Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 22 septembre 2021, 19-12.538, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 septembre 2021




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 1046 FP-B sur le 1er moyen

Pourvoi n° W 19-12.538






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 SEPTEMBRE 2021

L'Association tutélaire des Hautes-Pyrénées (AT 65), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 19-12.538 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [R] [O], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'Association tutélaire des Hautes-Pyrénées AT 65, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [O], les plaidoiries de Me Célice, et celles de Me Grévy, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 juin 2021 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Pion, Ricour, Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, conseillers, Mmes Duvallet, Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application des articles R. 421-4-1 et R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 20 décembre 2018), M. [O], engagé par l'Association tutélaire des Hautes-Pyrénées AT 65, suivant contrat du 2 juin 2008, en qualité de directeur, a fait l'objet le 16 mars 2015 d'une sanction disciplinaire constituée par une lettre d'observation puis a été licencié pour faute grave le 20 novembre 2015.

2. Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'annulation de la sanction disciplinaire constituée par la lettre d'observation et de reconnaissance de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler la sanction disciplinaire constituée par la lettre d'observation prononcée le 16 mars 2015 et de le condamner à payer au salarié des dommages-intérêts à ce titre, alors :

« 1°/ que selon l'article L. 1332-2 du code du travail ‘'lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié'‘ ; que l'article 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 énumère les sanctions disciplinaires applicables au sein de la branche, au nombre desquelles figure ‘'l'observation'‘, sanction la plus basse susceptible d'être infligée ; que cette sanction n'ayant pas, en elle-même, d'incidence, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, elle n'a pas à être précédée d'un entretien préalable, peu important que tout licenciement disciplinaire soit conditionné par l'article 33 de la convention au prononcé préalable d'au moins deux sanctions ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 et L. 1332-2 du code du travail ;

2°/ qu'en toute hypothèse, le défaut d'entretien préalable à une mesure de sanction disciplinaire, pouvant aller jusqu'au licenciement, constitue un simple vice de procédure qui n'entache pas en lui-même de nullité la sanction disciplinaire régulièrement notifiée au salarié ; qu'à le supposer obligatoire, l'absence d'entretien préalablement à la notification de l'observation disciplinaire faite à M. [O] constituait tout au plus, en conséquence, une irrégularité de procédure qui n'entachait pas la sanction de nullité ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a derechef violé les articles 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 et L. 1332-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. D'abord, il résulte de l'article L. 1332-2 du code du travail que si l'employeur n'est en principe pas tenu de convoquer un salarié à un entretien avant de lui notifier un avertissement ou une sanction de même nature, il en va autrement lorsque, au regard des dispositions d'une convention collective, la sanction peut avoir une influence sur le maintien du salarié dans l'entreprise. Tel est le cas lorsque la convention collective, instituant une garantie de fond, subordonne le licenciement d'un salarié à l'existence de deux sanctions antérieures.

6. Ensuite, la cour d'appel n'a fait qu'user du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1333-2 du code du travail en décidant que l'irrégularité de la sanction disciplinaire justifiait son annulation.

7. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait grief à l'arrêt de juger le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à lui payer des sommes à titre de rappel de salaires pendant la période de mise à pied, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié, alors « que le juge ne peut soulever d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en retenant, pour déduire l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, qu'il avait été prononcé par la présidente de l'association A.T 65, et non par le conseil d'administration, en méconnaissance des statuts de l'association, sans inviter préalablement les parties à fournir leurs explications sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

9. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

10. Pour juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'article 16 des statuts prévoyant que ‘'le conseil d'administration, sur proposition du bureau choisit un directeur d'association dont la fonction est directement attachée au président'‘, la règle du parallélisme des formes conduisait à admettre qu'il appartenait également au conseil d'administration de démettre le directeur de ses fonctions. Il relève ensuite que si le conseil d'administration avait bien pris la décision d'engager la procédure disciplinaire, il n'avait plus été réuni pour décider du licenciement du salarié, cette sanction ayant été décidée par la seule présidente. Il conclut que le pouvoir de licencier étant conféré par les statuts au conseil d'administration, le manquement à cette règle n'était pas susceptible de régularisation, de sorte que le licenciement prononcé par un organe qui n'en avait pas le pouvoir était sans cause réelle et sérieuse.

11. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il annule la sanction disciplinaire constituée par la lettre d'observation du 16 mars 2015, condamne l'Association tutélaire des Hautes Pyrénées AT 65 à payer à M. [O] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts et confirme le jugement ayant débouté M. [O] de sa demande de rappel de salaire basée sur une augmentation d'indice, l'arrêt rendu le 20 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour l'Association tutélaire des Hautes-Pyrénées AT 65

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR annulé la sanction disciplinaire (lettre d'observation) prononcée le 16 mars 2015 par l'association AT 65 à l'encontre de Monsieur [O] et d'AVOIR condamné l'association AT 65 à verser à Monsieur [O] la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « Selon l'alinéa 1 de l'article L 1332-2 du Code du travail : « Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié ». Or l'article 33 de la Convention collective applicable énonce : « Les mesures disciplinaires applicables aux personnels des établissements ou services s'exercent sous les formes suivantes : - l'observation ; - l'avertissement ; - la mise à pied avec ou sans salaire pour un maximum de 3 jours ; - le licenciement. L'observation, l'avertissement et la mise à pied dûment motivés par écrit sont prononcés conformément au règlement établi et déposés suivant les dispositions légales. Toute sanction encourue par un salarié et non suivie d'une autre dans un délai maximal de 2 ans sera annulée et il n'en sera conservé aucune trace. Sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l'égard d'un salarié si ce dernier n'a pas fait l'objet précédemment d'au moins deux des sanctions citées ci-dessus, prises dans le cadre de la procédure légale. Pour la procédure de licenciement, les dispositions légales s'appliqueront aux établissements quel que soit le nombre de salariés ». Il résulte du rapprochement de ces textes que la lettre d'observation du 16 mars 2015, notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception à Monsieur [O] constitue une sanction au sens de la convention collective applicable. De plus et dès lors que le licenciement est conditionné au prononcé préalable de deux sanctions disciplinaires - dont éventuellement celle de 'l'observation' écrite - il ne peut être sérieusement soutenu qu'elle est sans incidence sur la présence du salarié dans l'entreprise. L'absence d'entretien préalable constitue en conséquence une irrégularité à la procédure qui aurait dû être mise en oeuvre par l'employeur. Cependant l'annulation d'une sanction irrégulière en la forme, ne constitue pour le juge qu'une simple faculté. En l'occurrence l'employeur soutient que la présidente de l'association s'est entretenue le 12 février 2015 avec Monsieur [O] des griefs énoncés dans la lettre d'observation, ce que celui-ci conteste. De fait la lettre d'observation ne fait aucune allusion à cet entretien, et madame [F] [W], secrétaire, qui a attesté que « dans les jours qui ont suivi le conseil d'administration madame [M] [E] l'avait informé qu'elle recevait Monsieur [O] directeur de l'association A.T. 65 afin d'évoquer avec lui les propos qu'il avait tenus à son encontre lors de la réunion du 10 février 2015 » en lui demandant « de quitter son bureau contigu au sien pour des raisons de confidentialité » n'atteste pas que cet entretien a eu lieu, encore moins qu'il a permis au salarié de s'expliquer sur les faits reprochés. Or au regard des conséquences liées à la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire et du contexte conflictuel dans lequel se situait la notification de la sanction litigieuse (la procédure de licenciement ayant été mise en oeuvre sept mois plus tard seulement) l'absence d'entretien préalable au cours duquel Monsieur [O] aurait pu s'expliquer sur les propos qui lui étaient reprochés, apparaît comme une irrégularité suffisamment grave pour justifier l'annulation de la sanction prononcée et justifier la condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 1.000 € à titre indemnitaire. Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté le demandeur de cette prétention » ;

1/ ALORS QUE selon l'article L. 1332-2 du code du travail « lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié » ; que l'article 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 énumère les sanctions disciplinaires applicables au sein de la branche, au nombre desquelles figure « l'observation », sanction la plus basse susceptible d'être infligée ; que cette sanction n'ayant pas, en elle-même, d'incidence, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, elle n'a pas à être précédée d'un entretien préalable, peu important que tout licenciement disciplinaire soit conditionné par l'article 33 de la convention au prononcé préalable d'au moins deux sanctions ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 et L. 1332-2 du code du travail ;

2/ ALORS ET EN TOUTE HYPOTHESE QUE le défaut d'entretien préalable à une mesure de sanction disciplinaire, pouvant aller jusqu'au licenciement, constitue un simple vice de procédure qui n'entache pas en luimême de nullité la sanction disciplinaire régulièrement notifiée au salarié ; qu'à le supposer obligatoire, l'absence d'entretien préalablement à la notification de l'observation disciplinaire faite à Monsieur [O] constituait tout au plus, en conséquence, une irrégularité de procédure qui n'entachait pas la sanction de nullité ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a derechef violé les articles 33 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 et L. 133-2 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé le licenciement de Monsieur [O] sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné l'association AT 65 à lui verser les sommes de 7.363,50 € bruts à titre de rappel de salaires pendant la période de mise à pied, 29.454 € bruts d'indemnité compensatrice de préavis, 2.945,40 € bruts à titre de congés payés sur indemnité compensatrice de préavis, 36.817,50 € d'indemnité de licenciement, 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné l'association AT 65 à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées à Monsieur [O] du jour de son licenciement au jour du jugement du conseil de prud'hommes, dans la limite de 4 mois d'indemnités, en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ;

AUX MOTIFS QUE « Avant de contester un à un les griefs énoncés dans la lettre de licenciement, Monsieur [O] soutient : - d'une part que son licenciement avait été décidé le 15 octobre 2016 soit la veille de l'envoi de sa convocation à l'entretien préalable ; - d'autre part que la procédure de convocation et de vote du conseil d'administration n'a pas été respectée, en soulignant que le conseil de prud'hommes ne s'est pas prononcé de ce chef. Il en déduit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse Pour l'association A.T. 65 à l'inverse, la procédure de licenciement a parfaitement été respectée : le conseil d'administration a été consulté, mais le pouvoir de procéder au licenciement du directeur appartenait à la présidente de l'association, comme le confirment les statuts. De plus, le 15 octobre 2015, c'est seulement la mise en oeuvre de la procédure de licenciement qui a été décidée non le licenciement lui-même. S'agissant de la décision du conseil d'administration de mettre en oeuvre la procédure disciplinaire effectivement intervenue le 15 octobre 2015 soit, la veille de l'envoi de la convocation du salarié à un entretien préalable fixé au 28 octobre 2015, cette décision ne préjugeait en rien de la sanction prononcée le 20 novembre 2015, en sorte que le salarié est mal fondé à soutenir que son licenciement avait été décidé dès ce moment. S'agissant ensuite de l'étendue des pouvoirs du conseil d'administration, l'association A.T. 65 souligne à juste titre que « sauf clause particulière des statuts attribuant compétence à un autre organe, le pouvoir de licencier, dans une association, appartient exclusivement au président » et il n'est pas discuté que la lettre de licenciement du 20 novembre 2015 a bien été signée par Madame [M] [E] en sa qualité de présidente de l'association A.T. 65. Cependant l'article 16 des statuts dispose : « Le conseil d'administration sur proposition du bureau choisit un directeur d'association dont la fonction est directement attachée au président ». Par application de la règle du parallélisme des formes, il convient d'admettre que le conseil d'administration qui a le pouvoir de choisir et donc de recruter le directeur a également celui de le démettre de ses fonctions. A cet égard et s'il est vrai qu'aux termes de la décision du 15 octobre 2015 précité, ce conseil d'administration a « décidé d'engager une procédure disciplinaire à l'encontre de Monsieur [O] directeur de l'association A.T. 65 » cette décision, comme il a déjà été dit, ne préjugeait en rien ni de la poursuite de cette procédure, ni du choix de la sanction finale. Il est constant cependant que le conseil d'administration n'a plus été réuni à la suite de cette première délibération pour décider de l'application ou non du licenciement de Monsieur [O] cette sanction ayant été décidée par Madame [M] [E] seule, en sa qualité de présidente de l'association A.T. 65. Or l'association A.T. 65 ne peut se prévaloir comme elle le fait, de l'article 14-4 des statuts afférents aux « fonctions des membres du bureau » qui énonce : 'Le président ... exécute les décisions du conseil d'administration « dans la mesure où la décision de mettre un terme à la procédure disciplinaire par un licenciement pour faute grave excède largement la simple mise en oeuvre de la procédure disciplinaire décidée le 15 octobre 2015 par le conseil d'administration ». Elle est également mal fondée à se prévaloir de l'alinéa 3 de ce même article selon lequel le président « assure, assisté du bureau, la gestion courante de l'association notamment il recrute et licencie le personnel (...) » dès lors qu'il existe dans les statuts une disposition spéciale réservant au conseil d'administration le choix du directeur de l'association. Or, lorsque le pouvoir de licencier est conféré par les statuts au conseil d'administration, le manquement à cette règle n'est pas susceptible de régularisation. Dès lors, et sans qu'il y ait lieu de reprendre les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, il doit être admis que le licenciement prononcé par un organe qui n'en avait pas le pouvoir est sans cause réelle et sérieuse ».

1. ALORS QU'en retenant, pour déduire l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, qu'il avait été prononcé par la présidente de l'association A.T 65, et non par le conseil d'administration, en méconnaissance des statuts de l'association, cependant que dans ses conclusions écrites, reprises à l'audience, Monsieur [O] soutenait au contraire – tout comme l'association A.T 65 – que son licenciement avait été prononcé par décision du conseil d'administration de l'association, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE le juge ne peut soulever d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en retenant, pour déduire l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, qu'il avait été prononcé par la présidente de l'association A.T 65, et non par le conseil d'administration, en méconnaissance des statuts de l'association, sans inviter préalablement les parties à fournir leurs explications sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3. ALORS QU'il ressort des constatations de l'arrêt que par décision du 15 octobre 2015 le conseil d'administration de l'association A.T 65 a engagé la procédure de licenciement de Monsieur [O] ; qu'il s'ensuit que la lettre de licenciement notifiée le 20 novembre 2015, aux termes de cette procédure, a été mise en oeuvre par suite de cette décision du conseil d'administration ; qu'en retenant néanmoins que le licenciement était irrégulier comme ayant été décidé par la seule présidente de l'association A.T 65, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au litige, ensemble la loi du 1er juillet 1901 et les articles L.1231-1, L 1232-1, L.1235-3 et L.1237-2 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige ;

4. ALORS QU'en retenant qu' « il n'est pas discuté que la lettre de licenciement du 20 novembre 2015 a bien été signée par Madame [M] [E] en sa qualité de présidente de l'association A.T. 65 » (arrêt p. 7 § 1), cependant que l'association A.T 65 soutenait dans ses conclusions d'appel, reprises à l'audience, que la décision d'engager une procédure de licenciement disciplinaire à l'égard de Monsieur [O] avait été prise par le conseil d'administration conformément aux statuts et que la présidente n'avait fait qu'exécuter cette procédure (conclusions d'appel p. 40 § 1), la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile. ECLI:FR:CCASS:2021:SO01046
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