Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 17 mai 2023, 22-16.489, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 17 mai 2023, 22-16.489, Inédit
Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 22-16.489
- ECLI:FR:CCASS:2023:C100338
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mercredi 17 mai 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, du 08 mars 2022- Président
- Mme Guihal (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 17 mai 2023
Cassation
Mme GUIHAL, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 338 F-D
Pourvoi n° C 22-16.489
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 17 MAI 2023
M. [Z] [H], domicilié [Adresse 6], a formé le pourvoi n° C 22-16.489 contre l'arrêt rendu le 8 mars 2022 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Finamur, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Carthago invest, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée Probatiso groupe,
3°/ à la société Lefebvre, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à M. [R] [J], domicilié [Adresse 3],
5°/ à la société [F] [N] - MJO - mandataires judiciaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 7], prise en la personne de M. [F] [N], en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Probatiso Corporate Solutions et Urban confort,
6°/ à la société [D], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 5], prise en la personne de Mme [G] [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Probatiso finances,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [H], de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Finamur, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présents Mme Guihal, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ancel, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [H] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Carthago invest, anciennement dénommée Probatiso groupe, la société Lefebvre, M. [R] [J], la société [F] [N], en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Probatiso Corporate Solutions et Urban confort, la société [D], prise en la personne de Mme [G] [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Probatiso finances.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 mars 2022), la société française Finamur a consenti un crédit-bail portant sur un ensemble immobilier à usage industriel situé à Nantes à la société Sort et Chasles, aux droits de laquelle est venue la société de droit allemand Mh international, ayant comme gérant M. [H].
3. Le paiement des loyers et charges ayant cessé, la société Finamur a engagé une procédure pour obtenir l'expulsion des occupants et le paiement de diverses sommes.
4. M. [H], contre lequel est formé une demande de dommages-intérêts, a soulevé une exception d'incompétence devant le juge de la mise en état.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
6. M. [H] fait grief à l'arrêt de déclarer la juridiction nantaise compétente pour statuer sur les demandes de la société Finamur, alors « que, en tout état de cause, en matière de dissolution des sociétés, seules sont compétentes les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel celles-ci ont leur siège ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que la responsabilité délictuelle de M. [H] était mise en cause par la société Finamur pour avoir procédé, en sa qualité de gérant, à la dissolution prétendument frauduleuse de la société de droit allemand Mh international, dont le siège social était situé en Allemagne, a néanmoins retenu, pour dire que le litige ne présentait aucun élément d'extranéité imposant de recourir aux règles de compétence du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (dit Bruxelles I bis), que la dissolution litigieuse n'était pas discutée et ne constituait pas l'objet principal du litige, a violé l'article 24 du règlement précité. »
Réponse de la Cour
7. Il résulte de l'article 24 § 2 du règlement (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (règlement Bruxelles I bis) que les juridictions françaises sont compétentes pour statuer sur une action qui n'a pas pour objet principal de se prononcer sur la dissolution d'une société allemande mais tend à mettre en cause la responsabilité personnelle du défendeur, domicilié en France, afin de répondre des fautes qu'il aurait commises lorsqu'il était gérant de cette société.
8. Ayant retenu que si la société de droit allemand Mh International, titulaire du contrat de crédit-bail, avait son siège social en Allemagne, l'action n'était pas dirigée contre cette société, laquelle avait été définitivement radiée du registre du commerce par le tribunal de Hambourg en 2017, mais contre son gérant, M. [H], qui résidait en France, assigné en son nom personnel sur le fondement de l'article 1240 du code civil afin de répondre des fautes qu'il aurait commises lorsqu'il en était gérant, que la dissolution constituait un fait juridique non discuté qui n'était pas l'objet principal du litige mais seulement un des éléments permettant de caractériser à l'encontre de M. [H] l'existence d'une faute susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle à l'égard de la SA Finamur, et enfin que le litige ne portait pas sur la validité d'une décision prise par un organe de la société Mh International, la cour d'appel en a exactement déduit que la règle de compétence exclusive prévue à l'article 24 du règlement Bruxelles I Bis n'était pas applicable.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10. M. [H] fait grief à l'arrêt de déclarer la juridiction nantaise compétente pour statuer sur les demandes de la société Finamur, alors « qu'en se fondant d'elle-même, pour retenir la compétence du tribunal de Nantes, sur la circonstance que le litige ne présenterait aucun élément d'extranéité imposant de recourir aux règles de compétence prévues au règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (dit Bruxelles I bis) et qu'il conviendrait dès lors de faire application de l'article 46 du code de procédure civile, la cour d'appel, qui a ainsi relevé d'office le moyen tiré de l'absence de situation internationale et de l'application des règles nationales de compétence, sans avoir invité préalablement les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile ; »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
11. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
12. Pour rejeter l'exception d'incompétence, l'arrêt retient que le litige ne présente aucun élément d'extranéité imposant de recourir aux règles de compétence prévues par le règlement Bruxelles I bis et qu'il convient d'appliquer l'article 46 du code de procédure civile.
13. En statuant ainsi, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'inapplicabilité de ce règlement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne la société Finamur aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:C100338
CIV. 1
SG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 17 mai 2023
Cassation
Mme GUIHAL, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 338 F-D
Pourvoi n° C 22-16.489
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 17 MAI 2023
M. [Z] [H], domicilié [Adresse 6], a formé le pourvoi n° C 22-16.489 contre l'arrêt rendu le 8 mars 2022 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Finamur, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Carthago invest, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée Probatiso groupe,
3°/ à la société Lefebvre, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à M. [R] [J], domicilié [Adresse 3],
5°/ à la société [F] [N] - MJO - mandataires judiciaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 7], prise en la personne de M. [F] [N], en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Probatiso Corporate Solutions et Urban confort,
6°/ à la société [D], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 5], prise en la personne de Mme [G] [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Probatiso finances,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [H], de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Finamur, après débats en l'audience publique du 28 mars 2023 où étaient présents Mme Guihal, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ancel, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [H] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Carthago invest, anciennement dénommée Probatiso groupe, la société Lefebvre, M. [R] [J], la société [F] [N], en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés Probatiso Corporate Solutions et Urban confort, la société [D], prise en la personne de Mme [G] [D], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Probatiso finances.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 mars 2022), la société française Finamur a consenti un crédit-bail portant sur un ensemble immobilier à usage industriel situé à Nantes à la société Sort et Chasles, aux droits de laquelle est venue la société de droit allemand Mh international, ayant comme gérant M. [H].
3. Le paiement des loyers et charges ayant cessé, la société Finamur a engagé une procédure pour obtenir l'expulsion des occupants et le paiement de diverses sommes.
4. M. [H], contre lequel est formé une demande de dommages-intérêts, a soulevé une exception d'incompétence devant le juge de la mise en état.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
6. M. [H] fait grief à l'arrêt de déclarer la juridiction nantaise compétente pour statuer sur les demandes de la société Finamur, alors « que, en tout état de cause, en matière de dissolution des sociétés, seules sont compétentes les juridictions de l'Etat membre sur le territoire duquel celles-ci ont leur siège ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté que la responsabilité délictuelle de M. [H] était mise en cause par la société Finamur pour avoir procédé, en sa qualité de gérant, à la dissolution prétendument frauduleuse de la société de droit allemand Mh international, dont le siège social était situé en Allemagne, a néanmoins retenu, pour dire que le litige ne présentait aucun élément d'extranéité imposant de recourir aux règles de compétence du règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (dit Bruxelles I bis), que la dissolution litigieuse n'était pas discutée et ne constituait pas l'objet principal du litige, a violé l'article 24 du règlement précité. »
Réponse de la Cour
7. Il résulte de l'article 24 § 2 du règlement (UE) n°1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (règlement Bruxelles I bis) que les juridictions françaises sont compétentes pour statuer sur une action qui n'a pas pour objet principal de se prononcer sur la dissolution d'une société allemande mais tend à mettre en cause la responsabilité personnelle du défendeur, domicilié en France, afin de répondre des fautes qu'il aurait commises lorsqu'il était gérant de cette société.
8. Ayant retenu que si la société de droit allemand Mh International, titulaire du contrat de crédit-bail, avait son siège social en Allemagne, l'action n'était pas dirigée contre cette société, laquelle avait été définitivement radiée du registre du commerce par le tribunal de Hambourg en 2017, mais contre son gérant, M. [H], qui résidait en France, assigné en son nom personnel sur le fondement de l'article 1240 du code civil afin de répondre des fautes qu'il aurait commises lorsqu'il en était gérant, que la dissolution constituait un fait juridique non discuté qui n'était pas l'objet principal du litige mais seulement un des éléments permettant de caractériser à l'encontre de M. [H] l'existence d'une faute susceptible d'engager sa responsabilité délictuelle à l'égard de la SA Finamur, et enfin que le litige ne portait pas sur la validité d'une décision prise par un organe de la société Mh International, la cour d'appel en a exactement déduit que la règle de compétence exclusive prévue à l'article 24 du règlement Bruxelles I Bis n'était pas applicable.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10. M. [H] fait grief à l'arrêt de déclarer la juridiction nantaise compétente pour statuer sur les demandes de la société Finamur, alors « qu'en se fondant d'elle-même, pour retenir la compétence du tribunal de Nantes, sur la circonstance que le litige ne présenterait aucun élément d'extranéité imposant de recourir aux règles de compétence prévues au règlement (UE) n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (dit Bruxelles I bis) et qu'il conviendrait dès lors de faire application de l'article 46 du code de procédure civile, la cour d'appel, qui a ainsi relevé d'office le moyen tiré de l'absence de situation internationale et de l'application des règles nationales de compétence, sans avoir invité préalablement les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile ; »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
11. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
12. Pour rejeter l'exception d'incompétence, l'arrêt retient que le litige ne présente aucun élément d'extranéité imposant de recourir aux règles de compétence prévues par le règlement Bruxelles I bis et qu'il convient d'appliquer l'article 46 du code de procédure civile.
13. En statuant ainsi, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'inapplicabilité de ce règlement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;
Condamne la société Finamur aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille vingt-trois.