Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 28 juin 2023, 22-11.699, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 28 juin 2023, 22-11.699, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 22-11.699
- ECLI:FR:CCASS:2023:SO00769
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 28 juin 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 02 juin 2021- Président
- M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
BD4
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 juin 2023
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 769 F-B
Pourvoi n° W 22-11.699
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 JUIN 2023
M. [S] [V], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-11.699 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société PM Turenne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à M. [N] [B], domicilié [Adresse 3], pris en qualité de liquidateur amiable de la société PM Turenne,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ollivier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [V], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société PM Turenne, et de M. [B], ès qualités, après débats en l'audience publique du 1er juin 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ollivier, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2021), M. [V] a été employé en qualité de serveur par la société PM Turenne (la société) à compter du 2 juin 2014.
2. Le 9 octobre 2015, le salarié a demandé l'organisation d'élections professionnelles. Il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement le 5 novembre 2015, avec mise à pied conservatoire. Il a été licencié pour faute grave le 9 novembre 2015.
3. Invoquant l'existence d'une discrimination syndicale et contestant le bien-fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale le 16 février 2016 aux fins notamment d'annulation du licenciement, de réintégration et de paiement de rappels de salaire et de diverses indemnités.
4. La société a été placée en liquidation amiable, M. [B] étant désigné liquidateur.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à ce que son licenciement soit dit nul, que soit ordonnée sa réintégration et en paiement d'un rappel de salaire à compter du licenciement jusqu'à sa réintégration effective ainsi qu'un rappel de salaire provisionnel, alors « que lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'il appartient au juge d'examiner les éléments invoqués par le salarié au soutien de ses allégations de discrimination ; que pour caractériser la discrimination subie, le salarié faisait valoir que l'employeur avait engagé une procédure de licenciement à son encontre le jour même de la réception du courrier par lequel il sollicitait l'organisation d'élections professionnelles ; qu'en se bornant à affirmer que le salarié ne faisait état d'aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale sans rechercher si la concomitance entre la réception du courrier du salarié demandant l'organisation d'élections professionnelles et l'engagement de la procédure de licenciement ne laissait pas supposer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause :
6. Lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l'employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d'organiser des élections professionnelles au sein de l'entreprise.
7. Pour rejeter les demandes du salarié au titre de la nullité du licenciement pour discrimination syndicale et de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le salarié ne présente dans ses conclusions aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale.
8. En statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le licenciement prononcé n'était pas justifié par l'existence d'une cause réelle et sérieuse, qu'il résultait de ses constatations que le salarié avait demandé l'organisation des élections professionnelles le 9 octobre 2015, qu'il avait été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 5 novembre 2015 et licencié pour faute grave le 9 novembre 2015, et que le salarié soutenait dans ses conclusions que la procédure de licenciement avait été engagée le 14 octobre 2015, date à laquelle l'employeur avait reçu sa demande d'organisation des élections des délégués du personnel, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la demande du salarié d'organiser les élections professionnelles et le licenciement prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'institutions représentatives du personnel, alors « que l'employeur qui n'a pas accompli, bien qu'il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d'institutions représentatives du personnel, sans qu'un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés d'une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts ; qu'en rejetant la demande de réparation du salarié fondée sur l'absence d'institution représentative du personnel au motif inopérant que l'intéressé ne justifiait d'aucun préjudice consécutif à cette carence, la cour d'appel a violé l'article L. 2313-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, ensemble l'alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 1382, devenu 1240, du code civil et l'article 8, § 1, de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 2313-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, l'alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 1382, devenu 1240, du code civil et l'article 8, § 1, de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne :
10. Il résulte de l'application combinée de ces textes que l'employeur qui n'a pas accompli, bien qu'il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d'institutions représentatives du personnel, sans qu'un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés ainsi d'une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.
11.Pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour absence d'institutions représentatives du personnel, l'arrêt retient que le salarié ne justifie d'aucun préjudice consécutif à cette absence.
12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
13. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt ayant débouté le salarié de ses demandes de dire le licenciement nul, de réintégration dans l'entreprise et de rappel de salaires provisionnel entraîne la cassation des chefs de dispositif ayant condamné l'employeur à payer au salarié certaines sommes au titre du préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire
14. La cassation des chefs de dispositif ayant débouté le salarié de ses demandes de dire le licenciement nul, de réintégration dans l'entreprise et de rappel de salaires provisionnel et condamné l'employeur à payer au salarié certaines sommes au titre du préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ayant débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'institutions représentatives du personnel n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [V] de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'institutions représentatives du personnel, de ses demandes de dire le licenciement nul, de réintégration dans l'entreprise et de rappel de salaires provisionnel, en ce qu'il condamne la société PM Turenne à payer à M. [V] la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 2 473 euros au titre du préavis, la somme de 247,30 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 741,96 euros au titre de l'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 2 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société PM Turenne, prise en la personne de son liquidateur amiable M. [B], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société PM Turenne et condamne M. [B], ès qualités, à payer à M. [V] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:SO00769
SOC.
BD4
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 juin 2023
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 769 F-B
Pourvoi n° W 22-11.699
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 28 JUIN 2023
M. [S] [V], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-11.699 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société PM Turenne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à M. [N] [B], domicilié [Adresse 3], pris en qualité de liquidateur amiable de la société PM Turenne,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ollivier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [V], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société PM Turenne, et de M. [B], ès qualités, après débats en l'audience publique du 1er juin 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ollivier, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Laulom, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2021), M. [V] a été employé en qualité de serveur par la société PM Turenne (la société) à compter du 2 juin 2014.
2. Le 9 octobre 2015, le salarié a demandé l'organisation d'élections professionnelles. Il a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement le 5 novembre 2015, avec mise à pied conservatoire. Il a été licencié pour faute grave le 9 novembre 2015.
3. Invoquant l'existence d'une discrimination syndicale et contestant le bien-fondé de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale le 16 février 2016 aux fins notamment d'annulation du licenciement, de réintégration et de paiement de rappels de salaire et de diverses indemnités.
4. La société a été placée en liquidation amiable, M. [B] étant désigné liquidateur.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à ce que son licenciement soit dit nul, que soit ordonnée sa réintégration et en paiement d'un rappel de salaire à compter du licenciement jusqu'à sa réintégration effective ainsi qu'un rappel de salaire provisionnel, alors « que lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'il appartient au juge d'examiner les éléments invoqués par le salarié au soutien de ses allégations de discrimination ; que pour caractériser la discrimination subie, le salarié faisait valoir que l'employeur avait engagé une procédure de licenciement à son encontre le jour même de la réception du courrier par lequel il sollicitait l'organisation d'élections professionnelles ; qu'en se bornant à affirmer que le salarié ne faisait état d'aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale sans rechercher si la concomitance entre la réception du courrier du salarié demandant l'organisation d'élections professionnelles et l'engagement de la procédure de licenciement ne laissait pas supposer l'existence d'une discrimination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail, dans leur rédaction applicable en la cause :
6. Lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l'employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d'organiser des élections professionnelles au sein de l'entreprise.
7. Pour rejeter les demandes du salarié au titre de la nullité du licenciement pour discrimination syndicale et de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le salarié ne présente dans ses conclusions aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale.
8. En statuant ainsi, alors qu'elle retenait que le licenciement prononcé n'était pas justifié par l'existence d'une cause réelle et sérieuse, qu'il résultait de ses constatations que le salarié avait demandé l'organisation des élections professionnelles le 9 octobre 2015, qu'il avait été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 5 novembre 2015 et licencié pour faute grave le 9 novembre 2015, et que le salarié soutenait dans ses conclusions que la procédure de licenciement avait été engagée le 14 octobre 2015, date à laquelle l'employeur avait reçu sa demande d'organisation des élections des délégués du personnel, de sorte qu'il appartenait à l'employeur de démontrer l'absence de lien entre la demande du salarié d'organiser les élections professionnelles et le licenciement prononcé, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'institutions représentatives du personnel, alors « que l'employeur qui n'a pas accompli, bien qu'il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d'institutions représentatives du personnel, sans qu'un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés d'une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts ; qu'en rejetant la demande de réparation du salarié fondée sur l'absence d'institution représentative du personnel au motif inopérant que l'intéressé ne justifiait d'aucun préjudice consécutif à cette carence, la cour d'appel a violé l'article L. 2313-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, ensemble l'alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 1382, devenu 1240, du code civil et l'article 8, § 1, de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 2313-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause, l'alinéa 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 27 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'article 1382, devenu 1240, du code civil et l'article 8, § 1, de la directive 2002/14/CE du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne :
10. Il résulte de l'application combinée de ces textes que l'employeur qui n'a pas accompli, bien qu'il y soit légalement tenu, les diligences nécessaires à la mise en place d'institutions représentatives du personnel, sans qu'un procès-verbal de carence ait été établi, commet une faute qui cause un préjudice aux salariés, privés ainsi d'une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts.
11.Pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour absence d'institutions représentatives du personnel, l'arrêt retient que le salarié ne justifie d'aucun préjudice consécutif à cette absence.
12. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
13. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt ayant débouté le salarié de ses demandes de dire le licenciement nul, de réintégration dans l'entreprise et de rappel de salaires provisionnel entraîne la cassation des chefs de dispositif ayant condamné l'employeur à payer au salarié certaines sommes au titre du préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire
14. La cassation des chefs de dispositif ayant débouté le salarié de ses demandes de dire le licenciement nul, de réintégration dans l'entreprise et de rappel de salaires provisionnel et condamné l'employeur à payer au salarié certaines sommes au titre du préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ayant débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'institutions représentatives du personnel n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [V] de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'institutions représentatives du personnel, de ses demandes de dire le licenciement nul, de réintégration dans l'entreprise et de rappel de salaires provisionnel, en ce qu'il condamne la société PM Turenne à payer à M. [V] la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 2 473 euros au titre du préavis, la somme de 247,30 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 741,96 euros au titre de l'indemnité de licenciement, l'arrêt rendu le 2 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société PM Turenne, prise en la personne de son liquidateur amiable M. [B], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société PM Turenne et condamne M. [B], ès qualités, à payer à M. [V] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille vingt-trois.