Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 septembre 2021, 19-16.908, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MA



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 septembre 2021




Cassation


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 925 F-D

Pourvoi n° W 19-16.908




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 SEPTEMBRE 2021

La société Nouvelle Tolerie moderne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 19-16.908 contre l'arrêt rendu le 21 mars 2019 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [Q] [P], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Nouvelle Tolerie moderne, de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [P], après débats en l'audience publique du 2 juin 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, M. Rouchayrole, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 21 mars 2019), M. [P] a été engagé, courant 1976, en qualité de peintre par la société Tôlerie moderne (la société) suivant un contrat de travail oral. En dernier lieu, il avait la qualification de peintre confirmé, échelon 10, de la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile du 15 janvier 1981.

2. Licencié pour faute grave, le 7 novembre 2014, il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir l'annulation de trois avertissements et d'une mise à pied disciplinaire, la reconnaissance de ce que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse et la condamnation de la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire correspondant à la mise à pied à titre conservatoire, outre congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que les heures supplémentaires constituent l'exécution du contrat de travail, relevant du pouvoir de direction de l'employeur, en conséquence de quoi les heures supplémentaires imposées par l'employeur dans la limite du contingent dont il dispose légalement et en raison des nécessités de l'entreprise ne constituent pas une modification du contrat de travail, nonobstant le recours habituel aux dites heures ; qu'en l'espèce, pour décider que le non-respect de l'horaire collectif par le salarié n'était pas fautif, et, partant, que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a jugé que le recours systématique à des heures supplémentaires avait modifié son contrat de travail en portant la durée du travail du salarié de 35 heures à 39 heures, de sorte qu'à défaut d'accord exprès du salarié, le fait de quitter son travail à 16 heures 30 ne caractérisait pas une inexécution fautive de sa prestation de travail ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 3121-11, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, dans leur version en vigueur au moment des faits. »

Réponse de la Cour

4. Ayant relevé que le recours systématique à des heures supplémentaires portait la durée du travail du salarié de 35 heures à 39 heures, la cour d'appel, qui a retenu, à bon droit, que le caractère systématique de ce recours modifiait le contrat de travail de l'intéressé, en a exactement déduit que la société ne pouvait valablement augmenter la durée hebdomadaire de travail du salarié qu'avec son accord exprès, faisant ainsi ressortir que le refus de cette modification n'était pas fautif.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en ses trois dernières branches

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 2°/ que lorsque tous les salariés d'un atelier travaillent selon le même horaire collectif, un horaire établi selon l'heure légale indique les heures auxquelles commence et finit chaque période de travail ; qu'il en résulte qu'à défaut de dispositions contractuelles prévoyant les horaires de travail, le salarié n'est pas soumis à un horaire contractuel, mais à un horaire collectif décidé par l'employeur selon les besoins de son activité ; qu'en cas de modification de l'horaire collectif, toute décision de l'employeur visant à réviser la répartition des horaires s'impose au salarié ; que l'horaire collectif de travail au sein de la société a été modifié à compter du 2 janvier 2007 par un document affiché dans l'entreprise qui prévoyait que les salariés de l'atelier étaient soumis à l'horaire suivant : 8 heures 50-12 heures et 13 heures 30- 17 heures 20, et qui précisait que les heures supplémentaires seraient effectuées de 8 heures à 8 heures 50 ; qu'ainsi, la journée de travail des salariés concernés se terminait, non plus à 16 heures 30, mais à 17 heures 20, sans qu'il soit nécessaire d'obtenir leur accord ; qu'en jugeant néanmoins, pour décider que le non-respect de l'horaire collectif par le salarié n'était pas fautif, que la journée de travail contractuellement prévue se terminait à 16 heures 30, tandis que selon l'horaire collectif applicable à compter du 2 janvier 2007, l'ensemble des salariés de l'atelier terminaient leur travail à 17 heures 20, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles D. 3171-1, D. 3171-3, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

3°/ que les heures supplémentaires constituent l'exécution du contrat de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur, en conséquence de quoi ce dernier est libre de les fixer librement sur des plages horaires qui assurent au mieux les besoins du service et la bonne marche de l'entreprise ; que l'horaire collectif de travail au sein de la société a été modifié à compter du 2 janvier 2007 par un document affiché dans l'entreprise qui prévoyait que les salariés de l'atelier étaient soumis à l'horaire suivant : 8 heures 50-12 heures et 13 heures 30-17 heures 20, et qui précisait que les heures supplémentaires seraient désormais effectuées de 8 heures à 8 heures 50 ; qu'en relevant néanmoins, pour juger que le non-respect de l'horaire collectif par le salarié n'était pas fautif, que "c'est par un artifice que la société nouvelle Tôlerie Moderne soutient que les heures supplémentaires s'effectuaient de 8 heures à 8 heures 50. Elles s'effectuaient en réalité, au-delà de la fin de la journée de travail contractuellement prévue soit à compter de 16 heures 30", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 3121-11, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, dans leur version en vigueur au moment des faits ;

4°/ que l'employeur soutenait que, si le salarié pouvait refuser d'effectuer des heures supplémentaires, il en était autrement quant à la répartition des horaires de travail, laquelle était une prérogative de l'employeur ; que l'horaire collectif de travail au sein de l'atelier était fixé par l'employeur comme suit : 8 heures 50-12 heures et 13 heures 30- 17 heures 20, en conséquence de quoi le salarié devait respecter l'horaire collectif en vigueur depuis le 2 janvier 2007, indépendamment de l'accomplissement des heures supplémentaires et, partant, commencer sa journée de travail à 8 heures 50 pour la terminer à 17 heures 20 ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si nonobstant l'accomplissement d'heures supplémentaires, le salarié était tenu de respecter l'horaire collectif de travail en vigueur dans l'entreprise depuis le 2 janvier 2007, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles D. 3171-1, D. 3171-3, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1221-1, D. 3171-1, celui-ci dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-1553 du 18 novembre 2016, D. 3171-3, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, ce dernier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

7. Selon le deuxième de ces textes, lorsque tous les salariés d'un atelier travaillent selon le même horaire collectif, un horaire établi selon l'heure légale indique les heures auxquelles commence et finit chaque période de travail.

8. Il résulte du troisième que la modification de l'horaire collectif est applicable aux salariés qui y sont soumis à compter de son affichage.

9. Pour dire que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur au paiement d'un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et de diverses indemnités de rupture, l'arrêt constate que le salarié a été licencié au motif qu'il ne respectait pas, et ce de façon réitérée malgré de précédentes sanctions, « les consignes qui vous sont données ainsi que vos horaires de travail, à savoir 8h / 12h – 13h30 / 17h20, en quittant votre poste de travail à 16h30 au lieu de 17h20, soit 50 minutes plus tôt que votre horaire habituel ». Il relève qu'en 2008, le nouveau gérant de la société a mis en place un nouvel horaire de 8h à 12h et de 13h30 à 17h20, plaçant des heures supplémentaires en début de journée de 8h à 8h50 et ce, de façon systématique. Il précise qu'il n'est pas contesté que le salarié embauchait à 8h ainsi que tous les autres salariés de l'entreprise. Il retient que c'est par un artifice que la société soutient que les heures supplémentaires s'effectuaient de 8h à 8h50 et qu'elles s'effectuaient en réalité, au-delà de la fin de la journée de travail contractuellement prévue soit à compter de 16h30. Il ajoute que le salarié a l'obligation d'exécuter les heures supplémentaires décidées par l'employeur dans le respect de la réglementation applicable. Il en déduit que la société ne pouvait valablement modifier le contrat de travail en augmentant sa durée hebdomadaire de travail et, par voie de conséquence ses horaires, qu'avec son accord exprès, et que faute pour elle de l'avoir fait, elle n'était pas fondée à soutenir que le fait pour l'intéressé de quitter son travail à 16h30 caractérisait de sa part une inexécution fautive de sa prestation de travail.

10. En se déterminant ainsi, alors que l'horaire collectif est fixé par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction et qu'elle avait constaté qu'il était reproché au salarié de ne pas s'être conformé, de façon réitérée, à celui mis en place en 2008, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si, nonobstant son droit de refuser d'accomplir des heures supplémentaires, librement fixées par l'employeur en début de matinée, le salarié respectait les contraintes liées à l'horaire collectif affiché qui s'imposait à lui, n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

11. L'employeur fait grief à l'arrêt d'annuler les avertissements des 7 avril, 17 avril et 19 mai 2014, ainsi que la mise à pied disciplinaire de deux jours du 27 juin 2014 et de le condamner au paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire du chef de la mise à pied du 27 juin 2014, outre congés payés afférents et de dommages-intérêts pour sanction abusive, alors « que la cassation à intervenir du chef de l'arrêt ayant retenu que le licenciement du salarié était sans cause réelle et sérieuse entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef du dispositif ayant annulé les avertissements des 7 avril, 17 avril et 19 mai 2014, ainsi que la mise à pied disciplinaire de deux jours du 27 juin 2014, en raison du lien d'indivisibilité les unissant. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

12. La cassation prononcée sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif relatifs aux avertissements et mise à pied disciplinaire ainsi qu'aux rappels de salaire, congés payés et indemnités s'y rapportant, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;

Condamne M. [P] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit septembre deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Nouvelle Tolerie moderne


PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. [P] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société nouvelle Tôlerie Moderne à payer à M. [P] les sommes de 1.149,50 euros bruts à titre de rappel de salaire au titre de la mise à pied à titre conservatoire, outre la somme de 114,95 euros au titre des congés payés afférents, de 3.630 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 363 euros de congés payés y afférents, de 22.859 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et de 12.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE, en droit, la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve ; qu'aux termes de la lettre de licenciement du 10 octobre 2014, qui fixe les limites du litige, M. [P] a été licencié au motif qu'il ne respectait pas, et ce de façon réitérée malgré de précédentes sanctions, « les consignes qui vous sont données ainsi que vos horaires de travail, à savoir 8h/12h – 13h30/17h20, en quittant votre poste de travail à 16h30 au lieu de 17h20, soit 50 minutes plus tôt que votre horaire habituel » ; que le 20 juillet 2006, la société nouvelle Tôlerie Moderne avait confirmé à M. [P] que ses horaires de travail étaient ceux de l'horaire collectif, à savoir du lundi au vendredi de 8h à 12h et de 13h30 à 16h30 soit 35 heures par semaine ; qu'il lui était également rappelé qu'il pouvait être amené à effectuer des heures supplémentaires ; qu'ainsi, l'horaire contractuel de M. [P] était bien de 35 heures et il avait connaissance qu'il pouvait lui être demandé d'effectuer des heures supplémentaires ; qu'en 2008, le nouveau gérant de la société nouvelle Tôlerie Moderne a mis en place un nouvel horaire 8h à 12h et 13h30 à 17h20, plaçant des heures supplémentaires en début de journée de 8h à 8h50 et ce, de façon systématique ; qu'il n'est pas contesté que M. [P] embauchait à 8 heures ainsi que tous les salariés de l'entreprise ; que l'article L. 3121-35 du code du travail définit la semaine comme allant du lundi 0 heure à dimanche 24 heures ; que les heures supplémentaires sont des heures effectuées au-delà de la durée légale du travail ; que c'est par un artifice que la société nouvelle Tôlerie Moderne s'effectuait de 8h à 8h50 ; qu'elles s'effectuaient en réalité, au-delà de la fin de la journée de travail contractuellement prévue soit à compter de 16h30 ; que le salarié a l'obligation d'exécuter les heures supplémentaires décidées par l'employeur dans le respect de la réglementation applicable ; que cette obligation a cependant une limite : ne pas modifier le contrat de travail ; que la durée du travail, telle que mentionnée au contrat de travail, constitue en principe, un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié ; qu'en l'espèce, le recours systématique à des heures supplémentaires modifiait le contrat de travail portant systématiquement la durée du travail de M. [P] de 35 heures à 39 heures ; que la société nouvelle Tôlerie Moderne ne pouvait valablement modifier le contrat de travail en augmentant sa durée hebdomadaire de travail et, par voie de conséquence ses horaires, qu'avec son accord exprès ; que faute pour elle de l'avoir fait, elle n'est pas fondée à soutenir que le fait pour lui de quitter son travail à 16h30 caractérisait de sa part une inexécution fautive de sa prestation de travail ; qu'il convient au regard de l'ensemble de ces éléments de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [P] pour faute grave était justifié ; que sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L. 1234-1 du code du travail, le préavis est égal à deux mois lorsque le licenciement pour faute grave n'est pas fondé et que le salarié justifie d'une ancienneté de services continus chez le même employeur d'au moins deux ans ; qu'en conséquence la société nouvelle Tôlerie Moderne est condamnée à payer à M. [P] la somme de 3.630 euros outre celle de 363 euros de congés payés afférents, au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ; que l'article L. 1234-9 du code du travail prévoit, par ailleurs, que le salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont il bénéficiait avant la rupture du contrat de travail ; que selon l'article R. 1234-2 du même code, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté ; qu'en l'espèce, il est dû à M. [P] la somme de 22.859 euros, sur la base d'une moyenne de salaires mensuels bruts de 1.815 euros, au titre de l'indemnité de licenciement ; qu'aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable à la présente espèce, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et qu'il n'y a pas réintégration du salarié dans l'entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; que, compte tenu de l'effectif de l'entreprise, de l'ancienneté du salarié (38 ans), des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération brute versée à M. [P], de son âge, 54 ans, et des conséquences de la rupture à son égard, aucune pièce n'ayant été produite sur sa situation postérieure au 31 mars 2016, il lui est alloué la somme de 12.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que, dès lors que la faute grave n'est pas retenue, la mise à pied conservatoire n'est pas justifiée de sorte que M. [P] a droit au paiement du salaire indûment retenu pendant cette période, il sera fait droit à la demande de paiement du salaire durant la mise à pied, soit la somme de 1.149,50 euros outre 114,95 euros de congés payés afférents ; que sur la demande d'annulation des sanctions, le motif des sanctions notifiées, les 3 avertissements et la mise à pied, étant le même que celui du licenciement et ce motif ayant été jugé ni réel et sérieux, les sanctions doivent être annulées ; qu'il sera alloué à M. [P], en réparation de son préjudice, la somme de 500 euros outre un rappel de salaires de 167,54 euros outre celle de 16,75 euros de congés payés afférents pour les deux journées de mise à pieds injustifiées ; que sur les intérêts et la demande de capitalisation qu'il convient de rappeler que les intérêts au taux légal courent sur les sommes à caractère salarial à compter de la réception par l'employeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 17 novembre 2014 et qu'ils courent sur les sommes à caractère indemnitaire à compter du jugement déféré sur le montant de la somme allouée par les premiers juges et à compter du présent arrêt pour le surplus ; que les conditions de l'article 1154 ancien du code civil qui, en application de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, sont applicables à la présente instance en ce qu'elle a été engagée avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de ladite ordonnance, étant remplies, il convient de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts formée par le salarié dans les conditions de ce texte ; que sur l'article L. 1235-4 du code du travail, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner le remboursement par la société nouvelle Tôlerie Moderne à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. [P] du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de six mois d'indemnité de chômage ;

1°) ALORS QUE les heures supplémentaires constituent l'exécution du contrat de travail, relevant du pouvoir de direction de l'employeur, en conséquence de quoi les heures supplémentaires imposées par l'employeur dans la limite du contingent dont il dispose légalement et en raison des nécessités de l'entreprise ne constituent pas une modification du contrat de travail, nonobstant le recours habituel aux dites heures ; qu'en l'espèce, pour décider que le non-respect de l'horaire collectif par M. [P] n'était pas fautif, et, partant, que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a jugé que le recours systématique à des heures supplémentaires avait modifié son contrat de travail en portant la durée du travail du salarié de 35 heures à 39 heures, de sorte qu'à défaut d'accord exprès du salarié, le fait de quitter son travail à 16 heures 30 ne caractérisait pas une inexécution fautive de sa prestation de travail (arrêt, p. 5 § 2 et 3) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 3121-11, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, dans leur version en vigueur au moments des faits ;

2°) ALORS QUE lorsque tous les salariés d'un atelier travaillent selon le même horaire collectif, un horaire établi selon l'heure légale indique les heures auxquelles commence et finit chaque période de travail ; qu'il en résulte qu'à défaut de dispositions contractuelles prévoyant les horaires de travail, le salarié n'est pas soumis à un horaire contractuel, mais à un horaire collectif décidé par l'employeur selon les besoins de son activité ; qu'en cas de modification de l'horaire collectif, toute décision de l'employeur visant à réviser la répartition des horaires s'impose au salarié ; que l'horaire collectif de travail au sein de la société nouvelle Tôlerie Moderne a été modifié à compter du 2 janvier 2007 par un document affiché dans l'entreprise qui prévoyait que les salariés de l'atelier étaient soumis à l'horaire suivant : 8 heures 50 - 12 heures et 13 heures 30 - 17 heures 20, et qui précisait que les heures supplémentaires seraient effectuées de 8 heures à 8 heures 50 ; qu'ainsi, la journée de travail des salariés concernés se terminait, non plus à 16 heures 30, mais à 17 heures 20, sans qu'il soit nécessaire d'obtenir leur accord ; qu'en jugeant néanmoins, pour décider que le non-respect de l'horaire collectif par M. [P] n'était pas fautif, que la journée de travail contractuellement prévue se terminait à 16 heures 30 (arrêt, p. 5 § 1), tandis que selon l'horaire collectif applicable à compter du 2janvier 2007, l'ensemble des salariés de l'atelier terminaient leur travail à 17 heures 20, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles D. 3171-1, D. 3171-3, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9du code du travail ;

3°) ALORS QUE les heures supplémentaires constituent l'exécution du contrat de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur, en conséquence de quoi ce dernier est libre de les fixer librement sur des plages horaires qui assurent au mieux les besoins du service et la bonne marche de l'entreprise ; que l'horaire collectif de travail au sein de la société nouvelle Tôlerie Moderne a été modifié à compter du 2 janvier 2007 par un document affiché dans l'entreprise qui prévoyait que les salariés de l'atelier étaient soumis à l'horaire suivant : 8 heures 50 - 12 heures et 13 heures 30 - 17 heures 20, et qui précisait que les heures supplémentaires seraient désormais effectuées de 8 heures à 8 heures 50 ; qu'en relevant néanmoins, pour juger que le non-respect de l'horaire collectif par M. [P] n'était pas fautif, que « c'est par un artifice que la société nouvelle Tôlerie Moderne soutient que les heures supplémentaires s'effectuaient de 8 heures à 8 heures 50. Elles s'effectuaient en réalité, au-delà de la fin de la journée de travail contractuellement prévue soit à compter de 16 heures 30 » (arrêt, p. 5 § 1), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 3121-11, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, dans leur version en vigueur au moments des faits ;

4°) ALORS QUE l'employeur soutenait que, si le salarié pouvait refuser d'effectuer des heures supplémentaires, il en était autrement quant à la répartition des horaires de travail, laquelle était une prérogative de l'employeur (concl., p. 7 § 7) ; que l'horaire collectif de travail au sein de l'atelier était fixé par l'employeur comme suit : 8 heures 50 - 12 heures et 13 heures 30 - 17 heures 20, en conséquence de quoi M. [P] devait respecter l'horaire collectif en vigueur depuis le 2 janvier 2007, indépendamment de l'accomplissement des heures supplémentaires et, partant, commencer sa journée de travail à 8 heures 50 pour la terminer à 17 heures 20 (concl., p. 7 § 8 à 11) ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si nonobstant l'accomplissement d'heures supplémentaires, le salarié était tenu de respecter l'horaire collectif de travail en vigueur dans l'entreprise depuis le 2 janvier 2007, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles D. 3171-1, D. 3171-3, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9du code du travail.


SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé les avertissements des 7 avril, 17 avril et 19 mai 2014, ainsi que la mise à pied disciplinaire de deux jours du 27 juin 2014 et d'avoir condamné la société nouvelle Tôlerie Moderne à payer à M. [P] les sommes de 167,54 euros bruts, à titre de rappel de salaire du chef de la mise à pied du 27 juin 2014, outre la somme de 16,75 euros de congés payés y afférents et de 500 euros de dommages-intérêts pour sanction abusive ;

AUX MOTIFS QUE le motif des sanctions notifiées, les trois avertissements et la mise à pied, étant le même que celui du licenciement, et ce motif ayant été jugé ni réel ni sérieux, les sanctions doivent être annulées ; qu'il sera alloué à M. [P], en réparation de son préjudice, la somme de 500 euros outre un rappel de salaire de 167,54 euros, outre celle de 16,75 euros de congé payés y afférents pour les deux journées de mise à pied injustifiée ;

ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de l'arrêt ayant retenu que le licenciement de M. [P] était sans cause réelle et sérieuse entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef du dispositif ayant annulé les avertissements des 7 avril, 17 avril et 19 mai 2014, ainsi que la mise à pied disciplinaire de deux jours du 27 juin 2014, en raison du lien d'indivisibilité les unissant.ECLI:FR:CCASS:2021:SO00925
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