Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 septembre 2021, 20-13.961, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 septembre 2021




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président



Arrêt n° 1033 F-D

Pourvoi n° P 20-13.961




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 SEPTEMBRE 2021

La société Vinci énergies France Infras Méditerranée Centre Est, société par actions simplifiée unipersonnelle, venant aux droits de la société Cegelec Sud-Est, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 20-13.961 contre l'arrêt rendu le 12 décembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-5), dans le litige l'opposant à M. [O] [N], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Vinci énergies France Infras Méditerranée Centre Est, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [N], après débats en l'audience publique du 23 juin 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 décembre 2019), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 5 décembre 2018, pourvoi n° 17-11.223), M. [N] a été engagé par la société Vinci énergies France Infras Méditerranée (la société) le 17 mai 2000. Il a été élu conseiller prud'homal à compter de 2002.

2. Le 4 septembre 2006, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes de rappel de salaire, puis, par conclusions additionnelles du 18 janvier 2007, d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

3. Convoqué le 4 décembre 2006 à un entretien préalable à son licenciement, le salarié a été licencié pour faute grave, après autorisation de l'inspection du travail, le 23 février 2007. Par jugement du 26 janvier 2010, le tribunal administratif a annulé l'autorisation de licenciement et l'annulation a été confirmée par décision de la cour administrative d'appel le 29 mai 2012.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt d'infirmer partiellement le jugement en ce qu'il rejette la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié et ses demandes indemnitaires subséquentes et, statuant à nouveau, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur au 23 février 2017, de dire que la résiliation produit les effets d'un licenciement nul et de condamner la société à payer au salarié certaines sommes à titre de dommages-intérêts pour violation du statut protecteur, à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul et à titre d'indemnités de préavis, alors « que le contrat de travail du salarié protégé, licencié sur le fondement d'une autorisation administrative ensuite annulée et qui ne demande pas sa réintégration, est rompu par l'effet du licenciement ; que lorsque l'annulation est devenue définitive, le salarié a droit, d'une part, en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, au paiement d'une indemnité égale à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation, d'autre part, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre, et de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que ces dispositions font obstacle à ce que la juridiction prud'homale se prononce sur la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié protégé, même si sa saisine est antérieure à la rupture ; qu'en ayant prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N], la cour d'appel a violé les articles L. 2422-4, L. 2411-1 et L. 2411-22 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2422-4, L. 2411-1 et L. 2411-22 du code du travail, et l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause :

5. Le contrat de travail du salarié protégé, licencié sur le fondement d'une autorisation administrative ensuite annulée, et qui ne demande pas sa réintégration, est rompu par l'effet du licenciement. Lorsque l'annulation de l'autorisation de licenciement est devenue définitive, le salarié a droit, d'une part, en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, au paiement d'une indemnité égale à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation, d'autre part, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre, et de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il en résulte que la juridiction prud'homale ne peut se prononcer sur la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié protégé, même si sa saisine est antérieure à la rupture.

6. Pour prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur, la cour d'appel, après avoir énoncé que si la procédure de licenciement du salarié protégé est d'ordre public, celui-ci ne saurait être privé de la possibilité de poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, dont bénéficie par ailleurs le salarié non protégé, sous peine d'instaurer une inégalité de traitement entre ces deux catégories de salariés, relève qu'en demandant au salarié de ne pas assurer de remplacement d'autres conseillers prud'homaux et de "respecter le rôle en début d'année judiciaire", l'employeur a interféré dans le cadre de l'exercice du mandat prud'homal, ce qui caractérise une entrave et un manquement rendant impossible la poursuite du contrat de travail, justifiant dès lors la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur.
7. En statuant ainsi, alors que le contrat de travail avait été rompu par l'effet du licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N] et condamne la société au paiement d'une somme de 116 100 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, 50 000 euros pour licenciement nul, 11 610 euros à titre d'indemnité de préavis, et 1 161 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 12 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remets, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt, et les renvoie devant la la cour d'appel de Nîmes ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Vinci énergies France Infras Méditerranée Centre Est ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Vinci énergies France Infras Méditerranée Centre Est

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé partiellement le jugement en ce qu'il avait rejeté la demande de résiliation judiciaire formée par M. [N] et ses demandes indemnitaires subséquentes et, statuant à nouveau, d'avoir prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N] aux torts exclusifs de l'employeur au 23 février 2017, d'avoir dit que la résiliation produit les effets d'un licenciement nul et d'avoir condamné la société Vinci Energies Infras Méditerranée Centre Est à payer à M. [N] les sommes de 116 100 € à titre de dommages-intérêts pour violation du statut protecteur, 50 000 € à titre de dommages-intérêts licenciement nul, 11 610 € à titre d'indemnité de préavis, les congés payés y afférents, outre 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs que sur la résiliation judiciaire, en application des articles 1184 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 recodifié aux articles 1224 et suivants du code civil, et L. 1231-1 et 1222-1 du code du travail, le salarié peut demander la résiliation judiciaire du contrat de travail en cas d'inexécution par l'employeur des obligations découlant du contrat ; que les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être établis par le salarié et d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu'en présence d'un salarié protégé, la demande de résiliation judiciaire peut être fondée, non seulement sur un manquement aux obligations contractuelles de l'employeur, mais également sur une atteinte aux fonctions représentatives qui produit alors les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur lorsque les faits évoqués par le salarié la justifiaient, soit, dans le cas contraire, les effets d'une démission ; qu'en l'espèce, M. [N] a saisi la juridiction prud'homale le 4 septembre 2006 aux fins de rappel de salaire et étendu ses prétentions suivant conclusions du 18 janvier 2007 à la demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, au motif d'une atteinte portée à l'exécution de son mandat de conseiller prud'homal ; qu'il a entretemps été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 4 décembre 2006 et par suite licencié pour faute grave le 23 février 2007 ; que l'employeur formule devant la présente cour de nouveaux moyens à l'appui de ses contestations ; que la société fait valoir qu'il est établi que lorsque le licenciement du salarié protégé est autorisé par l'administration et prononcé par l'employeur, alors que l'action en résiliation judiciaire est en cours, le juge judiciaire ne peut plus se prononcer sur la demande de résiliation judiciaire, au nom du principe de séparation des pouvoirs, et peu important que la demande de résiliation judiciaire soit antérieure au licenciement ;

que toutefois, si la procédure de licenciement du salarié protégé est d'ordre public, le salarié protégé ne saurait être privé de la possibilité de poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, dont bénéficie par ailleurs le salarié non protégé, sous peine d'instaurer une inégalité de traitement entre ces deux catégories de salariés ; qu'elle ajoute que le contrôle de la qualification des faits relève de l'appréciation souveraine des juges du fond, lesquels, après avoir constaté les faits soumis à leur analyse ont régulièrement considéré qu'ils ne constituaient pas un manquement de l'employeur suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur, qu'en décidant que la cour d'appel aurait dû constater l'existence d'une entrave à l'exercice des fonctions de conseiller prud'homal de M. [N], la Cour de cassation a apprécié la qualification des faits, excédant ainsi son devoir de statuer uniquement en droit ; que dans l'hypothèse où l'action en résiliation judiciaire du contrat de travail serait accueillie, la Cour devra, « relever que la Cour de cassation a outrepassé son devoir de statuer sur le droit en se prononçant sur la qualification des faits qui relevait du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond » ; que si le contrôle de la qualification des faits relève de l'appréciation souveraine des juges du fond, la Cour de cassation s'autorise à exercer un contrôle minimum de la qualification retenue par les juges du fond, pouvant être appelée à sanctionner notamment les erreurs d'appréciation manifeste ; qu'en l'espèce, le contrôle exercé par la Cour suprême a été limité à la stricte appréciation du point de savoir si les manquements invoqués étaient bien de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail ; que les moyens non fondés seront écartés ; que sur la demande aux fins de résiliation judiciaire, l'article L. 1443-1 du code du travail dispose : « Le fait de porter atteinte ou de tenter de porter atteinte soit à la libre désignation à la nomination des conseillers prud'hommes, soit à l'indépendance ou à l'exercice régulier des fonctions de conseiller prud'hommes, notamment par méconnaissance des articles L. 1442-2,L. 1442-5 à L. 1442-7 et L. 1442-10, est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3.750 euros » ; que l'article L. 1442-5 du code précité énonce : « les employeurs laissent aux salariés de leur entreprise, membres d'un conseil de prud'hommes, le temps nécessaire pour se rendre et participer aux activités prud'homales » réglementairement définies ; qu'il s'en suit que l'employeur est tenu d'assurer au salarié l'exercice régulier de ses fonctions de conseiller prud'homal ; qu'en l'espèce, par courriel du 22 septembre 2006, la directrice des ressources humaines, a demandé à M. [N] « de ne pas assurer de remplacement d'autres conseillers et de respecter le « rôle » en début d'année judiciaire » ; qu'une telle décision, ayant pour finalité en définitive d'interférer dans le cadre de l'exercice du mandat prud'homal en demandant au salarié de refuser d'effectuer le remplacement de conseillers absents, caractérise une entrave au mandat de conseiller prud'hommes du salarié et un manquement rendant impossible la poursuite du contrat de travail, justifiant dès lors la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'employeur ; que le jugement sera en conséquence infirmé de ce chef ; que sur les conséquences indemnitaires, sur la violation du statut protecteur, M. [N] sollicite la somme de 161 200 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, représentant le montant de sa rémunération entre son éviction et l'expiration de la période de protection, additionnée des six mois après l'expiration du mandat, soit le 2 juin 2009 ;

que la SASU fait valoir que M. [N] a déjà été indemnisé au titre de la rupture de son contrat de travail des suites de l'annulation de l'autorisation administrative de son licenciement, laquelle a emporté sa condamnation à lui verser la somme de 7740 euros à titre d'indemnité en réparation de son préjudice correspondant aux salaires qu'il aurait perçus entre son licenciement et l'expiration d'un délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation, après déduction des salaires perçus dans le cadre de son nouvel emploi pendant cette période, que cette condamnation non cassée par l'arrêt de la Cour de cassation du 5 décembre 2018, est devenue définitive et M. [N] ne saurait obtenir une double indemnisation dans le cadre d'une double rupture de son contrat de travail ; qu'en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, le salarié protégé dont la demande d'autorisation de licenciement a été annulée par une décision devenue définitive a droit à l'indemnisation du préjudice subi pour la période écoulée entre le licenciement et l'expiration du délai de 2 mois suivant la notification de la décision d'annulation : que retenant que M. [N] avait retrouvé un emploi à compter du 1er avril 2007, la Cour, dans son arrêt du novembre 2016, lui a alloué en réparation de son préjudice une somme de 7740 euros correspondant aux salaires non perçus pour les mois de février et mars 2007 ; que ladite indemnisation diffère de celle demandée en ce qu'elle a pour objet de réparer le préjudice subi du fait de l'annulation ; que le moyen sera en conséquence rejeté ; que M. [N] ne peut toutefois prétendre qu'au paiement d'une somme égale à la rémunération qu'il aurait dû percevoir depuis son licenciement jusqu'à l'expiration de la période de protection résultant du mandat en cours à la date de la demande, dans la limite d'une durée de 2 ans (durée minimale légale du mandat de représentants élus du personnel) augmentée de 6 mois, soit 30 mois ; qu'il sera en conséquence alloué à M. [N] la somme de 116 100 euros à titre de dommages et intérêts ; que sur les dommages et intérêts pour licenciement nul, M. [N] sollicite une somme de 74 000 euros ; que la Sasu fait valoir que cette demande est infondée, dès lors qu'en sus de l'indemnité prévue à l'article L. 2422-4 du code du travail, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ne peut être allouée au salarié que « s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'en l'espèce, le licenciement de reposait sur une cause réelle et sérieuse ; qu'en tout état de cause, le salarié ne justifie d'aucun préjudice particulier ; que sa demande résultant de la résiliation judiciaire de son contrat de travail, laquelle produit les effets d'un licenciement nul en raison de la violation du statut protecteur, est toutefois fondée ; que compte tenu de l'ancienneté dans l'entreprise de M. [N], soit sept ans, alors qu'il était âgé de 46 ans, de la rémunération qu'il percevait, soit 3870 euros, de sa situation au regard de l'emploi postérieurement à la rupture du contrat de travail, les éléments du dossier permettant de relever qu'il a occupé un emploi à compter d'avril 2007, il convient de lui allouer une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ; que sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents, il sollicite la somme de 11 610 euros à titre d'indemnité de préavis outre celle de 1161 euros au titre des congés payés y afférents ; que la Sasu explique que M. [N] était tenu d'exécuter son préavis suite à la notification de son licenciement au mois de février 2007, que par courrier du 30 mars 2007, il a indiqué qu'il refusait de l'effectuer, au motif qu'il serait « dénué de cause « en l'état de sa demande de résiliation judiciaire antérieure, que par courrier du avril 2007, elle lui rappelait que sa demande de résiliation judiciaire soumise à l'appréciation du juge n'emportait pas en soi rupture de la relation contractuelle et qu'il restait tenu des obligations découlant de son contrat de travail ; qu'au regard des circonstances de l'espèce, le préavis non exécuté, est indemnisable ; qu'il sera en conséquence alloué les sommes demandées ;

Alors que le contrat de travail du salarié protégé, licencié sur le fondement d'une autorisation administrative ensuite annulée et qui ne demande pas sa réintégration, est rompu par l'effet du licenciement ; que lorsque l'annulation est devenue définitive, le salarié a droit, d'une part, en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, au paiement d'une indemnité égale à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation, d'autre part, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre, et de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que ces dispositions font obstacle à ce que la juridiction prud'homale se prononce sur la demande de résiliation judiciaire formée par le salarié protégé, même si sa saisine est antérieure à la rupture ; qu'en ayant prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [N], la cour d'appel a violé les articles L. 2422-4, L. 2411-1 et L. 2411-22 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.




DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

(Subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Vinci Energies Infras Méditerranée Centre Est à payer à M. [N] la somme de 116 100 € à titre de dommagesintérêts pour violation du statut protecteur ;

Aux motifs que sur la violation du statut protecteur, M. [N] sollicite la somme de 161 200 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur, représentant le montant de sa rémunération entre son éviction et l'expiration de la période de protection, additionnée des six mois après l'expiration du mandat, soit le 2 juin 2009 ; que la SASU fait valoir que M. [N] a déjà été indemnisé au titre de la rupture de son contrat de travail des suites de l'annulation de l'autorisation administrative de son licenciement, laquelle a emporté sa condamnation à lui verser la somme de 7 740 euros à titre d'indemnité en réparation de son préjudice correspondant aux salaires qu'il aurait perçus entre son licenciement et l'expiration d'un délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation, après déduction des salaires perçus dans le cadre de son nouvel emploi pendant cette période, que cette condamnation non cassée par l'arrêt de la Cour de cassation du 5 décembre 2018, est devenue définitive et M. [N] ne saurait obtenir une double indemnisation dans le cadre d'une double rupture de son contrat de travail ; qu'en application de l'article L. 2422-4 du code du travail, le salarié protégé dont la demande d'autorisation de licenciement a été annulée par une décision devenue définitive a droit à l'indemnisation du préjudice subi pour la période écoulée entre le licenciement et l'expiration du délai de 2 mois suivant la notification de la décision d'annulation : que retenant que M. [N] avait retrouvé un emploi à compter du 1er avril 2007, la Cour, dans son arrêt du 25 novembre 2016, lui a alloué en réparation de son préjudice une somme de 7740 euros correspondant aux salaires non perçus pour les mois de février et mars 2007 ; que ladite indemnisation diffère de celle demandée en ce qu'elle a pour objet de réparer le préjudice subi du fait de l'annulation ; que le moyen sera en conséquence rejeté ; que M. [N] ne peut toutefois prétendre qu'au paiement d'une somme égale à la rémunération qu'il aurait dû percevoir depuis son licenciement jusqu'à l'expiration de la période de protection résultant du mandat en cours à la date de la demande, dans la limite d'une durée de 2 ans (durée minimale légale du mandat de représentants élus du personnel) augmentée de 6 mois, soit 30 mois ; qu'il sera en conséquence alloué à M. [N] la somme de 116 100 euros à titre de dommages et intérêts ;

Alors que sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé ; que l'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation ; qu'en l'espèce, l'arrêt du 25 novembre 2016 avait déjà indemnisé M. [N] des suites de l'annulation de l'autorisation administrative de son licenciement, en condamnant l'employeur à lui payer une somme de 7 740 euros à titre d'indemnité en réparation du préjudice correspondant aux salaires qu'il aurait perçus entre son licenciement et l'expiration d'un délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation après déduction des salaires perçus dans le cadre de son nouvel emploi pendant cette période ; que cette condamnation est devenue définitive, l'arrêt du 25 novembre 2016 ayant été cassé « seulement en ce qu'il déboute M. [N] de ses demandes de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur et de condamnation en conséquence de la société Vinci énergie infra méditerranée à lui payer les sommes de 74 400 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive, 18 600 euros à titre de préavis, 1 860 euros à titre de congés payés sur préavis et 12 778 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ; que la cour d'appel de renvoi, en statuant sur la demande de M. [N] en paiement de dommagesintérêts pour violation du statut protecteur, a excédé ses pouvoirs et violé les articles 625 et 638 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

(Subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Vinci Energies Infras Méditerranée Centre Est à payer à M. [N] la somme de 11 610 € à titre d'indemnité de préavis, outre les congés payés y afférents ;

Aux motifs que l'employeur explique que M. [N] était tenu d'exécuter son préavis à la suite de la notification de son licenciement en février 2007, que par courrier du 30 mars 2007, il a indiqué qu'il refusait de l'effectuer au motif qu'il serait « dénué de cause » en l'état de sa demande de résiliation judiciaire antérieure ; que par courrier du 11 avril 2007, la société lui rappelait que sa demande de résiliation judiciaire soumise à l'appréciation du juge n'emportait pas en soi rupture de la relation contractuelle et qu'il restait tenu des obligations découlant de son contrat de travail ; qu'au vu des circonstances de l'espèce, le préavis non exécuté est indemnisable ; qu'il sera en conséquence alloué les sommes demandées ;

Alors 1°) que le juge ne peut statuer par voie d'affirmation et doit motiver sa décision ; qu'en affirmant qu'« au vu des circonstances de l'espèce, le préavis non exécuté est indemnisable », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Alors 2°) et en tout état de cause, qu'en cas d'inexécution du préavis par le salarié, l'employeur n'est tenu au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis que lorsqu'il a unilatéralement décidé de dispenser le salarié d'exécuter sa prestation de travail ou lorsque cette inexécution lui est imputable ; qu'en l'espèce pour condamner l'employeur à payer l'indemnité de préavis à M. [N], l'arrêt a retenu qu' « au vu des circonstances de l'espèce, le préavis non exécuté est indemnisable » ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'il était acquis que le salarié, qui n'avait pas été dispensé de l'exécution du préavis, avait refusé de l'effectuer, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que cette situation était imputable à l'employeur, a violé l'article L. 1234-5 du code du travail.ECLI:FR:CCASS:2021:SO01033
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