Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 30 juin 2021, 20-14.767, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 juin 2021




Cassation partielle


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 835 F-D

Pourvoi n° Q 20-14.767






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 JUIN 2021

M. [D] [R], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 20-14.767 contre l'arrêt rendu le 21 janvier 2020 par la cour d'appel de Nîmes (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société La Poste, prise en sa direction départementale du courrier DSCC13, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La société La Poste a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation et un moyen additionnel annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Gilibert, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [R], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société La Poste, après débats en l'audience publique du 18 mai 2021 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Gilibert, conseiller rapporteur, M. Pion, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 21 janvier 2020), M. [R], engagé par la société La Poste en qualité de facteur le 3 décembre 1992, a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 19 juin 2009.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen du pourvoi incident, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, alors « que si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité lui est due lorsque le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude ; qu'en déboutant M. [R] de sa demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, au motif inopérant qu'il avait été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle si bien qu'aucune indemnisation ne lui est due pour le préavis non exécuté, quand elle avait pourtant constaté que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur d'avoir satisfait à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1234-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1226-2 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, applicable au litige et L. 1234-5 du même code :

4. Il résulte de ces textes que si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude.

5. Pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis, l'arrêt, après avoir constaté que l'obligation de reclassement n'ayant pas été respectée, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse et que le salarié a été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle, retient, qu'aucune indemnisation ne lui est due pour le préavis non exécuté.

6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [R], de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents, l'arrêt rendu le 21 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la société La Poste aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société La Poste et la condamne à payer à M. [R] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen et moyen additionnel produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. [R] et Pôle emploi, demandeurs au pourvoi principal


MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [D] [R] de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de son licenciement pour inaptitude et de l'avoir débouté, par conséquent, de ses demandes indemnitaires subséquentes,

AUX MOTIFS QUE

Sur la nullité du licenciement pour inaptitude :

Sur le non-respect de la procédure applicable :

Selon l'article R. 4624-31 du code du travail dans sa rédaction applicable, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celles des tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après une étude de ce poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines. Le licenciement prononcé en raison de l'état de santé d'un salarié, dont l'inaptitude n'a pas été constatée conformément aux exigences du texte précité à l'issue de deux examens médicaux espacés d'un délai minimum de deux semaines, est nul en application de l'article L. 1132-1 du code du travail,

Toutefois, l'article R. 4624-31 susvisé n'impose pas que la constatation de l'inaptitude soit faite lors d'un examen médical de reprise consécutif à une suspension du contrat de travail, le médecin du travail pouvant la constater après tout examen médical qu'il pratique au cours de l'exécution du contrat de travail,

En l'espèce, alors que le contrat de travail était toujours suspendu en raison de l'arrêt de travail de M. [R] depuis le 24 mars 2005 régulièrement prolongé, une visite médicale a été effectuée, à la demande du salarié, par le médecin du travail le 28 janvier 2009, lequel a conclu :

"Inapte définitif à travailler à [Localité 1],

Inapte définitif aux manutentions > 15 kgs",

Puis, après la fin de l'arrêt de travail qui a cessé le 8 février 2009, une autre visite médicale a eu lieu le 17 février 2009, à la demande de l'employeur, les conclusions du médecin du travail étant les suivantes :

"L'avis ne peut être donné ce jour. II est demandé un examen médical complémentaire (code du travail Art. R. 4624-25)",

C'est ensuite que le médecin du travail, au terme d'une visite médicale en date du 2 mars 2009, a écrit :

"Suite à l'examen complémentaire, le spécialiste consulté et moi-même maintenons la préconisation d'exemption de reprise du travail à [Localité 1]CCTI. Une mutation dans un autre bureau permettrait d'éviter toute complication de la santé de M. [R] ultérieurement",

Il en résulte que si la visite médicale du 28 janvier 2009, réalisée sans que la Poste n'en soit informée, ce qu'elle reconnaît aux termes d'un courrier en date du 25 février 2009 adressé au médecin du travail et qu'elle produit aux débats, constitue une visite de pré-reprise, elle n'en est pas moins un examen médical au sens de l'article R. 4624-31 du code du travail susvisé en sorte qu'ayant été suivi d'un second examen médical plus de deux semaines plus tard, puis d'un troisième concluant à l'inaptitude du salarié, l'inaptitude de ce dernier a été régulièrement constatée,

En conséquence, la demande du salarié de ce chef sera rejetée,

Sur l'attitude fautive de l'employeur à l'origine de l'inaptitude :

M. [R] prétend que l'attitude fautive de l'employeur est à l'origine de son inaptitude, ce qui justifierait de plus fort le prononcé de la nullité du licenciement,

Il fait grief, dans un premier temps, à l'employeur de lui avoir infligé un blâme et de l'avoir "maintenu dans l'ignorance de la gravité des faits dont il était accusé", alors que l'employeur a d'ores et déjà été condamné de ce chef par l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes en date du 11 janvier 2011, définitif sur ce point, à lui payer la somme de 5 000 euros en réparation de son seul préjudice moral, le blâme étant par ailleurs annulé pour non-respect de la procédure disciplinaire sans que la cour ne se soit prononcée sur le bien-fondé de la sanction, Il lui reproche, en outre, de lui avoir adressé deux courriers, le premier en date du 14 avril 2005 l'appelant à reprendre son service à son ancien poste à compter du 2 mai 2005, et le second du 3 juillet 2008 le mettant en demeure de reprendre son service, lesquels ne tiendraient pas compte de sa "fragilité à exercer son activité", compte tenu de "troubles phobiques et dépressifs en lien avec son activité", alors que l'inaptitude du salarié "à travailler à [Localité 1]" n'a été constatée par le médecin du travail que lors de la visite de pré-reprise susvisée du 28 janvier 2009, la seule visite médicale antérieure en date du 30 juin 2008 n'en faisant nullement état,

Il ne peut, dès lors, être reproché à l'employeur d'avoir failli dans l'exécution de son obligation de sécurité de résultat en mettant en demeure le salarié "de reprendre son travail sans considération du contexte psychologique",

M. [R] ne peut davantage fonder sa demande à ce titre sur l'absence de mesures de reclassement prises par la Poste, alors qu'il invoque par ailleurs le non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement au soutien de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

Enfin, alors qu'il demande de voir annuler le licenciement par application de l'article L. 1132-1 du code du travail, le salarié ne présente aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1134-1 dans sa rédaction applicable.

En conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande du salarié de ce chef,

1° ALORS QUE constitue la visite médicale de reprise telle que prévue à l'article L. 4624-31 du code du travail, la visite médicale sollicitée par le salarié dont l'employeur a été averti, et dans le cadre de laquelle le médecin du travail se prononce sur l'aptitude du salarié ; que lorsque le salarié saisit, de sa propre initiative, le médecin du travail pendant la période de suspension de son contrat de travail sans que son employeur n'en soit informé, cette visite ne peut être qualifiée de visite de reprise ; qu'en considérant que la visite médicale organisée le 28 janvier 2009 à la suite de laquelle le médecin du travail avait déclaré M. [R] "Inapte définitif à travailler à [Localité 1], Inapte définitif aux manutentions > 15 kgs", constituait une visite de pré-reprise qui s'analysait en une visite médicale au sens de l'article R. 4624-31 du code du travail, quand elle avait constaté que cette visite médicale n'avait pas été portée préalablement à la connaissance de l'employeur, ce dont il résultait qu'elle ne pouvait pas s'analyser en une visite médicale au sens de l'article L. 4624-31 du code du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et R. 4624-22, R. 4624-23 et L. 4624-31 du code du travail dans leur rédaction antérieure au décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012,

2° ALORS QUE constitue la visite médicale de reprise telle que prévue à l'article L. 4624-31 du code du travail, la visite médicale sollicitée par le salarié dont l'employeur a été averti, et dans le cadre de laquelle le médecin du travail se prononce sur l'aptitude du salarié ; que lorsque le salarié saisit, de sa propre initiative, le médecin du travail pendant la période de suspension de son contrat de travail sans que son employeur n'en soit informé, cette visite ne peut être qualifiée de visite de reprise ; qu'en considérant que la visite médicale organisée le 28 janvier 2009 par laquelle le médecin du travail avait déclaré M. [R] "Inapte définitif à travailler à [Localité 1], Inapte définitif aux manutentions > 15 kgs", constituait une visite de pré-reprise qui s'analysait en une visite médicale au sens de l'article R. 4624-31 du code du travail, cependant qu'elle avait constaté que l'employeur avait lui-même reconnu que cette visite s'analysait en une visite de pré-reprise insusceptible de constituer une visite de reprise au sens de l'article R. 4624-31 du code du travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, R. 4624-22, R. 4624-23 et R. 4624-31 du code du travail dans leur rédaction antérieure au décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012,

3° ALORS QUE selon l'article R. 4624-22 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige "L'examen de reprise a pour objet d'apprécier l'aptitude médicale du salarié à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation du salarié ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures ; Cet examen a lieu lors de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de huit jours" ; qu'en jugeant que la visite médicale du 28 janvier 2009 constituait une visite médicale au sens de l'article R. 4624-31 du code du travail sans même vérifier, comme elle y était invitée par les écritures d'appel de M. [R], si la reprise du travail était prévue pour le 9 février 2009, de sorte que cette visite ne pouvait constituer qu'une visite de pré-reprise (cf. prod n° 3, p. 9 § 1er), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 4624-22 et R. 4624-31 du code du travail dans leur rédaction antérieure au décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012,

4° ALORS QUE le licenciement est entaché de nullité lorsque l'inaptitude n'a pas été constatée en respectant l'exigence du double examen médical ; qu'en énonçant, après avoir estimé de manière erronée que la visite médicale organisée par la médecine du travail du 28 janvier 2009 qui s'analysait en une visite de pré-reprise constituait une visite médicale au sens de l'article R. 4624-31 du code du travail, qu'"ayant été suivi d'un second examen médical plus de deux semaines plus tard, puis d'un troisième concluant à l'inaptitude du salarié, l'inaptitude de ce dernier a été régulièrement constatée", la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1 et R. 4624-31 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige,

5° ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier l'objet du litige tel qu'il résulte des conclusions des parties ; qu'en énonçant, pour débouter M. [R] de ses demandes, qu'il faisait grief à l'employeur dans un premier temps, de lui avoir infligé un blâme et de l'avoir maintenu dans l'ignorance de la gravité des faits dont il était accusé, et dans un second temps de lui avoir adressé deux courriers, le premier le 14 avril 2005 l'appelant à reprendre son service à son ancien poste à compter du 2 mai 2005, et le second le 3 juillet 2008 le mettant en demeure de reprendre son service, lesquels n'avaient pas tenu compte de sa fragilité à exercer son activité, compte tenu de troubles phobiques et dépressifs en lien avec son activité, cependant que M. [R] faisait valoir que l'inaptitude était liée à l'attitude de l'employeur à la suite des accusations portées à son encontre qui s'étaient avérées en très grande partie infondées (cf. prod n° 2, p. 9 § 8), la cour d'appel a modifié les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile,

6° ALORS QUE lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant, selon lui, une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en énonçant que le salarié ne présentait aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, quand M. [R] faisait état "des accusations portées à son encontre et s'étant avérées en très grande partie infondées" ainsi et de l'"absence de considération de l'état de santé du salarié malgré les multiples informations dont disposait l'employeur à ce sujet, justifie de voir annuler le licenciement du salarié par application de l'article L. 1132-1 du code du travail" (cf. prod n° 2, p. 9 § 7 à 10), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige.


MOYEN DE CASSATION ADDITIONNEL

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [D] [R] de sa demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents,

AUX MOTIFS QUE

(?) l'employeur ne justifie pas avoir exécuté sérieusement et loyalement son obligation de reclassement, ce qui rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnisation

(?)

Le salarié ayant été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle, aucune indemnisation ne lui est due pour le préavis non exécuté (arrêt attaqué page 9),

ALORS QUE si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter en raison d'une inaptitude à son emploi, cette indemnité lui est due lorsque le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement consécutive à l'inaptitude ; qu'en déboutant M. [D] [R] de sa demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, au motif inopérant qu'il avait été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle si bien qu'aucune indemnisation ne lui est due pour le préavis non exécuté, quand elle avait pourtant constaté que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur d'avoir satisfait à son obligation de reclassement, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-2 et L. 1234-5 du code du travail. Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société La Poste, demanderesse au pourvoi incident


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté l'exception de péremption d'instance soulevée par La Poste, d'AVOIR jugé recevables les demandes formées par le salarié, d'AVOIR, au visa de l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 11 janvier 2011 et de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 31 janvier 2019, dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société La Poste à payer à M. [R] une somme 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'AVOIR ordonné à la société La Poste de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M. [R] dans la limite de six mois d'indemnités du jour du licenciement au jour de l'arrêt en application de l'article L. 1235-4 du code du travail.

AUX MOTIFS QUE « Sur la recevabilité des demandes Tout d'abord, il ne peut être déduit du dispositif de l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes du 11 janvier 2011, tel qu'il est rédigé, que, faute pour M. [R] d'avoir demandé la réinscription de l'affaire au rôle de la cour d'appel de Nîmes dans le délai de deux ans à compter du 18 février 2016, date du jugement de départage rendu par le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, l'affaire est périmée depuis le 19 février 2018, ce que soutient à tort la Poste ; qu'il ne peut davantage être considéré qu'il n'y a plus matière à évocation, dès lors que les conditions restrictives relatives à l'évocation ne sont pas réunies et qu'il ne peut s'agir, concernant les prétentions du salarié inhérentes au licenciement, que de demandes nouvelles en cause d'appel ; enfin, que le litige n'a pas été vidé dans toutes ses dimensions, puisque la cour d'appel d'Aix-en-Provence ne s'est pas prononcée sur le fond du droit au visa du principe de l'unicité de l'instance, motifs pris que "les causes du litige relatif à la rupture du contrat de travail, notifiée le 19 juin 2009, étant connues avant la clôture des débats le 24 novembre 2010 devant la cour d'appel de Nîmes, déjà saisie de l'annulation de la sanction disciplinaire notifiée dans le cadre du même contrat de travail, la saisine du conseil de prud'hommes de Marseille en octobre 2009 et la procédure qui s'en est suivie, était contraire audit principe, et impose donc la poursuite de l'instance devant ladite cour, d'autant qu'elle n'est pas dessaisie par la décision de radiation". En conséquence, les demandes formées par le salarié devant la cour de céans sont recevables » ;

ALORS QUE l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans ; que les parties conduisent l'instance sous les charges qui leur incombent et qu'il leur appartient d'accomplir les actes de la procédure dans les formes et délais requis ; que lorsque la suspension du délai de péremption est la conséquence d'une décision de sursis à statuer jusqu'à la survenance d'un événement déterminé, un nouveau délai court à compter de la réalisation de cet événement ; que la société La Poste soulevait la péremption de l'instance au motif que la cour d'appel, par arrêt du 11 janvier 2011, avait sursis à statuer dans l'attente de la décision prud'homale à intervenir dans une autre instance et que cette décision étant intervenue le 18 février 2016, il incombait à M. [R], pour interrompre le nouveau délai de péremption qui courait, de réintroduire l'instance avant le 18 février 2018, ce qu'il n'a pas fait ; que pour écarter la péremption de l'instance, la cour d'appel a retenu qu' « il ne peut être déduit du dispositif de l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes du 11 janvier 2011, tel qu'il est rédigé, que, faute pour M. [R] d'avoir demandé la réinscription de l'affaire au rôle de la cour d'appel de Nîmes dans le délai de deux ans à compter du 18 février 2016, date du jugement de départage rendu par le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, l'affaire est périmée depuis le 19 février 2018 » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté une condition à la loi, tenant à ce que le juge qui sursoit à statuer dans l'attente de la survenance d'un évènement déterminé doive également mettre à la charge des parties d'accomplir les diligences nécessaires à la réinscription de l'affaire, a violé les articles 2, 386, 388, 390 et 392 du code de procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2021:SO00835
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