Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 novembre 2022, 21-15.208, Inédit
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 novembre 2022, 21-15.208, Inédit
Cour de cassation - Chambre sociale
- N° de pourvoi : 21-15.208
- ECLI:FR:CCASS:2022:SO01164
- Non publié au bulletin
- Solution : Cassation partielle
Audience publique du mercredi 09 novembre 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 10 mars 2021- Président
- Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
0SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 novembre 2022
Cassation partielle
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1164 F-D
Pourvoi n° Q 21-15.208
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 NOVEMBRE 2022
M. [K] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 21-15.208 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à la société Cubik Partners, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La société Cubik Partners a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de Me Isabelle Galy, avocat de M. [T], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Cubik Partners, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Le Lay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 mars 2021), M. [T] a été engagé à compter du 7 février 2011 par la société Cubik Partners, en qualité de consultant senior, puis promu directeur à compter de février 2014.
2. Il a été licencié pour insuffisance professionnelle par lettre notifiée le 11 mars 2015.
3.Sollicitant l'annulation de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur les premier à cinquième moyens du pourvoi incident, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses première et troisième branches
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et condamner l'employeur à lui payer une certaine somme à titre d'indemnité, alors :
« 1°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; que la cour d'appel a constaté qu'il ne pouvait être reproché à M. [T] son absence d'intégration de la valeur "fun & pro" de l'entreprise, qui se traduisait par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d'alcool, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages ; qu'en considérant néanmoins que le reproche adressé au salarié dans la lettre de licenciement de refuser d'accepter la politique de l'entreprise et le partage des valeurs "fun & pro" ne pouvait être considéré comme une violation de sa liberté d'expression, quand le refus de M. [T] d'adhérer à ces "valeurs" participait de sa liberté d'opinion et d'expression, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
3°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; qu'en retenant, pour rejeter la demande d'annulation du licenciement, que les reproches adressés au salarié portaient sur son comportement et ne remettaient pas en cause ses opinions personnelles, tout en constatant qu'il était reproché au salarié son désaccord sur les méthodes de management des associés et les critiques de leur décision, ce qui relevait de sa liberté d'expression, la cour d'appel a violé les articles les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1121-1 du code du travail et l'article 10, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
6. Il résulte de ces textes que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression.
7. Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
8. Pour débouter le salarié de sa demande en nullité de son licenciement, l'arrêt, après avoir constaté qu'il lui était notamment reproché son refus d'accepter la politique de l'entreprise ainsi que son désaccord sur les méthodes de management des associés et les critiques de leur décision, relève qu'il ne peut lui être reproché son absence d'intégration de la valeur « fun and pro », alors qu'il ressort de différentes pièces versées, notamment des attestations concordantes de salariés, que le « fun and pro » en vigueur dans l'entreprise se traduisait aussi par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive de tous les participants, encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d'alcool, la culture de l'apéro étant notamment citée dans la restitution de l'atelier culture Cubik 2011, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages.
9. Il retient que les reproches qui sont faits au salarié dans la lettre de licenciement ne peuvent être considérés comme une violation de sa liberté d'expression de nature à rendre nul le licenciement, qu'en effet, il lui est reproché son refus d'accepter la politique de l'entreprise et de se conformer aux modalités de fonctionnement basées sur des équipes de petite taille au sein desquelles la coopération par des échanges fréquents est valorisée et sur le partage des valeurs « fun » et « pro » par tous les salariés de l'entreprise, décrites notamment sur le site internet de la société sur la participation à la célébration des succès, la présence au séminaire annuel Saint-Palais et le partage de ses passions personnelles (cube Cubik), qu'aussi les reproches faits au salarié de sa rigidité, son manque d'écoute, son ton parfois cassant et démotivant vis-à vis de ses subordonnés et son impossibilité d'accepter le point de vue des autres constituent des critiques sur son comportement et ne sont pas des remises en cause de ses opinions personnelles.
10. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le licenciement était, en partie, fondé sur le comportement critique du salarié et son refus d'accepter la politique de l'entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro » mais aussi l'incitation à divers excès, qui participent de sa liberté d'expression et d'opinion, sans qu'un abus dans l'exercice de cette liberté ne soit caractérisé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, ce dernier étant subsidiaire, et sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [T] de ses demandes en nullité de son licenciement, aux fins d'ordonner sa réintégration à son poste de « consultant senior » au sein de la société Cubik Partners et en condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 461 406 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, l'arrêt rendu le 10 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société Cubik Partners aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cubik Partners et la condamne à payer à M. [T] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Isabelle Galy, avocat aux Conseils, pour M. [T], demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION
M. [T] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande tendant à voir prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et et condamner la société Cubiks Partners à lui payer une somme de 461 406 euros à titre d'indemnité,
1°) ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; que la cour d'appel a constaté qu'il ne pouvait être reproché à M. [T] son absence d'intégration de la valeur « fun & pro » de l'entreprise, qui se traduisait par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d'alcool, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages ; qu'en considérant néanmoins que le reproche adressé au salarié dans la lettre de licenciement de refuser d'accepter la politique de l'entreprise et le partage des valeurs « fun & pro » ne pouvait être considéré comme une violation de sa liberté d'expression, quand le refus de M. [T] d'adhérer à ces « valeurs » participait de sa liberté d'opinion et d'expression, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
2°) ALORS QU'est nul le licenciement intervenu en violation du droit fondamental du salarié à la dignité et au respect de sa vie privée ; que M. [T] faisait valoir que la culture « fun & pro » en vigueur dans l'entreprise était caractérisée par des pratiques humiliantes et intrusives dans la vie privée telles que des simulacres d'actes sexuels, l'obligation de partager son lit avec un autre collaborateur lors des séminaires, l'usage de sobriquets pour désigner les personnes et l'affichage dans les bureaux de photos déformées et maquillées ; qu'en refusant d'annuler le licenciement la cour d'appel, qui a elle-même constaté la réalité des pratiques de promiscuité, brimades, excès et dérapages prônées par les associés, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s'évinçait que le licenciement de M. [T], motivé par le refus de pratiques portant atteinte à sa dignité et à sa vie privée, était nul, la cour d'appel a violé le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, les articles 1er et 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
3°) ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; qu'en retenant, pour rejeter la demande d'annulation du licenciement, que les reproches adressés au salarié portaient sur son comportement et ne remettaient pas en cause ses opinions personnelles, tout en constatant qu'il était reproché au salarié son désaccord sur les méthodes de management des associés et les critiques de leur décision, ce qui relevait de sa liberté d'expression, la cour d'appel a violé les articles les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
M. [T] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande tendant à voir prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et et condamner la société Cubiks Partners à lui payer une somme de 461 406 euros à titre d'indemnité,
1°) ALORS QU'aucun salarié ne peut être licencié pour avoir relaté des faits constitutifs de harcèlement moral, peu important que le terme ne soit pas formellement employé ; que la cour d'appel a retenu, pour écarter la nullité du licenciement prononcé le 11 mars 2015, que si M. [T], dans sa lettre du 19 février 2015, avait informé son employeur de la répercussion sur son état de santé de la situation professionnelle qui lui était faite, le terme de harcèlement moral n'était pas employé dans cette lettre ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de ce terme ne permet pas d'écarter la protection prévue par les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail, dès lors que les faits dénoncés sont caractéristiques de harcèlement moral, la cour d'appel a violé ces textes ;
2°) ALORS QU'en retenant, pour écarter la nullité du licenciement, que la lettre de licenciement du 11 mars 2015 ne faisait aucune référence explicite à un reproche de dénonciation de harcèlement moral, tout en constatant que cette lettre répondait in fine à la lettre du salarié du 11 février 2015, réceptionnée par l'employeur le 23 février 2015, et sans rechercher, comme il était soutenu, si le très court délai entre la réception de cette lettre et l'engagement de la procédure de licenciement ne démontrait pas que le licenciement avait été prononcé en réaction à cette lettre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;
3°) ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; qu'en ne recherchant pas, comme il était soutenu, si le licenciement prononcé par une lettre du 11 mars 2015, répondant aux critiques développées par M. [T] dans sa lettre du 15 février 2015 concernant ses conditions de travail, ne constituait pas une atteinte à la liberté d'expression du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
M. [T] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande tendant à voir condamner la société Cubik Partners à lui payer une somme de 82 640 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
1°) ALORS QU'en se fondant exclusivement, pour considérer que l'insuffisance professionnelle de M. [T] était démontrée, sur les éléments de preuve produits par l'employeur, sans examiner ni même viser les pièces que le salarié produisait aux débats contestant celles de son employeur, la cour d'appel a a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en relevant qu'il résultait de la synthèse de l'évaluation de juin 2014 une absence de développement d'esprit d'équipe, de solidarité et de loyauté, un ton trop froid et cassant adopté en formation et le fait pour le salarié d'être d'abord dans la critique avant d'être dans la construction, sans s'expliquer sur la pièce produite par le salarié « feedback 360° » de juillet 2014, soit huit mois avant la rupture, relevant de nombreux points positifs et attribuant à M. [T] un score de 82 % supérieur ou égale à 3 étoiles (conclusions p. 29, pièce n° 18), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en retenant que Mme [R], directrice excellence opérationnelle SNCF, témoignait des difficultés rencontrées avec M. [T] comme responsable du compte, sans répondre aux conclusions d'appel de M. [T] (p. 31 et p. 35) faisant valoir que dans son attestation Mme [R] indiquait elle-même qu'il était un excellent formateur et qu'elle avait eu deux ans d'excellente collaboration avec lui, qu'elle lui avait fait une excellente recommandation sur Linkedin et que M. [T] avait continué à travailler pour le groupe SNCF jusqu'à la fin de son contrat, ni s'expliquer sur les retours positifs de M. [I] de SNCF Voyages et de M. [Y] directeur de SNCF Champagne Ardenne, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'en se fondant sur les courriels de M. [U] de chez Eurostar et celui de M. [M] de chez [Z], indiquant qu'ils avaient souhaité que M. [T] soit écarté de la gestion de leur compte, sans répondre aux conclusions d'appel du salarié (p. 33-34) faisant valoir que ses prestations pour ces deux sociétés dataient de 2011-2012, qu'il n'avait à l'époque reçu aucune remarque de la part de son employeur, qu'en 2012 et 2013 son salaire avait été augmenté de 7,5 % et avait reçu un bonus de performance individuelle, et qu'en février 2014 il avait été promu directeur, ce qui était incompatible avec une mauvaise performance chez un client, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QU'en retenant que le compte-rendu des stagiaires ayant assisté à la formation de l'Ecole centrale du 19 au 22 janvier 2015 contenait des critiques unanimes des huit participants, sans répondre aux conclusions d'appel de M. [T] (p. 37-38) faisant valoir qu'il avait assuré cette formation avec deux de ses collègues, que l'employeur produisait une évaluation globale sans faire connaître le nom des formateurs évalués, que cette formation s'était déroulée juste après l'entretien du 12 décembre 2014 au cours duquel son employeur l'avait informé de sa décision de rompre le contrat et que son état de santé était dégradé au point qu'il n'avait pu terminer la formation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS QU'en se fondant sur les seuls éléments de preuve de l'employeur sur la prétendue incapacité de M. [T] à travailler avec ses collègues, sans s'expliquer sur les attestations, courriels et nombreux « feedbacks » de salariés versés aux débats par M. [T], témoignant au contraire de leur appréciation très positive sur ses qualités professionnelles et relationnelles, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Cubik Partners, demanderesse au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 37 382,02 euros de rappels d'heures supplémentaires et 3 738,20 euros de congés payés afférents, et de 4 818,06 euros à titre de repos compensateur et 481,81 euros de congés payés afférents ;
1°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour faire droit à la demande du salarié, s'est bornée à relever que ce dernier, qui disposait d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, versait aux débats des tableaux récapitulatifs se bornant à faire état des horaires de début et de fin de journée, établis a posteriori pour les besoins de la cause, des courriels émis et adressés à des horaires tardifs et durant les fins de semaine, la copie de ses agendas manuscrits mentionnant de manière imprécise quelques rendez-vous professionnels mais aussi des rendez-vous personnels pendant la durée de travail en contradiction avec les tableaux récapitulatifs produits et des attestations de ses collègues faisant état d'un temps de travail majoritairement accompli de 9h à 19h30, ces éléments présentant diverses incohérences démontrées par l'employeur ; qu'en jugeant que de tels éléments étaient suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°) ALORS subsidiairement QU'un salarié n'a droit au paiement que des heures supplémentaires qui ont été accomplies avec l'accord au moins implicite de l'employeur ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir preuves à l'appui qu'il n'avait jamais demandé à M. [T] d'accomplir la moindre heure supplémentaire, que ce dernier était libre d'organiser son temps de travail et qu'il n'avait pas une charge de travail justifiant l'accomplissement d'heures supplémentaires (conclusions d'appel de l'exposante p.48 et p.58 et 59, productions n° 15 et 16) ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement que le salarié avait accompli des heures supplémentaires, au moins avec l'accord implicite de l'employeur, sans caractériser, en l'état d'une contestation expresse élevée sur ce point par l'employeur, en quoi, dans les faits, les heures supplémentaires retenues auraient été effectuées avec l'accord implicite de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 4 818,06 euros à titre de repos compensateur et 481,81 euros de congés payés afférents ;
1°) ALORS QUE la cassation du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à payer au salarié un rappel de salaire au titre de prétendues heures supplémentaires entraînera la cassation du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à payer au salarié les sommes de 4 818,06 euros à titre de repos compensateur et 481,81 euros de congés payés afférents, et ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°) ALORS à tout le moins QUE le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l'indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos et le montant des congés payés afférents ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a alloué au salarié les sommes de 4 818,06 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos et de 481,81 euros au titre des congés payés afférents, en raison du dépassement du contingent d'heures supplémentaires annuel pour les années 2012 à 2014 ; qu'en statuant ainsi, sans aucunement s'expliquer sur le mode de calcul de cette indemnité, ni préciser le nombre d'heures supplémentaires qui auraient été accomplies au-delà du contingent annuel applicable, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé les articles L. 3121-11, L. 3121-30, L. 3121-38, D. 3121-23 et D. 3121-24 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié la somme de 2 500 euros de dommages et intérêts pour temps de déplacement exceptionnels ;
ALORS QUE le temps de trajet dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail doit faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière, déterminé par la convention collective, ou le contrat de travail, ou à défaut par le juge ; qu'en l'espèce, en affirmant que le salarié avait régulièrement accompli des trajets excédant le temps habituel quotidien cumulé de transport d'1h30 et en lui allouant à ce titre des dommages-intérêts, quand il lui appartenait de déterminer le montant de la contrepartie financière qui lui était due au titre du temps de trajet dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail et de déterminer au préalable précisément ce temps, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-4 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 400 euros à titre de rappel de bonus et de 40 euros de congés payés afférents ;
1°) ALORS QU'il appartient à la partie qui se prétend créancière de prouver l'existence de la créance qu'elle allègue ; qu'en l'espèce, en affirmant qu'en 2013, le salarié avait perçu 3 600 euros, soit 90% de bonus individuel et 4 000 euros de bonus collectif, sans que la société n'ait justifié pour cette période des raisons pour lesquelles la totalité de la rémunération ne lui avait pas été versée, quand il appartenait pourtant au salarié d'établir l'existence de sa créance, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, l'employeur sollicitait la confirmation du jugement en ce qu'il avait retenu qu' « au titre de 2013, le salarié a perçu 100 % de son bonus collectif et 90 % de son bonus individuel, l'employeur l'ayant déjà alerté de difficultés à accepté les feed back et le travail en équipe » et précisait qu'« au titre de l'année 2013, M. [T] a ainsi perçu la somme de 3.600 € au titre de son bonus individuel, soit 90 % du montant maximal, et n'est pas fondé, compte tenu de son attitude globale et des insuffisances évoquées ci-dessus, à en percevoir davantage » (conclusions d'appel de l'exposante p.65) ; qu'en affirmant qu'en 2013, le salarié avait perçu 3 600 euros, soit 90% de bonus individuel et 4 000 euros de bonus collectif, et que l'employeur ne justifiait pas pour cette période des raisons pour lesquelles la totalité de la rémunération ne lui avait pas été versée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'employeur et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, l'employeur sollicitait la confirmation du jugement en ce qu'il avait retenu qu' « au titre de 2013, le salarié a perçu 100 % de son bonus collectif et 90 % de son bonus individuel, l'employeur l'ayant déjà alerté de difficultés à accepté les feed back et le travail en équipe » et précisait qu'« au titre de l'année 2013, M. [T] a ainsi perçu la somme de 3.600 € au titre de son bonus individuel, soit 90 % du montant maximal, et n'est pas fondé, compte tenu de son attitude globale et des insuffisances évoquées ci-dessus, à en percevoir davantage » (conclusions d'appel de l'exposante p.65) ; que pour établir les difficultés rencontrées par le salarié en 2013, l'employeur avait versé aux débats les échanges de courriels entre M. [F] et M. [P] en date du 28 octobre 2013 (production n°18) ; qu'en affirmant qu'en 2013, le salarié avait perçu 3 600 euros, soit 90% de bonus individuel et 4 000 euros de bonus collectif, et que l'employeur ne justifiait pas pour cette période des raisons pour lesquelles la totalité de la rémunération ne lui avait pas été versée, sans s'expliquer sur les justifications invoquées par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 2 129,31 euros à titre de rappel de prime de vacances et de 212,93 euros de congés payés afférents ;
ALORS QUE les juges sont tenus de motiver leur décision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les bulletins de paie du salarié révélaient que ce dernier avait perçu au titre de primes, en février 2012, 3 931,51 euros de prime exceptionnelle et 1 989,01 euros de primes supplémentaires, en mars 2012, 2 358,90 euros de rappel de prime 2011, et en février 2013, 1 252,83 euros de prime exceptionnelle ; qu'en affirmant que le salarié avait été rempli de ses droits au titre des années 2011 et 2012 mais qu'à défaut de perception de primes pouvant être considérées comme des primes de vacances, la somme de 2 129,31 euros devait lui être allouée au titre des primes de vacances pour les années 2013 à 2015, sans expliquer en quoi la prime exceptionnelle versée en 2013 ne pouvait pas être considérée comme une prime de vacances pour l'année 2013, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civileECLI:FR:CCASS:2022:SO01164
0SOC.
ZB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 novembre 2022
Cassation partielle
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1164 F-D
Pourvoi n° Q 21-15.208
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 NOVEMBRE 2022
M. [K] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 21-15.208 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à la société Cubik Partners, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La société Cubik Partners a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de Me Isabelle Galy, avocat de M. [T], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Cubik Partners, après débats en l'audience publique du 20 septembre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Le Lay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 mars 2021), M. [T] a été engagé à compter du 7 février 2011 par la société Cubik Partners, en qualité de consultant senior, puis promu directeur à compter de février 2014.
2. Il a été licencié pour insuffisance professionnelle par lettre notifiée le 11 mars 2015.
3.Sollicitant l'annulation de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
Examen des moyens
Sur les premier à cinquième moyens du pourvoi incident, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses première et troisième branches
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et condamner l'employeur à lui payer une certaine somme à titre d'indemnité, alors :
« 1°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; que la cour d'appel a constaté qu'il ne pouvait être reproché à M. [T] son absence d'intégration de la valeur "fun & pro" de l'entreprise, qui se traduisait par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d'alcool, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages ; qu'en considérant néanmoins que le reproche adressé au salarié dans la lettre de licenciement de refuser d'accepter la politique de l'entreprise et le partage des valeurs "fun & pro" ne pouvait être considéré comme une violation de sa liberté d'expression, quand le refus de M. [T] d'adhérer à ces "valeurs" participait de sa liberté d'opinion et d'expression, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
3°/ qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; qu'en retenant, pour rejeter la demande d'annulation du licenciement, que les reproches adressés au salarié portaient sur son comportement et ne remettaient pas en cause ses opinions personnelles, tout en constatant qu'il était reproché au salarié son désaccord sur les méthodes de management des associés et les critiques de leur décision, ce qui relevait de sa liberté d'expression, la cour d'appel a violé les articles les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1121-1 du code du travail et l'article 10, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
6. Il résulte de ces textes que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression.
7. Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
8. Pour débouter le salarié de sa demande en nullité de son licenciement, l'arrêt, après avoir constaté qu'il lui était notamment reproché son refus d'accepter la politique de l'entreprise ainsi que son désaccord sur les méthodes de management des associés et les critiques de leur décision, relève qu'il ne peut lui être reproché son absence d'intégration de la valeur « fun and pro », alors qu'il ressort de différentes pièces versées, notamment des attestations concordantes de salariés, que le « fun and pro » en vigueur dans l'entreprise se traduisait aussi par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive de tous les participants, encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d'alcool, la culture de l'apéro étant notamment citée dans la restitution de l'atelier culture Cubik 2011, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages.
9. Il retient que les reproches qui sont faits au salarié dans la lettre de licenciement ne peuvent être considérés comme une violation de sa liberté d'expression de nature à rendre nul le licenciement, qu'en effet, il lui est reproché son refus d'accepter la politique de l'entreprise et de se conformer aux modalités de fonctionnement basées sur des équipes de petite taille au sein desquelles la coopération par des échanges fréquents est valorisée et sur le partage des valeurs « fun » et « pro » par tous les salariés de l'entreprise, décrites notamment sur le site internet de la société sur la participation à la célébration des succès, la présence au séminaire annuel Saint-Palais et le partage de ses passions personnelles (cube Cubik), qu'aussi les reproches faits au salarié de sa rigidité, son manque d'écoute, son ton parfois cassant et démotivant vis-à vis de ses subordonnés et son impossibilité d'accepter le point de vue des autres constituent des critiques sur son comportement et ne sont pas des remises en cause de ses opinions personnelles.
10. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le licenciement était, en partie, fondé sur le comportement critique du salarié et son refus d'accepter la politique de l'entreprise basée sur le partage de la valeur « fun and pro » mais aussi l'incitation à divers excès, qui participent de sa liberté d'expression et d'opinion, sans qu'un abus dans l'exercice de cette liberté ne soit caractérisé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, ce dernier étant subsidiaire, et sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [T] de ses demandes en nullité de son licenciement, aux fins d'ordonner sa réintégration à son poste de « consultant senior » au sein de la société Cubik Partners et en condamnation de celle-ci à lui payer la somme de 461 406 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul, l'arrêt rendu le 10 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la société Cubik Partners aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Cubik Partners et la condamne à payer à M. [T] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Isabelle Galy, avocat aux Conseils, pour M. [T], demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION
M. [T] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande tendant à voir prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et et condamner la société Cubiks Partners à lui payer une somme de 461 406 euros à titre d'indemnité,
1°) ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; que la cour d'appel a constaté qu'il ne pouvait être reproché à M. [T] son absence d'intégration de la valeur « fun & pro » de l'entreprise, qui se traduisait par la nécessaire participation aux séminaires et aux pots de fin de semaine générant fréquemment une alcoolisation excessive encouragée par les associés qui mettaient à disposition de très grandes quantités d'alcool, et par des pratiques prônées par les associés liant promiscuité, brimades et incitation à divers excès et dérapages ; qu'en considérant néanmoins que le reproche adressé au salarié dans la lettre de licenciement de refuser d'accepter la politique de l'entreprise et le partage des valeurs « fun & pro » ne pouvait être considéré comme une violation de sa liberté d'expression, quand le refus de M. [T] d'adhérer à ces « valeurs » participait de sa liberté d'opinion et d'expression, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
2°) ALORS QU'est nul le licenciement intervenu en violation du droit fondamental du salarié à la dignité et au respect de sa vie privée ; que M. [T] faisait valoir que la culture « fun & pro » en vigueur dans l'entreprise était caractérisée par des pratiques humiliantes et intrusives dans la vie privée telles que des simulacres d'actes sexuels, l'obligation de partager son lit avec un autre collaborateur lors des séminaires, l'usage de sobriquets pour désigner les personnes et l'affichage dans les bureaux de photos déformées et maquillées ; qu'en refusant d'annuler le licenciement la cour d'appel, qui a elle-même constaté la réalité des pratiques de promiscuité, brimades, excès et dérapages prônées par les associés, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s'évinçait que le licenciement de M. [T], motivé par le refus de pratiques portant atteinte à sa dignité et à sa vie privée, était nul, la cour d'appel a violé le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, les articles 1er et 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
3°) ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; qu'en retenant, pour rejeter la demande d'annulation du licenciement, que les reproches adressés au salarié portaient sur son comportement et ne remettaient pas en cause ses opinions personnelles, tout en constatant qu'il était reproché au salarié son désaccord sur les méthodes de management des associés et les critiques de leur décision, ce qui relevait de sa liberté d'expression, la cour d'appel a violé les articles les articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
M. [T] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande tendant à voir prononcer la nullité du licenciement, ordonner sa réintégration et et condamner la société Cubiks Partners à lui payer une somme de 461 406 euros à titre d'indemnité,
1°) ALORS QU'aucun salarié ne peut être licencié pour avoir relaté des faits constitutifs de harcèlement moral, peu important que le terme ne soit pas formellement employé ; que la cour d'appel a retenu, pour écarter la nullité du licenciement prononcé le 11 mars 2015, que si M. [T], dans sa lettre du 19 février 2015, avait informé son employeur de la répercussion sur son état de santé de la situation professionnelle qui lui était faite, le terme de harcèlement moral n'était pas employé dans cette lettre ; qu'en statuant ainsi, quand l'absence de ce terme ne permet pas d'écarter la protection prévue par les articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail, dès lors que les faits dénoncés sont caractéristiques de harcèlement moral, la cour d'appel a violé ces textes ;
2°) ALORS QU'en retenant, pour écarter la nullité du licenciement, que la lettre de licenciement du 11 mars 2015 ne faisait aucune référence explicite à un reproche de dénonciation de harcèlement moral, tout en constatant que cette lettre répondait in fine à la lettre du salarié du 11 février 2015, réceptionnée par l'employeur le 23 février 2015, et sans rechercher, comme il était soutenu, si le très court délai entre la réception de cette lettre et l'engagement de la procédure de licenciement ne démontrait pas que le licenciement avait été prononcé en réaction à cette lettre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail ;
3°) ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale constitutionnellement garantie le licenciement intervenu à raison de l'exercice par le salarié de sa liberté d'expression ; qu'en ne recherchant pas, comme il était soutenu, si le licenciement prononcé par une lettre du 11 mars 2015, répondant aux critiques développées par M. [T] dans sa lettre du 15 février 2015 concernant ses conditions de travail, ne constituait pas une atteinte à la liberté d'expression du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1er et 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 décembre 2000, l'article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
M. [T] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté sa demande tendant à voir condamner la société Cubik Partners à lui payer une somme de 82 640 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
1°) ALORS QU'en se fondant exclusivement, pour considérer que l'insuffisance professionnelle de M. [T] était démontrée, sur les éléments de preuve produits par l'employeur, sans examiner ni même viser les pièces que le salarié produisait aux débats contestant celles de son employeur, la cour d'appel a a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en relevant qu'il résultait de la synthèse de l'évaluation de juin 2014 une absence de développement d'esprit d'équipe, de solidarité et de loyauté, un ton trop froid et cassant adopté en formation et le fait pour le salarié d'être d'abord dans la critique avant d'être dans la construction, sans s'expliquer sur la pièce produite par le salarié « feedback 360° » de juillet 2014, soit huit mois avant la rupture, relevant de nombreux points positifs et attribuant à M. [T] un score de 82 % supérieur ou égale à 3 étoiles (conclusions p. 29, pièce n° 18), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'en retenant que Mme [R], directrice excellence opérationnelle SNCF, témoignait des difficultés rencontrées avec M. [T] comme responsable du compte, sans répondre aux conclusions d'appel de M. [T] (p. 31 et p. 35) faisant valoir que dans son attestation Mme [R] indiquait elle-même qu'il était un excellent formateur et qu'elle avait eu deux ans d'excellente collaboration avec lui, qu'elle lui avait fait une excellente recommandation sur Linkedin et que M. [T] avait continué à travailler pour le groupe SNCF jusqu'à la fin de son contrat, ni s'expliquer sur les retours positifs de M. [I] de SNCF Voyages et de M. [Y] directeur de SNCF Champagne Ardenne, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'en se fondant sur les courriels de M. [U] de chez Eurostar et celui de M. [M] de chez [Z], indiquant qu'ils avaient souhaité que M. [T] soit écarté de la gestion de leur compte, sans répondre aux conclusions d'appel du salarié (p. 33-34) faisant valoir que ses prestations pour ces deux sociétés dataient de 2011-2012, qu'il n'avait à l'époque reçu aucune remarque de la part de son employeur, qu'en 2012 et 2013 son salaire avait été augmenté de 7,5 % et avait reçu un bonus de performance individuelle, et qu'en février 2014 il avait été promu directeur, ce qui était incompatible avec une mauvaise performance chez un client, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°) ALORS QU'en retenant que le compte-rendu des stagiaires ayant assisté à la formation de l'Ecole centrale du 19 au 22 janvier 2015 contenait des critiques unanimes des huit participants, sans répondre aux conclusions d'appel de M. [T] (p. 37-38) faisant valoir qu'il avait assuré cette formation avec deux de ses collègues, que l'employeur produisait une évaluation globale sans faire connaître le nom des formateurs évalués, que cette formation s'était déroulée juste après l'entretien du 12 décembre 2014 au cours duquel son employeur l'avait informé de sa décision de rompre le contrat et que son état de santé était dégradé au point qu'il n'avait pu terminer la formation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ALORS QU'en se fondant sur les seuls éléments de preuve de l'employeur sur la prétendue incapacité de M. [T] à travailler avec ses collègues, sans s'expliquer sur les attestations, courriels et nombreux « feedbacks » de salariés versés aux débats par M. [T], témoignant au contraire de leur appréciation très positive sur ses qualités professionnelles et relationnelles, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile
Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Cubik Partners, demanderesse au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 37 382,02 euros de rappels d'heures supplémentaires et 3 738,20 euros de congés payés afférents, et de 4 818,06 euros à titre de repos compensateur et 481,81 euros de congés payés afférents ;
1°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour faire droit à la demande du salarié, s'est bornée à relever que ce dernier, qui disposait d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, versait aux débats des tableaux récapitulatifs se bornant à faire état des horaires de début et de fin de journée, établis a posteriori pour les besoins de la cause, des courriels émis et adressés à des horaires tardifs et durant les fins de semaine, la copie de ses agendas manuscrits mentionnant de manière imprécise quelques rendez-vous professionnels mais aussi des rendez-vous personnels pendant la durée de travail en contradiction avec les tableaux récapitulatifs produits et des attestations de ses collègues faisant état d'un temps de travail majoritairement accompli de 9h à 19h30, ces éléments présentant diverses incohérences démontrées par l'employeur ; qu'en jugeant que de tels éléments étaient suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
2°) ALORS subsidiairement QU'un salarié n'a droit au paiement que des heures supplémentaires qui ont été accomplies avec l'accord au moins implicite de l'employeur ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir preuves à l'appui qu'il n'avait jamais demandé à M. [T] d'accomplir la moindre heure supplémentaire, que ce dernier était libre d'organiser son temps de travail et qu'il n'avait pas une charge de travail justifiant l'accomplissement d'heures supplémentaires (conclusions d'appel de l'exposante p.48 et p.58 et 59, productions n° 15 et 16) ; qu'en se bornant à affirmer péremptoirement que le salarié avait accompli des heures supplémentaires, au moins avec l'accord implicite de l'employeur, sans caractériser, en l'état d'une contestation expresse élevée sur ce point par l'employeur, en quoi, dans les faits, les heures supplémentaires retenues auraient été effectuées avec l'accord implicite de ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 4 818,06 euros à titre de repos compensateur et 481,81 euros de congés payés afférents ;
1°) ALORS QUE la cassation du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à payer au salarié un rappel de salaire au titre de prétendues heures supplémentaires entraînera la cassation du chef de dispositif ayant condamné l'employeur à payer au salarié les sommes de 4 818,06 euros à titre de repos compensateur et 481,81 euros de congés payés afférents, et ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°) ALORS à tout le moins QUE le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l'indemnité calculée comme si le salarié avait pris son repos et le montant des congés payés afférents ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a alloué au salarié les sommes de 4 818,06 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos et de 481,81 euros au titre des congés payés afférents, en raison du dépassement du contingent d'heures supplémentaires annuel pour les années 2012 à 2014 ; qu'en statuant ainsi, sans aucunement s'expliquer sur le mode de calcul de cette indemnité, ni préciser le nombre d'heures supplémentaires qui auraient été accomplies au-delà du contingent annuel applicable, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé les articles L. 3121-11, L. 3121-30, L. 3121-38, D. 3121-23 et D. 3121-24 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié la somme de 2 500 euros de dommages et intérêts pour temps de déplacement exceptionnels ;
ALORS QUE le temps de trajet dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail doit faire l'objet d'une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière, déterminé par la convention collective, ou le contrat de travail, ou à défaut par le juge ; qu'en l'espèce, en affirmant que le salarié avait régulièrement accompli des trajets excédant le temps habituel quotidien cumulé de transport d'1h30 et en lui allouant à ce titre des dommages-intérêts, quand il lui appartenait de déterminer le montant de la contrepartie financière qui lui était due au titre du temps de trajet dépassant le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail et de déterminer au préalable précisément ce temps, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-4 du code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 400 euros à titre de rappel de bonus et de 40 euros de congés payés afférents ;
1°) ALORS QU'il appartient à la partie qui se prétend créancière de prouver l'existence de la créance qu'elle allègue ; qu'en l'espèce, en affirmant qu'en 2013, le salarié avait perçu 3 600 euros, soit 90% de bonus individuel et 4 000 euros de bonus collectif, sans que la société n'ait justifié pour cette période des raisons pour lesquelles la totalité de la rémunération ne lui avait pas été versée, quand il appartenait pourtant au salarié d'établir l'existence de sa créance, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil, ensemble l'article 9 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, l'employeur sollicitait la confirmation du jugement en ce qu'il avait retenu qu' « au titre de 2013, le salarié a perçu 100 % de son bonus collectif et 90 % de son bonus individuel, l'employeur l'ayant déjà alerté de difficultés à accepté les feed back et le travail en équipe » et précisait qu'« au titre de l'année 2013, M. [T] a ainsi perçu la somme de 3.600 € au titre de son bonus individuel, soit 90 % du montant maximal, et n'est pas fondé, compte tenu de son attitude globale et des insuffisances évoquées ci-dessus, à en percevoir davantage » (conclusions d'appel de l'exposante p.65) ; qu'en affirmant qu'en 2013, le salarié avait perçu 3 600 euros, soit 90% de bonus individuel et 4 000 euros de bonus collectif, et que l'employeur ne justifiait pas pour cette période des raisons pour lesquelles la totalité de la rémunération ne lui avait pas été versée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'employeur et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, l'employeur sollicitait la confirmation du jugement en ce qu'il avait retenu qu' « au titre de 2013, le salarié a perçu 100 % de son bonus collectif et 90 % de son bonus individuel, l'employeur l'ayant déjà alerté de difficultés à accepté les feed back et le travail en équipe » et précisait qu'« au titre de l'année 2013, M. [T] a ainsi perçu la somme de 3.600 € au titre de son bonus individuel, soit 90 % du montant maximal, et n'est pas fondé, compte tenu de son attitude globale et des insuffisances évoquées ci-dessus, à en percevoir davantage » (conclusions d'appel de l'exposante p.65) ; que pour établir les difficultés rencontrées par le salarié en 2013, l'employeur avait versé aux débats les échanges de courriels entre M. [F] et M. [P] en date du 28 octobre 2013 (production n°18) ; qu'en affirmant qu'en 2013, le salarié avait perçu 3 600 euros, soit 90% de bonus individuel et 4 000 euros de bonus collectif, et que l'employeur ne justifiait pas pour cette période des raisons pour lesquelles la totalité de la rémunération ne lui avait pas été versée, sans s'expliquer sur les justifications invoquées par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
La société Cubik Partners fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer au salarié les sommes de 2 129,31 euros à titre de rappel de prime de vacances et de 212,93 euros de congés payés afférents ;
ALORS QUE les juges sont tenus de motiver leur décision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les bulletins de paie du salarié révélaient que ce dernier avait perçu au titre de primes, en février 2012, 3 931,51 euros de prime exceptionnelle et 1 989,01 euros de primes supplémentaires, en mars 2012, 2 358,90 euros de rappel de prime 2011, et en février 2013, 1 252,83 euros de prime exceptionnelle ; qu'en affirmant que le salarié avait été rempli de ses droits au titre des années 2011 et 2012 mais qu'à défaut de perception de primes pouvant être considérées comme des primes de vacances, la somme de 2 129,31 euros devait lui être allouée au titre des primes de vacances pour les années 2013 à 2015, sans expliquer en quoi la prime exceptionnelle versée en 2013 ne pouvait pas être considérée comme une prime de vacances pour l'année 2013, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile