Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 16 février 2023, 21-16.168, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FD



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 février 2023




Rejet


M. PIREYRE, président



Arrêt n° 168 F-B

Pourvoi n° G 21-16.168




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 FÉVRIER 2023

La société [4], société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° G 21-16.168 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2021 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre sécurité sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, dont le siège est [Adresse 9],

2°/ à l'Etablissement national des invalides de la marine, dont le siège est [Adresse 2],

3°/ au syndicat [6], dont le siège est [Adresse 7],

4°/ à M. [S] [C], domicilié [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société [4], de la SARL Cabinet Briard, avocat de l'Etablissement national des invalides de la marine, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [C], de la SCP Foussard et Froger, avocat du syndicat [6], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 mars 2021), M. [C], marin (la victime), a été employé par la [5], aux droits de laquelle vient la société [4] (la société) du 2 septembre 1959 au 9 août 1966. Il a ensuite travaillé du 1er juin 1978 au 15 juillet 1998 en qualité de mécanicien pour le compte du [8].

2. Ayant été reconnu atteint d'une maladie professionnelle du tableau n° 30 B, par décision du directeur de l'ENIM du 20 août 2012, la victime a saisi le 15 avril 2013 une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable du [8]. Le 16 octobre 2015, il a mis en cause la société [4] devant cette même juridiction et a sollicité la mise hors de cause du [8].

3. Le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) est intervenu en la cause.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de déclarer les actions de la victime et du FIVA non prescrites, alors « que pour avoir un effet interruptif de prescription, la demande en justice doit être adressée à l'encontre de celui qu'on veut empêcher de prescrire et non à un tiers ; qu'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur n'a pour effet d'interrompre la prescription qu'à l'égard des actions procédant du même fait dommageable ; que le fait dommageable est le fait générateur, c'est-à-dire l'acte ou l'événement ayant donné lieu aux dommages subis par la victime ; qu'en l'espèce, M. [C], après avoir agi en reconnaissance de la faute inexcusable du [8] pour le compte duquel il a travaillé du 1er juin 1978 au 15 juillet 1998, a agi en reconnaissance de la faute inexcusable de la [4], venant aux droits de la [5] qui l'a employé du 2 septembre 1959 au 9 août 1966 en sollicitant la mise hors de cause du [8] ; qu'il en résulte que les deux actions introduites à l'encontre de l'un puis de l'autre ne procédaient pas d'un fait dommageable unique mais relevaient de périodes d'exposition au risque distinctes à plusieurs années d'intervalle dans des circonstances différentes ; qu'en estimant néanmoins que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite à l'encontre du [8] avait eu pour effet d'interrompre la prescription de l'action introduite contre la société [4], la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 431-2 du code de la sécurité sociale et 2241 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de la combinaison des articles L. 431-2 du code de la sécurité sociale et 2241 du code civil que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur interrompt la prescription à l'égard de toute autre action procédant du même fait dommageable.

7. Ayant constaté que le caractère professionnel de la pathologie présentée par la victime avait été reconnu le 20 août 2012, de sorte que l'action en reconnaissance de faute inexcusable engagée contre le [8] le 15 avril 2013 avait été introduite dans le délai de prescription de deux ans, la cour d'appel en a déduit à bon droit que cette action avait eu pour effet d'interrompre la prescription à l'égard de la société au service de laquelle le salarié avait été exposé au risque, de sorte que son action était recevable.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

9. La société fait grief à l'arrêt de prononcer la mise hors de cause du [8], alors « qu'en cas d'exposition au risque au sein de plusieurs entreprises, l'employeur qui fait l'objet d'une action en reconnaissance de sa faute inexcusable est recevable à rechercher, devant la juridiction de sécurité sociale, pour obtenir leur garantie, la faute inexcusable des autres employeurs au service desquels la victime a été exposée au même risque ; qu'en confirmant la mise hors de cause du [8] au seul motif que la faute inexcusable de la société [4] a été reconnue sans statuer, comme elle était invitée à le faire par la société [4], sur la responsabilité du [8] en qualité de dernier employeur chez lequel M. [C] a été exposé pendant vingt ans au risque de l'amiante, la cour d'appel a violé les articles L 452-1, L. 452-4 et 331 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

10. Il ne ressort ni de l'arrêt ni de la procédure que la société ait appelé en garantie le [8].

11. Le moyen, qui manque en fait n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société [4] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [4] et la condamne à payer à M. [C], au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, à l'Etablissement national des invalides de la Marine et au syndicat [6] la somme de 3 000 euros chacun ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du seize février deux mille vingt-trois par Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société [4].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société [4] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause du [8], déclaré recevable l'action de M. [C], rejeté le moyen soulevé par la société [4] tiré de la prescription du FIVA, confirmé la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et déclaré opposable à la société [4] cette décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, dit que la [5] aux droits de laquelle vient la société [4] a commis une faute inexcusable dans la survenance de la maladie professionnelle de M. [C], fixé au maximum prévu par la loi la majoration de la rente servie à M. [C], fixé à la requête du FIVA, subrogé dans les droits de M. [C], la réparation des préjudices personnels subis à hauteur des sommes de 12 600 € au titre des souffrances morales et physiques et 1000 € au titre du préjudice esthétique, condamné la société [4] à rembourser à l'ENIM les sommes que celui-ci est amené à payer à M. [C] et au FIVA en exécution du jugement, intérêts compris, ainsi que l'intégralité des conséquences financières imputables à la reconnaissance de la faute inexcusable, dit que la majoration de pension servie à M. [C] par l'ENIM suivra l'évolution du taux d'incapacité permanente en cas d'aggravation de l'état de santé de l'intéressé, dit que le principe de cette majoration restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant sous réserve que l'ENIM soit saisi d'une demande de prise en charge du décès au titre de la législation professionnelle et qu'une décision conforme soit rendue ne ce sens, fixé l'indemnisation du préjudice d'agrément de M. [C] à la somme de 5000 € et condamné la société [4] à rembourser cette somme à l'ENIM ;

ALORS QUE pour avoir un effet interruptif de prescription, la demande en justice doit être adressée à l'encontre de celui qu'on veut empêcher de prescrire et non à un tiers ; qu'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur n'a pour effet d'interrompre la prescription qu'à l'égard des actions procédant du même fait dommageable ; que le fait dommageable est le fait générateur, c'est-à-dire l'acte ou l'événement ayant donné lieu aux dommages subis par la victime ; qu'en l'espèce, M. [C], après avoir agi en reconnaissance de la faute inexcusable du [8] pour le compte duquel il a travaillé du 1er juin 1978 au 15 juillet 1998, a agi en reconnaissance de la faute inexcusable de la [4], venant aux droits de la [5] qui l'a employé du 2 septembre 1959 au 9 août 1966 en sollicitant la mise hors de cause du [8] ; qu'il en résulte que les deux actions introduites à l'encontre de l'un puis de l'autre ne procédaient pas d'un fait dommageable unique mais relevaient de périodes d'exposition au risque distinctes à plusieurs années d'intervalle dans des circonstances différentes ; qu'en estimant néanmoins que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite à l'encontre du [8] avait eu pour effet d'interrompre la prescription de l'action introduite contre la société [4], la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 431-2 du code de la sécurité sociale et 2241 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

La société [4] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause du [8], déclaré recevable l'action de M. [C], confirmé la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et déclaré opposable à la société [4] cette décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, dit que la [5] aux droits de laquelle vient la société [4] a commis une faute inexcusable dans la survenance de la maladie professionnelle de M. [C], fixé au maximum prévu par la loi la majoration de la rente servie à M. [C], fixé à la requête du FIVA, subrogé dans les droits de M. [C], la réparation des préjudices personnels subis à hauteur des sommes de 12 600 € au titre des souffrances morales et physiques et 1000 € au titre du préjudice esthétique, condamné la société [4] à rembourser à l'ENIM les sommes que celui-ci est amené à payer à M. [C] et au FIVA en exécution du jugement, intérêts compris, ainsi que l'intégralité des conséquences financières imputables à la reconnaissance de la faute inexcusable, dit que la majoration de pension servie à M. [C] par l'ENIM suivra l'évolution du taux d'incapacité permanente en cas d'aggravation de l'état de santé de l'intéressé, dit que le principe de cette majoration restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant sous réserve que l'ENIM soit saisi d'une demande de prise en charge du décès au titre de la législation professionnelle et qu'une décision conforme soit rendue ne ce sens, fixé l'indemnisation du préjudice d'agrément de M. [C] à la somme de 5000 € et condamné la société [4] à rembourser cette somme à l'ENIM ;

1°) ALORS QUE si la victime d'une maladie professionnelle peut agir en faute inexcusable à l'encontre d'un ancien employeur chez qui elle a été exposée au risque, elle doit au préalable établir le caractère professionnel de sa maladie à l'égard de cet employeur ; qu'est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ; que si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime ; que pour dire que M. [C] était atteint d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de la société [4], l'arrêt retient que le délai de prise en charge prévu par le tableau n° 30 B était remplie, puisque ce salarié avait continué à être exposé à l'amiante pendant sa période d'activité pour le compte du [8] jusqu'en 1998, en sorte que la présomption d'imputabilité s'appliquait ; qu'en se déterminant ainsi quand M. [C] avait cessé d'être au service de la [5], aux droits de laquelle vient la société [4], le 9 août 1966, ce dont il résultait que le délai de prise en charge relatif à cette période d'exposition au risque étant expiré, la présomption instituée par l'article L. 461-1, alinéa 2 du code de la sécurité sociale ne pouvait être opposée à la société [4], la cour d'appel a violé les articles L 461-1, L 462-2 et L 452-1 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS QUE la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque, avant sa constatation médicale, sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire ; que la cour d'appel a constaté que M. [C] avait cessé d'être exposé au risque d'inhalation de poussières d'amiante en 1998, à l'issue de sa période d'activité pour le compte du [8], son dernier employeur ; qu'en retenant que la société [4], qui contestait que la maladie de M. [C] lui soit imputable, n'en rapportait pas la preuve quand il incombait au [8] de rapporter la preuve que l'affection dont était atteinte la victime devait être imputée aux conditions de travail de celle-ci chez son premier employeur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

La société [4] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause du [8], déclaré recevable l'action de M. [C], confirmé la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et déclaré opposable à la société [4] cette décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, dit que la [5] aux droits de laquelle vient la société [4] a commis une faute inexcusable dans la survenance de la maladie professionnelle de M. [C], fixé au maximum prévu par la loi la majoration de la rente servie à M. [C], fixé à la requête du FIVA, subrogé dans les droits de M. [C], la réparation des préjudices personnels subis à hauteur des sommes de 12 600 € au titre des souffrances morales et physiques et 1000 € au titre du préjudice esthétique, condamné la société [4] à rembourser à l'ENIM les sommes que celui-ci est amené à payer à M. [C] et au FIVA en exécution du jugement, intérêts compris, ainsi que l'intégralité des conséquences financières imputables à la reconnaissance de la faute inexcusable, dit que la majoration de pension servie à M. [C] par l'ENIM suivra l'évolution du taux d'incapacité permanente en cas d'aggravation de l'état de santé de l'intéressé, dit que le principe de cette majoration restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant sous réserve que l'ENIM soit saisi d'une demande de prise en charge du décès au titre de la législation professionnelle et qu'une décision conforme soit rendue ne ce sens, fixé l'indemnisation du préjudice d'agrément de M. [C] à la somme de 5000 € et condamné la société [4] à rembourser cette somme à l'ENIM ;

1°) ALORS QU'il incombe à celui qui invoque l'existence d'une faute inexcusable de prouver que l'employeur devait avoir conscience du danger auquel il était exposé et n'a pas pris toutes les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que la conscience par l'employeur du danger auquel est exposé son salarié doit s'apprécier objectivement en fonction de la réglementation applicable à l'époque de l'exposition au risque ; que pour retenir la faute inexcusable de la société [4], venant aux droits de la [5], l'arrêt attaqué énonce que les dispositions du décret du 17 août 1977 concernant les mesures particulières d'hygiène applicables dans les établissements où le personnel est exposé à l'action des poussières d'amiante ne pouvaient pas être ignorées de la [5] ; qu'en se déterminant ainsi par référence à un décret adopté onze après la fin de la période d'exposition de M. [C] au sein de la [5], la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS QUE la conscience du danger s'apprécie objectivement par rapport à ce que doit savoir, dans son secteur d'activité et pendant la période d'exposition du salarié au risque, un employeur conscient de ses devoirs et obligations ; que dans ses conclusions d'appel, reprises oralement à l'audience, la société [4] faisait valoir que les maladies inscrites aux tableaux des maladies professionnelles n'ont donné lieu à une indemnisation au titre du régime d'assurance sociale des marins qu'à compter du décret n° 99-452 du 28 juin 1999 et que l'obligation faite aux armateurs d'évaluer les risques sur les navires liés à l'exposition des marins à l'inhalation de poussières provenant de l'amiante ou de matériaux contenant de l'amiante ne date que du décret n° 2000-5645 du 24 juin 2000 ; qu'en retenant que la [5], en sa qualité d'armateur, ne pouvait ignorer les risques auxquels était exposé son salarié dans le cadre de ses fonctions du fait de l'inscription, en 1945, de la fibrose pulmonaire consécutive à l'inhalation de poussières d'amiante au tableau n° 25 et de la création, en 1950, du tableau n° 30 consacré à l'abestose professionnelle, tableaux qui d'une part n'étaient pas applicables au secteur maritime pendant la période d'emploi de M. [C] et qui d'autre part ne retenaient un lien causal entre les pathologies pulmonaires et le travail effectué que pour des activités spécifiques telles que le cardage, la filature et le tissage de l'amiante, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

3°) ALORS QU'en relevant que les dangers de l'inhalation des poussières d'amiante ne pouvaient être ignorés de la [5] pour les navires à bord desquels l'amiante était utilisé de manière habituelle comme matériau d'isolation et de protection contre l'incendie sans répondre aux conclusions d'appel de la société [4], reprises oralement à l'audience, qui faisait valoir qu'il ne pouvait être reproché à un armateur de navires, sur la période d'emploi de M. [C] de 1959 à 1966, de ne pas avoir eu conscience d'un danger que les pouvoirs publics n'avaient pas identifié et isolé puisque le risque d'exposition environnementale du fait de la proximité d'éléments d'équipements n'a été intégré qu'à compter du décret n° 96-445 du 22 mai 1996 visant les travaux d'équipement, d'entretien ou de maintenance effectués sur des matériels ou dans les locaux et annexes revêtus ou contenant des matériaux à base d'amiante et que l'usage de l'amiante dans les lieux bâtis et sur les lieux de travail n'a été interdit qu'après l'adoption de deux décrets du 7 février 1996, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QU'en s'abstenant de répondre aux conclusions d'appel de la société [4] qui faisait valoir que la conscience du danger que devait ou aurait dû avoir l'employeur devait s'apprécier in concreto en fonction de la nature des travaux effectués par le salarié et le secteur d'activité de l'employeur et que, compte tenu des fonctions occupées par M. [C] et de sa période d'emploi qui s'est achevée en 1966, la [5] ne pouvait avoir une quelconque conscience du danger lié à l'exposition à l'amiante en l'état d'études scientifiques, au demeurant confidentielles, qui à l'époque ne concernaient que les industries fabriquant ou transformant de l'amiante, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

La société [4] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause du [8], déclaré recevable l'action de M. [C], confirmé la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie et déclaré opposable à la société [4] cette décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie, dit que la [5] aux droits de laquelle vient la société [4] a commis une faute inexcusable dans la survenance de la maladie professionnelle de M. [C], fixé au maximum prévu par la loi la majoration de la rente servie à M. [C], fixé à la requête du FIVA, subrogé dans les droits de M. [C], la réparations des préjudices personnels subis à hauteur des sommes de 12 600 € au titre des souffrances morales et physiques et 1000 € au titre du préjudice esthétique, condamné la société [4] à rembourser à l'ENIM les sommes que celui-ci est amené à payer à M. [C] et au FIVA en exécution du jugement, intérêts compris, ainsi que l'intégralité des conséquences financières imputables à la reconnaissance de la faute inexcusable, dit que la majoration de pension servie à M. [C] par l'ENIM suivra l'évolution du taux d'incapacité permanente en cas d'aggravation de l'état de santé de l'intéressé, dit que le principe de cette majoration restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant sous réserve que l'ENIM soit saisi d'une demande de prise en charge du décès au titre de la législation professionnelle et qu'une décision conforme soit rendue ne ce sens, fixé l'indemnisation du préjudice d'agrément de M. [C] à la somme de 5000 € et condamné la société [4] à rembourser cette somme à l'ENIM ;

ALORS QU' en cas d'exposition au risque au sein de plusieurs entreprises, l'employeur qui fait l'objet d'une action en reconnaissance de sa faute inexcusable est recevable à rechercher, devant la juridiction de sécurité sociale, pour obtenir leur garantie, la faute inexcusable des autres employeurs au service desquels la victime a été exposée au même risque ; qu'en confirmant la mise hors de cause du [8] au seul motif que la faute inexcusable de la société [4] a été reconnue sans statuer, comme elle était invitée à le faire par la société [4], sur la responsabilité du [8] en qualité de dernier employeur chez lequel M. [C] a été exposé pendant vingt ans au risque de l'amiante, la cour d'appel a violé les articles L 452-1, L. 452-4 et 331 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2023:C200168
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