Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 mars 2023, 21-11.876, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 15 mars 2023, 21-11.876, Inédit
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 21-11.876
- ECLI:FR:CCASS:2023:CO00211
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation
Audience publique du mercredi 15 mars 2023
Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, du 17 novembre 2020- Président
- M. Mollard (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 mars 2023
Cassation
M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 211 F-D
Pourvoi n° T 21-11.876
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MARS 2023
Le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-11.876 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant à la société LD investissements, venant aux droits de la société [Localité 2] développement, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société LD investissements, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, Mme Graff-Daudret, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 novembre 2020), le 8 février 2002, la société SIG 55, devenue la société [Localité 2] développement, aux droits de laquelle est venue la société LD investissements (la société), a acquis un ensemble immobilier, s'engageant à y démolir les bâtiments existants et édifier des constructions dans un délai de quatre ans afin de bénéficier de l'exonération des droits d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière prévue à l'article 1594-0 G du code général des impôts.
2. A la suite d'un incendie survenu le 25 novembre 2006, la société a obtenu de l'administration fiscale deux prorogations annuelles, jusqu'au 8 février 2010, du délai pour construire.
3. Le 19 avril 2010, l'administration fiscale a notifié à la société deux propositions de rectification, suivies de deux avis de mise en recouvrement.
4. Après rejet par l'administration fiscale de ses réclamations et de sa demande gracieuse, la société a assigné le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France aux fins d'obtenir l'annulation de la décision de rejet et le dégrèvement des sommes réclamées.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré mal fondées les décisions de rejet et accordé le dégrèvement des droits d'enregistrement et pénalités, alors « que l'article 1594-0 G A du code général des impôts exonère de la taxe de publicité foncière ou du droit d'enregistrement les acquisitions de terrains à bâtir si l'acquéreur prend l'engagement d'effectuer les travaux de construction dans un délai de quatre ans à compter de la date d'acquisition ; que si, à l'expiration du délai légal de quatre ans, il n'est pas justifié de l'exécution des travaux, l'acquéreur est déchu du bénéfice de l'exonération et le régime fiscal de l'acquisition doit être remis en cause ; que des prorogations du délai de quatre ans, annuelles et renouvelables, peuvent toutefois être accordées, notamment en cas de force majeure ; que si les motifs invoqués par un acquéreur peuvent constituer un cas de force majeure justifiant la prorogation du délai pour construire, ces motifs n'ouvrent toutefois droit à une dispense de régularisation des droits de mutation qu'en cas de force majeure empêchant la construction de façon absolue et définitive ; qu'en l'espèce, après avoir acquis le 8 février 2002 un ensemble immobilier situé à [Localité 2] et [Localité 4], pris l'engagement de construire dans un délai de quatre ans lors de cette acquisition puis obtenu plusieurs prorogations de ce délai, la société a finalement soutenu qu'elle était dans l'impossibilité absolue et définitive de construire suite à un incendie criminel survenu le 23 novembre 2006, de sorte qu'elle devait pouvoir bénéficier de la dispense de régularisation des droits de mutation ; que pour faire droit à sa demande, la cour d'appel a, sur la base d'un rapport d'expertise judiciaire rendu le 10 juillet 2007, notamment constaté que "suite à l'incendie criminel du 25 novembre 2006 des poussières radioactives se sont disséminées mais que le site ayant été mis sous scellés pour les besoins de la procédure pénale, il ne s'en est pas suivi de risque de contamination pour les personnes et l'environnement, ce risque étant néanmoins avéré pour toute personne travaillant sur le site, site dont l'état n'a pu être déterminé qu'au fur et à mesure du dégagement des détecteurs enfouis, à l'origine de ces disséminations rétroactives", que "l'expert a donc préconisé une prise de risque nulle pour l'ensemble des travaux à venir" puis que "la présence de produits amiantés a également été constatée et confirmée par un bureau d'études" ; que, sur la base de ces constatations, la cour d'appel a ensuite estimé que "l'incendie criminel du 25 novembre 2006 constitue un événement extérieur à la société", puis que "son imprévisibilité ne fait pas débat pas plus que son irrésistibilité dès lors que, pour des raisons sanitaires, l'expert a préconisé une prise de risque nulle" pour en conclure enfin qu'"il résulte du rapport d'expertise judiciaire, rendu dans le cadre de l'information judiciaire ouverte suite au sinistre, que la société s'est trouvée dans l'impossibilité totale de construire" ; qu'en se prononçant de la sorte, alors même que les constatations opérées par la cour, sur la base du rapport du 10 juillet 2007, ne permettaient en aucun cas d'établir l'existence d'un cas de force majeure s'opposant de manière absolue et définitive au projet de construction, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1594-0 G du code général des impôts. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1594-0 G du code général des impôts :
6. Selon ce texte, sont exonérées de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement les acquisitions de terrains à bâtir si l'acquéreur prend l'engagement d'effectuer les travaux de construction dans un délai de quatre ans à compter de la date d'acquisition. Des prolongations annuelles renouvelables de ce délai peuvent être accordée en cas de force majeure.
7. Pour retenir que la société s'est trouvée dans l'impossibilité totale de construire et est donc fondée à invoquer la doctrine administrative n° 8 A 1623 du 15 novembre 2001, qui prévoit que la déchéance du régime de faveur prévu à l'article 1594-0 G du code général des impôts n'est pas encourue en cas de force majeure empêchant la construction de manière absolue et définitive, l'arrêt retient qu'il résulte de l'expertise judiciaire, diligentée dans le cadre de l'information ouverte à la suite de l'incendie criminel, que des poussières radioactives se sont disséminées sur le site, que le risque de contamination est avéré pour toute personne y travaillant et qu'il a été constaté la présence de produits amiantés. Il ajoute que l'expert judiciaire a préconisé une prise de risque nulle pour l'ensemble des travaux à venir.
8. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'impossibilité absolue et définitive de construire pour la société, dès lors qu'il ne se déduit pas de la préconisation, par l'expert judiciaire, d'une prise de risque nulle pour l'ensemble des travaux à venir une impossibilité de poursuivre les travaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société LD investissements aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société LD investissements à payer au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques.
L'arrêt attaqué, critiqué par le comptable, encourt la censure ;
EN CE QU' il a, confirmant le jugement, déclaré mal fondées les décisions de rejet du 8 février 2010 et du 13 avril 2012 et accordé le dégrèvement des droits d'enregistrement et pénalités pour les montants de 4.271.851 euros et 7.041 euros ;
ALORS QUE, l'article 1594-0 G A du code général des impôts exonère de la taxe de publicité foncière ou du droit d'enregistrement les acquisitions de terrains à bâtir si l'acquéreur prend l'engagement d'effectuer les travaux de construction dans un délai de quatre ans à compter de la date d'acquisition ; que si à l'expiration du délai légal de quatre ans, il n'est pas justifié de l'exécution des travaux, l'acquéreur est déchu du bénéfice de l'exonération et le régime fiscal de l'acquisition doit être remis en cause ; que des prorogations du délai de quatre ans, annuelles et renouvelables, peuvent toutefois être accordées, notamment en cas de force majeure ; que si les motifs invoqués par un acquéreur peuvent constituer un cas de force majeure justifiant la prorogation du délai pour construire, ces motifs n'ouvrent toutefois droit à une dispense de régularisation des droits de mutation qu'en cas de force majeure empêchant la construction de façon absolue et définitive ; qu'en l'espèce, après avoir acquis le 8 février 2002 un ensemble immobilier situé à [Localité 2] et [Localité 4], pris l'engagement de construire dans un délai de quatre ans lors de cette acquisition puis obtenu plusieurs prorogations de ce délai, la société LD INVESTISSEMENT a finalement soutenu qu'elle était dans l'impossibilité absolue et définitive de construire suite à un incendie criminel survenu le 23 novembre 2006, de sorte qu'elle devait pouvoir bénéficier de la dispense de régularisation des droits de mutation ; que pour faire droit à sa demande, la cour d'appel a, sur la base d'un rapport d'expertise judiciaire rendu le 10 juillet 2007, notamment constaté que « suite à l'incendie criminel du 25 novembre 2006 des poussières radioactives se sont disséminées mais que le site ayant été mis sous scellés pour les besoins de la procédure pénale, il ne s'en est pas suivi de risque de contamination pour les personnes et l'environnement, ce risque étant néanmoins avéré pour toute personne travaillant sur le site, site dont l'état n'a pu être déterminé qu'au fur et à mesure du dégagement des détecteurs enfouis, à l'origine de ces disséminations rétroactives », que « l'expert a donc préconisé une prise de risque nulle pour l'en6 semble des travaux à venir » puis que « la présence de produits amiantés a également été constatée et confirmée par un bureau d'études » ; que sur la base de ces constatations, la cour d'appel a ensuite estimé que « l'incendie criminel du 25 novembre 2006 constitue un événement extérieur à la société », puis que « son imprévisibilité ne fait pas débat pas plus que son irrésistibilité dès lors que, pour des raisons sanitaires, l'expert a préconisé une prise de risque nulle » pour en conclure enfin qu'« il résulte du rapport d'expertise judiciaire, rendu dans le cadre de l'information judiciaire ouverte suite au sinistre, que la société LD Investissement s'est trouvée dans l'impossibilité totale de construire » ; qu'en se prononçant de la sorte, alors même que les constatations opérées par la cour, sur la base du rapport du 10 juillet 2007, ne permettaient en aucun cas d'établir l'existence d'un cas de force majeure s'opposant de manière absolue et définitive au projet de construction, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1594-0 G du code général des impôts.ECLI:FR:CCASS:2023:CO00211
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 15 mars 2023
Cassation
M. MOLLARD, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 211 F-D
Pourvoi n° T 21-11.876
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 15 MARS 2023
Le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-11.876 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2020 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant à la société LD investissements, venant aux droits de la société [Localité 2] développement, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société LD investissements, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Mollard, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, Mme Graff-Daudret, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 novembre 2020), le 8 février 2002, la société SIG 55, devenue la société [Localité 2] développement, aux droits de laquelle est venue la société LD investissements (la société), a acquis un ensemble immobilier, s'engageant à y démolir les bâtiments existants et édifier des constructions dans un délai de quatre ans afin de bénéficier de l'exonération des droits d'enregistrement et de la taxe de publicité foncière prévue à l'article 1594-0 G du code général des impôts.
2. A la suite d'un incendie survenu le 25 novembre 2006, la société a obtenu de l'administration fiscale deux prorogations annuelles, jusqu'au 8 février 2010, du délai pour construire.
3. Le 19 avril 2010, l'administration fiscale a notifié à la société deux propositions de rectification, suivies de deux avis de mise en recouvrement.
4. Après rejet par l'administration fiscale de ses réclamations et de sa demande gracieuse, la société a assigné le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France aux fins d'obtenir l'annulation de la décision de rejet et le dégrèvement des sommes réclamées.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré mal fondées les décisions de rejet et accordé le dégrèvement des droits d'enregistrement et pénalités, alors « que l'article 1594-0 G A du code général des impôts exonère de la taxe de publicité foncière ou du droit d'enregistrement les acquisitions de terrains à bâtir si l'acquéreur prend l'engagement d'effectuer les travaux de construction dans un délai de quatre ans à compter de la date d'acquisition ; que si, à l'expiration du délai légal de quatre ans, il n'est pas justifié de l'exécution des travaux, l'acquéreur est déchu du bénéfice de l'exonération et le régime fiscal de l'acquisition doit être remis en cause ; que des prorogations du délai de quatre ans, annuelles et renouvelables, peuvent toutefois être accordées, notamment en cas de force majeure ; que si les motifs invoqués par un acquéreur peuvent constituer un cas de force majeure justifiant la prorogation du délai pour construire, ces motifs n'ouvrent toutefois droit à une dispense de régularisation des droits de mutation qu'en cas de force majeure empêchant la construction de façon absolue et définitive ; qu'en l'espèce, après avoir acquis le 8 février 2002 un ensemble immobilier situé à [Localité 2] et [Localité 4], pris l'engagement de construire dans un délai de quatre ans lors de cette acquisition puis obtenu plusieurs prorogations de ce délai, la société a finalement soutenu qu'elle était dans l'impossibilité absolue et définitive de construire suite à un incendie criminel survenu le 23 novembre 2006, de sorte qu'elle devait pouvoir bénéficier de la dispense de régularisation des droits de mutation ; que pour faire droit à sa demande, la cour d'appel a, sur la base d'un rapport d'expertise judiciaire rendu le 10 juillet 2007, notamment constaté que "suite à l'incendie criminel du 25 novembre 2006 des poussières radioactives se sont disséminées mais que le site ayant été mis sous scellés pour les besoins de la procédure pénale, il ne s'en est pas suivi de risque de contamination pour les personnes et l'environnement, ce risque étant néanmoins avéré pour toute personne travaillant sur le site, site dont l'état n'a pu être déterminé qu'au fur et à mesure du dégagement des détecteurs enfouis, à l'origine de ces disséminations rétroactives", que "l'expert a donc préconisé une prise de risque nulle pour l'ensemble des travaux à venir" puis que "la présence de produits amiantés a également été constatée et confirmée par un bureau d'études" ; que, sur la base de ces constatations, la cour d'appel a ensuite estimé que "l'incendie criminel du 25 novembre 2006 constitue un événement extérieur à la société", puis que "son imprévisibilité ne fait pas débat pas plus que son irrésistibilité dès lors que, pour des raisons sanitaires, l'expert a préconisé une prise de risque nulle" pour en conclure enfin qu'"il résulte du rapport d'expertise judiciaire, rendu dans le cadre de l'information judiciaire ouverte suite au sinistre, que la société s'est trouvée dans l'impossibilité totale de construire" ; qu'en se prononçant de la sorte, alors même que les constatations opérées par la cour, sur la base du rapport du 10 juillet 2007, ne permettaient en aucun cas d'établir l'existence d'un cas de force majeure s'opposant de manière absolue et définitive au projet de construction, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1594-0 G du code général des impôts. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1594-0 G du code général des impôts :
6. Selon ce texte, sont exonérées de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement les acquisitions de terrains à bâtir si l'acquéreur prend l'engagement d'effectuer les travaux de construction dans un délai de quatre ans à compter de la date d'acquisition. Des prolongations annuelles renouvelables de ce délai peuvent être accordée en cas de force majeure.
7. Pour retenir que la société s'est trouvée dans l'impossibilité totale de construire et est donc fondée à invoquer la doctrine administrative n° 8 A 1623 du 15 novembre 2001, qui prévoit que la déchéance du régime de faveur prévu à l'article 1594-0 G du code général des impôts n'est pas encourue en cas de force majeure empêchant la construction de manière absolue et définitive, l'arrêt retient qu'il résulte de l'expertise judiciaire, diligentée dans le cadre de l'information ouverte à la suite de l'incendie criminel, que des poussières radioactives se sont disséminées sur le site, que le risque de contamination est avéré pour toute personne y travaillant et qu'il a été constaté la présence de produits amiantés. Il ajoute que l'expert judiciaire a préconisé une prise de risque nulle pour l'ensemble des travaux à venir.
8. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'impossibilité absolue et définitive de construire pour la société, dès lors qu'il ne se déduit pas de la préconisation, par l'expert judiciaire, d'une prise de risque nulle pour l'ensemble des travaux à venir une impossibilité de poursuivre les travaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société LD investissements aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société LD investissements à payer au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques.
L'arrêt attaqué, critiqué par le comptable, encourt la censure ;
EN CE QU' il a, confirmant le jugement, déclaré mal fondées les décisions de rejet du 8 février 2010 et du 13 avril 2012 et accordé le dégrèvement des droits d'enregistrement et pénalités pour les montants de 4.271.851 euros et 7.041 euros ;
ALORS QUE, l'article 1594-0 G A du code général des impôts exonère de la taxe de publicité foncière ou du droit d'enregistrement les acquisitions de terrains à bâtir si l'acquéreur prend l'engagement d'effectuer les travaux de construction dans un délai de quatre ans à compter de la date d'acquisition ; que si à l'expiration du délai légal de quatre ans, il n'est pas justifié de l'exécution des travaux, l'acquéreur est déchu du bénéfice de l'exonération et le régime fiscal de l'acquisition doit être remis en cause ; que des prorogations du délai de quatre ans, annuelles et renouvelables, peuvent toutefois être accordées, notamment en cas de force majeure ; que si les motifs invoqués par un acquéreur peuvent constituer un cas de force majeure justifiant la prorogation du délai pour construire, ces motifs n'ouvrent toutefois droit à une dispense de régularisation des droits de mutation qu'en cas de force majeure empêchant la construction de façon absolue et définitive ; qu'en l'espèce, après avoir acquis le 8 février 2002 un ensemble immobilier situé à [Localité 2] et [Localité 4], pris l'engagement de construire dans un délai de quatre ans lors de cette acquisition puis obtenu plusieurs prorogations de ce délai, la société LD INVESTISSEMENT a finalement soutenu qu'elle était dans l'impossibilité absolue et définitive de construire suite à un incendie criminel survenu le 23 novembre 2006, de sorte qu'elle devait pouvoir bénéficier de la dispense de régularisation des droits de mutation ; que pour faire droit à sa demande, la cour d'appel a, sur la base d'un rapport d'expertise judiciaire rendu le 10 juillet 2007, notamment constaté que « suite à l'incendie criminel du 25 novembre 2006 des poussières radioactives se sont disséminées mais que le site ayant été mis sous scellés pour les besoins de la procédure pénale, il ne s'en est pas suivi de risque de contamination pour les personnes et l'environnement, ce risque étant néanmoins avéré pour toute personne travaillant sur le site, site dont l'état n'a pu être déterminé qu'au fur et à mesure du dégagement des détecteurs enfouis, à l'origine de ces disséminations rétroactives », que « l'expert a donc préconisé une prise de risque nulle pour l'en6 semble des travaux à venir » puis que « la présence de produits amiantés a également été constatée et confirmée par un bureau d'études » ; que sur la base de ces constatations, la cour d'appel a ensuite estimé que « l'incendie criminel du 25 novembre 2006 constitue un événement extérieur à la société », puis que « son imprévisibilité ne fait pas débat pas plus que son irrésistibilité dès lors que, pour des raisons sanitaires, l'expert a préconisé une prise de risque nulle » pour en conclure enfin qu'« il résulte du rapport d'expertise judiciaire, rendu dans le cadre de l'information judiciaire ouverte suite au sinistre, que la société LD Investissement s'est trouvée dans l'impossibilité totale de construire » ; qu'en se prononçant de la sorte, alors même que les constatations opérées par la cour, sur la base du rapport du 10 juillet 2007, ne permettaient en aucun cas d'établir l'existence d'un cas de force majeure s'opposant de manière absolue et définitive au projet de construction, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1594-0 G du code général des impôts.