Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 11 mai 2023, 21-16.923, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 11 mai 2023, 21-16.923, Inédit
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 21-16.923
- ECLI:FR:CCASS:2023:CO00341
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 11 mai 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, du 26 janvier 2021- Président
- M. Vigneau (président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 11 mai 2023
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 341 F-D
Pourvoi n° D 21-16.923
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 MAI 2023
Mme [J] [H], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 21-16.923 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2021 par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, domicilié [Adresse 5], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques,
2°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [H], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques et du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 14 mars 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 26 janvier 2021), par un acte de donation-partage reçu le 27 juin 2011, Mme [R] a notamment donné à sa fille, Mme [H], 7 000 actions de la société holding Natyce. Les droits de mutation à titre gratuit résultant de cette donation-partage ont été calculés sur le quart de la valeur des actions, en application des dispositions de l'article 787 B du code général des impôts.
2. Le 26 mars 2014, l'administration fiscale, considérant que cette donation-partage n'était pas éligible au dispositif de l'article 787 B du code général des impôts, au motif que la société holding Natyce n'avait pas la qualité d'animatrice de son groupe, a notifié à Mme [H] une proposition de rectification des droits de mutation dus.
3. Après le rejet de sa réclamation contentieuse, Mme [H] a assigné l'administration fiscale en décharge des rappels d'imposition réclamés.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Mme [H] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la décharge et au dégrèvement de l'imposition due au titre de la donation-partage du 27 juin 2011, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article 787 B du code général des impôts, sont exonérées des droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, les parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs, à condition que ces parts ou actions aient fait l'objet d'un engagement collectif de conservation présentant certaines caractéristiques ; que cette exonération s'applique aux parts ou actions de sociétés holding détenant des filiales opérationnelles au jour du fait générateur de l'imposition et qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, exercent de manière effective, au jour du fait générateur de l'imposition, une activité principale de participation active à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale, et, le cas échéant et, à titre purement interne, de fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers ; qu'en retenant, pour juger que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, qu'une société holding doit avoir exercé son activité d'animation dans un certain délai avant le fait générateur de l'imposition et que l'animation effective du groupe doit être préparée suffisamment en amont de l'acte de donation-partage, cependant que les dispositions de l'article 787 B du code général des impôts ne subordonnent nullement le bénéfice de l'exonération à l'exercice d'une activité d'animation pendant une certaine durée antérieurement au fait générateur de l'imposition, mais exigent seulement qu'à cette date, la société holding exerce de manière effective une activité d'animation de son groupe, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 787 B du code général des impôts ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour juger que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, la cour d'appel retient que, "pour tous documents", Mme [H] ne verse aux débats que la convention d'animation stratégique du 15 juin 2011, le mémorandum Natyce du 14 juin 2011, le procès-verbal de l'assemblée générale de la société Natyce du 27 juin 2011 et le rapport de Mme [H] présenté au cours de cette assemblée générale, que Mme [H] ne produit aucun acte révélant l'existence de services spécifiques administratifs, juridiques, comptables, financiers ou immobiliers qu'elle aurait réalisés au nom de la société en formation et que le mémorandum du 14 juin 2011 ne suffisait pas à établir l'effectivité de l'animation pendant la période de formation de la société Natyce ; qu'en se déterminant ainsi, sans analyser, même sommairement, les pièces annexées au courrier du 15 septembre 2014 adressé par Mme [H] à l'administration fiscale (courriers, courriels, mémos internes, devis, contrats), dont il ressortait que, pendant la période de formation de la société Natyce ayant débuté dans la seconde moitié de l'année 2010, Mme [H] avait, en prévision de l'acquisition, par la société Natyce, des titres des sociétés Opéra [Adresse 4] et Jardins d'[Adresse 3], activement géré les deux hôtels exploités par ces sociétés, en donnant des directives à leurs gérants respectifs, en supervisant les opérations de modernisation des locaux de ces hôtels, en définissant la stratégie commerciale, en contactant des prestataires et fournisseurs et en assurant le suivi des comptes des deux hôtels, tous éléments qui établissaient que Mme [H] avait, entre 2010 et 2011, accompli pour la société Natyce en cours de formation, des actes d'animation de ses futures filiales, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en vertu des articles L. 210-6 et R. 210-5 du code de commerce, une société peut, après son immatriculation, reprendre les engagements souscrits par ses fondateurs pendant la période de formation, les engagements étant alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société ; que pour juger que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, la cour d'appel retient par motifs propres et adoptés que l'appréciation de l'activité réelle d'une société ne peut porter sur la phase antérieure à sa création, au cours de laquelle elle est dépourvue de toute existence juridique, que Mme [H] ne pouvait avoir effectué aucun acte d'animation du groupe à la tête duquel devait se trouver la société Natyce en cours de formation avant le 15 juin 2011, date à laquelle la société Natyce a acquis des titres de la société Opéra [Adresse 4], que la société Natyce était, au cours des mois d'avril et de mai 2011, en voie de formation afin d'assurer l'animation d'hôtels détenus par la société Cybe et qu'il en résultait a contrario qu'avant la création de la société Natyce, l'animation était assurée par la société Cybe, et que le projet non concrétisé d'acquisition de l'hôtel de [Adresse 6] par la société Natyce en cours de formation ne pouvait être pris en compte pour caractériser une activité d'animation du groupe ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas de la décision du comité de direction de la société Natyce du 9 juin 2011 et de la décision de l'assemblée générale de la société Natyce du 27 juin 2011 que cette société avait décidé de reprendre les engagements et dépenses souscrits par Mme [H] pendant la période de formation de la société Natyce et s'il ne s'en déduisait pas qu'en vertu de l'effet rétroactif de la reprise, la société Natyce devait être réputée avoir réalisé dès l'origine les actes et décisions d'animation des sociétés Opéra [Adresse 4] et Jardins d'[Adresse 3] effectués par Mme [H] pendant la période de formation, de même que les démarches d'acquisition de l'hôtel [Adresse 6], de sorte qu'à la date de la donation-partage du 27 juin 2011, la société Natyce exerçait bien une activité effective d'animation de son groupe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 787 B du code général des impôts et des articles L. 210-6 et R. 210-5 du code de commerce ;
4°/ qu'en jugeant que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, au motif adopté que la convention du 15 juin 2011 par laquelle la société Cybe a cédé à la société Natyce des actions de la société Opéra [Adresse 4] stipulait que le cédant disposerait d'une minorité de blocage pour les décisions extraordinaires, ce dont elle a déduit que le contrôle exercé sur la filiale n'était pas total, cependant que la caractérisation d'une société holding animatrice n'est nullement subordonnée à l'existence d'un contrôle total de cette dernière sur ses filiales, la cour d'appel a violé l'article 787 B du code général des impôts. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article 787 B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs sont, à condition qu'elles aient fait l'objet d'un engagement collectif de conservation présentant certaines caractéristiques et d'un engagement individuel de conservation pendant une durée de quatre ans à compter de l'expiration de l'engagement collectif, exonérées de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur.
6. Est assimilée à une telle société la société holding qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, a pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, cette activité d'animation de son groupe par la société holding s'appréciant au jour du fait générateur de l'imposition.
7. L'arrêt énonce que, si la condition d'activité doit être respectée au jour de la donation, l'animation effective du groupe doit être préparée suffisamment en amont de l'acte pour permettre l'accumulation des actes et des faits sur la période considérée afin de pouvoir démontrer l'effectivité et la réalité du schéma présenté pour revendiquer l'application du régime de faveur au jour de la donation.
8. Il constate que la société Natyce, créée le 31 mai 2011 et immatriculée le 10 juin 2011, a, le 15 juin 2011, acquis de la société Cybe 350 actions sur les 500 représentant le capital de la société Opéra [Adresse 4], et a conclu le même jour une convention d'animation stratégique de management, de gestion et d'assistance commerciale avec la société Opéra [Adresse 4]. Il retient que Mme [H] ne rapporte aucunement la preuve, dont elle a la charge, de l'existence antérieure à la donation-partage d'interventions de la société Natyce dans la détermination des options stratégiques ou opérationnelles de la société Opéra [Adresse 4].
9. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, dont il résulte, d'une part, que la société Natyce, qui n'avait pas de filiale avant le 15 juin 2011, n'est devenue une société holding qu'à compter de cette date, d'autre part, que, nonobstant la conclusion d'une convention d'animation stratégique de management, de gestion et d'assistance commerciale avec la société Opéra [Adresse 4], aucune preuve n'est rapportée au 27 juin 2011, jour de la donation-partage, d'une animation effective de cette société par la société Natyce, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder aux recherches visées aux deuxième et troisième branches, que ses constatations rendaient inopérantes, a, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la première branche et de ceux, également surabondants, critiqués par la quatrième branche, exactement décidé de rejeter les demandes de décharge et de dégrèvement de l'imposition due au titre de la donation-partage du 27 juin 2011.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [H] et la condamne à payer au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et au directeur général des finances publiques la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:CO00341
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 11 mai 2023
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 341 F-D
Pourvoi n° D 21-16.923
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 MAI 2023
Mme [J] [H], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 21-16.923 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2021 par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, domicilié [Adresse 5], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques,
2°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [H], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques et du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 14 mars 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 26 janvier 2021), par un acte de donation-partage reçu le 27 juin 2011, Mme [R] a notamment donné à sa fille, Mme [H], 7 000 actions de la société holding Natyce. Les droits de mutation à titre gratuit résultant de cette donation-partage ont été calculés sur le quart de la valeur des actions, en application des dispositions de l'article 787 B du code général des impôts.
2. Le 26 mars 2014, l'administration fiscale, considérant que cette donation-partage n'était pas éligible au dispositif de l'article 787 B du code général des impôts, au motif que la société holding Natyce n'avait pas la qualité d'animatrice de son groupe, a notifié à Mme [H] une proposition de rectification des droits de mutation dus.
3. Après le rejet de sa réclamation contentieuse, Mme [H] a assigné l'administration fiscale en décharge des rappels d'imposition réclamés.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Mme [H] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la décharge et au dégrèvement de l'imposition due au titre de la donation-partage du 27 juin 2011, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article 787 B du code général des impôts, sont exonérées des droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, les parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs, à condition que ces parts ou actions aient fait l'objet d'un engagement collectif de conservation présentant certaines caractéristiques ; que cette exonération s'applique aux parts ou actions de sociétés holding détenant des filiales opérationnelles au jour du fait générateur de l'imposition et qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, exercent de manière effective, au jour du fait générateur de l'imposition, une activité principale de participation active à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale, et, le cas échéant et, à titre purement interne, de fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers ; qu'en retenant, pour juger que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, qu'une société holding doit avoir exercé son activité d'animation dans un certain délai avant le fait générateur de l'imposition et que l'animation effective du groupe doit être préparée suffisamment en amont de l'acte de donation-partage, cependant que les dispositions de l'article 787 B du code général des impôts ne subordonnent nullement le bénéfice de l'exonération à l'exercice d'une activité d'animation pendant une certaine durée antérieurement au fait générateur de l'imposition, mais exigent seulement qu'à cette date, la société holding exerce de manière effective une activité d'animation de son groupe, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 787 B du code général des impôts ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que pour juger que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, la cour d'appel retient que, "pour tous documents", Mme [H] ne verse aux débats que la convention d'animation stratégique du 15 juin 2011, le mémorandum Natyce du 14 juin 2011, le procès-verbal de l'assemblée générale de la société Natyce du 27 juin 2011 et le rapport de Mme [H] présenté au cours de cette assemblée générale, que Mme [H] ne produit aucun acte révélant l'existence de services spécifiques administratifs, juridiques, comptables, financiers ou immobiliers qu'elle aurait réalisés au nom de la société en formation et que le mémorandum du 14 juin 2011 ne suffisait pas à établir l'effectivité de l'animation pendant la période de formation de la société Natyce ; qu'en se déterminant ainsi, sans analyser, même sommairement, les pièces annexées au courrier du 15 septembre 2014 adressé par Mme [H] à l'administration fiscale (courriers, courriels, mémos internes, devis, contrats), dont il ressortait que, pendant la période de formation de la société Natyce ayant débuté dans la seconde moitié de l'année 2010, Mme [H] avait, en prévision de l'acquisition, par la société Natyce, des titres des sociétés Opéra [Adresse 4] et Jardins d'[Adresse 3], activement géré les deux hôtels exploités par ces sociétés, en donnant des directives à leurs gérants respectifs, en supervisant les opérations de modernisation des locaux de ces hôtels, en définissant la stratégie commerciale, en contactant des prestataires et fournisseurs et en assurant le suivi des comptes des deux hôtels, tous éléments qui établissaient que Mme [H] avait, entre 2010 et 2011, accompli pour la société Natyce en cours de formation, des actes d'animation de ses futures filiales, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en vertu des articles L. 210-6 et R. 210-5 du code de commerce, une société peut, après son immatriculation, reprendre les engagements souscrits par ses fondateurs pendant la période de formation, les engagements étant alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société ; que pour juger que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, la cour d'appel retient par motifs propres et adoptés que l'appréciation de l'activité réelle d'une société ne peut porter sur la phase antérieure à sa création, au cours de laquelle elle est dépourvue de toute existence juridique, que Mme [H] ne pouvait avoir effectué aucun acte d'animation du groupe à la tête duquel devait se trouver la société Natyce en cours de formation avant le 15 juin 2011, date à laquelle la société Natyce a acquis des titres de la société Opéra [Adresse 4], que la société Natyce était, au cours des mois d'avril et de mai 2011, en voie de formation afin d'assurer l'animation d'hôtels détenus par la société Cybe et qu'il en résultait a contrario qu'avant la création de la société Natyce, l'animation était assurée par la société Cybe, et que le projet non concrétisé d'acquisition de l'hôtel de [Adresse 6] par la société Natyce en cours de formation ne pouvait être pris en compte pour caractériser une activité d'animation du groupe ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas de la décision du comité de direction de la société Natyce du 9 juin 2011 et de la décision de l'assemblée générale de la société Natyce du 27 juin 2011 que cette société avait décidé de reprendre les engagements et dépenses souscrits par Mme [H] pendant la période de formation de la société Natyce et s'il ne s'en déduisait pas qu'en vertu de l'effet rétroactif de la reprise, la société Natyce devait être réputée avoir réalisé dès l'origine les actes et décisions d'animation des sociétés Opéra [Adresse 4] et Jardins d'[Adresse 3] effectués par Mme [H] pendant la période de formation, de même que les démarches d'acquisition de l'hôtel [Adresse 6], de sorte qu'à la date de la donation-partage du 27 juin 2011, la société Natyce exerçait bien une activité effective d'animation de son groupe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 787 B du code général des impôts et des articles L. 210-6 et R. 210-5 du code de commerce ;
4°/ qu'en jugeant que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'exercice par la société Natyce d'une activité d'animation du groupe antérieurement à la donation-partage du 27 juin 2011, au motif adopté que la convention du 15 juin 2011 par laquelle la société Cybe a cédé à la société Natyce des actions de la société Opéra [Adresse 4] stipulait que le cédant disposerait d'une minorité de blocage pour les décisions extraordinaires, ce dont elle a déduit que le contrôle exercé sur la filiale n'était pas total, cependant que la caractérisation d'une société holding animatrice n'est nullement subordonnée à l'existence d'un contrôle total de cette dernière sur ses filiales, la cour d'appel a violé l'article 787 B du code général des impôts. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article 787 B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009, les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès ou entre vifs sont, à condition qu'elles aient fait l'objet d'un engagement collectif de conservation présentant certaines caractéristiques et d'un engagement individuel de conservation pendant une durée de quatre ans à compter de l'expiration de l'engagement collectif, exonérées de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur.
6. Est assimilée à une telle société la société holding qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, a pour activité principale la participation active à la conduite de la politique de son groupe et au contrôle de ses filiales exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture à ces filiales de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, cette activité d'animation de son groupe par la société holding s'appréciant au jour du fait générateur de l'imposition.
7. L'arrêt énonce que, si la condition d'activité doit être respectée au jour de la donation, l'animation effective du groupe doit être préparée suffisamment en amont de l'acte pour permettre l'accumulation des actes et des faits sur la période considérée afin de pouvoir démontrer l'effectivité et la réalité du schéma présenté pour revendiquer l'application du régime de faveur au jour de la donation.
8. Il constate que la société Natyce, créée le 31 mai 2011 et immatriculée le 10 juin 2011, a, le 15 juin 2011, acquis de la société Cybe 350 actions sur les 500 représentant le capital de la société Opéra [Adresse 4], et a conclu le même jour une convention d'animation stratégique de management, de gestion et d'assistance commerciale avec la société Opéra [Adresse 4]. Il retient que Mme [H] ne rapporte aucunement la preuve, dont elle a la charge, de l'existence antérieure à la donation-partage d'interventions de la société Natyce dans la détermination des options stratégiques ou opérationnelles de la société Opéra [Adresse 4].
9. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, dont il résulte, d'une part, que la société Natyce, qui n'avait pas de filiale avant le 15 juin 2011, n'est devenue une société holding qu'à compter de cette date, d'autre part, que, nonobstant la conclusion d'une convention d'animation stratégique de management, de gestion et d'assistance commerciale avec la société Opéra [Adresse 4], aucune preuve n'est rapportée au 27 juin 2011, jour de la donation-partage, d'une animation effective de cette société par la société Natyce, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder aux recherches visées aux deuxième et troisième branches, que ses constatations rendaient inopérantes, a, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la première branche et de ceux, également surabondants, critiqués par la quatrième branche, exactement décidé de rejeter les demandes de décharge et de dégrèvement de l'imposition due au titre de la donation-partage du 27 juin 2011.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [H] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [H] et la condamne à payer au directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et au directeur général des finances publiques la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille vingt-trois.