Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 19 avril 2023, 21-19.743, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 avril 2023




Cassation


M. VIGNEAU, président



Arrêt n° 308 F-B

Pourvoi n° U 21-19.743




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 AVRIL 2023

La société L'Olivier d'Aude, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-19.743 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2021 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [K] [G], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société L'Olivier d'Aude, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 18 mai 2021), le 7 avril 1989, la société civile immobilière L'Olivier d'Aude (la SCI) a consenti à Mme [G] un bail portant sur un local commercial moyennant le paiement d'un loyer, payable mensuellement et d'avance par termes égaux de 4 000,00 francs (702,33 euros).

2. Le 8 novembre 2019, la SCI a fait délivrer à sa locataire un commandement de payer la somme de 36 429,40 euros en principal, cet acte reproduisant la clause résolutoire incluse au contrat de bail.

3. Par un jugement du 3 décembre 2019, Mme [G] a bénéficié d'une procédure de rétablissement professionnel.

4. Le 9 mars 2020, la SCI a assigné en référé Mme [G] en constatation de l'acquisition de la clause résolutoire du bail et en paiement d'une somme provisionnelle égale aux loyers impayés.

5. Entre-temps, un jugement du 21 juillet 2020 a ordonné la clôture de la procédure de rétablissement professionnel de Mme [G] et dit que cette clôture entraînait l'effacement des dettes figurant sur la liste des créances déclarées annexée au jugement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de résiliation du bail et de paiement d'un arriéré de loyers ainsi que d'une indemnité d'occupation, alors « que la clôture de la procédure de rétablissement professionnel entraîne effacement des dettes à l'égard des créanciers dont la créance, née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, a été portée à la connaissance du juge commis par le débiteur et a fait l'objet de l'information prévue à l'article L. 645-8 du code de commerce ; que la cour d'appel a constaté que, dans le cadre de la procédure de rétablissement professionnel, "la débitrice a indiqué (...) devoir (à la SCI L'Olivier d'Aude) la somme de 18 330,58 euros" ; que, néanmoins, elle a infirmé l'ordonnance de référé entreprise en ce qu'elle avait constaté que le commandement de payer du 8 novembre 2019, visant la clause résolutoire et portant sur la somme de 36 774,87 euros, dont 36 429,40 euros au titre du principal de la créance de loyers, était demeuré infructueux un mois après sa signification, constaté que la clause résolutoire était acquise au bailleur à compter du 8 décembre 2019 et constaté la résolution du bail signé le 7 avril 1989 et, statuant à nouveau, a débouté la SCI de ses demandes à ce titre ; qu'en considérant ainsi la dette d'un montant de 36 429,40 euros comme ayant été effacée en totalité par la clôture du rétablissement professionnel, quand cette dette n'avait été portée par la débitrice à la connaissance du juge commis qu'à concurrence de 18 330,58 euros, la cour n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences qui s'en déduisaient nécessairement au regard de l'article L. 645-11 du code de commerce, que, par suite, elle a violé. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 645-11 et R. 645-17 du code de commerce :

8. Selon le premier de ces textes, la clôture de la procédure de rétablissement professionnel entraîne effacement des dettes à l'égard des créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, a été portée à la connaissance du juge commis par le débiteur et a fait l'objet de l'information prévue à l'article L. 645-8 du code de commerce.

9. Selon le second, le jugement de clôture comprend l'état chiffré des créances effacées avec l'indication, selon le cas, du nom ou de la dénomination et du domicile ou siège des créanciers.

10. Il en résulte qu'une dette n'est susceptible d'être effacée par la clôture de la procédure qu'à concurrence du montant indiqué dans cet état chiffré des créances.

11. Pour rejeter les demandes de constat de la résiliation du bail et de paiement de l'arriéré des loyers formées par la SCI, l'arrêt retient que la dette de loyer de la locataire existait avant le 8 novembre 2019, date du commandement de payer, que, par une lettre du 6 avril 2020, le mandataire au rétablissement professionnel de Mme [G] a invité la SCI à lui adresser sa déclaration de créance dans les délais légaux, lui exposant que la débitrice avait indiqué lui devoir la somme de 18 330,58 euros, et que la créance de loyers ne fait pas partie des créances exclues de l'effacement.

12. En statuant ainsi, alors que la créance portée à la connaissance du juge commis et faisant l'objet du jugement de clôture de la procédure de rétablissement professionnel de Mme [G], emportant son effacement, était de 18 330,58 euros, tandis que la SCI se prévalait d'un commandement de payer portant sur un arriéré de loyers d'un montant supérieur, de 36 429,40 euros en principal, la cour d'appel, en retenant l'effacement intégral de la dette de Mme [G], a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France autrement composée ;

Condamne Mme [G] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société L'Olivier d'Aude ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf avril deux mille vingt-trois. ECLI:FR:CCASS:2023:CO00308
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