Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 21 avril 2022, 20-10.809, Publié au bulletin
Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 21 avril 2022, 20-10.809, Publié au bulletin
Cour de cassation - Chambre commerciale
- N° de pourvoi : 20-10.809
- ECLI:FR:CCASS:2022:CO00287
- Publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 21 avril 2022
Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, du 17 janvier 2018- Président
- Mme Mouillard
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
DB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 avril 2022
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 287 FS-B
Pourvoi n° N 20-10.809
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 21 AVRIL 2022
1°/ M. [E] [V], domicilié [Adresse 2],
2°/ la société [R] et associés, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [M] [R], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. [E] [V], ont formé le pourvoi n° N 20-10.809 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2018 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige les opposant à la société 2EI, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [V], de la société [R] et associés, ès qualités, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société 2EI, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Ponsot, Mmes Fèvre, Ducloz, conseillers, M. Guerlot, Mmes de Cabarrus, Lion, Tostain, MM. Boutié, Gillis, Maigret, conseillers référendaires, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse,17 janvier 2018), M. [V] a, par un acte du 3 janvier 2013, cédé l'intégralité des parts composant le capital de la SARL Entreprise [V] à la société 2E, devenue la société 2EI, moyennant un prix déterminé au vu d'un bilan arrêté au 30 septembre 2012.
2. La société Entreprise [V] a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, respectivement les 21 janvier et 18 février 2014.
3. Soutenant que la situation présentée par M. [V] ne correspondait pas à la réalité, la société 2EI l'a assigné en exécution de la garantie d'actif et de passif prévue par l'acte de cession et en paiement de dommages-intérêts puis a demandé principalement l'annulation de la cession et la remise des parties dans la situation où elles se trouvaient antérieurement ainsi que la condamnation de M. [V] à lui payer des dommages-intérêts.
4. Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de M. [V], la société [R] et associés étant désignée liquidateur.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font grief à l'arrêt d'annuler la convention de cession de parts du 3 janvier 2013, d'ordonner, en conséquence, la restitution des parts à M. [V] et de rejeter la demande de paiement de prix de ce dernier, alors « que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en ordonnant en conséquence de la nullité de la cession des parts sociales de la SARL Entreprise [V], la restitution desdites parts à M. [V], alors que dans leurs dernières conclusions ni la société 2EI, ni M. [V] n'avait formulé une telle demande, la cour d'appel a jugé au-delà des prétentions des parties et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
6. La société 2EI ayant, dans le dispositif de ses conclusions, demandé à la cour d'appel de confirmer le jugement entrepris, notamment, en ce qu'il avait dit et jugé que les parties étaient remises dans leurs situations antérieures à la signature de l'acte de cession des parts du 3 janvier 2013, le grief manque en fait.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
8. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité, le défaut de réponse à conclusions constituant un défaut de motif ; que dans ses conclusions, M. [V] faisait valoir "l'impossibilité de replacer les parties dans leur état initial d'avant la cession du fait de la liquidation de la société Entreprise [V] à l'initiative de la demanderesse", et demandait par conséquent à la cour de condamner la SAS 2EI non pas à lui restituer lesdites parts, mais à lui payer la somme de 150 000 euros ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pertinent en ce qu'il aurait permis à M. [V] d'obtenir la restitution en valeur des parts sociales qui n'existaient plus, et en ordonnant la restitution des parts sociales de la SARL Entreprise [V] à M. [V], la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
9. M. [V] ayant demandé, non la restitution en valeur des parts sociales de la société Entreprise [V], mais des dommages-intérêts aux motifs qu'il avait été privé du prix de cession de ces parts, qu'il avait été évincé de son poste de gérant de la société Entreprise [V] et privé de son poste de responsable régional, contractuellement dû pendant une certaine durée, et que la société Entreprise [V] avait été pillée de ses actifs au profit de la société 2EI sans bourse délier, la cour d'appel, qui a retenu que la privation du prix de cession des parts n'était que la conséquence de l'annulation de la cession du fait des dissimulations auxquelles M. [V] s'était livré et ne pouvait donner lieu à indemnisation, que M. [V] ne démontrait pas que la société 2EI avait pillé la société Entreprise [V] de ses actifs ou avait tiré un quelconque bénéfice durant la période séparant la cession des parts de son annulation, et qu'il ne pouvait se prévaloir d'un engagement pris dans le cadre d'une convention annulée en raison de sa déloyauté, a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument délaissées.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
11. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « qu'en cas d'annulation d'une cession de parts sociales, si la restitution desdites parts consécutive à cette nullité est impossible, le cédant est en droit d'obtenir la restitution de la valeur qu'elles avaient au jour de la cession litigieuse ; qu'en ordonnant la restitution de parts sociales de l'entreprise [V] à M. [V], alors que la société avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire de sorte que les parts sociales n'existaient plus, la cour d'appel a violé les articles 1844-8 du code civil, L. 237-2 du code de commerce et 1234 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
12. Il résulte de l'article 1844-7, 7°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, ainsi que des articles 1844-8, alinéa 3, du même code et L. 237-2, alinéa 2, du code de commerce, que le jugement de liquidation judiciaire d'une société, s'il entraîne sa dissolution de plein droit, est sans effet sur sa personnalité morale, qui subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de la procédure, de sorte que, tant que cette publication n'est pas intervenue, les parts sociales composant son capital ont toujours une existence juridique et peuvent faire l'objet d'une restitution en nature.
13. Le moyen, qui soutient que la restitution en nature n'est plus possible en raison de la seule liquidation judiciaire de la société Entreprise [V], sans prétendre que la procédure avait été clôturée par un jugement publié, n'est pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] et la société [R] et associés, en qualité de liquidateur judiciaire de M. [V], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un avril deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen annexe produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. [V] et la société [R] et associés, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. [V].
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la convention de cession des parts de la SARL Entreprise [V] intervenue le 3 janvier 2013 entre Monsieur [E] [V] et la SARL 2E, devenue SAS 2EI, d'avoir en conséquence ordonné la restitution des parts sociales de la SARL Entreprise [V] à Monsieur [E] [V] et de l'avoir débouté de sa demande de paiement du prix ;
AUX MOTIFS QUE « la cession de parts sociales de la SARL Entreprise [V] par Monsieur [V] à la SARL 2EI sera en conséquence annulée en raison du dol imputable au cédant, la décision déférée étant confirmée sur ce point.
Sur les conséquences de l'annulation
Sur les restitutions
Les parties doivent être remises dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant cette exécution, ce qui implique d'une part l'annulation de la dette de la société 2EI à Monsieur [V] au titre du paiement du prix de 150 000 € et le rejet de sa demande en paiement, d'autre part, le retour des parts sociales de la SARL Entreprise [V] dans le patrimoine de ce dernier. La SA 2EI soutient que la restitution des parts sociales intervient en l'état dans lequel elles se trouvaient à la date de la cession, puisque la société était déjà en liquidation judiciaire. L'autorité de la chose jugée s'attachant à la fixation de la date de cessation des paiements au 30 septembre 2012 par le tribunal de commerce, n'a d'effet qu'à l'égard des parties qui ont été présentes ou représentées à l'audience et qui, dans la nouvelle instance, procèdent en la même qualité, et s'il y a entre les deux litiges identité de cause et d'objet. La cour n'est en conséquence pas tenue par la date de cessation des paiements fixée par le tribunal qui ouvre le redressement judiciaire de la société dont les parts ont été cédées, et Monsieur [V] est en droit de la contester nonobstant l'absence de tierce opposition. Toutefois, il a été relevé ci-dessus que la société [V] rencontrait de grosses difficultés à honorer ses engagements au cours du dernier trimestre 2012, qu'elle n'était pas à jour auprès de l'administration fiscale, des organismes sociaux, des caisses de retraite et de congés payés, et ne faisait pas face aux échéances. En outre ses comptes bancaires étaient débiteurs pour plus de 150 000 €, au 30 septembre comme au 31 décembre 2012, et des dettes restaient impayées malgré mises en demeures et menaces de procédures judiciaires. Bien qu'ayant été sollicité, Monsieur [V] n'a pas démontré l'existence de créances clients permettant de faire face au passif exigible, lui-même reconnaissant que certaines de ces créances étaient plus délicates à recouvrer. Dès lors, il n'y a pas lieu de remettre en cause la date de cessation des paiements telle que fixée par le tribunal de commerce. La SAS 2EI restitue donc à Monsieur [V] des parts d'une société en cessation des paiements, comme elles lui ont été vendues, la liquidation judiciaire ayant toutefois été depuis lors prononcée » ;
1°/ ALORS QUE la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en ordonnant en conséquence de la nullité de la cession des parts sociales de la SARL Entreprise [V], la restitution desdites parts à Monsieur [E] [V], alors que dans leurs dernières conclusions ni la société 2EI, ni Monsieur [V] n'avait formulé une telle demande, la cour d'appel a jugé au-delà des prétentions des parties et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE, subsidiairement, tout jugement doit être motivé à peine de nullité, le défaut de réponse à conclusions constituant un défaut de motif ; que dans ses conclusions, l'exposant faisait valoir « l'impossibilité de replacer les parties dans leur état initial d'avant la cession du fait de la liquidation de la Société Entreprise [V] à l'initiative de la demanderesse » (v. conclusions p. 26 et p. 46), et demandait par conséquent à la cour de condamner la SAS 2EI non pas à lui restituer desdites parts, mais à lui payer la somme de 150 000 euros ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pertinent en ce qu'il aurait permis à Monsieur [V] d'obtenir la restitution en valeur des parts sociales qui n'existaient plus, et en ordonnant la restitution des parts sociales de la SARL Entreprise [V] à Monsieur [V], la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3° / ALORS QUE subsidiairement, en cas d'annulation d'une cession de parts sociales, si la restitution desdites parts consécutive à cette nullité est impossible, le cédant est en droit d'obtenir la restitution de la valeur qu'elles avaient au jour de la cession litigieuse ; qu'en ordonnant la restitution de parts sociales de l'entreprise [V] à Monsieur [V], alors que la société avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire de sorte que les parts sociales n'existaient plus, la cour d'appel a violé les articles 1844-8 du code civil, L. 237-2 du Code de commerce et 1234 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.ECLI:FR:CCASS:2022:CO00287
COMM.
DB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 avril 2022
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 287 FS-B
Pourvoi n° N 20-10.809
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 21 AVRIL 2022
1°/ M. [E] [V], domicilié [Adresse 2],
2°/ la société [R] et associés, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [M] [R], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. [E] [V], ont formé le pourvoi n° N 20-10.809 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2018 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige les opposant à la société 2EI, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [V], de la société [R] et associés, ès qualités, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société 2EI, et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 mars 2022 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Ponsot, Mmes Fèvre, Ducloz, conseillers, M. Guerlot, Mmes de Cabarrus, Lion, Tostain, MM. Boutié, Gillis, Maigret, conseillers référendaires, M. Lecaroz, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse,17 janvier 2018), M. [V] a, par un acte du 3 janvier 2013, cédé l'intégralité des parts composant le capital de la SARL Entreprise [V] à la société 2E, devenue la société 2EI, moyennant un prix déterminé au vu d'un bilan arrêté au 30 septembre 2012.
2. La société Entreprise [V] a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, respectivement les 21 janvier et 18 février 2014.
3. Soutenant que la situation présentée par M. [V] ne correspondait pas à la réalité, la société 2EI l'a assigné en exécution de la garantie d'actif et de passif prévue par l'acte de cession et en paiement de dommages-intérêts puis a demandé principalement l'annulation de la cession et la remise des parties dans la situation où elles se trouvaient antérieurement ainsi que la condamnation de M. [V] à lui payer des dommages-intérêts.
4. Une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de M. [V], la société [R] et associés étant désignée liquidateur.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font grief à l'arrêt d'annuler la convention de cession de parts du 3 janvier 2013, d'ordonner, en conséquence, la restitution des parts à M. [V] et de rejeter la demande de paiement de prix de ce dernier, alors « que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en ordonnant en conséquence de la nullité de la cession des parts sociales de la SARL Entreprise [V], la restitution desdites parts à M. [V], alors que dans leurs dernières conclusions ni la société 2EI, ni M. [V] n'avait formulé une telle demande, la cour d'appel a jugé au-delà des prétentions des parties et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
6. La société 2EI ayant, dans le dispositif de ses conclusions, demandé à la cour d'appel de confirmer le jugement entrepris, notamment, en ce qu'il avait dit et jugé que les parties étaient remises dans leurs situations antérieures à la signature de l'acte de cession des parts du 3 janvier 2013, le grief manque en fait.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
8. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité, le défaut de réponse à conclusions constituant un défaut de motif ; que dans ses conclusions, M. [V] faisait valoir "l'impossibilité de replacer les parties dans leur état initial d'avant la cession du fait de la liquidation de la société Entreprise [V] à l'initiative de la demanderesse", et demandait par conséquent à la cour de condamner la SAS 2EI non pas à lui restituer lesdites parts, mais à lui payer la somme de 150 000 euros ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pertinent en ce qu'il aurait permis à M. [V] d'obtenir la restitution en valeur des parts sociales qui n'existaient plus, et en ordonnant la restitution des parts sociales de la SARL Entreprise [V] à M. [V], la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
9. M. [V] ayant demandé, non la restitution en valeur des parts sociales de la société Entreprise [V], mais des dommages-intérêts aux motifs qu'il avait été privé du prix de cession de ces parts, qu'il avait été évincé de son poste de gérant de la société Entreprise [V] et privé de son poste de responsable régional, contractuellement dû pendant une certaine durée, et que la société Entreprise [V] avait été pillée de ses actifs au profit de la société 2EI sans bourse délier, la cour d'appel, qui a retenu que la privation du prix de cession des parts n'était que la conséquence de l'annulation de la cession du fait des dissimulations auxquelles M. [V] s'était livré et ne pouvait donner lieu à indemnisation, que M. [V] ne démontrait pas que la société 2EI avait pillé la société Entreprise [V] de ses actifs ou avait tiré un quelconque bénéfice durant la période séparant la cession des parts de son annulation, et qu'il ne pouvait se prévaloir d'un engagement pris dans le cadre d'une convention annulée en raison de sa déloyauté, a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument délaissées.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
Et sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
11. M. [V] et la société [R] et associés, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors « qu'en cas d'annulation d'une cession de parts sociales, si la restitution desdites parts consécutive à cette nullité est impossible, le cédant est en droit d'obtenir la restitution de la valeur qu'elles avaient au jour de la cession litigieuse ; qu'en ordonnant la restitution de parts sociales de l'entreprise [V] à M. [V], alors que la société avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire de sorte que les parts sociales n'existaient plus, la cour d'appel a violé les articles 1844-8 du code civil, L. 237-2 du code de commerce et 1234 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
12. Il résulte de l'article 1844-7, 7°, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, ainsi que des articles 1844-8, alinéa 3, du même code et L. 237-2, alinéa 2, du code de commerce, que le jugement de liquidation judiciaire d'une société, s'il entraîne sa dissolution de plein droit, est sans effet sur sa personnalité morale, qui subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de la procédure, de sorte que, tant que cette publication n'est pas intervenue, les parts sociales composant son capital ont toujours une existence juridique et peuvent faire l'objet d'une restitution en nature.
13. Le moyen, qui soutient que la restitution en nature n'est plus possible en raison de la seule liquidation judiciaire de la société Entreprise [V], sans prétendre que la procédure avait été clôturée par un jugement publié, n'est pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] et la société [R] et associés, en qualité de liquidateur judiciaire de M. [V], aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un avril deux mille vingt-deux.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen annexe produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. [V] et la société [R] et associés, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. [V].
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la convention de cession des parts de la SARL Entreprise [V] intervenue le 3 janvier 2013 entre Monsieur [E] [V] et la SARL 2E, devenue SAS 2EI, d'avoir en conséquence ordonné la restitution des parts sociales de la SARL Entreprise [V] à Monsieur [E] [V] et de l'avoir débouté de sa demande de paiement du prix ;
AUX MOTIFS QUE « la cession de parts sociales de la SARL Entreprise [V] par Monsieur [V] à la SARL 2EI sera en conséquence annulée en raison du dol imputable au cédant, la décision déférée étant confirmée sur ce point.
Sur les conséquences de l'annulation
Sur les restitutions
Les parties doivent être remises dans l'état dans lequel elles se trouvaient avant cette exécution, ce qui implique d'une part l'annulation de la dette de la société 2EI à Monsieur [V] au titre du paiement du prix de 150 000 € et le rejet de sa demande en paiement, d'autre part, le retour des parts sociales de la SARL Entreprise [V] dans le patrimoine de ce dernier. La SA 2EI soutient que la restitution des parts sociales intervient en l'état dans lequel elles se trouvaient à la date de la cession, puisque la société était déjà en liquidation judiciaire. L'autorité de la chose jugée s'attachant à la fixation de la date de cessation des paiements au 30 septembre 2012 par le tribunal de commerce, n'a d'effet qu'à l'égard des parties qui ont été présentes ou représentées à l'audience et qui, dans la nouvelle instance, procèdent en la même qualité, et s'il y a entre les deux litiges identité de cause et d'objet. La cour n'est en conséquence pas tenue par la date de cessation des paiements fixée par le tribunal qui ouvre le redressement judiciaire de la société dont les parts ont été cédées, et Monsieur [V] est en droit de la contester nonobstant l'absence de tierce opposition. Toutefois, il a été relevé ci-dessus que la société [V] rencontrait de grosses difficultés à honorer ses engagements au cours du dernier trimestre 2012, qu'elle n'était pas à jour auprès de l'administration fiscale, des organismes sociaux, des caisses de retraite et de congés payés, et ne faisait pas face aux échéances. En outre ses comptes bancaires étaient débiteurs pour plus de 150 000 €, au 30 septembre comme au 31 décembre 2012, et des dettes restaient impayées malgré mises en demeures et menaces de procédures judiciaires. Bien qu'ayant été sollicité, Monsieur [V] n'a pas démontré l'existence de créances clients permettant de faire face au passif exigible, lui-même reconnaissant que certaines de ces créances étaient plus délicates à recouvrer. Dès lors, il n'y a pas lieu de remettre en cause la date de cessation des paiements telle que fixée par le tribunal de commerce. La SAS 2EI restitue donc à Monsieur [V] des parts d'une société en cessation des paiements, comme elles lui ont été vendues, la liquidation judiciaire ayant toutefois été depuis lors prononcée » ;
1°/ ALORS QUE la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ; qu'en ordonnant en conséquence de la nullité de la cession des parts sociales de la SARL Entreprise [V], la restitution desdites parts à Monsieur [E] [V], alors que dans leurs dernières conclusions ni la société 2EI, ni Monsieur [V] n'avait formulé une telle demande, la cour d'appel a jugé au-delà des prétentions des parties et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE, subsidiairement, tout jugement doit être motivé à peine de nullité, le défaut de réponse à conclusions constituant un défaut de motif ; que dans ses conclusions, l'exposant faisait valoir « l'impossibilité de replacer les parties dans leur état initial d'avant la cession du fait de la liquidation de la Société Entreprise [V] à l'initiative de la demanderesse » (v. conclusions p. 26 et p. 46), et demandait par conséquent à la cour de condamner la SAS 2EI non pas à lui restituer desdites parts, mais à lui payer la somme de 150 000 euros ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, pertinent en ce qu'il aurait permis à Monsieur [V] d'obtenir la restitution en valeur des parts sociales qui n'existaient plus, et en ordonnant la restitution des parts sociales de la SARL Entreprise [V] à Monsieur [V], la cour d'appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3° / ALORS QUE subsidiairement, en cas d'annulation d'une cession de parts sociales, si la restitution desdites parts consécutive à cette nullité est impossible, le cédant est en droit d'obtenir la restitution de la valeur qu'elles avaient au jour de la cession litigieuse ; qu'en ordonnant la restitution de parts sociales de l'entreprise [V] à Monsieur [V], alors que la société avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire de sorte que les parts sociales n'existaient plus, la cour d'appel a violé les articles 1844-8 du code civil, L. 237-2 du Code de commerce et 1234 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.