Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 26 janvier 2022, 21-81.052, Inédit
Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 26 janvier 2022, 21-81.052, Inédit
Cour de cassation - Chambre criminelle
- N° de pourvoi : 21-81.052
- ECLI:FR:CCASS:2022:CR00091
- Non publié au bulletin
- Solution : Rejet
Audience publique du mercredi 26 janvier 2022
Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, du 28 janvier 2021Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° J 21-81.052 F-D
N° 00091
SL2
26 JANVIER 2022
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 JANVIER 2022
M. [Z] [S] a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 45 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 28 janvier 2021, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de recel, a confirmé la décision de non-restitution du bien saisi prise par le procureur de la République.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Ascensi, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [Z] [S], et les conclusions de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 24 octobre 2018, le tribunal correctionnel a déclaré M. [Z] [S] coupable de recel de bien provenant d'un délit puni d'une peine n'excédant pas cinq ans d'emprisonnement et l'a condamné à la peine de seize mois d'emprisonnement et au paiement d'une amende de 1 500 euros.
3. Le tribunal l'a par ailleurs relaxé pour les faits de transport, détention, offre ou cession, acquisition non autorisés de produits stupéfiants pour lesquels il avait également été poursuivi.
4. Le tribunal a en outre ordonné la confiscation des scellés, sans cependant statuer sur la restitution des sommes d'argent inscrites sur trois comptes bancaires dont le prévenu était titulaire à la Caisse d'Epargne, pour un montant de 66 907 euros, et qui avaient été saisies au cours de l'enquête par ordonnance du juge des libertés et de la détention.
5. Le 29 mars 2019, le conseil du prévenu a saisi le procureur de la République d'une requête aux fins de restitution de ces sommes d'argent.
6. Par décision du 7 novembre 2019, le procureur de la République a rejeté cette demande.
7. M. [S] a déféré la décision de non-restitution à la chambre de l'instruction.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
8. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
9. Le moyen, en ses deuxième et troisième branches, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à restitution, alors :
« 2°/ que lorsque la requête aux fins de restitution est présentée après que la juridiction de jugement saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice, la non-restitution du produit de l'infraction ne saurait présenter un caractère obligatoire ; qu'en retenant que « la somme totale de 66.907 euros saisie sur les comptes qu'il a alimentés constitue donc le produit direct de l'infraction pour laquelle [Z] [S] a été condamné » et « ne saurait en conséquence être restituée », la chambre de l'instruction, qui s'est estimée tenue de rejeter la demande de restitution, a violé l'article 41-4 du code de procédure pénale ;
3°/ que, hormis le cas où le bien saisi constitue, dans sa totalité, l'objet ou le produit de l'infraction ou la valeur de ceux-ci, le juge qui en refuse la restitution, doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte ainsi portée au droit de propriété de l'intéressé, au regard de la situation personnelle de ce dernier et de la gravité concrète des faits, lorsque, comme en l'espèce, une telle garantie est invoquée ; qu'en se déterminant par des motifs impropres ou insuffisants à établir que les sommes dont la restitution était demandée constituait en totalité le produit ou la valeur de l'infraction de recel dont M. [S] avait été déclaré coupable, la chambre de l'instruction a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
10. Aux termes de l'article 41-4 du code de procédure pénale, au cours de l'enquête ou lorsqu'aucune juridiction n'a été saisie ou que la juridiction saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice, le procureur de la République ou le procureur général est compétent pour décider, d'office ou sur requête, de la restitution de ces objets lorsque la propriété n'en est pas sérieusement contestée.
11. Le texte ajoute qu'il n'y a pas lieu à restitution notamment lorsque le bien saisi est le produit direct ou indirect de l'infraction.
12. Cependant, l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal ne prévoit pas que la peine complémentaire de confiscation du produit de l'infraction présente un caractère obligatoire.
13. Par ailleurs, selon l'article 485-1 du code de procédure pénale, la confiscation du produit de l'infraction n'a pas à être motivée.
14. Enfin, en application de l'article 481, alinéa 3, du code de procédure pénale, le refus de restitution d'un bien saisi constituant l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction est une simple faculté pour la juridiction saisie (Crim., 27 juin 2018, pourvoi n° 17-87.424, Bull. crim. 2018, n° 129).
15. Il s'en déduit le principe suivant. Lorsque la requête aux fins de restitution est présentée après que la juridiction de jugement saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice, la non-restitution du produit de l'infraction ne saurait présenter un caractère obligatoire, mais constitue une simple faculté.
16. Pour dire n'y avoir lieu à restitution, l'arrêt retient qu'il résulte de la procédure que M. [S] disposait le 17 juillet 2015 d'un capital de 121 435,07 euros alors qu'il avait déclaré un revenu de 10 776 euros en 2014, qu'il a déclaré lors de sa garde à vue et confirmé lors de son interrogatoire au fond qu'il était employé par la pharmacie de M. [D] [X] pour un salaire de 1 096 euros depuis avril 2014, mais que les salariés de la pharmacie ont expliqué qu'il y était employé alors qu'il n'était pas titulaire du diplôme de préparateur en pharmacie et n'accomplissait pas les 35 heures de travail prévues à son contrat.
17. Les juges ajoutent que M. [S] a soutenu que M. [X] lui avait prêté la somme de 100 000 euros, versés par fractions de 5 000 euros jusqu'en juillet 2015 pour un projet immobilier, que M. [X] a confirmé lui avoir versé plus de 100 000 euros, mais a aussi expliqué qu'il s'agissait d'un remboursement de sommes que son employé lui avait prêtées en espèces et qu'il avait établi une attestation mensongère pour justifier la remise de 13 500 euros à M. [S].
18. Ils précisent que M. [S] a été condamné pour recel d'un délit puni de cinq ans d'emprisonnement au vu de ces éléments et qu'il résulte ainsi de la procédure que ce recel avait pour objet les sommes dont ses comptes et celui au nom de son père avaient été créditées, après lui avoir été remises par M. [X], personnellement ou par l'intermédiaire de sa société.
19. Ils en déduisent que la somme totale de 66 907 euros saisie sur les comptes de M. [S] constitue le produit direct de l'infraction pour laquelle ce dernier a été condamné, qu'il est indifférent qu'il ait été relaxé des autres infractions pour lesquelles il était poursuivi et que cette somme ne saurait en conséquence être restituée.
20. En l'état des ces motifs, procédant de son appréciation souveraine, la chambre de l'instruction, qui a, d'une part, établi que les sommes objet de la demande de restitution constituaient dans leur totalité le produit de l'infraction dont M. [S] a été déclaré coupable, d'autre part, exercé la faculté qu'elle tient des dispositions de l'article 41-4 du code de procédure pénale de ne pas lui restituer ce produit, a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen.
21. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.
22. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-six janvier deux mille vingt-deux.ECLI:FR:CCASS:2022:CR00091
N° J 21-81.052 F-D
N° 00091
SL2
26 JANVIER 2022
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 JANVIER 2022
M. [Z] [S] a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 45 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 28 janvier 2021, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de recel, a confirmé la décision de non-restitution du bien saisi prise par le procureur de la République.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Ascensi, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [Z] [S], et les conclusions de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 24 octobre 2018, le tribunal correctionnel a déclaré M. [Z] [S] coupable de recel de bien provenant d'un délit puni d'une peine n'excédant pas cinq ans d'emprisonnement et l'a condamné à la peine de seize mois d'emprisonnement et au paiement d'une amende de 1 500 euros.
3. Le tribunal l'a par ailleurs relaxé pour les faits de transport, détention, offre ou cession, acquisition non autorisés de produits stupéfiants pour lesquels il avait également été poursuivi.
4. Le tribunal a en outre ordonné la confiscation des scellés, sans cependant statuer sur la restitution des sommes d'argent inscrites sur trois comptes bancaires dont le prévenu était titulaire à la Caisse d'Epargne, pour un montant de 66 907 euros, et qui avaient été saisies au cours de l'enquête par ordonnance du juge des libertés et de la détention.
5. Le 29 mars 2019, le conseil du prévenu a saisi le procureur de la République d'une requête aux fins de restitution de ces sommes d'argent.
6. Par décision du 7 novembre 2019, le procureur de la République a rejeté cette demande.
7. M. [S] a déféré la décision de non-restitution à la chambre de l'instruction.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
8. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
9. Le moyen, en ses deuxième et troisième branches, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à restitution, alors :
« 2°/ que lorsque la requête aux fins de restitution est présentée après que la juridiction de jugement saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice, la non-restitution du produit de l'infraction ne saurait présenter un caractère obligatoire ; qu'en retenant que « la somme totale de 66.907 euros saisie sur les comptes qu'il a alimentés constitue donc le produit direct de l'infraction pour laquelle [Z] [S] a été condamné » et « ne saurait en conséquence être restituée », la chambre de l'instruction, qui s'est estimée tenue de rejeter la demande de restitution, a violé l'article 41-4 du code de procédure pénale ;
3°/ que, hormis le cas où le bien saisi constitue, dans sa totalité, l'objet ou le produit de l'infraction ou la valeur de ceux-ci, le juge qui en refuse la restitution, doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte ainsi portée au droit de propriété de l'intéressé, au regard de la situation personnelle de ce dernier et de la gravité concrète des faits, lorsque, comme en l'espèce, une telle garantie est invoquée ; qu'en se déterminant par des motifs impropres ou insuffisants à établir que les sommes dont la restitution était demandée constituait en totalité le produit ou la valeur de l'infraction de recel dont M. [S] avait été déclaré coupable, la chambre de l'instruction a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
10. Aux termes de l'article 41-4 du code de procédure pénale, au cours de l'enquête ou lorsqu'aucune juridiction n'a été saisie ou que la juridiction saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice, le procureur de la République ou le procureur général est compétent pour décider, d'office ou sur requête, de la restitution de ces objets lorsque la propriété n'en est pas sérieusement contestée.
11. Le texte ajoute qu'il n'y a pas lieu à restitution notamment lorsque le bien saisi est le produit direct ou indirect de l'infraction.
12. Cependant, l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal ne prévoit pas que la peine complémentaire de confiscation du produit de l'infraction présente un caractère obligatoire.
13. Par ailleurs, selon l'article 485-1 du code de procédure pénale, la confiscation du produit de l'infraction n'a pas à être motivée.
14. Enfin, en application de l'article 481, alinéa 3, du code de procédure pénale, le refus de restitution d'un bien saisi constituant l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction est une simple faculté pour la juridiction saisie (Crim., 27 juin 2018, pourvoi n° 17-87.424, Bull. crim. 2018, n° 129).
15. Il s'en déduit le principe suivant. Lorsque la requête aux fins de restitution est présentée après que la juridiction de jugement saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des objets placés sous main de justice, la non-restitution du produit de l'infraction ne saurait présenter un caractère obligatoire, mais constitue une simple faculté.
16. Pour dire n'y avoir lieu à restitution, l'arrêt retient qu'il résulte de la procédure que M. [S] disposait le 17 juillet 2015 d'un capital de 121 435,07 euros alors qu'il avait déclaré un revenu de 10 776 euros en 2014, qu'il a déclaré lors de sa garde à vue et confirmé lors de son interrogatoire au fond qu'il était employé par la pharmacie de M. [D] [X] pour un salaire de 1 096 euros depuis avril 2014, mais que les salariés de la pharmacie ont expliqué qu'il y était employé alors qu'il n'était pas titulaire du diplôme de préparateur en pharmacie et n'accomplissait pas les 35 heures de travail prévues à son contrat.
17. Les juges ajoutent que M. [S] a soutenu que M. [X] lui avait prêté la somme de 100 000 euros, versés par fractions de 5 000 euros jusqu'en juillet 2015 pour un projet immobilier, que M. [X] a confirmé lui avoir versé plus de 100 000 euros, mais a aussi expliqué qu'il s'agissait d'un remboursement de sommes que son employé lui avait prêtées en espèces et qu'il avait établi une attestation mensongère pour justifier la remise de 13 500 euros à M. [S].
18. Ils précisent que M. [S] a été condamné pour recel d'un délit puni de cinq ans d'emprisonnement au vu de ces éléments et qu'il résulte ainsi de la procédure que ce recel avait pour objet les sommes dont ses comptes et celui au nom de son père avaient été créditées, après lui avoir été remises par M. [X], personnellement ou par l'intermédiaire de sa société.
19. Ils en déduisent que la somme totale de 66 907 euros saisie sur les comptes de M. [S] constitue le produit direct de l'infraction pour laquelle ce dernier a été condamné, qu'il est indifférent qu'il ait été relaxé des autres infractions pour lesquelles il était poursuivi et que cette somme ne saurait en conséquence être restituée.
20. En l'état des ces motifs, procédant de son appréciation souveraine, la chambre de l'instruction, qui a, d'une part, établi que les sommes objet de la demande de restitution constituaient dans leur totalité le produit de l'infraction dont M. [S] a été déclaré coupable, d'autre part, exercé la faculté qu'elle tient des dispositions de l'article 41-4 du code de procédure pénale de ne pas lui restituer ce produit, a justifié sa décision sans méconnaître les textes visés au moyen.
21. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.
22. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-six janvier deux mille vingt-deux.