Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 13 septembre 2023, 22-12.970, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

BD4



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 13 septembre 2023




Rejet


Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 857 F-B

Pourvoi n° C 22-12.970




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 13 SEPTEMBRE 2023

L'Etablissement public de sécurité ferroviaire, établissement public national à caractère administratif, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 22-12.970 contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2022 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à M. [Z] [R], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

M. [R] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de l'Etablissement public de sécurité ferroviaire, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [R], après débats en l'audience publique du 20 juin 2023 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, Mme Valéry, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 6 janvier 2022), M. [R] a été engagé le 21 avril 2011 par l'Etablissement public de sécurité ferroviaire en qualité d'administrateur de base de données incidents.

2. Placé en arrêt de travail pour maladie non professionnelle à compter du 5 janvier 2015, il a été déclaré inapte suivant avis du médecin du travail du 23 août 2017 rédigé en ces termes : « Inapte. Étude de poste, étude des conditions de travail et échanges entre le médecin du travail et l'employeur réalisés le 16 août 2017. Tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé ».

3. Licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 18 septembre 2017, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen du pourvoi incident

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer au salarié des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, alors « qu'aux termes de l'article L. 1226-2-1 du code du travail, l'employeur peut rompre le contrat de travail s'il justifie, notamment, de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ; que ce texte concerne le maintien du salarié dans un emploi au sein de l'entreprise employeur et n'implique pas que le médecin du travail fasse mention de ce que le maintien du salarié dans un emploi, quel qu'il soit, même en dehors de l'entreprise, serait gravement préjudiciable à sa santé ; que l'avis d'inaptitude concernant M. [R] émis par le médecin du travail mentionnait que "tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé" ; qu'en retenant que, dans la mesure où les termes employés par le médecin du travail n'impliquaient pas l'éloignement du salarié de toute situation de travail, ils ne dispensaient pas l'employeur de procéder à des recherches de reclassement et de consulter les délégués du personnel, et que, par suite, le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-2-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de l'article L. 1226-2-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 que l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

7. Il s'ensuit que, lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l'employeur n'est pas tenu de rechercher un reclassement.

8. L'arrêt constate que l'avis d'inaptitude du médecin du travail mentionne que tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé et non pas que tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.

9. La cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur n'était pas dispensé de procéder à des recherches de reclassement et de consulter les délégués du personnel et qu'il avait ainsi manqué à son obligation de reclassement.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois, tant principal qu'incident ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille vingt-trois, et signé par lui et Mme Valéry, conseiller référendaire, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2023:SO00857
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