Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 22 juin 2022, 21-10.512, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 juin 2022




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 501 FS-B

Pourvoi n° K 21-10.512




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 JUIN 2022

Mme [I] [Z], domiciliée [Adresse 4], a formé le pourvoi n° K 21-10.512 contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 2, chambre 3), dans le litige l'opposant

1°/ à Mme [U] [Y], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à la société Pacifica, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5],

3°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai, dont le siège est [Adresse 2],

4°/ à la Mission nationale de controle et d'audit des organismes de sécurité sociale dont le siège est [Adresse 1], représentée par le ministre des afffaires sociales et de la santé,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Gallet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de Mme [Z], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [Y] et de la société Pacifica, et l'avis de Mme Morel-Coujard, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 mai 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Gallet, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Andrich, MM. Jessel, David, Jobert, Mme Grandjean, conseillers, M. Jariel, Mmes Schmitt, Aldigé, conseillers référendaires, Mme Morel-Coujard, avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à Mme [Z] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la caisse primaire d'assurance maladie de Lille-Douai et la mission nationale de contrôle et d'audit des organismes de sécurité sociale.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 novembre 2020), le 5 juillet 2014, Mme [Y] (la bailleresse), assurée auprès de la société Pacifica, a donné à bail à Mme [Z] (la locataire) un appartement situé en étage.

3. Le 3 octobre 2014, la locataire a chuté depuis une fenêtre du logement dépourvue de garde-corps et dont la partie basse se situait à moins de 90 centimètres du plancher.

4. Elle a assigné la bailleresse et son assureur en responsabilité et indemnisation.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La locataire fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de dommages-intérêts de l'exposante, que le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 n'oblige pas les bailleurs à créer des dispositifs de retenue des personnes dans les immeubles anciens, construits avant 1955, qui en sont dépourvus, en l'absence de dispositions légales ou réglementaires imposant leur installation, quand ne satisfait pas aux caractéristiques du logement décent le logement dont les dispositifs de garde-corps des balcons ne sont pas dans un état conforme à leur usage, la cour d'appel a violé les articles 1719 du code civil et 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et les articles 1 et 2-2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 ;

2°/ qu'il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail ; ne satisfait pas aux caractéristiques du logement décent le logement dont les dispositifs de garde-corps des balcons ne sont pas dans un état conforme à leur usage ; qu'en retenant que l'absence de garde-corps constituait une caractéristique inhérente à la date de construction du local loué dont le locataire peut se convaincre lors de la visite des lieux, alors que l'appréciation du caractère dangereux d'une fenêtre n'est pas à la portée d'un locataire profane et ne constitue pas une caractéristique inhérente au local loué, la cour d'appel a violé les articles 1721 du code civil, 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et les articles 1 et 2-2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002. »

Réponse de la cour

6. En premier lieu, la cour d'appel a retenu à bon droit que le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 imposait seulement aux bailleurs d'entretenir les garde-corps existants dans un état conforme à leur usage, mais non d'installer de tels dispositifs dans les immeubles anciens qui en étaient dépourvus, en l'absence de dispositions légales ou réglementaires l'imposant.

7. Elle en a exactement déduit que le fait pour la bailleresse de ne pas avoir équipé de garde-corps les fenêtres de l'appartement donné à bail ne caractérisait pas un manquement à son obligation de mise à disposition d'un logement décent satisfaisant aux conditions prévues par le décret privé en matière de sécurité et de santé.

8. En second lieu, la cour d'appel a pu retenir que l'absence de garde-corps dans un immeuble construit avant 1955 ne constituait ni un vice de construction, ni une défectuosité dont le bailleur devait répondre, mais une caractéristique apparente inhérente à sa date de construction, dont le locataire pouvait se convaincre lors de la visite des lieux.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [Z] et la condamne à payer à Mme [Y] et la société Pacifica la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour Mme [Z]

Madame [Z] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de l'AVOIR déboutée de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de Mme [U] [Y] et de la société Pacifica.

ALORS DE PREMIERE PART QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent ; qu'en retenant, pour rejeter la demande de dommages-intérêts de l'exposante, que le décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 n'oblige pas les bailleurs à créer des dispositifs de retenue des personnes dans les immeubles anciens, construits avant 1955, qui en sont dépourvus, en l'absence de dispositions légales ou réglementaires imposant leur installation, quand ne satisfait pas aux caractéristiques du logement décent le logement dont les dispositifs de garde-corps des balcons ne sont pas dans un état conforme à leur usage, la cour d'appel a violé les articles 1719 du code civil et 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et les articles 1 et 2-2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 ;

ALORS DE SECONDE PART QU'il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l'usage quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail ; ne satisfait pas aux caractéristiques du logement décent le logement dont les dispositifs de garde-corps des balcons ne sont pas dans un état conforme à leur usage ; qu'en retenant que l'absence de garde-corps constituait une caractéristique inhérente à la date de construction du local loué dont le locataire peut se convaincre lors de la visite des lieux, alors que l'appréciation du caractère dangereux d'une fenêtre n'est pas à la portée d'un locataire profane et ne constitue pas une caractéristique inhérente au local loué, la cour d'appel a violé les articles 1721 du code civil, 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 et 1 et 2-2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002. ECLI:FR:CCASS:2022:C300501
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