Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 5 avril 2023, 21-21.318, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 5 avril 2023, 21-21.318, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 21-21.318
- ECLI:FR:CCASS:2023:SO00341
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 05 avril 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, du 28 mai 2021- Président
- M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
AF1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 avril 2023
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 341 F-B
Pourvoi n° F 21-21.318
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 AVRIL 2023
M. [R] [B], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 21-21.318 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1, chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ au groupement d'intérêt économique Avions de transport régional (GIE ATR), dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Leonardo Finmeccanica SPA, dont le siège est [Adresse 3] (Italie),
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat du GIE ATR, de la SCP Spinosi, avocat de la société Leonardo Finmeccanica SPA, après débats en l'audience publique du 15 février 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 28 mai 2021), M. [B] a été engagé par la société Leonardo Finmeccanica, établie à [Localité 4] (Italie), le 12 octobre 1979.
2. Il a été détaché, en France, auprès du GIE ATR, à compter du 1er juillet 1995.
3. La société Leonardo Finmeccanica a informé le salarié, par lettre du 14 mars 2016, de sa décision de mettre fin au détachement et de l'affecter en Italie à compter du 1er juin 2016. Le terme du détachement a été reporté au 31 août 2016 afin de permettre au salarié d'organiser son départ.
4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 21 juin 2016 et sollicité la condamnation du GIE ATR et de la société Leonardo Finmeccanica au paiement d'une certaine somme en invoquant un abus de détachement, ainsi que la reconnaissance d'un contrat de travail le liant au GIE ATR et sa réintégration au sein de cette dernière entité.
5. Le salarié a été licencié pour faute grave, le 15 septembre 2016, par la société Leonardo Finmeccanica, au motif qu'il ne s'était pas présenté à son poste de travail, en Italie, le 1er septembre 2016.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, le deuxième moyen et le quatrième moyen
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui, s'agissant du premier moyen, pris en sa troisième branche, est irrecevable et qui, pour le surplus, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas de contrat de travail entre lui et le GIE ATR et que son licenciement pour faute grave est fondé, de dire que son licenciement n'est pas nul et de le débouter de ses demandes de dommages-intérêts, d'indemnités de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité pour travail dissimulé, alors :
« 1°/ qu'est illicite le détachement d'un salarié sur le territoire national par un employeur non établi en France qui n'est pas une entreprise de travail temporaire, dès lors que ce détachement n'est réalisé ni pour le compte de l'employeur et sous sa direction dans le cadre d'un contrat conclu entre celui-ci et un destinataire, ni entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe, ni pour le compte de l'employeur sans qu'il existe un contrat entre celui-ci et un destinataire ; qu'en retenant que le salarié avait été régulièrement détaché en France quand il ressortait de ses constatations que le détachement ne résultait d'aucune de ces trois situations mais correspondait à une opération de prêt de main d'oeuvre à but non lucratif, ce qui interdisait le recours au détachement, la cour d'appel a violé l'article L. 342-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er janvier 2007 au 1er mai 2008, devenu les articles L. 1262-1 et L. 1262-2 à compter du 1er mai 2008 ;
2°/ que l'employeur non établi France ne peut détacher que temporairement un salarié sur le territoire national ; qu'en retenant que le salarié avait été régulièrement détaché en France du 1er juillet 1995 au 31 août 2016 aux motifs erronés que "la durée d'un détachement n'est pas limitée par la loi et le caractère temporaire du contrat de détachement n'implique pas qu'il soit nécessairement de courte durée" pour en déduire qu'"au cas d'espèce, le détachement a été reconduit par plusieurs avenants depuis 1995, après accord du salarié et pour des durées déterminées et limitées, ce qui n'a pu laisser penser au salarié que le détachement était définitif, quelle que soit sa durée induite par les prorogations convenues par les parties" quand le détachement du salarié en continu sur une période de 21 ans, fusse par une succession d'avenants, excluait manifestement son caractère temporaire, la cour d'appel a violé l'article L. 342-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er janvier 2007 au 1er mai 2008, devenu les articles L. 1262-1 et L. 1262-2 à compter du 1er mai 2008, interprétés à lumière de l'article 2 de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services :
5°/ que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en écartant l'existence d'un lien de subordination entre le salarié et le GIE ATR aux motifs que ce dernier ne versait pas lui-même la rémunération, ne gérait pas les augmentations de salaire et le niveau hiérarchique du salarié et n'avait pas usé de son pouvoir de sanction quand elle constatait que "le fait que le salarié ait effectué son travail dans le cadre imposé par la hiérarchie du GIE ATR est inhérent à l'exécution de la mission de détachement et n'est pas de nature à caractériser l'existence d'un lien de subordination à l'égard de celui-ci. À cet égard les diverses diligences et modalités de travail décrites par le salarié s'inscrivent dans une simple exécution de son travail au sein de l'entreprise auprès de laquelle il était détaché, notamment : signatures de document à en-tête d'ATR, suivi des directives de la direction d'ATR, présence dans l'organigramme d'ATR, suivis de formations, permanences réponses techniques pour des clients d'ATR", ce dont il s'évinçait que le salarié était subordonné au GIE ATR, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
8. D'abord, aux termes de l'article L. 1262-1 du code du travail, un employeur établi hors de France peut détacher temporairement des salariés sur le territoire national, à condition qu'il existe un contrat de travail entre cet employeur et le salarié et que leur relation de travail subsiste pendant la période de détachement. Le détachement est réalisé : 1° Soit pour le compte de l'employeur et sous sa direction, dans le cadre d'un contrat conclu entre celui-ci et le destinataire de la prestation établi ou exerçant en France ; 2° Soit entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe ; 3° Soit pour le compte de l'employeur sans qu'il existe un contrat entre celui-ci et un destinataire.
9. Aux termes de l'article L. 1262-2 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, une entreprise exerçant une activité de travail temporaire établie hors du territoire national peut détacher temporairement des salariés auprès d'une entreprise utilisatrice établie ou exerçant sur le territoire national, à condition qu'il existe un contrat de travail entre l'entreprise étrangère et le salarié et que leur relation de travail subsiste pendant la période de détachement.
10. Ces articles transposent dans le droit français l'article 1er, intitulé « Champ d'application », de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services.
11. Cette directive a pour base légale les articles 57, § 2, et 66 du Traité instituant la Communauté européenne, selon lesquels le Conseil arrête les directives visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant la libre prestation des services.
12. Elle vise à coordonner les réglementations nationales matérielles relatives aux conditions de travail et d'emploi des travailleurs détachés (CJUE, arrêt du 3 décembre 2014, De Clercq e.a., C-315/13, point 47).
13. Il en résulte que la circonstance qu'un détachement ne répondrait pas aux conditions définies aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2 du code du travail n'a pour conséquence que l'exclusion des règles de coordination prises en transposition de la directive 96/71. Ainsi que la Cour l'a déjà jugé, le non-respect, par l'employeur étranger, des règles relatives au détachement, sur le territoire national, d'un de ses salariés, n'a pas pour effet de voir reconnaître la qualité d'employeur à l'entreprise établie sur le territoire national et bénéficiaire dudit détachement (Soc., 9 janvier 2013, pourvoi n° 11-11.521).
14. Le moyen, qui, en ses deux premières branches, invoque la seule violation des articles L. 1262-1 et L. 1262-2 du code du travail, ne permet pas d'atteindre les chefs du dispositif critiqués de l'arrêt de la cour d'appel, et est, dès lors, inopérant.
15. Il en résulte que la question préjudicielle soumise par le salarié, portant sur l'interprétation de l'article 2 de la directive 96/71, n'est pas utile à la solution du litige.
16. Il n'y a pas lieu en conséquence de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de cette question.
17. Ensuite, l'arrêt retient que le GIE ATR n'est pas signataire du contrat de détachement et de ses avenants de renouvellement, que l'absence alléguée de prolongation par avenant du détachement pour la période allant entre le 1er octobre 2015 et le 14 mars 2016 ne concerne que la société Leonardo Finmeccanica, que la rémunération du salarié a toujours été versée par la société Leonardo Finmeccanica, laquelle a adressé à M.[B] ses bulletins de salaire tout au long de la relation contractuelle, que le salarié ne conteste pas avoir reçu de la société italienne une indemnité de détachement de 30 000 euros par an, une prise en charge de la taxe d'habitation, le remboursement de frais de voyage de retour en Italie, ainsi que des bonus de rémunération calculés sur les résultats de la société italienne et non du GIE ATR, que le salarié admet avoir reçu en France une médaille de travail délivrée par la société Leonardo Finmeccanica en récompense de son ancienneté de 35 ans au service de la société italienne, que la carrière du salarié, s'agissant des augmentations de salaire et de niveau hiérarchique, était gérée par la société italienne, ce dont atteste le tableau récapitulatif de carrière à en tête de la société italienne, que le cadre imposé par la hiérarchie du GIE ATR est inhérent à l'exécution de la mission de détachement, les diverses diligences et modalités de travail décrites par le salarié s'inscrivant dans une simple exécution de son travail au sein d'un GIE dont l'objet est de mettre en oeuvre des moyens destinés à faciliter ou à développer l'activité économique de ses membres sans que celui-ci ne se substitue aux sociétés participantes, qu'il n'est pas démontré que le GIE ATR ait exercé un pouvoir disciplinaire à l'encontre du salarié détaché, qu'en revanche la société Leonardo Finmeccanica a fait usage de son pouvoir de direction en décidant le 14 mars 2016 de la fin du détachement du salarié et de son rapatriement en Italie et de son pouvoir disciplinaire en enjoignant à son salarié de rejoindre son poste de travail en Italie le 7 septembre 2016 ainsi qu'en le sanctionnant par un licenciement pour faute grave le 16 septembre 2016 pour absence injustifiée.
18. En l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu déduire l'absence de contrat de travail liant le salarié au GIE ATR.
19. Le moyen, pris en sa cinquième branche, n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
20. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à la suite de la résistance de la société Leonardo Finmeccanica à fournir l'attestation Pôle emploi, alors « que le juge doit motiver sa décision ; qu'en rejetant sans motif la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive de l'employeur à son obligation de fournir l'attestation Pôle emploi à la suite du licenciement, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Recevabilité du moyen
21. Sous le couvert d'un grief de défaut de motifs, le moyen dénonce une omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile.
22. Le moyen est donc irrecevable.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Dit n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel ;
REJETTE le pourvoi.
Condamne M. [B] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille vingt-trois.ECLI:FR:CCASS:2023:SO00341
SOC.
AF1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 5 avril 2023
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 341 F-B
Pourvoi n° F 21-21.318
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 5 AVRIL 2023
M. [R] [B], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 21-21.318 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2021 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 1, chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ au groupement d'intérêt économique Avions de transport régional (GIE ATR), dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Leonardo Finmeccanica SPA, dont le siège est [Adresse 3] (Italie),
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, quatre moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat du GIE ATR, de la SCP Spinosi, avocat de la société Leonardo Finmeccanica SPA, après débats en l'audience publique du 15 février 2023 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 28 mai 2021), M. [B] a été engagé par la société Leonardo Finmeccanica, établie à [Localité 4] (Italie), le 12 octobre 1979.
2. Il a été détaché, en France, auprès du GIE ATR, à compter du 1er juillet 1995.
3. La société Leonardo Finmeccanica a informé le salarié, par lettre du 14 mars 2016, de sa décision de mettre fin au détachement et de l'affecter en Italie à compter du 1er juin 2016. Le terme du détachement a été reporté au 31 août 2016 afin de permettre au salarié d'organiser son départ.
4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 21 juin 2016 et sollicité la condamnation du GIE ATR et de la société Leonardo Finmeccanica au paiement d'une certaine somme en invoquant un abus de détachement, ainsi que la reconnaissance d'un contrat de travail le liant au GIE ATR et sa réintégration au sein de cette dernière entité.
5. Le salarié a été licencié pour faute grave, le 15 septembre 2016, par la société Leonardo Finmeccanica, au motif qu'il ne s'était pas présenté à son poste de travail, en Italie, le 1er septembre 2016.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, le deuxième moyen et le quatrième moyen
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui, s'agissant du premier moyen, pris en sa troisième branche, est irrecevable et qui, pour le surplus, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas de contrat de travail entre lui et le GIE ATR et que son licenciement pour faute grave est fondé, de dire que son licenciement n'est pas nul et de le débouter de ses demandes de dommages-intérêts, d'indemnités de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité pour licenciement nul ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité pour travail dissimulé, alors :
« 1°/ qu'est illicite le détachement d'un salarié sur le territoire national par un employeur non établi en France qui n'est pas une entreprise de travail temporaire, dès lors que ce détachement n'est réalisé ni pour le compte de l'employeur et sous sa direction dans le cadre d'un contrat conclu entre celui-ci et un destinataire, ni entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe, ni pour le compte de l'employeur sans qu'il existe un contrat entre celui-ci et un destinataire ; qu'en retenant que le salarié avait été régulièrement détaché en France quand il ressortait de ses constatations que le détachement ne résultait d'aucune de ces trois situations mais correspondait à une opération de prêt de main d'oeuvre à but non lucratif, ce qui interdisait le recours au détachement, la cour d'appel a violé l'article L. 342-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er janvier 2007 au 1er mai 2008, devenu les articles L. 1262-1 et L. 1262-2 à compter du 1er mai 2008 ;
2°/ que l'employeur non établi France ne peut détacher que temporairement un salarié sur le territoire national ; qu'en retenant que le salarié avait été régulièrement détaché en France du 1er juillet 1995 au 31 août 2016 aux motifs erronés que "la durée d'un détachement n'est pas limitée par la loi et le caractère temporaire du contrat de détachement n'implique pas qu'il soit nécessairement de courte durée" pour en déduire qu'"au cas d'espèce, le détachement a été reconduit par plusieurs avenants depuis 1995, après accord du salarié et pour des durées déterminées et limitées, ce qui n'a pu laisser penser au salarié que le détachement était définitif, quelle que soit sa durée induite par les prorogations convenues par les parties" quand le détachement du salarié en continu sur une période de 21 ans, fusse par une succession d'avenants, excluait manifestement son caractère temporaire, la cour d'appel a violé l'article L. 342-1 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er janvier 2007 au 1er mai 2008, devenu les articles L. 1262-1 et L. 1262-2 à compter du 1er mai 2008, interprétés à lumière de l'article 2 de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services :
5°/ que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en écartant l'existence d'un lien de subordination entre le salarié et le GIE ATR aux motifs que ce dernier ne versait pas lui-même la rémunération, ne gérait pas les augmentations de salaire et le niveau hiérarchique du salarié et n'avait pas usé de son pouvoir de sanction quand elle constatait que "le fait que le salarié ait effectué son travail dans le cadre imposé par la hiérarchie du GIE ATR est inhérent à l'exécution de la mission de détachement et n'est pas de nature à caractériser l'existence d'un lien de subordination à l'égard de celui-ci. À cet égard les diverses diligences et modalités de travail décrites par le salarié s'inscrivent dans une simple exécution de son travail au sein de l'entreprise auprès de laquelle il était détaché, notamment : signatures de document à en-tête d'ATR, suivi des directives de la direction d'ATR, présence dans l'organigramme d'ATR, suivis de formations, permanences réponses techniques pour des clients d'ATR", ce dont il s'évinçait que le salarié était subordonné au GIE ATR, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
8. D'abord, aux termes de l'article L. 1262-1 du code du travail, un employeur établi hors de France peut détacher temporairement des salariés sur le territoire national, à condition qu'il existe un contrat de travail entre cet employeur et le salarié et que leur relation de travail subsiste pendant la période de détachement. Le détachement est réalisé : 1° Soit pour le compte de l'employeur et sous sa direction, dans le cadre d'un contrat conclu entre celui-ci et le destinataire de la prestation établi ou exerçant en France ; 2° Soit entre établissements d'une même entreprise ou entre entreprises d'un même groupe ; 3° Soit pour le compte de l'employeur sans qu'il existe un contrat entre celui-ci et un destinataire.
9. Aux termes de l'article L. 1262-2 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, une entreprise exerçant une activité de travail temporaire établie hors du territoire national peut détacher temporairement des salariés auprès d'une entreprise utilisatrice établie ou exerçant sur le territoire national, à condition qu'il existe un contrat de travail entre l'entreprise étrangère et le salarié et que leur relation de travail subsiste pendant la période de détachement.
10. Ces articles transposent dans le droit français l'article 1er, intitulé « Champ d'application », de la directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services.
11. Cette directive a pour base légale les articles 57, § 2, et 66 du Traité instituant la Communauté européenne, selon lesquels le Conseil arrête les directives visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant la libre prestation des services.
12. Elle vise à coordonner les réglementations nationales matérielles relatives aux conditions de travail et d'emploi des travailleurs détachés (CJUE, arrêt du 3 décembre 2014, De Clercq e.a., C-315/13, point 47).
13. Il en résulte que la circonstance qu'un détachement ne répondrait pas aux conditions définies aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2 du code du travail n'a pour conséquence que l'exclusion des règles de coordination prises en transposition de la directive 96/71. Ainsi que la Cour l'a déjà jugé, le non-respect, par l'employeur étranger, des règles relatives au détachement, sur le territoire national, d'un de ses salariés, n'a pas pour effet de voir reconnaître la qualité d'employeur à l'entreprise établie sur le territoire national et bénéficiaire dudit détachement (Soc., 9 janvier 2013, pourvoi n° 11-11.521).
14. Le moyen, qui, en ses deux premières branches, invoque la seule violation des articles L. 1262-1 et L. 1262-2 du code du travail, ne permet pas d'atteindre les chefs du dispositif critiqués de l'arrêt de la cour d'appel, et est, dès lors, inopérant.
15. Il en résulte que la question préjudicielle soumise par le salarié, portant sur l'interprétation de l'article 2 de la directive 96/71, n'est pas utile à la solution du litige.
16. Il n'y a pas lieu en conséquence de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de cette question.
17. Ensuite, l'arrêt retient que le GIE ATR n'est pas signataire du contrat de détachement et de ses avenants de renouvellement, que l'absence alléguée de prolongation par avenant du détachement pour la période allant entre le 1er octobre 2015 et le 14 mars 2016 ne concerne que la société Leonardo Finmeccanica, que la rémunération du salarié a toujours été versée par la société Leonardo Finmeccanica, laquelle a adressé à M.[B] ses bulletins de salaire tout au long de la relation contractuelle, que le salarié ne conteste pas avoir reçu de la société italienne une indemnité de détachement de 30 000 euros par an, une prise en charge de la taxe d'habitation, le remboursement de frais de voyage de retour en Italie, ainsi que des bonus de rémunération calculés sur les résultats de la société italienne et non du GIE ATR, que le salarié admet avoir reçu en France une médaille de travail délivrée par la société Leonardo Finmeccanica en récompense de son ancienneté de 35 ans au service de la société italienne, que la carrière du salarié, s'agissant des augmentations de salaire et de niveau hiérarchique, était gérée par la société italienne, ce dont atteste le tableau récapitulatif de carrière à en tête de la société italienne, que le cadre imposé par la hiérarchie du GIE ATR est inhérent à l'exécution de la mission de détachement, les diverses diligences et modalités de travail décrites par le salarié s'inscrivant dans une simple exécution de son travail au sein d'un GIE dont l'objet est de mettre en oeuvre des moyens destinés à faciliter ou à développer l'activité économique de ses membres sans que celui-ci ne se substitue aux sociétés participantes, qu'il n'est pas démontré que le GIE ATR ait exercé un pouvoir disciplinaire à l'encontre du salarié détaché, qu'en revanche la société Leonardo Finmeccanica a fait usage de son pouvoir de direction en décidant le 14 mars 2016 de la fin du détachement du salarié et de son rapatriement en Italie et de son pouvoir disciplinaire en enjoignant à son salarié de rejoindre son poste de travail en Italie le 7 septembre 2016 ainsi qu'en le sanctionnant par un licenciement pour faute grave le 16 septembre 2016 pour absence injustifiée.
18. En l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu déduire l'absence de contrat de travail liant le salarié au GIE ATR.
19. Le moyen, pris en sa cinquième branche, n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
20. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi à la suite de la résistance de la société Leonardo Finmeccanica à fournir l'attestation Pôle emploi, alors « que le juge doit motiver sa décision ; qu'en rejetant sans motif la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive de l'employeur à son obligation de fournir l'attestation Pôle emploi à la suite du licenciement, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Recevabilité du moyen
21. Sous le couvert d'un grief de défaut de motifs, le moyen dénonce une omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile.
22. Le moyen est donc irrecevable.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
Dit n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel ;
REJETTE le pourvoi.
Condamne M. [B] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille vingt-trois.