Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 14 décembre 2022, 21-20.885, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 14 décembre 2022, 21-20.885, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre civile 1
- N° de pourvoi : 21-20.885
- ECLI:FR:CCASS:2022:C100894
- Publié au bulletin
- Solution : Cassation sans renvoi
Audience publique du mercredi 14 décembre 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 05 janvier 2021- Président
- M. Chauvin
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 décembre 2022
Cassation sans renvoi
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 894 FS-B
Pourvoi n° K 21-20.885
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 1er juin 2021.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 DÉCEMBRE 2022
M. [C] [S], domicilié chez Mme [V] [M], avocate, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-20.885 contre l'ordonnance rendue le 5 janvier 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant au préfet de la Seine-Saint-Denis, domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de M. [S], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes Le Gall, de Cabarrus, Feydeau-Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 5 janvier 2021), et les pièces de la procédure, le 2 novembre 2020, M. [S], de nationalité algérienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une obligation de quitter le territoire français. Par ordonnances des 4 novembre et 3 décembre 2020, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention pour une durée de vingt-huit, puis de trente jours.
2. Le 1er janvier 2021, le juge des libertés et de la détention a été saisi par le préfet, sur le fondement de l' article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), d'une requête en troisième prolongation de la mesure de rétention.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. M. [S] fait grief à l'ordonnance d'accueillir la demande, alors « que le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; que pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention concernant M. [S], le premier président a retenu que ce dernier ne présentait aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité et ne fournissait pas d'élément sur sa réelle identité et notamment sa nationalité, "ce qui constitue une obstruction continue à l'exécution de la mesure d'éloignement" ; qu'en se fondant, pour se déterminer, sur la notion "d'obstruction continue", sans caractériser l'existence d'un acte positif volontaire imputable à M. [S] commis "dans les quinze derniers jours" et tendant à faire obstruction à la mesure d'éloignement, le premier président a violé l'article L.552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 :
4. Selon ce texte, le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement.
5. La présentation d'un document d'identité ou de voyage qui n'est plus en cours de validité ne caractérise pas une obstruction à l'exécution de la mesure d'éloignement.
6. Pour prolonger la rétention de M. [S], l'ordonnance retient, par motifs adoptés, qu'il n'a présenté aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité et n'a pas fourni d'élément sur sa réelle identité et notamment sa nationalité, ce qui constitue une obstruction continue à l'exécution de la mesure d'éloignement.
7. En statuant ainsi, alors, d'une part, qu'il résultait de ses constatations que M. [S] avait présenté un document d'identité qui n'était plus en cours de validité, d'autre part, que son identité et sa nationalité, mentionnées sur les ordonnances, n'étaient pas contestées, le premier président, qui n'a pas caractérisé l'existence d'un acte d'obstruction à la mesure d'éloignement commis dans les quinze derniers jours, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 5 janvier 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. [S]
M. [C] [S] fait grief à la décision attaquée d'avoir ordonné une troisième prolongation de la mesure de rétention le concernant pour une durée de quinze jours à compter du 1er janvier 2021,
ALORS, d'une part, QUE le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; que pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention concernant M. [S], le premier président a retenu que ce dernier ne présentait aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité et ne fournissait pas d'élément sur sa réelle identité et notamment sa nationalité, « ce qui constitue une obstruction continue à l'exécution de la mesure d'éloignement » (motifs adoptés de l'ordonnance du JLD de Meaux, p. 2 al. 5) ; qu'en se fondant, pour se déterminer, sur la notion « d'obstruction continue », sans caractériser l'existence d'un acte positif volontaire imputable à M. [S] commis « dans les quinze derniers jours » et tendant à faire obstruction à la mesure d'éloignement, le premier président a violé l'article L.552-7, alinéa 5, du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
ALORS, d'autre part, QUE le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai ; qu'en ordonnant une troisième prolongation de la mesure de rétention concernant M. [S], sans caractériser le fait que la délivrance des documents de voyage interviendrait à bref délai, le premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.552-7, alinéa 5, du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.ECLI:FR:CCASS:2022:C100894
CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 décembre 2022
Cassation sans renvoi
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 894 FS-B
Pourvoi n° K 21-20.885
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [S].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 1er juin 2021.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 DÉCEMBRE 2022
M. [C] [S], domicilié chez Mme [V] [M], avocate, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-20.885 contre l'ordonnance rendue le 5 janvier 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant au préfet de la Seine-Saint-Denis, domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de M. [S], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes Le Gall, de Cabarrus, Feydeau-Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, M. Chaumont, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 5 janvier 2021), et les pièces de la procédure, le 2 novembre 2020, M. [S], de nationalité algérienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une obligation de quitter le territoire français. Par ordonnances des 4 novembre et 3 décembre 2020, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention pour une durée de vingt-huit, puis de trente jours.
2. Le 1er janvier 2021, le juge des libertés et de la détention a été saisi par le préfet, sur le fondement de l' article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), d'une requête en troisième prolongation de la mesure de rétention.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. M. [S] fait grief à l'ordonnance d'accueillir la demande, alors « que le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; que pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention concernant M. [S], le premier président a retenu que ce dernier ne présentait aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité et ne fournissait pas d'élément sur sa réelle identité et notamment sa nationalité, "ce qui constitue une obstruction continue à l'exécution de la mesure d'éloignement" ; qu'en se fondant, pour se déterminer, sur la notion "d'obstruction continue", sans caractériser l'existence d'un acte positif volontaire imputable à M. [S] commis "dans les quinze derniers jours" et tendant à faire obstruction à la mesure d'éloignement, le premier président a violé l'article L.552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 552-7, alinéa 5, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 :
4. Selon ce texte, le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement.
5. La présentation d'un document d'identité ou de voyage qui n'est plus en cours de validité ne caractérise pas une obstruction à l'exécution de la mesure d'éloignement.
6. Pour prolonger la rétention de M. [S], l'ordonnance retient, par motifs adoptés, qu'il n'a présenté aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité et n'a pas fourni d'élément sur sa réelle identité et notamment sa nationalité, ce qui constitue une obstruction continue à l'exécution de la mesure d'éloignement.
7. En statuant ainsi, alors, d'une part, qu'il résultait de ses constatations que M. [S] avait présenté un document d'identité qui n'était plus en cours de validité, d'autre part, que son identité et sa nationalité, mentionnées sur les ordonnances, n'étaient pas contestées, le premier président, qui n'a pas caractérisé l'existence d'un acte d'obstruction à la mesure d'éloignement commis dans les quinze derniers jours, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 5 janvier 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. [S]
M. [C] [S] fait grief à la décision attaquée d'avoir ordonné une troisième prolongation de la mesure de rétention le concernant pour une durée de quinze jours à compter du 1er janvier 2021,
ALORS, d'une part, QUE le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; que pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention concernant M. [S], le premier président a retenu que ce dernier ne présentait aucun document d'identité ou de voyage en cours de validité et ne fournissait pas d'élément sur sa réelle identité et notamment sa nationalité, « ce qui constitue une obstruction continue à l'exécution de la mesure d'éloignement » (motifs adoptés de l'ordonnance du JLD de Meaux, p. 2 al. 5) ; qu'en se fondant, pour se déterminer, sur la notion « d'obstruction continue », sans caractériser l'existence d'un acte positif volontaire imputable à M. [S] commis « dans les quinze derniers jours » et tendant à faire obstruction à la mesure d'éloignement, le premier président a violé l'article L.552-7, alinéa 5, du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
ALORS, d'autre part, QUE le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai ; qu'en ordonnant une troisième prolongation de la mesure de rétention concernant M. [S], sans caractériser le fait que la délivrance des documents de voyage interviendrait à bref délai, le premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.552-7, alinéa 5, du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.