 octobre 2014, les bailleurs ont assigné la locataire ainsi que les sociétés Axa France IARD et Allianz IARD en indemnisation de leurs préjudices.

Examen des moyens

Sur les premier et troisième moyens

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

10. Les bailleurs font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en paiement d'une indemnité complémentaire à celle leur ayant été versée par la société Axa France IARD au titre de leurs pertes de loyer consécutives au sinistre, alors « que le preneur dont la responsabilité est engagée sur le fondement de l'article 1733 du code civil doit réparer l'entier dommage causé par l'incendie et indemniser le bailleur de la perte des loyers jusqu'à la reconstruction de l'immeuble, même si le bail a été résilié ; que la cour d'appel a constaté que la responsabilité du preneur était engagée sur le fondement de l'article 1733 du code civil ; qu'en retenant néanmoins, pour débouter les consorts [K] [C] de leur demande relative aux pertes de loyer, que « les difficultés rencontrées par eux pour la reconstruction de l'immeuble sinistré ne sont pas imputables à leur locataire », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1733 du code civil :

11. Il résulte de ce texte que le locataire dont la responsabilité est engagée sur son fondement doit réparer l'entier dommage causé par l'incendie et indemniser le bailleur de la perte des loyers jusqu'à la reconstruction de l'immeuble, même si le bail a été résilié.

12. Pour rejeter la demande des bailleurs en condamnation in solidum de la locataire et de la société Allianz IARD au paiement d'une indemnité complémentaire à celle versée par la société Axa au titre de la perte de loyer du local sinistré du 1er février 2010 au 31 janvier 2018, l'arrêt retient que les difficultés rencontrées par les bailleurs pour la reconstruction de l'immeuble sinistré ne sont pas imputables à la locataire et qu'il n'est pas démontré que la locataire et la société Allianz IARD seraient à l'origine de la longueur des opérations d'expertise judiciaire.

13. En statuant ainsi, après avoir constaté que la locataire était responsable de l'incendie, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.

Mise hors de cause

14. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause la société Axa France IARD, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de Mme [K], de M. [C] et de Mme [C] en condamnation in solidum de la société Europ labo et de la société Allianz IARD en paiement d'une indemnité de 315 370,90 euros, complémentaire à celle versée par la société Axa France IARD, au titre de la perte de loyer du local sinistré depuis le 1er février 2010 jusqu'au 31 janvier 2018, l'arrêt rendu le 27 janvier 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Met hors de cause la société Axa France IARD ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Europ labo et la société Allianz IARD aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Europ labo et la société Allianz IARD à payer à Mme [K], M. [C] et Mme [C] la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C300669
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