Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 30 mars 2022, 20-21.665, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 mars 2022




Cassation partielle


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 379 F-D

Pourvoi n° N 20-21.665




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 MARS 2022

Mme [W] [J], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 20-21.665 contre l'arrêt rendu le 9 septembre 2020 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans le litige l'opposant à la société UP, venant aux droits de la société Le Chèque Cadhoc, société coopérative de production à forme anonyme et capital variable, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [J], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société UP, après débats en l'audience publique du 8 février 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, M. Pion, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 septembre 2020), Mme [J] a été engagée à compter du 21 octobre 2013, par la société Chèque Cadhoc, aux droits de laquelle vient la société UP, en qualité de responsable du pôle « gestion des commandes ».

2. Elle a été licenciée le 10 septembre 2014 pour insuffisance professionnelle.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l'arrêt de limiter à la somme 10 000 euros le montant des dommages-intérêts que l'employeur a été condamné à lui payer au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors « que la pièce n° 32, versée aux débats par l'employeur, est le profil Linkedin de Mme [J] qui mentionne que d'octobre 2014 à février 2016, Mme [J] a réalisé une étude et effectué des démarches en vue de la reprise d'une entreprise, ce qui a consisté en des « négociations commerciales et promesses d'achat avec les cédants, études des bilans comptables, études de marché, réalisation du business plan, dépôt et présentation du projet auprès des organismes bancaires » ; qu'à supposer même que l'arrêt ait en réalité visé cette pièce, en affirmant qu'elle établissait que Mme [J] avait retrouvé un emploi depuis octobre 2014, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

4. Pour condamner l'employeur à payer à la salarié une somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient, au visa de la pièce 32, que la salariée a retrouvé un emploi depuis octobre 2014, soit un mois après son licenciement.

5. En statuant ainsi, alors que la pièce 32, profil Linkedin de la salariée, mentionne, qu'à compter d'octobre 2014, celle-ci a réalisé une étude et effectué des démarches en vue de la reprise d'une entreprise, et non qu'elle a retrouvé un emploi, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société UP à payer à Mme [J] la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal, l'arrêt rendu le 9 septembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la société UP aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société UP et la condamne à payer à Mme [J] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille vingt-deux.


MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme [J]


Mme [J] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme 10 000 € le montant des dommages et intérêts que la société UP, venant aux droits de la société Le Chèque Cadhoc, a été condamnée à lui payer au titre du licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

1°) ALORS QUE la pièce n° 32, versé aux débats par Mme [J], est un échange de courriels professionnels datés du 18 mars 2014 -soit antérieurement au licenciement notifié le 10 septembre 2014- entre Mme [J] et deux collègues de la société Chèque Cadhoc, Mme [S] [B] et Mme [O] [G], sur la gestion des commandes ; qu'en affirmant que la pièce n° 32 de Mme [J] établissait qu'elle avait retrouvé un emploi depuis octobre 2014, soit un mois après son licenciement, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

2°) ALORS QUE la pièce n° 32, versée aux débats par l'employeur, est le profil Linkedin de Mme [J] qui mentionne que d'octobre 2014 à février 2016, Mme [J] a réalisé une étude et effectué des démarches en vue de la reprise d'une entreprise, ce qui a consisté en des « négociations commerciales et promesses d'achat avec les cédants, études des bilans comptables, études de marché, réalisation du business plan, dépôt et présentation du projet auprès des organismes bancaires » ; qu'à supposer même que l'arrêt ait en réalité visé cette pièce, en affirmant qu'elle établissait que Mme [J] avait retrouvé un emploi depuis octobre 2014, la cour d'appel l'a dénaturée en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

3°) ALORS QUE pour établir l'étendue du préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi, Mme [J] a produit aux débats (pièce n° 200), une attestation, délivrée par Pôle emploi, de ses périodes d'inscription en continue comme demandeur d'emploi allant du 19 novembre 2014 au 18 mars 2018 ; elle a également produit (pièce n° 5) l'attestation Pôle emploi établi par son employeur mentionnant qu'elle avait effectué son préavis du 12 septembre 2014 au 10 novembre 2014 ; qu'en s'abstenant d'analyser, même sommairement, ces pièces qui établissaient que Mme [J] avait travaillé pour la société chèque Cadhoc jusqu'au 10 novembre 2014 et qu'elle n'avait pas retrouvé d'emploi à l'issue de son préavis de deux mois, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2022:SO00379
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